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Où l’on parle des anges, des démons et des esprits des morts           

CHAPITRE 9: Les fantômes et les revenants

 

            Le Père Emmanuel, dans son ermitage alpin, fut le premier homme d’Église dont je reçus un enseignement théologique sur le phénomène des revenants. J’avoue qu’avant d’écouter son témoignage, je rangeais cette question parmi les mythes superstitieux dont regorgent nos campagnes. Je fus extrêmement surpris d’apprendre ce jour là que l’Église prenait cela très au sérieux.

            Nous étions donc réunis autour de lui, et nous écoutions. Il nous raconta alors qu’au début de sa vie érémitique, il avait reçu de la part des villageois une vieille ferme abandonnée, appelée l’Adoux d’Oule. Il l’aménagea un peu, et s’y installa. Dès la première nuit, il perçut, venant du sol, une sorte de gémissement. Le lendemain, les gémissements se firent plus forts, prenant, dans le silence de la nuit une intensité encore plus poignante. Cela ne ressemblait, ni au cri d’un animal, ni au hululement du vent. Le gémissement semblait humain.

            Extrêmement intrigué, le Père Emmanuel décida donc de mener son enquête. L’Église demande d’agir ainsi avant de se prononcer sur le caractère paranormal d’un phénomène. Il descendit donc au village, pour y interroger les gens. Il apprit d’eux que l’Adoux d’Oule était une ancienne ferme.

            Pendant la seconde guerre mondiale, elle avait été le théâtre d’événements tragiques, puisque les miliciens y avaient torturé, puis exécuté des résistants (avant d’être à leur tour supprimés à la libération). Tout cela bouleversa le Père Emmanuel, étant convaincu de l’origine paranormale des gémissements, il décida d’offrir trois messes à l’attention des âmes du Purgatoire. Dès lors, il n’entendit plus jamais de bruits anormaux dans son ermitage.

            Les paysans du secteur eurent vent de cette histoire. L’un d’eux vint donc trouver le Père Emmanuel, pour lui raconter une histoire autrement plus mystérieuse. Il possédait une grange en pleine montagne. Depuis des siècles, une tradition affirmait qu’on y voyait, par certaines nuits, des défilés d’ombres ressemblant une procession de moines en habit religieux. Or, le paysan affirmait avoir été lui-même témoin du phénomène, certains soirs où il s’occupait de ses bêtes. Le Père Emmanuel prit au sérieux cette histoire, à partir du jour où il apprit que cette grange se situait non loin du cite d’un ancien prieuré bénédictin. Le prieuré avait été fermé au XIIe siècle, par son Abbaye-mère, à cause de la décadence notoire de sa vie monastique. Le Père Emmanuel se rendit donc trois fois sur le lieu, pour y célébrer la messe. Fallait-il admettre que, depuis huit siècles, les âmes de ces moines erraient en ce lieu?

            L’Église catholique possède donc une procédure spécifique face aux phénomènes de revenants. L’enquête précède la prière, qui délivre les âmes de leur errance. Selon certains théologiens, un revenant n’est autre qu’une âme soumise au Purgatoire, sur le lieu même où elle a péché. Que ce soit un milicien criminel ou un moine infidèle, Dieu peut, par la puissance de ses anges, le maintenir un certain temps dans notre monde. On devrait dire plutôt que c’est l’âme elle-même, à cause d’un attachement excessif à la terre, qui reste comme « accrochée » au lieu ou elle a vécu, d’où elle a été arrachée trop vite, et qu’elle ne s’habitue pas à devoir quitter. Il s’agit donc d’une âme pathologiquement attachée à la terre puisqu’elle s’est détournée volontairement de la Lumière venue la chercher, malgré sa beauté. Ces cas sont donc assez rares car assez spécifiques de personnes mal dégrossies. Dieu les laisse donc, le temps qu’il faut, jusqu’à ce qu’elles se lassent. Il n’agit pas ainsi pour punir, mais dans un but pédagogique. Ne pouvant être vues par les hommes vivants (sauf cas exceptionnel), étant séparées du monde des morts, leur solitude est totale. Si cette solitude dure plusieurs années, plusieurs siècle, elle finit par produire un retournement. La vanité des choses auxquelles elles sont attachées finit par s’imposer à elles. Dans sa solitude terrible, les esprits des pêcheurs apprennent petit à petit la vanité des biens de la Terre. Ils comprennent que l’unique bien est l’Amour.

Mais ces âmes peuvent être aider dans la découverte de ce chemin par les vivants qui, s’ils se rendent compte de leur présence peuvent prier pour elles et leur expliquer leur erreur et le chemin qui leur est ouvert vers l’autre monde. Pour cela, Dieu permet que les âmes de ce purgatoire apparaissent ou se fassent entendre des vivants. Elles ont du mal à le faire par elles-mêmes tant le corps psychique qui leur est resté est peu adapté à ce genre de contact. La plupart du temps, il s’agit plutôt d’une aide de Dieu et de ses anges. Le phénomène des revenants, quand il se produit, ne devrait jamais effrayer. Comment avoir peur de ces âmes, qui crient leurs détresses? Notre réponse immédiate doit être, au contraire, la miséricorde. Il faut prier pour les âmes du Purgatoire. Certains saints, canonisés par l’Église, passèrent leur vie entière à s’offrir pour elles. De telles prières ou sacrifices offerts pour elles ont une efficacité étonnante: L’âme en peine est bouleversée, comme le serait le plus solitaire des prisonniers, qui, pour la première fois, recevrait une lettre. Ce geste est efficace, tant l’âme a soif: elle peut, devant la beauté de ce geste comprendre en un instant la grandeur de l’Amour, et se trouver délivrée de sa solitude. Elle passe alors dans un autre Purgatoire où la souffrance n’est plus causée par l’absence des plaisirs, mais par l’absence de Dieu.

 

            Afin d’illustrer ce phénomène, voici quelques récits rapportés par des saints : parmi toutes les révélations que cite saint Grégoire le Grand dans ses dialogues, nous choisirons celles dont l’authenticité est à l’abri de toute contradiction.

            « Un pèlerin du territoire de Rodez, revenant de Jérusalem, est-il dit dans les annales de Citeaux, fut obligé par la tempête de relâcher sur une île voisine de la Sicile. Il y visita un saint ermite qui s’informa de ce qui touchait à la religion dans son pays de France, et lui demanda en outre s’il connaissait le monastère de Cluny et l’abbé Odilon. Le pèlerin répondit qu’il les connaissait, et ajouta qu’il lui saurait gré de lui dire quel intérêt le portait à lui adresser cette question. L’ermite reprit: il y a ici tout près un cratère dont nous apercevons les cimes; A certaines époques il vomit avec fracas des tourbillons de fumée et de feu. J’ai vu des démons emporter les âmes des pécheurs, et les précipiter dans ce gouffre affreux, afin de les tourmenter pour un temps. Or, il m’arrive, à certains jours, d’entendre les mauvais esprits s’entretenir mutuellement et se plaindre de ce que quelques-unes de ces âmes leur échappent; ils murmurent contre les personnes de piété qui par leurs prières et leurs sacrifices, hâtent la délivrance de ces âmes. Odilon et ses religieux sont les hommes qui paraissent leur inspirer plus d’effroi. C’est pourquoi, quand vous serez de retour dans votre pays, je vous prie, au nom de Dieu, d’exhorter les moines et l’abbé de Cluny à redoubler leurs prières et leurs aumônes pour le soulagement de ces pauvres âmes. Le pèlerin à son retour s’acquitta de la commission. Le saint abbé Odilon considéra et pesa mûrement toutes choses; Il eut recours aux lumières de Dieu et ordonna que dans tous les monastères de son ordre, on fit chaque année, le deuxième jour de novembre, la commémoration de tous les fidèles trépassés. Telle fut l’origine de la fête des morts. »

            Saint Bernard, dans la vie de saint Malachie, cite un autre trait. Ce saint raconte qu’il vit un jour sa sœur trépassée depuis quelque temps. Elle faisait son Purgatoire au cimetière. A cause de ses vanités, des soins qu’elle avait eus de sa chevelure et de son corps, elle avait été condamnée à habiter la propre fosse où elle avait été ensevelie et à assister à la dissolution de son cadavre. Le saint offrit pour elle le sacrifice de la messe pendant trente jours. Ce terme expiré, il revit de nouveau sa sœur. Cette fois, elle avait été condamnée à achever son Purgatoire à la porte de l’Église, sans doute à cause de ses irrévérences dans le lieu saint, peut-être parce qu’elle avait détourné les fidèles de l’attention des mystères sacrés, pour attirer sur elle la considération et les regards. Elle était profondément triste, voilée de deuil, dans une angoisse extrême. Le saint célébra de nouveau le sacrifice pour elle durant trente jours, et une dernière fois elle lui apparut dans le sanctuaire, le front serein, rayonnante, vêtue d’une robe blanche. L’évêque connut à ce signe que sa sœur avait obtenu sa délivrance.

            Ce récit constate la coutume universellement en vigueur dès les premiers ages de l’Église, de prier pour les morts durant l’espace de trente jours. En ce point, le christianisme n’avait fait que suivre la tradition mosaïque. “ Mes enfants ”, disait à ses fils le patriarche Jacob à son lit de mort, “ ensevelissez-moi dans la caverne de Mambré, qui est dans la terre de Chanaan ”, et les petits-fils d’lsaac pleurèrent leur père durant trente jours. A la mort du grand prêtre Aaron et de son frère Moïse, le peuple renouvela ce deuil de trente jours. Et la pieuse coutume de prier pour les défunts tout un mois devint bientôt une loi de la nation choisie. Saint Pierre, prince des Apôtres, au dire de saint Clément, aimait à faire prier pour le soulagement des morts, et saint Denys l’Aréopagite nous décrit en termes magnifiques avec quelle majesté les fidèles célébraient les funérailles. Dès les premiers siècles, l’Église, en mémoire des trente jours de deuil observés dans la loi mosaïque, encouragea les prières pendant un mois, après la mort des fidèles.

 

            Sans faire d’amalgame, il est important de constater que certaines théologies orientales expliquent de la même façon le phénomène des revenants. Le Livre des Morts tibétain indique comment il est possible aux vivants de conduire les âmes errantes vers le bon port. Dans cette tradition, on explique leur lien avec notre monde par une présence exceptionnelle sur terre, au-delà de la mort du corps physique, de ce qu’ils appellent le corps astral (1). De cette manière, il leur est facile d’expliquer les manifestations des revenants. Une telle vision est parfaitement admissible par la théologie catholique.

 

            Le phénomène des revenants est, malheureusement, pour beaucoup cause de terreur plutôt que d’amour. Qu’on se rappelle la réaction des disciples de Jésus, quand ils le virent s’approcher d’eux en marchant sur les eaux: “ Ils crurent que c’était un fantôme, et poussèrent des cris ” (2).           

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(1) sorte de corps entourant le corps physique, composé d’énergie magnétique, et siège des facultés sensibles;

(2) Evangile de saint Marc 6, 49.

 

            Toutes les histoires de fantômes ne doivent pas être prises à la lettre, sans une enquête approfondie de la part des autorités religieuses. Une imagination débridée peut inventer bien des fantasmes. Il suffit de mettre un enfant dans le noir, pour s’en rendre compte. Il y verra sincèrement toutes sortes de monstres dangereux dans les plis d’un rideau, toute espèce de criminel dans le craquement d’un parquet. Nos ancêtres superstitieux inventaient dans leur frayeur des monstres comme l’Ancou avec son char (la Mort en Bretagne), le vampire assoiffé de sang (Roumanie), les Trolles et les lutins (Scandinavie). Chaque peuple a ses croyances d’enfant.

            Le phénomène des revenants ne doit pas être confondu avec celui des maisons qu’on dit hantées. Le Saint Curé d’Ars alors qu’il était déjà connu dans la France entière, entendit une nuit d’hiver d’étranges bruits dans sa maison: des coups étaient frappés dans les plafonds et sur les meubles. Il chercha en vain, mais ne trouva personne. Persuadé d’avoir affaire à quelqu’un qui cherchait à l’effrayer, il fit appel à un solide paysan du village, qui vint veiller avec lui dans sa maison la nuit suivante. Dehors, il faisait froid, et la neige tombait à gros flocons. Vers minuit, les bruits se firent entendre de nouveau. Ils cherchèrent dans la maison, dans le grenier, mais ne virent personne. Etant sorti, le curé d’Ars se rendit compte qu’il n’y avait aucune trace de pas dans la neige. Il appela donc le paysan, et il le lui fit constater: “Rentre chez toi, lui dit-il, ce n’est que le démon ”.La réaction du Saint Curé a de quoi surprendre: effrayé par l’éventualité d’un voleur, il se tranquillise quand il se rend compte que sa maison est hantée par le démon.

            Le phénomène des maisons hantées ne s’explique pas pan une âme défunte, mais par le démon. Or le démon ne vient jamais de sa propre initiative troubler la paix extérieure des hommes. Comme pour les cas de possession démoniaques (l) (prise de contrôle par le démon, du corps d’une personne), deux causes en sont possibles:

l) L’appel de l’homme par une pratique d’invocation d’esprits. Il n’est pas rare que des séances de spiritisme, où, le démon est appelé sans qu’on s’en doute, prolongent leurs effets pendant des années auprès des personnes qui les ont pratiquées: obsession démoniaque (conscience vive d’une présence malsaine), possession ou phénomène de maisons hantées. On me rapporta le fait suivant: un groupe de jeunes pratiquait le spiritisme. L’un d’eux eut l’idée de mettre sur la table un petit miroir de toilette, et de dire à l’esprit: “ Si tu es là, casse ce miroir ”. Rien ne se produisit. Or, en revenant chez eux, les jeunes découvrirent avec horreur que tous les miroirs de leurs maisons respectives avaient été brisés. On imagine les effets d’un tel choc sur la paix de leur imagination.

            A la différence du spiritisme, la sorcellerie (2) appelle expressément le démon. Des pactes d’alliance peuvent être conclus entre le sorcier et le démon, dont 1 pouvoir devient à partir de ce jour soumis aux désirs de l’homme. Rien n’empêche donc que le sorcier puisse nuire à ses ennemis de cette manière, les plongeant dans la peur.

2) Permission de Dieu: dans des cas beaucoup plus rares, le phénomène de maisons hantées (comme celui de la possession) peut se produire sans aucune intervention humaine, à la simple initiative du démon, auquel Dieu laisse exceptionnellement la permission d’agir. La Bible témoigne de ces phénomènes: “ Il y avait jadis au pays d’Ur, un homme intègre et droit appelé Job.

            Or, le jour où les Fils de Dieu venaient se présenter devant Yahvé, le Satan aussi se présentait parmi eux. Dieu dit alors a Satan: “ As-tu remarqué mon serviteur Job? Il n’a point son pareil sur la Terre ”. Et le Satan de répliquer: “ Est ce pour rien que Job crains Dieu? n’as-tu pas béni toutes ses entreprises? Ses troupeaux pullulent dans le pays ”. “ Soit, dit Yahvé au Satan, tous ses biens sont en ton pouvoir. Evite seulement de porter la main sur lui ” (3).

            Le lendemain, Job se trouva réduit à la misère, mais il ne pêcha pas contre Dieu.

 (1) Voir le chapitre 11 sur l’exorcisme;

(2) Voir le chapitre 10 sur la sorcellerie;

(3) Job 1.

 

            Cette permission de Dieu est exceptionnelle. La plupart du temps, le démon se contente de nous tenter pour nous faire tomber, nous maintenant dans une médiocrité habituelle. Le Curé d’Ars fut un véritable saint, et eut donc à subir des attaques de plus en plu directes du démon: après ces premiers bruits dans sa maison (obsession antérieure venant du démon), il connut la délation et la mise en doute de son honnêteté (on l’accusa d’être maigre non par ascèse, mais excès de débauche avec les femmes). Il connut enfin la tentation du désespoir (obsession intérieure venant du démon). Sainte Mariam, carmélite arabe, fut, pour sa part, soumise à une véritable possession démoniaque. Marthe Robin semble avoir été frappée par le démon jusqu’à en mourir (témoignage du Père Finet). De simples coups donnés dans une maison ou même la constatation d’objets qui se déplacent seuls, ne suffisent pas à conclure à un cas de hantise démoniaque. Un infirmier psychiatrique me raconta un jour le fait suivant: A New York, un café fut victime de phénomènes inexplicables: Les bouteilles tombaient seules des étagères, les verres se cassaient sans que personne les ait touchés. Le patron était au bord de la faillite. Il décida de renvoyer son garçon de café. A peine était-il parti que les phénomènes cessèrent.

            Ce garçon était travailleur, mais complètement renfermé sur lui-même. Il ne parlait pratiquement jamais, et semblait proie à la solitude. Il se fit embaucher dans un autre café de la ville. Les verres et bouteilles se remirent à tomber. S’étant renseigné, le patron le renvoya aussitôt. Sa réputation était faite, et personne ne voulait plus le prendre à son service, partit dans un autre état américain, où il trouva sans peine du travail. Les phénomènes se reproduisirent. Mais son nouveau patron, curieux de nature, se passionnait pour les phénomènes paranormaux. Il se mit donc à l’observer dans son travail. Un jour, alors qu’il servait, le garçon se retourna devant une rangée de verres, qui tombèrent un par un, au fur et à mesure qu’il passait. Aucun doute n’était plus permis: il s’agissait d’un extraordinaire phénomène de télékinésie (1) inconsciente. Ce garçon, malade de sa solitude, accumulait en lui une énergie qu’il vidait, sans s’en rendre compte, de cette manière. Il ne s’agissait pas d’une hantise démoniaque, mais d’une télékinésie inconsciente.

            La télékinésie inconsciente peut aussi se produire dans le sommeil. La personne déplace des objets de sa maison sans s’en rendre compte, sans aucune intervention démoniaque.

            Il est donc nécessaire que le psychiatre et l’exorciste s’unissent avant de conclure à un phénomène de maisons hanté. Le diagnostic conduira à un exorcisme ou à une action de cure psychiatrique, selon le cas.

(1) voir le chapitre 3 sur la télékinésie.

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