Eglise et paranormal http://eschatologie.ifrance.com Portail catholique http://eschatologie.ifrance.com Page

SUIVANT

Février 2004 Spiritisme par Damien Saurel. Étude complète.

Où l’on parle des anges, des démons et des esprits des morts           

CHAPITRE 4: la nécromancie et le spiritisme

 

            Le monde des esprits est donc complexe. Ces trois chapitres nous ont permis de mieux le connaître et surtout de cerner son rapport avec notre monde à nous. Il nous faut maintenant entrer dans la partie la plus difficile de cette étude, celle où nous aurons à discerner les effets de cet univers parallèle.

            La nécromancie (ou divination avec les morts) sera le premier phénomène que nous étudierons, accompagné de sa forme moderne qu’on appelle spiritisme. Depuis toujours l’homme cherche à prendre contact avec ceux qui sont morts. Il n’existe pas une seule civilisation qui n’ait ses formes de nécromancie. Le monde occidental moderne a curieusement consacré le renouveau du phénomène, au moment même où la révolution scientifique et industrielle battait son plein. Victor Hugo est connu comme l’un des plus fervents adeptes du spiritisme alors en plein essor.

            Il est très difficile de recenser les méthodes qui furent jadis employées pour établir le contact avec les esprits. On connaît beaucoup mieux celles qui furent utilisées successivement dans le spiritisme moderne. Il est né au siècle dernier aux USA: Deux jeunes filles entendaient des coups sourds dans leur maison. Elles eurent l’idée d’y répondre. Elles décidèrent d’établir un code permettant à l’esprit de répondre par oui et par non. La nouvelle de leur expérience fit sensation et elles furent bientôt imitées dans tout le pays. Les méthodes pour communiquer avec l’esprit frappeur se perfectionnèrent. On inventa les plaquettes du oui-ja, puis le guéridon à trois pieds que l’esprit peut basculer pour en frapper le sol.

            Les cercles spirites se rendirent vite compte des limites de ces méthodes de communication. Ils inventèrent d’autres systèmes. Sur une table ronde, on disposait en cercle de morceaux de papier sur lesquels on inscrivait les lettres de l’alphabet, les chiffres de 0 à 9 et les mots oui et non. Un verre était placé au centre. Les participants devaient se concentrer et invoquer l’esprit pour qu’il se manifeste, d’où la célèbre parole “ esprit, es tu là? ”. Quand la manifestation se produisait, le verre se mettait à glisser seul sur la table, indiquant tour à tour des lettres qui constituaient ses réponses.

            Les spirites ayant constaté la facilité avec laquelle les esprits déplaçaient les objets, ils eurent l’idée de les invoquer sur eux même pour qu’ils prennent possession de leur main. L’écriture automatique était née; Par elle, on obtint des écrits étonnants: Des partitions furent couvertes en quelques instants de notes de musique après qu’on ait invoqué l’esprit de Jean-Sébastien Bach. L’écriture était celle du célèbre musicien et la musique était non seulement de son style mais de la plus haute qualité.

            Avec l’invention du magnétophone, le spiritisme est entré dans une nouvelle phase. On s’aperçut vite de la possibilité de communiquer. par l’intermédiaire de cette bande magnétique. Le spirite invoque l’esprit. Quand il est sûr d’avoir établi le contact, il pose une question et laisse le magnétophone fonctionner pendant un temps. En réécoutant la bande, il entend dans les vides laissés les réponses de l’esprit. Avec le magnétoscope, le phénomène va plus loin puisque ce n’est pas seulement la voix qui s’inscrit mais aussi le visage de celui qui parle. Du témoignage même des familles, des gens morts depuis des années ont pu être reconnus sur ces films vidéo d’un nouveau genre. Quand on a affaire à des esprits suffisamment puissants, l’enregistrement semble pouvoir se faire alors que le magnétoscope est débranché. Le père Brune n’hésite pas à s’enthousiasmer devant un tel miracle qui rend le monde des morts a porté de celui des vivants (1).

            Ces méthodes, malgré leur extrême diversité, ont toutes quelques points en commun: Elles ne peuvent être habituellement utilisées sans être précédées d’une forme de prières, d’invocation des esprits (2). L’initiative vient donc de l’homme. Fondée sur cette prière, l’esprit se manifeste même aux débutants. On a tous entendu parlé de ces soirées de jeunes se terminant dans une séance de spiritisme “ pour s’amuser ”. Il n’est pas rare que, malgré l’ambiance peu sérieuse, une manifestation ait lieu à partir du moment où une invocation a été lancée.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

(1) Voir avec précaution, le livre du père Brune: Pourquoi les morts nous parlent?

(2) L’invocation dont je parle n’est pas la simple prière qu’on peut faire à un être cher décédé pour obtenir une aide. Il s’agit d’une demande ayant pour objet une manifestation extérieure de cet esprit. Elle est souvent accompagnée de rites d’apparences magiques.

L’invocation semble même être condition nécessaire au phénomène. Sans elle, on aura beau se concentrer, le verre placé au centre de la table ne bougera pas d’un millimètre (3. Une telle constatation nous permet d’exclure l’hypothèse d’un phénomène de télékinésie collective. Nous sommes bien en présence de quelque chose qui dépasse l’homme.

            D’après le témoignage des spirites, les esprits sont de plusieurs espèces. Certains se présentent comme de bons esprits (celui d’un homme ayant vécu sur la terre ou celui d’un ange n’ayant jamais été incarné). D’autres se présentent comme de mauvais esprits et les spirites se transmettent des rites pour s’en débarrasser (casser le verre, le retourner etc). D’autres enfin sont “ farceurs ”: Ils semblent prendre un malin plaisir à raconter n’importe quoi quand on les interroge. Les spirites ne font habituellement confiance qu’aux bons esprits. Ils en reçoivent des prédictions sur le futur et des récits sur le monde de l’au-delà.

            Les esprits n’ont pas tous la même puissance d’action. Certains d’entre eux peuvent se manifester à n’importe qui le désire, sans qu’aucune disposition magnétique soit nécessaire. D’autres au contraire ne peuvent s’adresser aux hommes que par un intermédiaire ou médium dont le magnétisme naturel favorise le contact. Certains témoignages rapportent des apparitions directes d’esprits, particulièrement puissants, sous la forme humaine. Le corps qu’ils se façonnent est parfois une simple image (un hologramme), parfois il est au contraire palpable par les assistants.

            Que pense l’Église de tout cela? Beaucoup pensent qu’elle ne peut qu’encourager un tel phénomène qui apporte de l’eau à son enseignement sur la survie après la mort. Il n’en est rien. La condamnation est totale, aussi ancienne qu’elle, et est déjà formulée par les premiers pères apostoliques. Elle fut renouvelée solennellement en 1917, avec une sévérité qui en manifeste la gravité: “ Est-il permis de prendre part, soit par médium soit sans médium, en usant au non de l’hypnotisme, à des entretiens ou à des manifestations spirites, présentant même une apparence honnête ou pieuse, soit qu’on interroge les âmes ou les esprits, soit qu’on écoute les réponses faites, soit qu’on se contente d’observer, alors même qu’on protesterait tacitement ou expressément que l’on ne veut aucune relation avec les esprits mauvais? La réponse est non, sur tous les points (2). Cette condamnation était accompagnée d’une menace d’excommunication.

            En 1962, la commission préconciliaire rappelle la sévérité de l’Église en ce domaine: “ Le spiritisme qui sous sa            forme actuelle de prétendue communication avec les morts, n’a guère plus de 100 ans d’existence, a été condamné à plusieurs reprises par l’Église, à cause des risques qu’il comporte pour la foi et la morale. Dès 1856, avant même que fut publié un des textes fondamentaux de la doctrine de spiritisme (1869, Kardec), le saint office avait déclaré gravement illicite l’invocation des morts. Cette condamnation fut renouvelée sous des formes diverses en 1882, 1898, 1917 pour ne citer que les plus connues ”.

            L’Église motivait sa condamnation non seulement sur les alertes lancées de toutes les nations chrétiennes à propos des conséquences graves du spiritisme mais aussi sur la Bible elle même. Moise n’hésite pas à écrire dans le livre du Deutéronome: “ Qu’on ne trouve parmi vous personne qui s’adonne à la divination ou à la magie et qui interroge les morts. Toutes ces choses sont en abomination à Yahvé ” (3).

            Les premiers rois d’Israël reçurent de Dieu la mission de faire disparaître toute forme de nécromancie du pays. L’un deux, le roi Saül, désobéit à ce commandement en consultant pour lui même les morts. Il y perdit la vie, dès le lendemain, comme Dieu le lui avait annoncé par l’intermédiaire d’une apparition (4).

 

 (1) Ou, s’il bouge, c’est que le doigt d’un participant déplace inconsciemment le verre;

(2) Acte du Saint Siège le 01/06/1917;

(3) Deutéronome 18, 10-12;

(4) I Samuel 28.

            Pourquoi l’Église est-elle si sévère? Elle n’a jusqu’ici jamais justifié sa condamnation par un document dogmatique solennel. Elle laisse donc aux théologiens le soin de s’exprimer pour elle. Sa décision est avant tout liée à la foi (obéissance aux commandements de Dieu donnés â Moise) et â la pastorale (constatation des effets pervers du spiritisme sur les chrétiens et sur les hommes en général.

            Ces effets sont effectivement terribles. Les premiers d’entre eux sont psychologiques. Un rapport des hôpitaux psychiatriques de Paris, datant de la fin du siècle dernier, tire la sonnette d’alarme en affirmant que plus d’un psychotique sur deux fut adepte du spiritisme avant de sombrer dans la maladie mentale. Il semble donc y avoir un lien étroit entre ces pratiques et la folie. D’autre part, des témoignages rapportent un nombre incroyable de suicides dus à des névroses obsessionnelles graves. Victor Hugo s’étant efforcé une partie de sa vie d’entrer en contact avec sa fille décédée, termina ses jours obsédé par des cauchemars nocturnes. Une de ses filles se suicida et beaucoup pensent que les séances de spiritisme n’y sont pas étrangères.

            Les psychiatres expliquent les conséquences psychologiques ainsi: Pratiqué avec assiduité (et le besoin comme la passion naissent vite), le spiritisme se tourne en obsession, en idée fixe, en désordres mentaux. Il est vrai de dire des pratiques spirites ce que Saint Augustin dit des pratiques magiques, qu’elles ont pour cause et qu’en même temps elle excite le désir immodéré d’expérimenter et de connaître, et ce désir, cette curiosité sans fin, provoquent dans l’âme l’attente fiévreuse, hallucinante, du merveilleux. Trop nombreux sont ceux dont ce breuvage empoisonné a égaré la raison.

            Le Père Charles écrit en 1921: “ Il y a des caractères bien assis et bien fermes pour lesquels la suggestion n’agira guère; Mais la masse est beaucoup plus perméable, plus sensible à l’égard de tous les dissolvants, et une seule séance de spiritisme, surtout si elle a des résultats, peut être l’origine de troubles psychiques très graves. Il est d’ailleurs difficile, quand on pense de bonne foi recevoir chaque jour des nouvelles de l’autre monde, de poser sur la réalité ambiante et sensible ce regard clair et normal qui est celui de l’homme sain. L’ivresse des voyants est souvent plus pernicieuse que celle des alcooliques ”.

            Les effets du spiritisme concernent aussi la foi, domaine que l’Église a le droit et le devoir de protéger. Allan Kardec fut le premier a réunir les dogmes principaux de la foi spirite. Dans ce livre, les enseignements de l’Église sont niés. Les brochures spirites fourmillent d’erreurs théologiques. Elles constituent une sorte de syncrétisme entre des aspects chrétien, et des aspects bouddhistes. Dieu n’est plus une personne mais un élément intelligent et universel duquel émanent tous les esprits. Le péché originel, jugé choquant, est remplacé par le dogme de la préexistence des âmes ou du péché personnel antérieur à l’incarnation (voir Platon). La réincarnation est une des doctrines fondamentales de ce mouvement. L’Église ne peut que constater l’entraînement presque fatal que subissent ses fidèles vers de telles doctrines. Chez la plupart, même si les expériences ne sont que des tentatives curieuses, presque des jeux, il apparaît une grande avidité pour les livres qui expliquent ces choses. Et la doctrine, qui parait si bien prouvée par le fait que la table a répondu, que la planchette a frappé des coups, est admise comme incontestable.

            Les effets du spiritisme concernent aussi la vie concrète des personnes: beaucoup d’entre elles se mettent à l’écoute avec une confiance aveugle de l’esprit qui finit par diriger leur existence. C’est à lui que l’on demande des mots d’ordre et que l’on soumet ses doutes. Les pires aberrations deviennent possibles dans de pareilles conditions et en l’absence voulue de tout contrôle.

            Devant les désastres du spiritisme sur la santé mentale, sur la foi et sur les mœurs, l’Église se devrait de réagir. Mais il nous faut aller plus loin. Est-il possible de déterminer avec certitude l’origine de ce phénomène? Le théologien peut-il admettre l’existence d’un réel contact avec les morts? Pour répondre à cette question nous nous mettons de nouveau a l’école du grand théologien Saint Thomas d’Aquin.

            Comme nous l’avons montré au chapitre précédent, les apparitions des esprits des morts sont possibles dans certains cas. Deux catégories d’âmes en sont capables: Celles qui sont auprès de Dieu et qui reçoivent de lui la possibilité de nous voir et de nous aider et celles qui d’après une tradition, restent en lien avec notre monde où elles subissent une première étape du purgatoire.

            Or il est facile de montrer que les âmes qui sont auprès de Dieu au paradis ne se laissent jamais aller à répondre aux appels des spirites: Dieu interdit de telles pratiques aussi on les voit mal lui désobéir aussi ouvertement alors qu’elles me désirent que sa volonté. La seule exception connue à cette règle est rapportée par la Bible. Le roi Saül était en guerre avec les philistins. Il se demandant s’il devait attaquer. Il essaye de consulter les prophètes de Dieu mais ceux ci ne purent rien reprendre. Il décida alors d’aller voir secrètement une nécromancienne. Mal lui en pris: “ Saül se déguisa et endossa d’autres vêtements puis il partit avec deux hommes et ils arrivèrent de nuit chez la femme. Il lui dit: “ Je t’en prie, fais moi dire l’avenir par revenant et invoque pour moi celui que je te dirai ”. Mais la femme lui répondit: “Voyons, tu sais toi-même ce qui a fait Saül et comment il a supprimé du pays les divins. Pourquoi tends-tu un piège à ma vie pour me faire mourir? ”. Alors Saül lui fit ce serment par Yahvé: “ Aussi vrai que Yahvé est vivant, dit-il, tu n’encourras aucun blâme pour cette affaire ”. La femme demanda: Qui faut-il invoquer pour toi? ”. Et il répondit “ invoque-moi Samuel le prophète ”.

            Alors la femme vit Samuel et, poussant un grand cri, elle dit à Saül: “ Pourquoi m’as tu trompé. Tu es Saül ”. Le roi lui dit: “ N’aie pas peur! Mais que vois-tu, et la femme répondit “ c’est un vieillard qui monte, il est drapé dans un manteau ”. Alors Saül sut que c’était Samuel et, s’inclinant face contre terre, il se prosterna. Samuel dit à Saül: “ pourquoi as-tu troublé mon repos en m’évoquant? ”. C’est répondit Saül que je suis dans une grande angoisse: Les Philistins me font la guerre et Dieu s’est détourné de moi, il ne répond plus, ni par les prophètes, ni en songe. Alors je t’ai appelé pour que tu m’indiques ce que je dois faire ”. Samuel dit: “ Pourquoi me consulter, quand Yahvé s’est détourné de toi et est devenu ton adversaire ! Parce que tu n’as pas obéi à Yahvé, c’est pour cela que Yahvé s’est détourné de toi aujourd’hui. Demain, toi et tes fils mourrez. Vous serez avec moi: Le camp d’Israël aussi, Yahvé le livrera aux mains des Philistins ”. Aussitôt Saül tomba à terre de tout son long. Il était terrifié. Il mourut effectivement le lendemain.

            Les théologiens et les Pères de l’Église n’ont cessé de discuter pour savoir si c’était Samuel lui-même qui était apparu. Saint Thomas d’Aquin montre qu’il se peut que ce soit Samuel, à condition qu’il ait été rendu apparent par la puissance des anges qui seuls sont capables de façonner des spectres de cette manière. Ce cas est exceptionnel. Si Dieu a voulu que Samuel réponde ainsi aux appels de la nécromancienne, c’est pour montrer à Saül la gravité de sa faute.

            Hormis ce cas, jamais les Saints de Dieu ne se montrent aux appels des spirites. Ils respectent trop la volonté de Dieu qui veut que nous connaissions les choses de l’au-delà à travers l’humilité qui est juste le contraire de l’avide curiosité des adeptes du spiritisme. A cause du mystère de la foi, les âmes saintes du paradis n’apparaissent que brièvement, d’une manière toute spontanée, sans jamais être provoquées (1), encore moins contraintes. Et l’on doit ajouter qu’elles apportent toujours avec elles des enseignements salutaires. En ce qui concerne les bons anges, nous pouvons faire exactement le même raisonnement. L’âme sainte et l’ange bon se comportent exactement de la même manière par rapport à nous.

            Nous avons montré que les âmes de l’enfer et celles du purgatoire n’ont pas par elles-mêmes la possibilité de nous apparaître. Elles ne disposent pas de la puissance de Dieu qui donne ce pouvoir aux âmes du ciel. La nature humaine dépouillée de son corps n’a pas la possibilité de nous contacter car, à la différence de la nature angélique, elle ne peut mouvoir la matière.

            Il reste donc uniquement deux catégories d’esprits qui peuvent répondre aux invocations spirites: tout d’abord ces quelques âmes humaines du purgatoire inférieur que Dieu maintient

 

 

 (1) Même les saints ont parfois expérimenté l’imprudence qui réside dans toute invocation en vue de l’apparition d’un mort. Saint Jean Bosco fut l’un deux. Il raconte lui-même: “ Entre Comollo et moi, a-t-il raconté lui-même, existait une amitié très sincère jointe à une confiance illimitée. Assez souvent, nous parlions de ce qui pouvait, à chaque instant nous arriver, par exemple si la mort venait à nous séparer... Un jour nous en sommes venu à cet échange de promesses: “ Celui qui d’entre nous mourra le premier, mettra l’autre, si Dieu le permet, au courant de son salut éternel ”. Je ne me rendais pas compte de l’importance d’une telle promesse. Je dois avouer qu’il y avait beaucoup de légèreté. Quoi qu’il en soit je ne conseillerai jamais à personne d’agir ainsi. Nous l’avions cependant fait et même répété plusieurs fois, surtout pendant la dernière maladie de Comollo. Ses dernières paroles et son dernier regard me donnèrent la certitude qu’il ne manquerait pas à sa promesse. Beaucoup de mes compagnons avaient d’ailleurs connaissance de la chose. Comollo mourut le 2 avril 1839. Le lendemain soir avaient lieu ses funérailles solennelles en I’Église Saint-Philippe. Ceux qui connaissaient la promesse qui nous liait attendaient impatiemment sa réalisation. Moi-même, je ne vivais plus; et, de plus, j’espérais de l’événement un grand réconfort à ma peine. Ce soir-là, couché depuis un certain temps, je ne parvenais pas à m’endormir. J’étais persuadé que ce serait cette nuit-là que, dans notre dortoir qui comptait environ vingt séminaristes, se vérifierait la promesse. Il pouvait être environ onze heures et demie lorsque ce local fut soudain mis en émoi par un vacarme épouvantable qui semblait s’avancer dans les corridors. On eût dit un puissant chariot, tiré par un imposant attelage, qui s’approchait de la porte du dortoir. D’instant en instant, le bruit s’amplifiait tragiquement, faisant trembler le dortoir comme si c’eût été un coup de tonnerre. Epouvantés, les séminaristes sautèrent à bas de leur lit et se réfugièrent dans un coin, se réconfortant comme ils pouvaient. A ce moment, un coup de tonnerre encore plus effroyable que les précédents retentit et par trois fois on perçut distinctement la voix de Comollo: “ Bosco, je suis sauvé ”. Tous entendirent ces bruits; Plusieurs, les paroles de Comollo, mais sans en comprendre la signification; D’autres cependant, la comprirent tout aussi bien que moi. Pendant longtemps encore on parla de cet événement au séminaire. Ce fut la première fois, je l’avoue, que j’eus vraiment peur. Et même, mon épouvante fut telle que je tombai gravement malade et faillis en mourir.

 

 

miraculeusement liées à leur corps et qui sont cause du phénomène des revenants (1). Rappelons que, pour en être la, ces esprits sont nécessairement les plus grossiers, incapables d’apporter un véritable enseignement sur l’au-delà qu’ils ont à peine commencé à comprendre. Ils forment donc une maigre autorité doctrinale !

            Mais il existe surtout l’immense catégorie des anges rebelle, à Dieu. Ceux là ne peuvent avoir bien évidemment aucun scrupule à se rendre présents à l’invocation des spirites. Leur nature étant adaptée à cela, ils peuvent, à volonté, communiquer avec les hommes et l’aide d’un intermédiaire médiumnique leur est d ’autant moins nécessaire qu’ils font partie d’une hiérarchie supérieure. Tous les grands théologiens catholiques du paranormal sont d’accord pour attribuer aux démons la paternité de la majorité des manifestations spirites. En comprenant cela, on saisit mieux la gravité et le danger de la pratique de la nécromancie. Le démon, rappelons le, est l’ennemi du genre humain. Son intelligence est extrêmement puissante, bien plus forte que la nôtre et il ne désire qu’une chose: nous éloigner de ce qui s’appelle l’amour (amour de Dieu et amour du prochain). Toute jeune fille sensée, apprenant qu’elle à devant elle un violeur notoire, n’irait jamais s’isoler avec lui dans une pièce ! Ce serait de la folie. De la même façon, tout chrétien sachant qu’il a devant lui celui qui peut non seulement détruire son corps mais aussi son âme (2), ne peut sans être inconscient évoquer sa présence.

            Beaucoup de personnes adeptes du spiritisme objectent à tout cela leur certitude d’avoir été un jour en contact avec l’un de leurs proches décédés. Un élève me racontait un jour a propos de sa mère: “Elle m’a même rappelé une scène que nous deux, et nous deux seulement avions vécus.

            Un tel argument a de quoi impressionner et l’on comprend le désir de ces jeunes de prolonger leurs expériences spirites qui leur permet de retrouver leurs chers disparus. Il faut pourtant être lucide: le démon, s’il veut entraîner les gens dans la dangereuse pratique du spiritisme, ne va pas se présenter a eux sous son aspect réel. On n’attire pas les abeilles avec du vinaigre mais avec du miel. Rien de plus facile pour lui que de se déguiser avec le visage d’une mère disparue. Saint Pierre affirme que l’esprit du mal voit tous nos actes: “ Soyez vigilants, votre adversaire le diable, comme un lion rugissant va et vient à la recherche de sa proie ” (3). L’essentiel pour lui, au point de départ d’une aventure spirite, c’est de séduire ceux qui la pratiquent pour les inciter à recommencer. Il espère ainsi conquérir un pouvoir direct sur leur intelligence et sur leur vie, pour les perdre plus vite. Il espère dépasser le simple et habituel pouvoir de tentations’, qu’il exerce habituellement et qui ne touche directement que l’imagination des hommes.

            En conséquence, il n’y a plus à s’étonner de voir l’esprit se présenter à ceux qui sont sincèrement chrétiens comme encore plus chrétien qu’eux, à ceux qui sont musulmans comme des adeptes fervents du prophète; A ceux qui viennent de perdre un proche, il apparaît comme ce proche en personne; Ceux que dévore la curiosité, il manifeste sa présence par des phénomènes fascinants, des tables qui s’envolent, (on raconte que dans ma famille des ancêtres ont voulu faire appel aux esprits par simple curiosité. La table ronde qui était devant eux s’est mise à tourner à une hauteur de 10 cm du sol. Tout le monde fut effrayé. Une de mes ancêtres qui avait un chapelet bénit dans sa poche le lança sur la table qui aussitôt s’immobilisa en se cassant en deux), des objets qui lévitent, des annonces du futur; A ceux qui sont ambitieux, il n’hésite pas à révéler son pouvoir; A ceux qui veulent réussir un examen, il donnera gratuitement les sujets (du moins s’ils sont déjà écrits), étant certain d’être consulté de nouveau par celui qui a triché une fois. Quand il aura affaire à des personnes fragiles psychologiquement, il agira plus directement par la terreur, se présentant comme l’ange des ténèbres et s’amusant à les effrayer ou à les poursuivre ( d’où certaines folies).

            Dans chacun de ces cas, s’il réussit à s’attirer une proie, il s’efforcera de l’entraîner petit à petit à sa perte (perte de la foi, de la moralité ou même de la raison).

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

(1) voir le chapitre consacré à cela;

(2) Matthieu 10, 28;

(3) I Pierre 5, 8.


 

            Voici brièvement rapportés, trois témoignages significatifs:

                        *) Une jeune femme, profondément chrétienne, avait eu l’imprudence de s’essayer au spiritisme avec son mari. Le phénomène fonctionnait très bien au point qu’il arrivait que l’esprit se manifeste à elle à travers son mari durant son sommeil. Il l’instruisait des choses du ciel et elle était chaque jour bouleversée d’être si chanceuse. Les premiers temps, i1 lui conseillait d’éduquer ses enfants dans la foi. Au bout d’un an, après ce qui me semble une longue approche de mise en confiance, la jeune femme considérait cet esprit comme son ange gardien. Il commença à la mettre en garde contre certains enseignements de l’Église, insensiblement au début puis ouvertement. A la fin, il lui révéla les secrets de la réincarnation. La femme finit par quitter l’Église, elle ne croyait plus. Elle avait perdu la foi qui jusqu’ici la faisait vivre.

                        *) Un jeune homme, passionné de musique, se demandait comment devenir chanteur. Or, durant une séance de spiritisme, l’esprit lui affirma être capable de réaliser son rêve, sous certaines conditions: Les chansons devraient être composées dans les séances de spiritisme. Ce jeune homme s’appelait Bob Dylan. Il devint effectivement célèbre. Mais au fur et à mesure que sa carrière avançait l’esprit se faisait de plus en plus exigent, au point de réclamer la composition des chansons sous état de narcotiques ou de drogue. Pris par la drogue, conscient de sa décadence physique et morale, Bob Dylan finit par se convertir au christianisme, rejetant toute forme de spiritisme. Son témoignage est éloquent: “ Il faut croire, écrit-il, au diable. Ce n’est pas une image, un symbole, mais une présence réelle, vivante. Il est là partout dans le monde. Il peut même prendre le masque d’un homme de paix ” (1). Avec la musique issue du spiritisme, nous sortons du domaine de la magie blanche ( celle qui cherche à obtenir quelque chose par l’évocation des seuls esprits bons) pour celui de la magie noire (celle qui évoque les esprits mauvais). Le spiritisme est comme la porte ouverte au phénomène de la sorcellerie (2). Il suffit d’utiliser un peu plus le pouvoir du démon.                     

                        *) Un troisième exemple me vient d’un de mes élèves. Il voulait avoir son bac. Il eut l’idée d’en demander les sujets en séance de spiritisme. L’esprit les lui communiqua sans problème et il s’avéra qu’il n’avait pas menti. Un an plus tard, l’élève décida de recommencer pour sa première année de DEUG. L’esprit accepta, en y mettant toutefois une condition: il devrait pratiquer au moins une fois par semaine une invocation spirite. Ayant été élevé en école catholique, il hésita puis il prit peur. Il décida d’arrêter là ses activités spirites. Or, en rentrant chez lui le soir, il eut l’impression d’être suivi et épié. Etait-ce un effet de son imagination? Peut-être. Etait-ce un phénomène démoniaque? Peut-être. Toujours est-il qu’il ne trouva la paix qu’après avoir tout raconté à un prêtre qui lui conseilla de se confier à Dieu, de se confesser et de faire un signe de croix s’il était repris par de telles angoisses.

            De ce dernier témoignage il résulte que les prophéties du spiritisme sont très souvent vraies. Le démon a tout intérêt à agir ainsi s’il veut séduire. En saint Luc, on voit un démon proclamer que Jésus est le Messie et lui dit: “ tais toi ” (3). Saint Athanase commente ainsi: “ Bien que le démon confessa la vérité, le Christ réprimait ses paroles pour qu’il ne répondit point sa malice en publiant la vérité. Il voulait nous accoutumer aussi à ne pas jeter attention aux révélations de ce genre, même si elles paraissent vraies. Il est criminel en effet, alors que nous possédons la Sainte Ecriture, de nous faire instruire par le démon (4).

               

 (1) Lettre à son ami Mac Guinn;

(2) L’adepte du spiritisme croit avoir affaire à un bon esprit à la différence du sorcier qui appelle explicitement les démons;

(3) Evangile de saint Luc IV, 35;

(4) Voir le commentaire sur saint Luc de saint Athanase.

 

Le dernier témoignage m’à été rapporté par une femme, à la sortie d’une conférence sur le spiritisme: “ un couple ami, monsieur et madame D. avaient l’habitude de pratiquer ensemble chaque semaine une séance de spiritisme. L’esprit leur disait beaucoup de choses sur leur avenir ou sur l’avenir de leurs amis. Or, il leur annonça un jour la mort prochaine par accident de la route d’un couple de leurs proches. L’esprit leur conseilla de ne pas en parler pour ne pas les effrayer inutilement devant leur destin (1). Effectivement, 15 jours plus tard, ils apprirent que leurs amis s’étaient encastrés avec leur voiture sous un camion et que les pompiers avaient mis deux heures à les en sortir. Ils étaient morts avant d’arriver à l’hôpital. Choqués mais émerveillés par la puissance de l’esprit qui pouvait même leur annoncer l’avenir, Le couple D. continua ses séances de spiritisme. Moins de six mois plus tard, l’esprit leur annonça de nouveau la mort future d’un de leurs amis. Cette fois ils prirent peur et décidèrent d’aller en parler à un prêtre. Celui ci, peu au courant de ces questions, les orienta vers l’exorciste diocésain. L’exorciste se mit, parait-il, fort en colère et leur reprocha leur imprudence. Il exigea d’eux qu’ils reviennent le voir le lendemain avec l’ami dont l’esprit avait annoncé la mort.

            Le lendemain, après avoir raconté au jeune homme toute l’histoire, le prêtre le rassure et lui promit qu’il ne pourrait rien lui arriver, à condition qu’il se confie par la prière à la protection de Dieu. Il lui donna une médaille de la Vierge qu’il bénit. Jusqu’à ce jour, il n’est effectivement rien arrivé au garçon. Quant au couple D., il a bien sûr arrêté de pratiquer le spiritisme ”.

            J’ai tenu à raconter cette dernière histoire car elle pose un problème: Comment l’esprit a t-il pu connaître la mort prochaine par accident de la route? Il s’agit d’un fait que, théoriquement, seul

Dieu peut prévoir. Nous avons vu plus haut comment les anges eux-mêmes étaient ignorants devant le hasard. Faut-il admettre une révélation de la part de Dieu? Certainement pas. Nous touchons encore une fois l’orgueil de Lucifer qui espère se faire adorer comme Dieu. En annonçant un événement accidentel qui effectivement se produit, il fait croire aux spirites qu’il peut tout connaître, qu’il est Dieu. En réalité, le démon est incapable de prévoir cet accident. S’il l’annonce, c’est qu’il sait pouvoir le provoquer. La colère de l’exorciste s’explique sans doute pour cela. En pratiquant le spiritisme, le couple D. ne mettait pas seulement leurs propres personnes en danger mais aussi la personne de leurs proches. Ils sont, en quelque sorte, responsable de la mort de leurs amis, puisque l’esprit l’a provoqué dans un but de propagande sur sa puissance.

            Aux yeux de la foi, le spiritisme est donc condamnable d’une façon absolue. Chrétiens, juifs et Musulmans se rejoignent dans cette unique théologie. Il n’existe à mes yeux qu’un seul aspect positif dans cette méthode: Certains de mes élèves, après avoir essayé malgré les mises en garde de l’Église, sont ressortis convaincus de l’existence du monde des esprits. Il est malheureusement bien rare que celui qui l’a pratiqué une fois ne recommence pas.

            Aux yeux de la foi, le démon est beaucoup plus dangereux lorsqu’il se présente comme un bon ange que lorsqu’il s’amuse à effrayer par la puissance de ses actions. Il est en effet beaucoup plus grave au regard de la vie éternelle de perdre la foi (ce fondement de tout l’édifice spirituel) que de perdre la raison. Or la pratique du spiritisme sous ses formes modernes (magnétoscope) a séduit ces dernières années des fidèles et des hommes d’Église. Le Père Brune est pour moi l’exemple type de la sincérité abusée. Il se décrit dans son livre comme un homme de foi plutôt que comme un théologien. C’est donc par la crédibilité qu’il s’est laissé abuser incapable de discerner les contradictions de certains de leurs enseignements avec la foi de l’Église (2).

 

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

(1) Rappelons que selon la théologie catholique, le destin n’existe pas: notre vie n’est pas à l’avance programmée comme si nous étions des ordinateurs s’illusionnant d’une certaine liberté. La liberté humaine existe réellement et il dépend bien souvent d’elle que nous changions notre vie.

            On ne peut appeler au sens propre destin les divers conditionnements qui s’imposent à nous: nous ne choisissons pas notre corps mais nous le recevons de la biologie de nos parents, nous ne choisissons pas notre conditionnement social.

(2) Les livres du Père François Brune, malgré le respect que j’ai pour ce prêtre sincère, me paraissent trop séduisants pour être lus par quelqu’un de mal assuré dans sa Foi. Ils sont donc à mes yeux à déconseiller absolument.
 Un ami connaissait un prêtre qui me confiait son inquiétude: en regardant les U.S.A qui ont 10 ans d’avance sur la vieille Europe dans ces domaines là, en constatant l’existence de cultes spirites dans les collèges et les lycées, il se demandait si nous n’allons pas passer en France par une telle crise. La voie est à ses yeux toute tracée: la religion officielle étant en grande partie ruinée et remplacée par le culte du matérialisme, le besoin de religiosité de nos contemporains n’est plus comblé. Or la nature a horreur du vide. Il est fort possible qu’on assiste à un violent retour de bâton, un puissant attrait vers le spirituel que l’Église ne sera pas forcément capable de combler, faute d’ouvriers. Voici la voie ouverte au spiritisme et aux sectes.

SUIVANT