Arnaud DUMOUCH
La fin du monde
Docteur angélique
Nihil Obstat
Archevêché de Paris
Paris, le 7 juillet 1996 (n°37), M. Dupuy.
Imprimatur
Archevêché de Paris
Paris, le 5 novembre
2002 (n° 50-91), Mgr M. Vidal.
© Éditions Docteur
angélique, 2007
www.docteurangelique.com
ISBN: 978-2-9527315-1-5
Au Père Marie-Dominique Philippe
CHAPITRE 1 : Le grand spectacle de la fin
Comment se
produira la fin du monde?
CHAPITRE 2 : Les Sept « Jours » de
l’histoire du monde
L’histoire du
monde peut être décrite comme une semaine de sept jours
Les trois
premiers jours de l’humanité
C’est ce que
l’Esprit Saint veut
La vie de saint
Pierre, une prophétie des quatre derniers temps de l’Église
CHAPITRE 3 : Quatrième jour, l’annonce de
l’Évangile
Les trois sens
des textes sur la fin du monde
Chaque
génération connaît sa fin du monde
L’orgueil des
premiers théologiens et l’élaboration du Credo
Le protestantisme
et les guerres de religion
CHAPITRE 4 : Cinquième jour, la marche vers
l’apostasie
Les prophéties
concernant cet événement
Les péchés des
chrétiens (à partir du XIIe siècle)
Le déclin de
l’Église, vu par un frère Protestant
Discréditer ce
qui porte le nom de Dieu sur terre (à partir du xviiie siècle)
Les nouveaux
évangiles (à partir du xviiie
siècle)
L’humanisme
sans Dieu (à partir de 1960 et pour le xxie
siècle)
CHAPITRE 5 : Cinquième jour - Suite - Les signes
annonçant le sixième jour
Les signes des
temps dans l’islam
Les signes
donnés par la Vierge Marie
Les signes
donnés par la petite
Thérèse
Les signes dans
l’Église, la marche vers l’humilité
CHAPITRE 6 : Le sixième jour et l’Antéchrist
Qui est le dernier
Antéchrist ?
Jusqu’où iront
les succès de l’Antéchrist ?
Le témoignage
de la papauté et le martyre de l’Église
CHAPITRE 7 : Sixième jour - Suite - Le temps du Sépulcre, le signe de Jonas
Le Christ
trouvera-t-il la foi sur la terre lorsqu’il reviendra dans sa gloire ?
Le monde de
l’Antéchrist disposera les pécheurs au salut !
Le dernier
signe, « l’arbre de vie »
Les dernières
catastrophes cosmiques
CHAPITRE 8 : Septième jour, le jour du Seigneur
La durée du
monde de l’Antéchrist
La Vision
béatifique et l’enfer
CHAPITRE 9 : Septième jour - Suite - Le Jugement
général
CHAPITRE 1 : Fréquenter amoureusement l’Esprit
Saint et Marie
CHAPITRE 2 : La foi de l’Église par l’Écriture et
Pierre
CHAPITRE 3 : Les saints canonisés et les
apparitions reconnues par l’Église
Depuis près d’un siècle, le
silence s’est fait dans l’Église catholique sur la fin du monde. Les
théologiens et les prédicateurs n’ont plus osé en parler. Tant de récits
effrayants avaient été donnés en chaire par les anciens curés du xixe siècle, que ce genre de thème prêtait plus à
la suspicion qu’à l’intérêt. Une autre peur, celle de paraître ridicule, ou
pire, sectaire, paralysait les docteurs. La recherche n’était autorisée que
dans un seul sens qui visait à relativiser les textes, à leur donner une
signification purement symbolique.
La peur n’est pas évangélique. Ce silence a eu de graves conséquences. Il a laissé une grande place aux sectes politiques ou religieuses. Beaucoup de fidèles en ont été réduits à mettre leur espoir, non dans la venue certaine du Royaume de Dieu, mais dans la construction sociale du monde d’ici-bas. Hegel, Marx ne sont pas autre chose que des théologiens politiques de la fin de l’histoire, de l’arrivée du paradis sur terre. L’espérance marxiste a causé de manière directe la mort d’au moins cent millions de personnes. Pour les plus religieux, les propositions théologiques des sectes fondamentalistes les ont détournés de cette foi qui, loin de répandre la peur, est source d’une paix profonde. Les sectes apocalyptiques chrétiennes[1] ont causé pour le moment relativement peu de morts en comparaison des idéologies politiques. Mais elles transforment de manière hideuse en fanatisme illuminé ce qui devrait rayonner d’amour et d’humilité.
Une autre conséquence touche le cœur même de la vie spirituelle, à savoir l’espérance théologale. Depuis deux siècles, l’Église catholique vit une crise. En Occident, elle perd des fidèles. D’anciennes nations chrétiennes sont au bord d’apostasier* tout rapport à la foi. Des chrétiens perdent espoir. Ils ne comprennent plus. Le Christ n’avait-il pas annoncé que les portes de l’enfer ne l’emporteraient jamais ?
Or le Christ parle
explicitement dans les évangiles d’événements difficiles. Il annonce même, de
façon mystérieuse, « l’abomination de la désolation dans le Temple
saint »[2]. Ce texte ne peut annoncer
quelque chose de positif. Pourtant, dans un passage parallèle, parlant de la
venue de ces malheurs, Jésus dit : « Quand
tout cela commencera d’arriver, réjouissez-vous et relevez la tête car votre
rédemption est proche »[3].
Comment Jésus peut-il demander
de se réjouir d’un malheur ? Qui peut, parmi les lecteurs de ce livre,
répondre maintenant pour lui-même de manière claire à cette question ? La
plupart sont dans l’ignorance de ces sujets. Si le Christ, Maître et Seigneur
de notre foi, en a parlé, ce n’était certainement pas pour que nous mettions un
boisseau d’obscurité sur ses paroles[4].
Il est donc nécessaire, plus
que jamais, de raconter l’espérance
catholique pour la fin du monde. Lorsqu’on découvre qu’il ne s’agit pas
seulement d’un traité théorique mais d’une vie qui de plus se raconte comme une
histoire, avec une fin de lumière et d’amour, on ne peut qu’en être
enthousiasmé. Cet ouvrage vise à le manifester.
Trois parties vont se
succéder :
I- Le grand secret à l'origine de tout
En quelques lignes, il s'agit
de se remémorer la base de tout, ce sans quoi le reste est incompréhensible.
L'Alpha, la Trinité, etc.
II- La fin du monde
Avant le retour du Christ, Dieu prépare un plan grandiose qui donne l’explication de ce que l’humanité vit déjà actuellement. Ces textes sont valables à deux niveaux :
1. Pour chaque génération qui a vécu
depuis la venue du
Messie. Je montrerai donc dans un premier temps comment les textes se sont
historiquement et explicitement réalisés.
2. Mais ils annoncent aussi la venue historique, à un temps donné, d’une fin du monde entier. Les prophéties de l’Écriture Sainte ne permettent d’en connaître ni la date ni le détail avec une précision absolue. Mais elles sont assez explicites pour en dévoiler les grandes étapes et, à l’inverse de ce qu’en disent les sectes apocalyptiques, pour enflammer l’espérance.
Tout cela vise une cible
unique, l'Oméga, voir Dieu face à face.
III- Les sources de ces
connaissances
Cette partie est destinée aux esprits curieux de mes sources, croyants ou incroyants.[5]
– Les choses certaines : À chaque fois que je l’ai pu, je n’ai fait que rapporter la foi de l’Église (à travers l’Écriture Sainte ou le Magistère romain). Tout au long de l’ouvrage, je préciserai, en note ou dans le texte, quand il s’agit d’une telle source. Afin que le lecteur s’y retrouve, de tels textes seront marqués de la mention [Choses certaines].
– Les choses probables : Mais tout dans cet ouvrage n’est pas explicitement la foi de
l’Église. À chaque époque, des signes et des prophéties ont été donnés aux
hommes. C’est le cas de révélations* faites à des saints canonisés ou lors
d’apparitions* célestes reconnues canoniquement par l’Église. Ces sources
secondaires ne constituent pas, loin de là, des vétilles. Elles ont une très
grande valeur, non pour ajouter à la foi, mais
pour expliquer sa réalisation concrète (l’espérance). Elles seront
qualifiées de
[choses probables] tout au long du texte.
– Les
choses indécises : La manière concrète, avec les détails de date, de lieu et de
circonstances dont ces prophéties se réaliseront à l’avenir est affaire
d’hypothèse, de réflexion, d’analyse sociologique, de connaissance prédictive
de l’homme. Ce sont les
[Choses indécises] de ce livre.
– Les
opinions personnelles :
J’émets parfois des hypothèses personnelles, l’Église demandant au chercheur un
tel travail (voir par exemple des questions comme l’origine de l’islam, son
destin, la manière dont Israël reconnaîtra le Christ, etc.). Je peux assurer
que cet ouvrage ne contient rien qui soit contre la foi (contra fidem).
Mais il contient quelques précisions qui sont en marge de la foi (praeter
fidem). L’Imprimatur ecclésiastique ne veut rien signifier d’autre.
Je me trompe peut-être sur ces points. Ce livre doit rester sans cesse en chantier.
Ces aspects sont marqués de la mention : [Selon moi… Au lecteur de juger]
Note : Le vocabulaire marqué de * est traité à la fin de l’ouvrage
[La chose la
plus certaine]
Dans un premier ouvrage[6], j’ai décrit l’histoire sainte des individus, la manière dont Dieu s’efforce de conduire chaque homme à l’humilité puis à l’amour. Ici, je vais m’efforcer de raconter l’Histoire Sainte des peuples, des nations*, de l’humanité entière. Ces deux histoires ont le même commencement et le même terme… Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais rappeler en quelques mots ce fondement de tout.
Il n’est pas possible de comprendre quoi que ce soit de la lecture chrétienne des événements de la fin du monde sans connaître la raison et l’origine de tout. Comment comprendre l’Oméga si l’on ne connaît pas l’Alpha? Tout dans cette espérance s’explique par un principe simple. Il s’agit d’un projet de Dieu. Il veut se montrer à l’humanité entière, face à face, pour la combler de bonheur. Rien, dans l’histoire de l’humanité, ne se comprend au plan chrétien sans cette lumière. Mais tout peut être compris avec elle. L’Évangile de Jésus-Christ, celui qui explique la souffrance des communautés humaines, se résume à cela :
Avant que le monde n’existe, depuis toute éternité, il
existe un Être unique, une Personne... Il vit totalement heureux, comblé par sa
propre nature. Il est mystérieux puisque, tout en étant un seul être, trois
personnes[7] s’aiment et se contemplent en lui, le Père, le Fils et l’Esprit Saint[8]. Il s’agit d’une inimaginable vie intime, faite de tendresse et de
lumière inaccessibles. Deux qualités du cœur peuvent résumer la vie de Dieu,
l’humilité et l’amour[9]. Sans cesse, le Père glorifie le Fils, Le Fils glorifie le
Saint-Esprit parce qu’il l’aime. Dieu est ainsi et nul ne peut le changer.
Dans son éternité, il conçut le projet suivant : faire partager
ce bonheur à d’autres êtres; créer de nombreuses personnes, dotées
d’intelligence et de liberté, et les introduire, si elles le veulent, au cœur
des trois personnes. Ce serait comme un mariage, un acte d’amour réciproque.
Mais il convient de faire ici une remarque importante. Dieu ne désirait pas
créer un paradis où chaque personne, perdue dans sa contemplation, serait
uniquement tournée face à lui. Il voulait créer une Église, c’est-à-dire une
communauté immense vivant en Lui dans une totale communion d’humilité et
d’amour. Ce serait ainsi une fête éternelle où des milliards d’êtres épousés
communieraient au même pain. C’est pourquoi Dieu décida de faire de l’histoire
de ses créatures spirituelles une Histoire Sainte dirigée vers ce but unique.
Dieu agit. Il créa d’abord les anges, de purs esprits sans corps[10]. Puis il créa les hommes et les femmes, êtres spirituels et physiques.
Anges et hommes étaient faits pour voir Dieu face à face.
Un problème se posait pourtant. Pour que ces communautés
humaines entrent auprès de Dieu et vivent comme une Église sainte du bonheur
infini qui consiste à le comprendre et à l’aimer face à face, il était
absolument nécessaire qu’elles deviennent au plan du cœur semblables à lui, à
savoir tout humbles et toutes données à l’amour. Ici se trouve la clef de tout[11]. ‘Nul ne peut voir Dieu sans mourir à lui-même’[12]. À cause de la pureté et de la délicatesse de Dieu, n’importe quel
amour ne suffisait pas mais seulement un amour total, dépouillé de toute
recherche intéressée. Le moindre orgueil, le moindre égoïsme, et l’entrée face
à Dieu devenait impossible, comparable à un viol alors qu’elle devrait être un
mariage.
Ceci était vrai non seulement pour les individus, mais pour l’humanité dans son ensemble. C’est pourquoi, afin de laisser aux communautés humaines le temps de découvrir leur misère, il décida de les faire transiter par un devenir terrestre, par une gloire puis une décadence, par la mort enfin. Il appliqua cette loi à toutes, sans exception, y compris à celles qu’il avait voulues lui-même, celles qui portaient son nom[13] (Israël, et son Église). Tout cela constituait une série d’étapes purificatrices. Toutes étaient marquées par la souffrance[14]. Ce temps, par tout ce qu’il était, devait servir d’école de la vie.
« Dieu abaisse les puissants et relève les humbles. »[15]
« Depuis l’Ascension, l’avènement du Christ dans
la gloire est imminent même s’il ne nous appartient pas de connaître les temps
et les moments que le Père a fixés de sa seule autorité. Cet avènement
eschatologique peut s’accomplir à tout moment même s’il est retenu, lui et l’épreuve finale qui
le précédera. » [17]
[Chose certaine]
La Révélation chrétienne est explicite pour enseigner que le monde ne durera pas toujours. Dieu sait combien d’êtres humains doivent naître. À l’heure dite, celle que lui seul connaît, il mettra fin au monde terrestre. Cette heure n’a rien à voir avec les prédictions des astronomes sur l’évolution du soleil. Elle n’est pas naturelle donc non prévisible. Elle concerne Dieu seul et son projet sur l’homme. La dernière génération, celle qui vivra sur terre à cette époque, assistera à des événements étonnants. Dieu prépare sur la terre une nouvelle manifestation de son amour. Ce sera un spectacle grandiose, digne de ce que la Bible appelle le jour du Seigneur.
Mais tout spectacle de Dieu est avant tout spirituel car Dieu est esprit. Cette fois, l’amour ne sera pas manifesté par la douleur silencieuse. Il le sera par la victoire joyeuse. Cette heure a rapport avec ce que le Credo appelle le retour du Christ dans sa gloire.
L’Église ne connaît pas la date de ces événements[18]. Jésus dit en Mathieu[19] : « Quant à la date de ce jour, et à l’heure, personne ne les connaît, ni les anges dans les Cieux, ni le Fils, personne si ce n’est le Père ». Bien plus, afin de couper court à des indiscrétions qui s'étaient produites, elle n'a pas hésité à défendre sous peine d'excommunication d'annoncer pour une époque déterminée la venue de l'Antéchrist ou le jour du Jugement dernier. C'est sous Léon X, en l'an 1516, le 14 des Calendes de janvier, au Ve concile oecuménique de Latran (sess. XI, Constit. Supernæ majestatis præsidio) que ce décret, dont voici la teneur, a été porté : « Nous ordonnons à tous ceux qui exercent la charge de la prédication ou qui l'exerceront dans l'avenir qu'ils ne présument pas de fixer dans leurs prédications ou dans leurs affirmations un temps déterminé pour les maux futurs, soit pour l'avènement de l'Antéchrist, soit pour le Jugement : attendu que la Vérité dit : Ce n'est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Ceux donc qui, jusqu'à présent, ont osé émettre de pareilles choses, ont menti, et il est avéré que, par leur fait, un grand dommage a été porté à l'autorité de ceux qui prêchent sagement[20]. » La raison en est simple. Il s’agit d’un événement tout à fait comparable à la mort individuelle de chaque homme. Dieu se réserve l’heure de la mort de chacun. Le suicide lui déplaît puisque nul ne peut juger avec les yeux de Dieu qu’il a assez appris de son passage ici-bas. De même, nulle communauté humaine ne peut connaître sa fin (il s’agit ici de la fin d’un monde et non du monde) avant d’avoir compris qu’elle n’est rien. Il doit en être de même pour le monde dans son ensemble (la fin des fins).
Le Christ a, par contre, laissé des prophéties suffisamment précises et nombreuses pour permettre de comprendre le déroulement de ce qui précèdera la fin du monde. Des signes de la proximité des événements seront donnés aux hommes, permettant à ceux qui auront la foi en ces jours-là de les vivre de l’intérieur, de sentir l’imminence du retour du Christ. D’autres signes seront plus extérieurs, adressés à ceux qui n’auront pas la foi. Appuyés sur ces Révélations contenues dans les Écritures, il est possible de dire quelque chose de sûr.
[Chose certaine]
Il peut être intéressant de se livrer à un petit exercice. Mettons-nous à la place de Dieu. Imaginons que nous recevions la responsabilité de préparer la fin de la dernière génération humaine avec les objectifs suivants :
1. Former les hommes à l’humilité, cette vertu qui dispose le cœur à
l’amour.
2. Leur laisser le temps d’approfondir leur soif consciente ou
inconsciente du salut.
3. Leur prouver d’une manière définitive et grandiose l’amour de Dieu,
en vue de les sauver.
Comment nous y prendrions-nous? Il va de soi que, étant Dieu, nous aurions le droit d’utiliser tous les moyens à notre disposition, à savoir une puissance infinie, tout en respectant au moment du choix final, la liberté de ceux qui refusent l’amour. Il faut en effet remarquer qu’avant ce choix final, Dieu ne respecte pas toute la liberté de l’homme. Au contraire, il forme cette liberté en la soumettant à toutes sortes de contraintes que nous expérimentons tous les jours.
La première solution qui vient à l’esprit des enfants du catéchisme, surtout des garçons, consiste à organiser un festival du miracle, un spectacle avec mouvements d’astres, feu d’artifices d’étoiles se terminant par le bouquet final, l’atterrissage dans le plus pur style Albator, d’un Christ lumineux. Les descriptions de ce scénario ne manquent pas dans l’Écriture. Les anges ne disent-ils pas aux apôtres le jour de l’Ascension : « Ce même Jésus viendra comme cela de la même manière dont vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. » Il est vrai qu’un tel spectacle supprimerait l’athéisme.
C’est l’argument principal des enfants. Cependant, répond-il aux trois critères imposés plus haut ? Il est vrai que le critère 3 (La manifestation de Dieu) serait en partie réalisé. Mais qu’en serait-il de la charité et de sa mère, l’humilité, les seules réalités importantes pour la vie éternelle? Jésus, dans l’Évangile de saint Jean, montre les effets ambigus des miracles sur les hommes[21]. Il multiplie pour une foule des pains; les gens croient et applaudissent puis décident de le couronner roi d’Israël… pour qu’il chasse les Romains. Le Christ, voyant qu’ils ont détourné ses miracles pour en faire un outil de puissance politique, est obligé de se retirer dans la montagne. Ce scénario n’est donc pas, apparemment, le meilleur possible, au moins pour ce qui concerne le critère 1.
Il ne faut pas se moquer des enfants. Les adultes ne trouvent pas mieux, malgré leur bonne volonté, et ils se servent souvent mal de leurs trouvailles.
On peut donc être certain qu’avant que le Christ revienne en descendant du Ciel, il aura préparé le cœur des hommes par une série d’événements. Existe-t-il des textes du Magistère papal les décrivant ? Au cours de ses deux mille ans d’histoire, l’Église s’est très peu prononcée sur ces événements, sauf pour condamner certaines interprétations trop fondamentalistes de la Bible. Pourtant, depuis quelques décennies, elle parle. Le phénomène est nouveau et, nous le verrons, il constitue certainement un signe. Le Catéchisme de l’Église Catholique donne en deux paragraphes un enseignement nouveau et précis[22]. C’est la première fois qu’un texte doté d’une infaillibilité ordinaire[23] est aussi explicite :
« Avant
l’avènement du Christ, l’Église doit passer par une épreuve finale qui
ébranlera la foi de nombreux croyants. La persécution qui accompagne son
pèlerinage sur terre dévoilera le mystère
d’iniquité sous la forme d’une imposture religieuse apportant aux hommes
une solution apparente à leurs problèmes au prix de l’apostasie de la vérité.
L’imposture religieuse suprême est celle de l’Anti-Christ, c’est-à-dire d’un
pseudo-messianisme où l’homme se glorifie lui-même à la place de Dieu et de son
Messie venu dans la chair.
Cette imposture antichristique se
dessine déjà dans le monde à chaque fois que l’on prétend accomplir dans
l’histoire l’espérance messianique qui ne peut s’achever qu’au-delà d’elle à
travers le jugement eschatologique : même sous sa forme mitigée, l’Église
a rejeté cette falsification du Royaume à venir sous le nom de millénarisme,
surtout sous la forme politique d’un messianisme sécularisé, intrinsèquement pervers.
L’Église
n’entrera dans la gloire du Royaume qu’à travers cette ultime Pâque où elle
suivra son Seigneur dans sa mort et sa Résurrection. Le Royaume ne s’accomplira
donc pas par un triomphe historique de l’Église selon un progrès ascendant mais
par une victoire de Dieu sur le déchaînement ultime du mal qui fera descendre
du Ciel son épouse. Le triomphe de Dieu sur la révolte du mal prendra la forme
du jugement dernier après l’ultime ébranlement cosmique de ce monde qui
passe. »
Ce texte de théologie donne la clef de toutes les prophéties de l’Écriture sur la fin du monde. Jésus annonce pour son retour une Église humiliée, presque absente du fait de la réussite quasi-universelle d’un Antéchrist* qui ne sera même pas nécessairement violent puisqu’il établira une fausse paix sur le monde[24]. Il est clair que ce succès provisoire de ce qui s’oppose au Christ sera permis par Dieu et entrera au centre même de son projet grandiose. S’il avait voulu autre chose, il lui aurait suffi d’agir, Lui qui peut faire naître à partir des pierres des fils à Abraham[25].
S’il s’agit là du scénario prévu par Dieu, c’est qu’il est le meilleur possible[26].
Or, et c’est remarquable, ce scénario ressemble à celui que choisit l’Esprit Saint pour le Christ. C’est ainsi qu’il sauva le monde. Lui aussi passa par un martyre, après une lente kénose[27]. La clef de l’histoire est ici. Le même Esprit qui conduisit le Christ, conduira l’Église à son Heure. C’est en passant par la croix, à l’imitation de son époux, qu’elle provoquera le retour du Messie et le salut de l’humanité entière. La fin de l’Église est donc la même, analogiquement, que celle du Christ car c’est le même Esprit Saint.
Nous verrons au long de ce récit à quel point la vie du Christ est une allégorie de celle de l’Église, jusqu’à la fin du monde. Ce sera même une allégorie de détail, chaque acteur du drame de la passion trouvant sa place sous forme d’un courant idéologique particulier lors du témoignage final de l’Église[28].
Avant de reconstituer cette histoire à venir pour la fin des fins, suivons pas à pas le cheminement de l’humanité au cours de son histoire. En effet, comme toutes les prophéties apocalyptiques, elles ont plusieurs manières de se réaliser dans l’histoire des hommes[29] :
1. à chaque époque de l’histoire, c’est-à-dire pour chaque homme face à l’histoire de sa génération. C’est ce que je vais décrire dans le chapitre 3.
2. d’une manière plus grandiose, lors de la dernière génération sur la terre. Ce sera l’objet des chapitres suivants.
La connaissance de la fin de tel ou tel monde particulier permettra de mieux comprendre la fin des fins.
« ...
en attendant que tout lui soit soumis : Déjà présent dans son Église, le
Règne du Christ n’est cependant pas encore achevé avec puissance et grande gloire. Jusqu’à ce que tout lui ait été soumis,
l’Église vit elle-même parmi les créatures qui gémissent présentement encore
dans les douleurs de l’enfantement et attendent la manifestation des fils de
Dieu. Le temps présent est, selon le Seigneur, un temps encore marqué par la détresse et l’épreuve du mal qui n’épargne pas
l’Église et inaugure les combats des derniers jours. » [30]
[Chose
certaine]
L’histoire de l’humanité est sainte. Elle est dirigée de
l’intérieur par Dieu. Son but unique est, rappelons-le, de rendre chaque homme
individuellement, mais aussi chaque génération, humble, assoiffé d’un salut, pour qu’il puisse aimer (Agapé) et entrer dans la salle des noces
avec Dieu où il sera l’épousé. Il dirige chaque personne individuellement par
le travail de son ange gardien. Mais il dirige aussi l’humanité à travers son
histoire. Pour cela, il dispose d’un ordre d’anges appelés Princes par l’Écriture et qui, d’après Denys, connaissent parfaitement
ce qu’il faut faire pour diminuer l’orgueil des peuples.
Ils suivirent la chute d’Adam et Ève.
Le premier de ces jours est le temps où Dieu se taisait complètement, laissant
l’homme livré dans la nuit à sa liberté.
Après la mort d’Adam et Ève, Dieu laissa l’humanité[32] devenue égoïste vivre comme
elle le désirait, goûter jusqu’au bout les fruits séduisants de l’arbre de
l’orgueil. Il la laissa en récolter la solitude, les souffrances, la vie
insensée et la mort. Lui-même se cacha et n’expliqua plus son but aux hommes au
point qu’ils oublièrent le sens de la vie. Ils tendirent les bras vers le ciel
vide. Ils se créèrent de multiples dieux imaginaires plutôt que de rester
seuls. Ayant touché le fond de la misère, humilié,
l’homme se mit à désirer de tout son être un Sauveur. Ainsi, à travers cette
souffrance, les plus orgueilleux parmi les hommes furent disposés à comprendre un début d’humilité et un besoin
d’amour...
Cette première phase est la plus terrible car elle conduit, du fait du silence de Dieu, au désespoir devant la mort. Elle est décrite par la Bible jusqu’à l’heure de la vocation d’Abraham. Elle est symbolisée dans l’Évangile par le mauvais larron crucifié avec Jésus. Elle est la phase du silence de Dieu, silence efficace contre l’orgueil de l’homme qui meurt.
Le second jour est celui où il promit à quelques-uns un sauveur sans en préciser la nature. Il le fit aux juifs mais aussi ici et là chez les païens ;
L’homme appela à l’aide. Mais la souffrance sous toutes ses formes ne s’arrêta pas. Il supplia qu’on vienne le sauver. « Y a-t-il quelqu’un là-haut qui entende nos prières ? »[33] Alors, bien des générations plus tard, Dieu répondit. Il promit un Sauveur à quelques-uns. Mais il ne l’envoya pas tout de suite pour que la soif des hommes s’approfondisse. Orgueilleux, ils devinrent plus humbles et leur âme se mit à désirer la révélation du Dieu dont ils ne connaissaient pas le cœur. Ainsi, insensiblement, à travers ces souffrances, le cœur de l’humanité mûrit vers une humilité plus grande et un plus grand désir d’amour.
Cette deuxième phase fut en particulier vécue par les Juifs jusqu’à la venue du Messie Jésus. Elle est symbolisée dans l’Évangile par le bon larron. En effet, les justes subissent les mêmes souffrances au cours de leur vie que les mauvais. Mais elle provoque un effet plus profond. Le bon larron crucifié à la droite de Jésus lui disait : « Souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton royaume. » Elle est la phase de la foi et de l’espérance.
Le troisième jour est le temps enfin où il se fit chair et annonça l’Évangile.
Enfin Dieu les sauva. Il le fit lui-même, par un moyen merveilleux,
tel que chacun put s’écrier : « Vraiment, Dieu nous
aimait ! » L’une des personnes de la Trinité se fit homme en Jésus-Christ.
Le Messie-Dieu enseigna et voulut mourir de la main de ceux qu’il sauvait, afin
que les plus orgueilleux parmi les hommes ne puissent plus douter de son amour.
C’est la phase de l’amour de nouveau
révélé, celle qui a commencé depuis deux mille ans. Mais Dieu ne supprima
pas pour autant les souffrances de la vie, ni son silence. Le chrétien meurt
comme le païen. C’est que, à travers ses souffrances, il lui fut possible de
transformer sa croix en plus d’humilité
et d’amour, en une humilité et un amour conscients de ce qui les finalise.
Le croyant chrétien peut le faire avec plus d’intensité car il sait où il va et
ce qu’il fait sur terre.[34]
Cette partie de l’humanité (et de notre cœur) est symbolisée au Golgotha par le Christ lui-même. L’Église terrestre, qui est censée le suivre dans la même lumière, est comme son corps resté sur la terre.
Chacune de ces périodes dispose les cœurs au salut. Ces trois jours, commencés après le péché originel, sont toujours d’actualité. Les deux premiers sont vécus de nos jours par des milliards d’hommes qui n’ont jamais entendu parler du Christ mais seulement d’un hypothétique salut futur.
« Depuis
l’Ascension, le dessein de Dieu est entré dans son accomplissement. Nous sommes
déjà à la dernière heure. Ainsi donc déjà les derniers temps sont arrivés pour
nous. »[35]
Après son Ascension, Jésus annonce de nouveau trois temps, trois étapes de l’histoire durant lesquelles il préparera les nations* à son retour glorieux. On peut les discerner à la lecture de son discours eschatologique[36] et des multiples prophéties dispersées ici et là dans les lettres des apôtres.
Le quatrième de ces temps est celui de l’extension de l’Évangile dans le monde. C’est une période accompagnée de luttes et de souffrances nombreuses.
Le cinquième est celui du
rejet de l’Évangile par le monde.
Le sixième est le temps de
sa disparition quasi complète du monde.
Il convient de remarquer qu’on peut facilement mettre en parallèle
ces trois temps avec ceux de la vie de Jésus. D’abord écouté (4), il fut
ensuite rejeté (5) puis mis à mort (6). L’Esprit Saint conduit l’Église de la
même façon qu’il le fit pour les trois ans de la vie apostolique du Christ.
L’humanité vit donc sur terre six jours (elle connaît six phases, six états
spirituels en fonction de son salut) puis vient le septième, le jour du Seigneur, inauguré par le
retour du Christ. Bien des symboles bibliques trouvent leur interprétation dans
cette remarque, en particulier celui de la création du monde en six jours. La recréation
y trouve son modèle.
Ces trois derniers temps ainsi que le règne de l’Antéchrist* ne
sont pas des événements symboliques. Leur réalisation historique est aussi
certaine que l’étaient pour les Juifs les prophéties de l’Ancien Testament.
Quand un prophète annonçait qu’une jeune fille vierge serait enceinte et
enfanterait le Messie (troisième temps), les Juifs n’y voyaient pas seulement
un symbole, une image d’Israël* en attente de la manifestation de Dieu. Il en
est de même pour les événements de la fin du monde. Chaque prophétie de Jésus
a, c’est certain, un sens symbolique valable pour toutes les générations. Mais
elle a aussi un sens historique : « Le ciel et la terre passeront
mais mes paroles ne passeront pas. »[37] Toute la difficulté consiste à
démêler leur écheveau.
[Chose
probable]
Pour mieux comprendre le caractère concret de ces événements, il peut être utile de se remémorer la vie de saint Pierre*, le premier pape. Elle est une allégorie. Elle raconte l’action de Dieu sur l’Église.
Premier temps :
Les succès apostoliques. Pierre sortit de la maison où il venait de vivre
quelques jours caché des Juifs en présence de Marie* et des disciples de Jésus.
L’Esprit Saint
venait de fondre sur lui sous la forme de langues de feu. Animé de sa force, il
se mit à prêcher sans crainte dans la rue. Certains le crurent ivre de bon
matin tant l’Esprit le tenait. Pourtant, les gens qui écoutaient eurent le cœur comme transpercé. Ils furent
trois mille en ce jour-là à demander le baptême[38].
Deuxième temps : Le temps des demi-succès, le temps aussi pour Pierre de découvrir ses propres travers, ses errances et ses défauts[39]. Après leurs brillants succès apostoliques des débuts, Pierre et Paul furent confrontés à la lutte. Les oppositions se firent plus nombreuses non seulement de la part de l’État romain : « Vous serez haïs de toutes les nations à cause de mon nom », avait annoncé Jésus ; mais aussi des hérétiques chrétiens : « Il en viendra beaucoup en mon nom ». De plus, Pierre fut confronté à ses propres travers et défauts[40]. Il n’y eut plus autant de miracles. La puissance des premiers temps ne fut bien sûr pas le fait de Pierre* mais de l’Esprit qui coopérait avec lui pour implanter solidement la toute jeune Église dans le monde[41].
Troisième temps : Le temps de la prison et de l’exécution. Pierre fut persécuté, mis en prison, battu et exécuté. Il vécut la même croix que Jésus et sortit de ce monde sans orgueil, abreuvé de douleur et assoiffé de Dieu. Jésus avait prévenu Pierre : « Quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture et tu allais où tu voulais. Quand tu auras vieilli, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas. Il signifiait, en parlant ainsi, le genre de mort par laquelle Pierre devait glorifier Dieu[42]. »
Quatrième temps :
Le Christ lui apparut, glorieux. « Entre
dans ma joie. »
De même que pour Pierre, les trois temps qui précéderont le retour du Christ peuvent être datés. Le premier, celui de l’annonce de l’Évangile, commence avec le jour de la Pentecôte et dure jusqu’à aujourd’hui. Il se caractérise par l’extension de la chrétienté à travers le monde et par des luttes que le Seigneur appelle « des guerres et des rumeurs de guerre »[43].
Le second, le temps de l’apostasie* qui se généralise, trouve son origine en Occident comme en Orient dans l’orgueil des catholiques ou orthodoxes trop puissants à la fin du Moyen Âge. Après les guerres de religion, la réaction humaniste du siècle des Lumières portait en elle le rejet de l’Église puis du Christ. Il commence au plan politique avec les soubresauts antichrétiens de la Révolution française. Il continue à s’étendre jusqu’à aujourd’hui.
Quant au troisième temps, celui
du règne mondial d’un
Antéchrist*, de la disparition politique de tout ce qui porte le nom de Dieu[44], il est imminent au plan
politique. Certes, l’Antéchrist et son gouvernement mondial ne sont pas là. Au
plan des idées, le rêve d’un monde libéré de tout ce qui porte le nom de Dieu a
commencé en France au milieu du xixe
siècle. Dans le Grand Orient de France, on espère depuis longtemps ce que John
Lennon mit en chanson dans « Imagine » :
Imagine qu’il n’y ait plus de frontière,
C’est facile si tu essaies,
Pas d’enfer sous nous,
Au-dessus seulement les étoiles (pas de Dieu).
Imagine que tous les gens vivent au jour le jour.
Imagine qu’il n’y ait plus de frontière,
C’est facile si tu essaies,
Rien pour tuer ou se sacrifier,
Et pas de religion non plus.
Imagine que tous les gens vivent en paix.
Imagine qu’il n’y ait plus de propriété,
J’espère que tu le peux,
Plus de faim ni de soif,
La fraternité humaine.
Imagine que tous les gens se partagent le monde.
Divers courants antichrétiens oeuvrent puissamment, écrivent et souhaitent l’arrivée d’un gouvernement mondial athée. De puissants courants en Europe occidentale voudraient chasser de la mémoire historique le passé chrétien de ces nations. Pour saint Paul, le fait que ce troisième temps n’est pas réalisé est la preuve que le retour glorieux du Christ n’est pas imminent[45]. Il ne reviendra pas se montrer à l’humanité tant que les dernières prophéties n’auront pas été réalisées.
Dans les trois chapitres suivants, il faut s’efforcer de suivre pas à pas et à grands traits les trois temps de l’humanité, la sagesse de Dieu sur eux, la manière dont il apprend l’humilité à chaque génération.
[Principaux
sens eschatologiques]
Jésus a lui-même annoncé la fin du monde pour sa génération : « En vérité je vous le dis, cette génération ne passera pas que tout cela ne soit arrivé. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. »[46] S’est-il trompé ? C’est ce que crurent des générations dès le début de l’Église catholique. Le premier pape Pierre en témoigne[47] : « Les incroyants diront : Où est la promesse de son avènement ? Depuis que les Pères sont morts, tout demeure comme au début de la création. »
Or Jésus n’est pas le seul à avoir annoncé avec autorité la fin du monde pour son époque. Saint Vincent Ferrier se le permit de manière solennelle. Il fit même de grands miracles pour prouver ses dires. On raconte que, devant le scepticisme des théologiens catholiques de son époque, il ressuscita une femme morte qui confirma ses dires. Pourtant, depuis sa mort en Bretagne en 1419, rien n’est venu. S’est-il trompé ? L’Église ne le pense pas puisqu’elle le canonisa avec le titre d’ange du jugement, en référence à un verset de l’Apocalypse de saint Jean où un ange proclame d’une voix forte : « Plus de délai ! »[48]
La solution à ce problème vient de l’ambiguïté de la lettre des textes. Ils sont parole de Dieu et non parole d’homme. Il semble que Dieu regarde en un seul regard trois sortes d’événements qui paraissent différents à un regard humain :
1- La mort des individus[49]
2- La fin des sociétés humaines, des générations (la fin d’un monde)
3- La fin du monde (les événements de la dernière génération qui vivra sur terre)
On trouve une preuve de ces sens multiples dans un texte de l’évangile de Matthieu 24, 37-42. Il s’agit d’un passage où Jésus parle de son retour dans la gloire, mystère habituellement réservé à la fin du monde. Or il y décrit aussi dans le même passage, sans qu’il y ait rupture du texte, la mort individuelle d’un homme, puis d’une femme : « Alors deux hommes seront aux champs : l'un est pris, l'autre laissé ; deux femmes en train de moudre : l'une est prise, l'autre laissée. »
Jésus et saint Vincent Ferrier se sont-ils trompés ? L’explication de leur étonnante affirmation est simple. La fin du monde signifie plusieurs choses. On pense d’abord à la fin des fins, telle que je la décrirai à la fin de cet ouvrage. Mais Jésus pensait aussi à la mort de chaque individu et la fin de chaque génération. Tout ceci constitue d’ailleurs un seul et même mystère puisque, cent ans après sa naissance, toute une génération a vu le retour du Christ, individu après individu. Autrement dit, dans cent vingt ans maximum, nous serons tous morts. Avant que cela n’arrive, dans les jours de sa vieillesse, il n’est pas de génération humaine qui ne récolte les fruits de l’orgueil de sa jeunesse. Il est important, pour le salut, que cela se passe ainsi. Application simple : Que reste-t-il des jeunes immortels musclés qui partirent combattre l’ennemi en 1914 ?
Conclusion : Attention à ne jamais interpréter les textes eschatologiques comme s’ils annonçaient en premier lieu la fin des fins. Curieusement, c’est ce sens (qui n’est pas non plus à exclure, nous le verrons) qui fascine le plus les théologiens débutants, sans doute parce que sa dimension à la fois politique et curieuse a tendance à rendre fou le croyant non formé. Il y a deux sens beaucoup plus concrets et éducatifs à considérer :
« Prépare-toi à la venue de ton Juge. Ta mort est proche. »
« Ne mets pas trop ton espoir dans ton système politique. Elle passe, la figure de ton monde. »
Cette façon de contempler la fin du monde permet d’expliquer bien des choses.
Le signe de la croix dans chaque génération
[Chose
certaine]
L’annonce de l’Évangile aux nations* à travers des luttes sans merci, voilà donc ce que le Seigneur promet pour le premier temps de l’Église. L’histoire montre que cette période est déjà en grande partie derrière nous. Dans ce chapitre, je voudrais essayer de manifester de manière concrète l’action de Dieu à travers l’exemple de quelques générations chrétiennes.
Il existe, cachée sous l’apparente anarchie de l’histoire, une logique profonde[50]. Il existe une Sagesse qui éclaire le tout. L’unité vient d’un principe simple que je me suis efforcé de résumer dans l’introduction de ce livre. Son but est de faire sortir de chaque génération le maximum d’humilité et d’amour. Tout cela sert au salut du plus grand nombre. Tout cela a un rapport avec le mystère de la Trinité.
– Puisque Dieu veut introduire chaque génération dans la vision béatifique, il la prépare ;
– Puisque l’humilité est une condition fondamentale au salut, Dieu se plaît à la créer ;
– Puisque le défaut fondamental de chaque génération est de se croire plus intelligente, plus réussie que la précédente, Dieu prend le moyen de la mettre face à sa fatuité ;
– Puisque enfin rien n’est plus efficace que l’échec pour apprendre un peu d’humilité, Dieu se plaît à confronter chaque génération à sa ruine. Tout se résume à cette parole de Marie : « Il renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles. »[51] Il dose pour chaque époque réussites et échecs, paix et guerres, maladies et fléaux. Il dose tout cela jusqu’à l’extrême, jusqu’à ce que la génération passe de la vieillesse à la mort[52]. Il s’agit donc bien, à chaque génération, d’une fin du monde.
[Chose
certaine]
« ‘Dis-nous, demandèrent les
disciples, quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde?’ Et Jésus
leur répondit : ‘Prenez garde qu’on ne vous abuse car il en viendra
beaucoup sous mon nom, qui diront : “c’est moi le Christ”, et ils
abuseront bien des gens. Vous aurez aussi à entendre parler de guerres et de rumeurs
de guerres. Voyez, ne vous alarmez pas. Car il faut que cela arrive, mais ce
n’est pas encore la fin. On se dressera en effet nation contre nation et
royaume contre royaume. Il y aura par endroit des famines et des tremblements
de terre. Et tout cela ne fera que commencer les douleurs de l’enfantement.
Alors on vous livrera aux tourments et on vous tuera. Vous serez haïs de toutes
les nations à cause de mon nom. Et alors beaucoup succomberont ; ce seront
des trahisons et des haines intestines. Des faux prophètes surgiront nombreux
et abuseront bien des gens (...) Cette bonne nouvelle du Royaume sera proclamée
dans le monde entier en témoignage à la face de toutes les nations.’ »[53]
Décrivons, à titre d’exemple et pour mieux comprendre l’universalité de cette sagesse divine, l’expérience telle qu’elle a été vécue par la génération de la Première Guerre mondiale.
Son orgueil majeur est sa foi dans la science qui doit, croit-elle, lui apporter la totalité du bonheur. Son idole principale est la Patrie qu’elle exalte jusqu’à en faire un monstre dévoreur d’hommes. Il s’agit bien d’un monstre puisqu’on se prépare mentalement dès 1870 à tout lui offrir en sacrifice. Pour la patrie, chacun bombe le torse. En France, on se targue de faire rendre gorge aux Boches. En Allemagne, on chante Deutschland über alles[54]. L’idéologie est mondiale.
Dieu laisse faire les lois de ce péché d’idolâtrie. Mais il commence par avertir en donnant un signe, visible par tous. Le regard obsessionnel des Occidentaux pour le naufrage du Titanic en 1912, montre que ce malheur a été compris dès cette époque, au moins confusément, comme une prophétie. Le Titanic est l’image du monde séparé en classes sociales qui précède la Première Guerre mondiale : « Même Dieu ne pourrait pas le couler »[55].
La génération des poilus de la grande guerre a été profondément éduquée à l’humilité. Avant de rejoindre l’autre monde, elle a dû, à travers trois coups de boutoir, admettre son erreur. La boue des tranchées, la défaite de 40 et de manière ultime la révolution libertaire de mai 68 (où leurs petits enfants prirent les valeurs inverses à celles qu’ils avaient défendues, leur reprochant avec raison leur nationalisme fou) sont les trois principales leçons apocalyptiques qu’elle reçut. Vers la fin de sa vie terrestre, cette génération a bu jusqu’à la lie la coupe de son échec, de la main même de ses petits-enfants. Se croyant plus intelligents (l’orgueil était aussi leur lot), ceux-ci ont craché à la face de leurs pères et grands-pères leurs valeurs criminelles de patrie, honneur, sacrifice, devoir. Ils ont exalté les valeurs opposées. Quel échec pour les patriotes de 14… Pour celui qui sait lire les signes des temps, il y a ici une application de la théologie de fin du monde. Ce fut, pour toute cette génération, une véritable souffrance mais surtout, pour qui sait lire l’action de Dieu, une véritable action de salut produite par les lois de Dieu. Beaucoup, grâce à cela, ont été sauvés, efficacement. Dès cette terre puis face à l’apparition glorieuse du Christ, ils ont renié pour toujours la morgue nationaliste de leur jeunesse.
Je vais le montrer, cette pratique de Dieu peut s’appliquer à chaque génération. Une fois cette sagesse comprise, chacun peut même aisément devenir prophète et prévoir comment la génération suivante vivra sa fin du monde. Faisons le prophète. L’exemple de la génération de mai 68 dont je viens d’esquisser l’orgueil mérite d’être développé ici. Son péché majeur est sa foi dans sa puissante intelligence des choses de la vie. Nos pères furent des idiots. Nous avons enfin compris que la tolérance absolue, les droits de l’homme sont l’Alpha et l’Oméga de la sagesse. Son idole principale (le fondement de sa conception du bonheur) s’appelle plaisirs et bonheur immédiats, sexualité libre et spontanée. Il s’agit à nouveau d’un monstre puisqu’on invite chacun à tout lui offrir en sacrifice : mariage (un couple sur trois divorce au nom du devoir d’être heureux tout de suite), enfants (un sur quatre avorté, parce que cela vaut mieux pour lui), vieux parents (souvent délaissés). Elle chantait sur les pavés de Paris : « Faites l’amour, pas la guerre. »
On peut prévoir que la génération de mai 68 sera, elle aussi, profondément éduquée à l’humilité. Elle se croyait intelligente. Ses élites avaient soutenu Mao, Pol Pot, Castro sans jamais faire repentance de leur aveuglement. On peut observer que la leçon est déjà commencée. Dieu laisse faire jusqu’à aujourd’hui les conséquences de son péché. Mais il a commencé à l’avertir en lui donnant des signes, visibles par tous. Trois coups de boutoir se sont déjà produits : l’échec mortel du communisme, le SIDA apparu en 1980 et qui vint atteindre de plein fouet la civilisation de la luxure[56] et, au moment où j’écris, la haine de plus en plus inquiétante de banlieues jeunes, islamisées et fécondes. Au plan politique, ne peut-on pas craindre une véritable fin de leur monde ? L’avortement de toute une génération[57] remplacée par des immigrés dont l’islam est souvent non intégrable, prépare-t-il un triste réveil ?
On peut prévoir que la leçon se terminera sur terre avec l’âge. Ce sera une bien pauvre cohorte de personnes âgées qui récoltera les fruits d’un amour qui ne s’est construit que dans l’immédiateté. La solitude sera sa dernière plaie. Ses enfants, élevés dans le culte du bonheur immédiat, auront-ils le sens moral de l’accompagner dans les maisons de retraite ? Pire, elle devra affronter dans la nuit l’approche de la mort car elle est la première génération sans religion et sans prêtre. Elle sent confusément approcher ce moment. Agée de cinquante ans au moment où j’écris, elle se concocte, partout en Occident, des lois pour s’euthanasier.
Ce portrait est humainement très pessimiste. Il ne l’est qu’au plan d’un jugement humaniste terrestre. Il doit être complété par son vrai sens spirituel. C’est par ces épreuves que cette génération, à l’image de toutes les générations précédentes, sera sauvée par Dieu. Frappée par où elle a péché, ses membres de bonne volonté apprendront peu à peu l’humilité. La plus grande épreuve sera celle de sa confrontation avec l’apparition du Christ glorieux lorsque, un par un, ses membres passeront la porte de la mort. Le jour du Seigneur est terrible car il a le pouvoir de dévoiler la vérité des cœurs. Tout se terminera pour la majorité dans le repentir et la Vie.
Le temps des persécutions
(33-313 ap. J.-C.)
« Alors on vous
livrera aux tourments et on vous tuera ; vous serez haïs de toutes les
nations à cause de mon nom. Et alors beaucoup succomberont ; ce seront des
trahisons et des haines intestines. »[58]
À travers quelques événements chronologiques de l’histoire de l’Église, essayons de contempler l’action très sage de Dieu pour le salut du plus grand nombre. À chacun, en s’appuyant sur ces exemples, de prolonger ce travail pour chaque génération de toutes les civilisations du monde.
Au cours des trois premiers siècles, Dieu permit que la jeune Église soit persécutée par la puissance des dirigeants de l’Empire romain. Ceux-ci n’agissaient pas par haine lucide de Dieu. Leur ignorance du christianisme, leur zèle politique pour la religion de l’État et l’influence sournoise du démon qui sait amplifier les peurs, les rendaient souvent sincères. De cette persécution décrite par saint Mathieu comme de toutes les persécutions de l’histoire, il sortit des fruits immenses pour la vie éternelle. Jamais on ne vit Église plus sainte car plus pauvre. C’était une grande joie au Ciel que de voir arriver ces vierges chrétiennes, Blandine, Agnès, Cécile, fortes dans leur confiance en Jésus, toutes petites à cause de leur peur et de leurs larmes, et dignes de devenir reines pour l’éternité. Il n’y avait pas beaucoup d’orgueil en ce temps-là dans l’Église. Quant aux bourreaux païens, quelle n’a pas été leur stupéfaction de se voir accueillis par leurs victimes au moment de leur mort. Il n’est pas naïf d’affirmer que beaucoup, après avoir expérimenté leur propre misère par la mort, se convertirent et furent sauvés. Beaucoup réalisèrent cette parole de Jésus : « Ses péchés, ses nombreux péchés, lui sont remis parce qu’elle a montré beaucoup d’amour. Mais celui à qui on remet peu montre peu d’amour. »[59] En ce temps-là, on vivait sans difficulté, au jour le jour, les prophéties concernant le retour imminent du Christ puisqu’on pouvait être mis à mort n’importe quand.
La génération des premiers moines
« Vous aurez aussi à
entendre parler de guerres et de rumeurs de guerres ; voyez, ne vous
alarmez pas : car il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la
fin. »[60]
À cette époque, tout n’était cependant pas saint chez les chrétiens. Certains ne vivaient pas l’attente du jour du Seigneur en paix, tel qu’il convient à un croyant fidèle. Ils s’exaltaient avec orgueil et donnaient même des dates précises pour le retour du Christ, se faisant l’égal de Dieu. Ils invitaient à ne plus se marier. La sagesse de Dieu qui conduit à l’humilité se trouvait donc parfois vaincue par l’orgueil, même en ces temps douloureux. Devant la multiplication des persécutions, certains théologiens et chrétiens inventèrent une conception orgueilleuse et intransigeante du martyre. On le vanta tant qu’on en fit l’acte suprême du courage humain, de la force d’âme. On prétendit conquérir le Ciel par le mérite de sa résistance aux tourments. On en a des preuves dans des textes de l’époque. Des évêques refusaient le pardon à des chrétiens repentants pour le péché suivant : ils avaient renié leur foi par peur des tortures. On les appelait lapsi et parfois relaps quand ils avaient failli deux fois. Ainsi, le don de sa vie pouvait devenir un acte d’autosuffisance humaine ! Cela déplut au Ciel. Ne voyait-on pas arriver des martyrs dans l’autre monde, empreints d’une attitude revendicatrice, exigeant la récompense qui n’est donnée qu’aux humbles. Alors Dieu agit. Se servant des rouages multiples qui font l’histoire, il permit que la paix se fasse avec l’Empire. Constantin, en signant l’Édit de Milan (313), reconnaissait au christianisme le droit d’exister. En raison de la fin des persécutions, des foules de païens hésitants demandèrent leur entrée dans l’Église. Mais, par la même occasion, en raison de l’arrivée de cette masse de pauvres gens peu faits pour l’héroïsme, le zèle pour Dieu se refroidit. L’Église devint moins élitiste et marquée des graves défauts d’un peuple mal évangélisé. Il y avait moins de ferveur mais aussi moins d’orgueil dans l’héroïsme. Beaucoup adhéraient par arrivisme politique.
Cette deuxième étape de l’histoire de l’Église fut ressentie par beaucoup de chrétiens jadis fervents (surtout par les assoiffés du martyre) comme la fin du monde. À la pureté des premiers âges succédait une foule à peine dégrossie et encore empreinte de superstitions païennes. Ce n’était pourtant que la fin de leur monde devenu trop élitiste. Dieu l’avait détruit en vue du salut du plus grand nombre.
Ceux que décevait cette décadence reçurent souvent de la part de l’Esprit Saint l’appel explicite de se retirer au désert et d’y vivre comme des moines. Cet appel fut particulièrement ressenti en Égypte. Mieux que par le martyre sanglant, le martyre quotidien disposa des milliers de moines à la vie éternelle en les confrontant à leur misère. Il y eut en premier lieu de grands saints, suscités par Dieu. Saint Antoine du désert, par exemple, fut violemment attaqué par le démon qui le tentait de tous les péchés possibles. Loin de se contenter de simplement lui résister en restant vertueux, il devint un homme humble et aimant. Lorsqu’il eut découvert que l’ordre spirituel qui plaît à Dieu est celui qui met au sommet de tout l’amour de Dieu et du prochain, qui établit comme base de tout l’humilité et qui, en troisième lieu, cultive le reste des vertus, il fut béni de Dieu. Aidé par des charismes (don de faire des miracles par exemple), il reçut de Dieu la mission de créer un ordre monastique pour faire découvrir aux jeunes moines la véritable vie de sainteté.
Mais Dieu prit aussi le moyen de sauver les moines orgueilleux,
ceux qui venaient au désert afin de gagner le Ciel à la puissance de leur
vertu. Logiques avec eux-mêmes, ceux-là s’imposèrent des pénitences terribles.
Dieu les laissait faire avec patience. Sa seule arme fut le temps. Après
quelques mois et, pour les plus entêtés, quelques années de résistance, la
plupart s’écroulaient. Ils retombaient d’abord dans leurs faiblesses sexuelles
puis ils étaient frappés par un ennui particulier de l’âme qu’on nomme l’acédie[61]. Leur existence devenait
tantôt monotone, tantôt attaquée de tout côté par leurs passions. Ils
péchèrent, furent déçus par eux-mêmes. Presque tous se découvrirent bien
misérables. Or, je l’ai dit, il y a dans cette découverte de sa misère un
premier pas dans la mise à mort de l’orgueil. En fin de compte, seuls restaient
en danger ceux qui mouraient en se croyant dignes du Ciel.
« Des
faux prophètes surgiront nombreux et abuseront bien des gens. »[62]
Parallèlement, dans les cités de l’Empire, les évêques et les chrétiens libérés de la crainte du martyre eurent du temps pour faire de la théologie. Diverses conceptions de la Trinité naquirent. Chacun cherchait la vérité sur Dieu et le peuple se passionnait pour ces débats. Dieu permit la prédication de beaucoup d’hérétiques. Il laissait faire afin que de la lutte sorte la prière et que, de la prière, apparaisse la vérité. Mais il ne permit jamais que l’Église tombe tout entière dans l’erreur[63]. Par contre, la venue de faux prophètes poussa les évêques à mieux le connaître.
Mais, très vite, parce que la science enfle, on se mit à défendre la vérité plus par amour de sa propre intelligence que par amour pour Dieu. On en fit même un motif politique, allant jusqu’à adhérer à telle théorie parce qu’elle était soutenue par tel prince. Il y eut des mensonges, de la corruption, des meurtres. Cela déplut au Ciel. Dans l’autre monde, à l’heure de la mort, arrivaient une foule de chrétiens hérétiques ou non et tout aussi sûrs les uns que les autres d’aller au paradis pour avoir défendu avec dureté la vraie doctrine.
Arrivé à ce niveau de notre description de l’Histoire Sainte, on peut constater qu’elle se résume ainsi : « À chaque génération son péché. À chaque génération sa forme d’orgueil. À chaque génération son fléau envoyé par Dieu en vue de l’humilité. »
Alors Dieu se comporta de la même façon qu’au temps de la tour de Babel[64] : « Dieu dit : ‘Voici que tous ne font qu’un seul peuple et ne parlent qu’une seule langue, et ce n’est que le début de leurs entreprises ! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux. Allons ! Descendons ! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres.’ » Dieu[65] divisa donc l’Église en plusieurs communautés séparées et ennemies. Divisée, elle était plus faible ; plus faible, elle obtenait moins de gloire humaine. Plus humble, elle était mieux préparée à l’amour donc à la vie éternelle.
À partir de 632. L’islam, fouet de Dieu pour la
sanctification des chrétiens
[Selon
moi… Au lecteur d’en juger[66]]
« À
l’Ange de l’Église de Laodicée, écris : Ainsi parle l’Amen, le Témoin
fidèle et vrai, le Principe de la création de Dieu. Je connais ta
conduite : tu n’es ni froid ni chaud – que n’es-tu l’un ou l’autre !
– Ainsi, puisque te voilà tiède, ni chaud ni froid, je vais te vomir de ma
bouche. Tu t’imagines : me voilà riche, je me suis enrichi et je n’ai
besoin de rien ; mais tu ne le vois donc pas : c’est toi qui es malheureux,
pitoyable, pauvre, aveugle et nu ! Aussi, suis donc mon conseil :
achète chez moi de l’or purifié au feu pour t’enrichir. »[67]
Parmi toutes les divisions
envoyées ou permises par Dieu, une est particulière. Il s’agit de l’islam*.
Dieu vit un homme qui marchait en conduisant une caravane dans le désert
d’Arabie. Lorsque arriva la nuit, il se retira loin de ses compagnons pour
méditer. Il s’appelait Mahomet.
Attention, les pensées de Dieu ne sont pas celles des hommes. Avant de rejeter
l’islam dans le rang des sectes qui auraient réussi, il faut se souvenir de la
remarque pleine de sagesse de Gamaliel rapportée par les Actes des Apôtres[68] à propos du christianisme naissant. Lui aussi était persuadé que
Jésus était un imposteur, que Dieu ne pouvait avoir un fils ou se faire homme.
Il pensait sincèrement que les disciples avaient caché le corps de cet illuminé
pour faire croire à sa résurrection. Pourtant, il était sage. Il savait que le
mystère de Dieu est grand. Les chefs des Juifs avaient envoyé partout des
émissaires chargés de faire arrêter et exécuter les premiers chrétiens. L’un
d’entre eux, Saul de Tarse, « ne respirait que menaces et carnage à
l’égard des disciples du Seigneur »[69]. Or, lors d’une réunion au
Sanhédrin, Gamaliel prit la parole. « C’était un docteur de la Loi
respecté de tout le peuple. Il dit aux sanhédrites : ‘Hommes d’Israël,
prenez bien garde à ce que vous allez faire à l’égard de ces gens-là. À présent
donc, je vous le dis, ne vous occupez pas de ces gens-là, laissez-les. Car si
leur propos ou leur oeuvre vient des hommes, elle se détruira
d’elle-même ; mais si vraiment elle vient de Dieu, vous n’arriverez pas à
les détruire. Ne risquez pas de vous trouver en guerre contre Dieu.’ On adopta
son avis. »
Il est important que nous jugions de l’islam avec la même sagesse. Plus
d’une fois dans l’Écriture, Dieu a surpris son peuple. Ce qui d’un premier
abord apparaît comme impossible, il le fait. L’un des exemples les plus
étonnants de son action mystérieuse se trouve dans l’Ancien Testament. Dieu
peut-il lutter contre lui-même ? Dieu peut-il vouloir la destruction de
son propre
Temple ? « Non » répondirent unanimement les Docteurs d’Israël.
Ils jugèrent fou le pseudo-prophète qui venait de vaticiner le contraire[70] : « Et maintenant, puisque vous avez commis tous ces actes –
oracle de Yahvé – puisque vous n’avez pas écouté quand je vous parlais
instamment et sans me lasser, et que vous n’avez pas répondu à mes appels, je
vais traiter ce Temple qui porte mon nom, et dans lequel vous placez votre
confiance, ce lieu que j’ai donné à vous et à vos pères, comme j’ai traité
Silo. Je vais le détruire. » Jérémie
paya son audace. Mais le Temple fut vraiment détruit quelques années plus tard.
Les chefs des Juifs comprirent qu’ils avaient été trop rapides à qualifier
Jérémie d’hérétique. Ils lui construisirent un mausolée...
L’islam vient-il de Dieu ? À propos de l’origine de l’islam, il est très difficile d’être absolument concluant car l’Écriture sainte et le Magistère de l’Église ne donnent pas d’enseignements définitifs sur son origine. Depuis le concile Vatican II, l’Église appelle simplement à un regard de respect. Il distingue la marque du nom de Dieu, non seulement dans l’islam, mais aussi dans les autres traditions religieuses qu’il cite. Il a reconnu la riche valeur de la foi et de la morale musulmane[71] : « Le dessein de salut enveloppe également ceux qui reconnaissent le Créateur, en tout premier lieu les musulmans qui professent avoir la foi d’Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour. » Ce respect de l’Église est important. Il montre qu’il n’est plus possible de considérer l’islam ou les autres religions comme de simples Antichristianismes, venus du démon.
Mais une telle position ne nourrit que le cœur. Elle ne peut suffire à
une intelligence croyante. D’où vient l’islam ? Pour répondre, il faut
s’efforcer de voir s’il existe des prophéties bibliques à propos de cette
religion et si elle s’y reconnaît. Il s’agit de la deuxième religion
monothéiste du monde. Elle touche plus d’un milliard de fidèles. Il ne peut
manquer d’y avoir quelque texte biblique prophétisant sur son avenir.
Or il est remarquable de constater que la référence première des
musulmans est le patriarche Abraham, et ils désirent se soumettre à Dieu comme
lui-même s’est soumis. Ils se disent fils d’Abraham par son fils Ismaël. C’est
donc du côté des promesses faites à Abraham qu’il faut chercher.
La lettre des Écritures est alors surprenante. On y apprend effectivement
qu’Abraham a eu deux fils, et non un seul
et que ces fils reçurent tous deux
une promesse de bénédiction de Dieu. Il convient de rappeler ici l’histoire, en
la prenant à sa source même.
La grande tristesse d’Abraham, ce pasteur sémite, était de ne jamais pu
avoir d’enfant.
« La parole de Yahvé fut adressée à Abram[72], dans une vision : ‘Ne crains pas, Abram ! Je suis ton bouclier, ta
récompense sera très grande.’ Abram répondit : ‘Mon Seigneur Yahvé, que me
donnerais-tu ? Je m’en vais sans enfant...’ Alors cette parole de Yahvé
lui fut adressée : ‘Ce n’est pas un serviteur qui sera ton héritier, mais
bien quelqu’un issu de ton sang.’ Il le conduisit dehors et dit : ‘Lève
les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer’ et il lui
dit : ‘Telle sera ta postérité.’ Abram crut en Yahvé, qui le lui compta
comme justice. » [73]
Ismaël, figure allégorique de l’islam
Quelques mois après, la promesse tardait à se réaliser. Sarah, épouse
d’Abraham, s’impatienta et lui dit, dans son bon sens [74] : « ‘Vois, je te prie. Yahvé n’a pas permis que j’enfante. Va
donc vers ma servante. Peut-être obtiendrai-je par elle des enfants.’ Et Abram
écouta la voix de Sarah. Ainsi, au bout de dix ans qu’Abram résidait au pays de
Canaan, sa femme Sarah prit Agar l’Égyptienne, sa servante, et la donna pour
femme à son mari, Abram. Celui-ci
alla vers Agar, qui devint enceinte. »
Ainsi, le fils aîné d’Abraham fut celui d’une esclave, d’une muslim selon la terminologie sémitique.
Ici, il convient d’être attentif. Quel est cet enfant premier-né et que dit la Bible de lui, de son avenir ?
« Lorsque Agar se vit enceinte, sa maîtresse ne compta plus à ses
yeux. Alors Sarah dit à Abram : ‘Tu es responsable de l’injure qui m’est
faite ! J’ai mis ma servante entre tes bras et, depuis qu’elle s’est vue
enceinte, je ne compte plus à ses yeux. Que
Yahvé juge entre moi et toi !’ Abram dit à Sarah : ‘Eh bien, ta servante
est entre tes mains, fais-lui comme il te semblera bon.’ Sarah la maltraita
tellement que l’autre s’enfuit de devant elle. L’Ange de Yahvé la rencontra
près d’une certaine source au désert, la source qui est sur le chemin de Shur.
Il dit : ‘Agar, servante de Sarah, d’où viens-tu et où vas-tu ?’ Elle
répondit : ‘Je fuis devant ma maîtresse Sarah.’ L’Ange de Yahvé lui
dit : ‘Retourne chez ta maîtresse et sois-lui soumise.’ L’Ange de Yahvé
lui dit : ‘Je multiplierai beaucoup ta descendance, tellement qu’on ne
pourra pas la compter.’ L’Ange de Yahvé lui dit : ‘Tu es enceinte et tu
enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom d’Ismaël, car Yahvé a entendu ta
détresse. Celui-là sera un onagre d’homme, sa main contre tous, la main de tous
contre lui, il s’établira à la face de tous ses frères.’ »[75]
Ainsi, l’enfant fut béni par Dieu après sa conception. Dieu ne fut pas à
l’origine de sa naissance mais il le bénit tout de même, à cause d’Abraham. Et
sa bénédiction fut grande !
D’autres prophéties bibliques furent données par la suite concernant
Ismaël. Sarah, qui était une femme terrible, chassa à nouveau l’enfant de la
servante après la naissance d’Isaac, le fils qui lui vint dans sa vieillesse[76] : « Lorsque cela arriva, Dieu dit à Abraham : ‘Ne te
chagrine pas à cause du petit et de ta servante, tout ce que Sara te demande,
accorde-le, car c’est par Isaac qu’une descendance perpétuera ton nom, mais du
fils de la servante je ferai aussi une grande nation car il est de ta race.’
Abraham se leva tôt, il prit du pain et une outre d’eau qu’il donna à Agar, et
il mit l’enfant sur son épaule, puis il la renvoya. Elle s’en fut errer au
désert de Bersabée. Quand l’eau de l’outre fut épuisée, elle jeta l’enfant sous
un buisson et elle alla s’asseoir vis-à-vis, loin comme une portée d’arc. Elle
se disait en effet : ‘Je ne veux pas voir mourir l’enfant !’ Elle s’assit
vis-à-vis et elle se mit à crier et à pleurer. Dieu entendit les cris du petit
et l’Ange de Dieu appela du ciel Agar et lui dit : ‘Qu’as-tu, Agar ?
Ne crains pas, car Dieu a entendu les cris du petit, là où il était. Debout !
Soulève le petit et tiens-le ferme, car j’en ferai une grande nation.’ Dieu
dessilla les yeux d’Agar et elle aperçut un puits. Elle alla remplir l’outre et
fit boire le petit. Dieu fut avec lui, il grandit et demeura au désert, et il
devint un tireur d’arc. Il demeura au désert de Parân et sa mère lui choisit
une femme du pays d’Égypte. »
Ainsi, une deuxième fois, Ismaël fut béni et quelques précisions sur son
destin furent données : son lien avec le désert (l’islam naquit dans le
désert d’Arabie), le fait qu’il devint tireur d’arc (donc une religion de la guerre).
Parce que la figure d’Ismaël semble une allégorie* de l’islam, la fin de
la vie d’Ismaël mérite aussi d’être rapportée[77] :
« Voici la descendance d’Ismaël, le fils d’Abraham, que lui enfanta
Agar, la servante égyptienne de Sara. Voici les noms des fils d’Ismaël, selon
leurs noms et leur lignée : le premier-né d’Ismaël Nebayot, puis Qédar,
Adbéel, Mibsam, Mishma, Duma, Massa, Hadad, Téma, Yetur, Naphish et Qédma. Ce sont
là les fils d’Ismaël et tels sont leurs noms, d’après leurs douars et leurs camps,
douze chefs d’autant de clans. Voici la durée de la vie d’Ismaël : 137
ans. Puis il expira ; il mourut et il fut réuni à sa parenté. Il habita
depuis Havila jusqu’à Shur, qui est à l’est de l’Égypte, en allant vers
l’Assyrie. Il s’était établi à la face de tous ses frères. »
Isaac, figure du christianisme
Le second fils d’Abraham fut appelé Isaac. L’annonce de sa naissance fut
très différente. Elle fut décidée par Dieu lui-même lors de son apparition au
chêne de Mambré sous la forme de trois personnes (la Trinité fut révélée ce
jour-là pour la première fois). Il fut conçu par la femme libre d’Abraham,
c’est-à-dire par Sara. Et Dieu dit à propos d’Isaac et d’Ismaël[78] : « C’est par Isaac qu’une descendance perpétuera ton nom mais
du fils de la servante je ferai aussi une grande nation car il est de ta
race. »
Il y a là une allégorie* qui concerne les deux religions issues du
judaïsme, à savoir l’islam et le christianisme. Les détails de ressemblance
sont plus que frappants.
En effet, le christianisme fut créé immédiatement par une initiative de
Dieu qui vint lui-même le prêcher sur terre. De plus, cette religion reçut la
révélation du Mystère de la Trinité
symbolisée dans l’histoire d’Isaac au chêne de Mambré[79] par les trois personnes qui
étaient un seul Dieu. Les chrétiens sont appelés enfants et amis de Dieu de même qu’Isaac est enfant d’Abraham par son épouse légitime, sans passer par la
servante. Les musulmans se nomment eux-mêmes les esclaves de Dieu (muslim),
ce qui est symbolisé dans cette prophétie par leur mère qui était esclave égyptienne. Le mot arabe
« islam » signifie « soumission, abandon à Dieu ». La
formule « inch Allah » (Si Dieu le veut) exprime la foi et la
soumission en l’action constante et souveraine de Dieu dans sa création. La
formule « Mektoub » (c’était écrit) est plus populaire. Elle exprime
une tendance à la passivité, respectueuse de Dieu, devant les malheurs.
Si l’on suit la lettre de l’Écriture, le christianisme est l’Alliance
voulue explicitement par Dieu et symbolisée par Isaac. Quant à l’islam, si on
en croit cette prophétie, il vient de l’initiative des hommes, de même
qu’Ismaël naquit par l’initiative personnelle d’Abraham et de Sarah, sans ordre
de Dieu. Il fut inventé par Mahomet. Mais Dieu le bénit par la suite et le
rendit extrêmement fécond à cause de la foi dont faisaient preuve les
musulmans, suivant en cela l’exemple de leur Père Abraham.
Si l’on regarde avec précision les diverses prophéties qu’ajoute la Bible concernant le destin d’Ismaël, on est frappé de constater qu’il s’agit du portrait de l’islam tel que nous le voyons depuis 1422 ans. Le livre de la Genèse 16 donne un portrait prophétique d’Ismaël, donc de l’islam, qui correspond trait pour trait à sa façon d’exister depuis des siècles : Il sera un onagre d’homme (c’est-à-dire comme un âne indomptable, rude dans leur pratique religieuse et intransigeant pour ce qui concerne sa foi). Sa main contre tous et la main de tous contre lui (à cause de cette intransigeance pour la foi, qu’il aura tendance à imposer). Il s’établira à la face de tous ses frères (à commencer par son frère chrétien qu’il supplanta en Afrique du Nord, puis en Turquie). La Genèse précise[80] qu’il devint un tireur d’arc (donc par métaphore, un peuple guerrier se répandant par la conquête militaire). Douze tribus sortirent de lui, à l’image des nations revendiquées comme terres musulmanes : Arabes, Perses, Égyptiens, Indonésiens, Pakistanais (d’origine indienne), Africains noirs, Turcs, nations du Caucase, peuples musulmans de Chine, Afghans.
Diverses
objections viennent à l’esprit de tout chrétien. Comment Dieu peut-il bénir*
une hérésie ? L’islam enseigne des dogmes contradictoires avec la foi
chrétienne. Tout ce qui a rapport avec la possibilité d’une vie surnaturelle
est nié : la Trinité, l’incarnation du Verbe, sa passion et sa
résurrection, l’élévation de l’homme à l’amitié avec Dieu. Selon beaucoup
d’auteurs musulmans, le paradis est réduit à un bonheur humain et la vision
face à face de Dieu est impossible. En ce sens, on peut dire que cette religion
consiste en une dégradation grave des promesses du Christ. D’ami, elle réduit
l’homme à être serviteur de Dieu. En conséquence, à cause de ses erreurs, il
est impossible pour un croyant chrétien que l’islam ait été directement dicté
par Dieu, quoiqu’en dise Mahomet. On voit mal Dieu dicter de lui-même des
choses fausses. On le voit souvent parler dans la Bible de manière ambiguë. Il
laisse l’homme se fourvoyer dans des interprétations qui ne sont pas les
siennes, parce que les mots n’ont pas le même sens pour lui que pour l’homme.
Mais on ne le voit jamais mentir. Par contre, souvent il joue de l’ambiguïté
des mots.[81]
En effet, une religion ne peut subsister mille quatre cent vingt-trois
ans et devenir la deuxième au monde si elle n’en reçoit pas de Dieu
l’autorisation. Quand je dis que Dieu bénit* telle ou telle communauté humaine,
cela signifie qu’il la laisse se multiplier. Il lui donne du pouvoir, de la
réussite. Jésus l’affirme à Pilate lorsqu’il se vantait de son pouvoir sur
lui : « ‘Tu ne me parles pas ? Ne sais-tu pas que j’ai pouvoir
de te relâcher et que j’ai pouvoir de te crucifier ?’ Jésus lui répondit :
‘Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi, si cela ne t’avait été donné d’en
haut.’ »[82]
Pour répondre de
manière chrétienne, il est nécessaire de revenir à ce qui transparaît dans
l’évangile et qui semble être une des bases de la révélation du Christ. Il
arrive que, dans son obstination, l’homme contraigne Dieu à choisir entre deux
termes qui, normalement, devraient être unis. Il s’agit de l’humilité et de la
compréhension de la vérité. Dans ce but, il préférera l’humilité à la vérité.
Dès le début du christianisme, saint Jean Chrysostome l’affirmait :
« Donnez-moi deux attelages pour une course de chars. Que les chevaux du
premier s’appellent Vérité (christianisme) et Orgueil, ceux du second
s’appellent Hérésie et Humilité. Et bien vous verrez le second attelage
remporter la victoire, non à cause de l’erreur mais à cause de la force du
cheval Humilité. » Concrètement, il importe moins pour Dieu qu’un homme
soit chrétien si, parallèlement, il se conduit comme un égoïste ou avec la
morgue d’un pharisien. C’est, semble-t-il, l’explication de la bénédiction de
l’islam par Dieu[83].
C’est un travail
spirituel extrêmement douloureux car il remet en question des aspects habituels
et déviés de notre espérance. Il ne nous a jamais été promis que le
christianisme vaincrait les autres religions ou l’athéisme et implanterait sa
foi ici-bas, sur terre. Il a été
promis que le Christ vaincrait puissamment à l’heure de la mort et dans l’autre
monde par son apparition glorieuse, accompagné des saints et des anges. Nous
confondons souvent espoir et espérance théologale. L’espoir
attend quelque chose d’humain, ici-bas. L’espérance attend la victoire finale
de Dieu dans l’éternité et reconnaît aujourd'hui l'action de Dieu malgré toutes
les apparences. En ce qui concerne l’Église, il nous a été annoncé que sa fin
serait extrêmement glorieuse, c’est-à-dire (et c’est la seule interprétation
légitime d’après le Catéchisme de l’Église catholique[84]) qu’elle ressemblera à la fin du Christ : l’Église finira petite,
humble, crucifiée et priante. Elle sera si humble qu’elle provoquera le retour
glorieux du Christ. Évidemment, ceux qui rêvent du retour du succès politique
ici-bas ne peuvent qu’être choqués.
Une seule chose importe à Dieu en définitive : sauver tous les
hommes et donc façonner leur cœur dans la plus grande disposition à son
mystère. Ces qualités se résument à deux : humilité et amour. Peu lui
importe la survie de l’Afrique du Nord ou de l’Égypte chrétienne si leur
christianisme devient objet de perdition pour leurs peuples.
Dieu peut
parfois autoriser (c’est-à-dire, selon l’expression biblique, bénir*) ce qui apparaît à un regard
superficiel comme un désastre, à cause d’un bien plus profond qu’il en fait
sortir et qui a rapport avec le salut éternel des hommes[85].
Tout au long de
l’histoire biblique, des exemples de ce comportement sont donnés. Il semble se
faire ennemi des projets de l’homme, à chaque fois qu’il y discerne l’orgueil
et le désir de puissance.
Le premier exemple biblique est donné à Babel[86] : « Comme les hommes se déplaçaient à l’orient, ils trouvèrent
une vallée au pays de Shinéar et ils s’y établirent. Ils se dirent l’un à
l’autre : ‘Allons ! Faisons des briques et cuisons-les au feu !’
La brique leur servit de pierre et le bitume leur servit de mortier. Ils
dirent : ‘Allons ! Bâtissons-nous une ville et une tour dont le
sommet pénètre les cieux ! Faisons-nous un nom et ne soyons pas dispersés
sur toute la terre !’ Or Yahvé descendit pour voir la ville et la tour que
les hommes avaient bâtie. Et Yahvé dit : ‘Voici que tous font un seul
peuple et parlent une seule langue, et tel est le début de leurs
entreprises ! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux.
Descendons ! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent
plus les uns les autres.’ Yahvé les dispersa de là sur toute la face de la
terre et ils cessèrent de bâtir la ville. Aussi la nomma-t-on Babel, car c’est
là que Yahvé confondit le langage de tous les habitants de la terre et c’est de
là qu’il les dispersa sur toute la face de la terre. »
On pourrait croire que ce texte est périmé, qu’il ne s’applique plus à l’humanité. C’est l’erreur que firent les Juifs à l’époque de Salomon. Dieu avait donné à ce roi une puissance et une unité populaire jamais observée. Alors, comme il est naturel dans ce cas, Salomon s’enorgueillit, prit un nombre incroyable de femmes, imposa à son peuple des corvées et des impôts insupportables. Yahvé dit à Salomon[87] : « Parce que tu t’es comporté ainsi et que tu n’as pas observé mon alliance et les prescriptions que je t’avais faites, je vais sûrement t’arracher le royaume et le donner à l’un de tes serviteurs. Seulement je ne ferai pas cela durant ta vie, en considération de ton père David ; c’est de la main de ton fils que je l’arracherai. Encore ne lui arracherai-je pas tout le royaume : je laisserai une tribu à ton fils, en considération de mon serviteur David et de Jérusalem que j’ai choisie. »
Le Seigneur dit en saint Mathieu[88] : « Vous aurez aussi à entendre parler de
guerres et de rumeurs de guerres : voyez, ne vous alarmez pas, il faut que
cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin »[89]. Et ailleurs[90] : « Lorsque l’on dira paix et sécurité,
c’est alors que fondra sur eux tout d’un coup la perdition, comme les douleurs
de la femme enceinte, et ils ne pourront y échapper. »
L’islam a connu après Mahomet deux grandes expansions dues à des
nomades aguerris et galvanisés par leur foi : 1- À la fin du viie siècle, des Arabes, « les cavaliers d’Allah », iront porter
l’islam jusqu’à l’Indus et jusqu’à Tours et Poitiers. 2- Au xve siècle, les Turcs s’empareront des Balkans et parviendront aux portes de
Vienne, qui les verra revenir en 1682. Il connaîtra aussi deux régressions :
la perte de l’Espagne au xve siècle, la perte des Balkans au xixe siècle. Certes, la guerre sainte est un devoir pour la communauté
islamique, mais les conversions des masses furent le plus souvent opérées sous
l’influence des commerçants, des marins, et des pèlerins. Toute expédition
militaire des musulmans n’est pas à identifier au devoir de la guerre sainte.
Pour comprendre comment la guerre a pu être permise par Dieu, il faut
revenir aux sources mêmes de la révélation judaïque. J’aborderai ultérieurement[91] plus à fond la question du sens de toutes les souffrances. Je montrerai
à quel point la révélation du Christ achève et donne sens à ce que les Juifs
devinaient déjà. Mais, là où nous sommes rendus, la sagesse laborieusement apprise
par les Juifs suffit.
Que faisons-nous sur terre ? Pourquoi nous faut-il passer par ce
lieu de fragilité où le mal frappe, sans cause apparente ? Visiblement,
comprirent les Juifs, il est une qualité qui tient au cœur de Yahvé plus que
toute autre : Il ne supporte pas l’orgueil. L’humilité semble être
appréciée par lui au-dessus de tout. En conséquence, tout ce que Dieu crée est
marqué tôt ou tard par la faiblesse et la mort. Marie, mère de Jésus, jeune
fille formée par le plus pur des judaïsmes, avait compris ce fait. Elle le
chante dans son Magnificat[92] : « Il a déployé la force de son bras, il a dispersé les
hommes au cœur superbe. Il a renversé les potentats de leurs trônes et élevé
les humbles, Il a comblé de biens les affamés et renvoyé les riches les mains
vides. »
Il semblerait que Dieu veut apprendre quelque chose d’important à
l’homme, quelque chose en rapport avec son salut. Ainsi en va-t-il de la
guerre. Celui qui prend l’épée fait périr les autres par l’épée mais finit, tôt
ou tard, par périr lui-même. Et la chose semble universelle.
Le peuple juif en fut le témoin et la victime. Pour le comprendre, une
histoire vaut mieux qu’une théorie. Il s’agit de la plus horrible histoire que
la Bible contienne. Elle met en scène l’homme dans sa nature la plus réaliste
et la façon dont il apprend, à ses dépens, qu’il n’est décidément rien[93]. En fait, elle nous met en scène nous-mêmes, mais nous ne le comprenons
pas encore.
« En ce temps-là, il y avait un homme, un
lévite, qui résidait au fond de la montagne d’Éphraïm. Dans un moment de colère
sa concubine le quitta pour rentrer dans la maison de son père, et elle y resta
quatre mois. Son mari alla la trouver pour parler à son cœur ; quand elle
le vit arriver, elle se réjouit fort. Le cinquième jour, le lévite se leva pour
partir et sa concubine le suivit. Ils arrivèrent en vue de Gibéa. Il s’assit
sur la place de la ville. Survint un vieillard qui dit : ‘ Sois
le bienvenu chez moi, mais ne passe pas la nuit sur la place.’ Pendant qu’ils
se réconfortaient chez lui, voici que des gens de la ville, des vauriens,
s’attroupèrent autour de la maison et, frappant à la porte à coups redoublés,
ils dirent au maître de la maison : ‘Fais sortir l’homme qui est venu
chez toi, que nous couchions avec lui.’ Alors le maître de la maison sortit
vers eux et leur dit : ‘Non, mes frères, je vous en prie, ne soyez pas des
criminels. Je vous donnerai plutôt ma fille qui est vierge.’ Ces gens ne
voulurent pas l’écouter. Alors l’homme prit sa concubine et la leur amena dehors.
Ils la violèrent, ils abusèrent d’elle toute la nuit jusqu’au matin et, au
lever de l’aurore, ils la lâchèrent. Vers le matin, la femme s’en vint tomber à
l’entrée de la maison de l’homme chez qui était son mari et elle resta là
jusqu’au jour. Au matin, son mari se leva et, ayant ouvert la porte de la
maison, il sortait pour continuer sa route, quand il vit que la femme, sa
concubine, gisait à l’entrée de la maison, les mains sur le seuil. ‘Lève-toi,
lui dit-il, et partons !’ Pas de réponse. Alors il la chargea sur son âne et il
se mit en route pour rentrer chez lui. Arrivé à la maison, il prit un couteau
et, saisissant sa concubine, il la découpa, membre par membre, en douze
morceaux, puis il l’envoya dans tout le territoire d’Israël. Il donna des ordres
à ses émissaires, disant : ‘Vous direz à tous les Israélites : A-t-on
jamais vu pareille chose ?’
Tous les Israélites sortirent donc, et, comme un
seul homme, la communauté se réunit. Les chefs de tout le peuple, toutes les
tribus d’Israël assistèrent à l’assemblée du peuple de Dieu, 400000 hommes de
pied, sachant tirer l’épée. Les tribus d’Israël envoyèrent des émissaires dans
toute la tribu de Benjamin pour dire : ‘Maintenant, livrez ces hommes, ces
vauriens, qui sont à Gibéa, pour que nous les mettions à mort et que nous
fassions disparaître le mal du milieu d’Israël.’ Mais les Benjaminites ne
voulurent pas écouter leurs frères les Israélites.
Les gens d’Israël se mirent en marche pour monter à
Béthel, pour consulter Dieu : ‘Qui de nous montera le premier au combat
contre les Benjaminites ?’ Et Yahvé répondit : ‘C’est
Juda qui montera le premier.’ Au matin, les gens d’Israël s’avancèrent au
combat contre Benjamin. Mais les Benjaminites sortirent de Gibéa et, ce
jour-là, ils massacrèrent 22000 hommes d’Israël. Les Israélites vinrent pleurer
devant Yahvé jusqu’au soir, puis ils consultèrent Yahvé en disant :
‘Dois-je encore engager le combat contre les fils de Benjamin mon frère ?’
Et Yahvé répondit : ‘Marchez contre lui !’ Le second jour les
Israélites s’approchèrent donc des Benjaminites, mais, en cette seconde
journée, Benjamin massacra encore 18000 hommes des Israélites. Alors tous les
Israélites et tout le peuple s’en vinrent à Béthel, ils pleurèrent, ils
s’assirent là devant l’Arche d’alliance de Yahvé, ils jeûnèrent toute la
journée jusqu’au soir et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de
communion devant Yahvé ; puis les Israélites consultèrent Yahvé. Et Yahvé
répondit : ‘Marchez, car demain, je le livrerai entre vos mains.’
Alors Israël plaça des troupes en embuscade tout autour de Gibéa. Les
Benjaminites se dirent : ‘Les voilà battus devant nous comme la première
fois’, mais l’embuscade d’Israël surgit de sa position. Yahvé battit
Benjamin devant Israël et, en ce jour, les Israélites tuèrent à
Benjamin 25100 hommes. Ceux de l’embuscade se hâtèrent de s’élancer contre
Gibéa ; ils se déployèrent et passèrent toute la ville au fil de l’épée,
femmes et enfants compris. Six hommes de Benjamin tournèrent le dos et
s’enfuirent au désert. Ils y restèrent quatre mois.
Fatigué, le peuple se rendit à Béthel, il resta là
assis devant Dieu jusqu’au soir, poussant des gémissements et pleurant à gros
sanglots : ‘Yahvé, Dieu d’Israël, disaient-ils, une tribu a été retranchée
d’Israël. Que ferons-nous pour procurer des femmes à ceux qui restent, puisque
nous avons juré par Yahvé de ne pas leur donner de nos filles en
mariage ?’ Ils s’informèrent alors : ‘Quel est celui d’entre les
tribus d’Israël, qui n’est pas monté auprès de Yahvé à Miçpa ?’ Et il se trouva
que personne de
Yabesh en Galaad n’était venu au camp, à l’assemblée. Alors la communauté y
envoya 12000 hommes d’entre les vaillants avec cet ordre : ‘Allez, et vous
passerez au fil de l’épée les habitants de Yabesh en Galaad, ainsi que les
femmes et les enfants mais vous laisserez la vie aux vierges.’ Et c’est ce
qu’ils firent. Parmi les habitants de Yabesh de Galaad ils trouvèrent 400
jeunes filles vierges, et ils les emmenèrent au camp. Toute la communauté
envoya alors des émissaires aux six Benjaminites qui se trouvaient au Rocher de
Rimmôn pour leur proposer la paix.
Benjamin revint alors. On leur donna les femmes de Yabesh. Les Israélites se
dispersèrent alors pour regagner chacun sa tribu et son clan, et s’en
retournèrent de là chacun dans son héritage. En ce temps-là il n’y avait pas de
roi en Israël et chacun faisait ce qui lui semblait bon. »
Cette histoire est probablement réelle. Les détails sont crédibles car
peu flatteurs pour Israël. On aurait du mal à y discerner un travail d’embellissement.
Les femmes y sont traitées comme du bétail par des hommes durs dont pas un seul
n’est juste. Ils veulent la guerre. Ils l’ont. Dieu l’accepte et se fait même
pour eux prophète. Il leur parle mais ses paroles sont ambiguës. Eux se
trompent, ne comprennent pas. Le malheur fond sur eux tous. De tout ce malheur,
une seule chose apparaît : l’humanité est bien pitoyable.
Or ces hommes du passé sont à l’image de tous les habitants de la terre,
de nous-mêmes. Nous sommes persuadés que nous sommes justes car nous n’avons
jamais été confrontés à notre vraie nature. Il suffit de rester sans nourriture
deux jours pour voir se réveiller en nous la réalité. Qui pourra nous faire
comprendre à quel point nous ne sommes que de pauvres pécheurs ?[94] Comment fait Dieu pour révéler à l’homme installé sur la terre ce qu’il
ne veut pas voir ? Il le soumet à des expériences négatives. Parmi elles,
la guerre extérieure manifeste la proximité de sa propre fin, de ses limites.
Non seulement chaque individu est amené à penser à sa propre mort mais aussi
les nations et les religions dont le destin dépend du sort des armes.
Au contraire, il arrive que la paix civile rende l’homme et les religions
inconscients de la précarité de leur être. On peut alors se croire juste, tout
en se complaisant dans l’égoïsme et la vanité. Une fausse paix peut conduire
l’homme ou la religion à oublier Dieu, le jugement dernier, la nécessité de
bien se comporter, la nécessité d’être sans illusion sur soi. La recherche de
Dieu dans la prospérité est exceptionnelle, à cause de la nature sensible de
l’homme.
Le mal et les guerres perpétuelles qui règnent dans le monde provoquent chez beaucoup le rejet et la haine de Dieu. Mais, curieusement, cet effet est particulièrement visible chez ceux qui n’ont jamais subi la guerre. Ils accusent Dieu car ils n’ont pas encore eu l’occasion de prendre conscience que la guerre naît d’abord dans leur propre cœur.
Lorsqu’un homme frappé dans ce qu’il aime le plus rejette Dieu, c’est différent. Ce sentiment part alors non de l’orgueil mais de l’expérience. Il ne peut comprendre pourquoi il a été atteint. Il ne peut saisir que c’est en vue d’un bien éternel. Car la clef de tout est là : s’il n’y avait pas de vie après la mort, si le destin des hommes s’arrêtait ici-bas, alors l’histoire biblique de l’homme de Galaad qui livra sa concubine amoureuse afin de ne pas être lui-même violé, n’aurait pas de sens. Elle serait simplement réaliste et désespérée. Mais s’il est vrai que cette vie n’est pas la vraie vie, tout prend sens. S’il est vrai que Dieu recueille de l’autre côté du voile toutes ces vies détruites, qu’il les réconforte, leur explique pourquoi il a paru les tromper, alors il y a une justice. « Si j’ai permis tout cela, c’était pour vous sauver. » L’homme agit un peu comme le petit enfant, qui recevant de son père une punition qui lui paraît injustifiée, n’en découvre que plus tard le bien-fondé. De même les hommes, en découvrant au moment de leur mort la vraie raison du gouvernement divin sur eux, n’en éprouveront plus de scandale, sauf si l’orgueil est resté en eux. Telle est la finalité de la souffrance. Telle est la raison ultime de toutes les peines que subissent les hommes en ce monde. Le peuple juif en est témoin : les justes massacrés à Auschwitz ont appris dans leur chair à appeler Dieu, leur Sauveur.
Parmi
les chrétiens, beaucoup refusent
cette interprétation judaïque du mal[95]. Dieu ne peut de lui-même permettre ou vouloir le malheur, même pour
éduquer les hommes. Le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu de liberté ! Pour
ces théologiens, tout le mal sans exception vient du pari que Dieu a
fait : il a laissé l’homme libre. Alors certains en ont profité pour faire
le mal. Cette conception n’est qu’en partie réaliste. Elle expliquera sans
problème le mal dont l'homme est source ou qui frappe un homme maître de ses
actes comme Hitler. Il sème le vent et récolte la tempête. C’est justice. Mais
elle n’expliquera jamais des maux qui ne concernent en aucun cas la
liberté : la mort de ces nourrissons qu’à Auschwitz, par manque de place
dans les chambres à gaz, on jeta vivants dans le feu.
« Puisque tu n’auras pas servi Yahvé ton Dieu
dans la joie et le bonheur que donne l’abondance de toutes choses, Yahvé suscitera
contre toi une nation lointaine, des extrémités de la terre, comme l’aigle qui
prend son essor. Ce sera une nation dont la langue te sera inconnue, une nation
au visage dur, sans égard pour la vieillesse et sans pitié pour la jeunesse.
Elle mangera le fruit de ton bétail et le fruit de ton sol, jusqu’à te
détruire, sans te laisser ni froment, ni vin, ni huile, ni portée de vache ou
croît de brebis, jusqu’à ce qu’elle t’ait fait périr. Elle t’assiégera dans toutes
tes villes, jusqu’à ce que soient tombées tes murailles les plus hautes et les
mieux fortifiées, toutes celles où tu chercheras la sécurité dans ton pays.
Elle t’assiégera dans toutes les villes, dans tout le pays que t’aura donné
Yahvé ton Dieu. »[96]
Une troisième objection va
encore plus loin. L’islam s’est implanté dans des nations qui avaient été
originellement gagnées au Christ, supprimant les Églises patriarcales en
convertissant ses fidèles. Dieu peut-il avoir béni* un tel désastre pour son
Évangile ? L’islam prêche une
forme de guerre sainte qui lui permet de réussir son implantation par le calcul
politique. La méthode habituelle est celle de l’impôt de capitation. Dans son Dictionnaire élémentaire de l’islam, Tahar Gaïd reconnaît et justifie cette pratique de l’islam qui ne
consiste pas directement à convertir par la force mais par l’usage de l’impôt
et par l’établissement des non-musulmans dans l’état de citoyens de seconde
zone : « Il ne fait aucun doute, dit-il, que l’islam soumit à son
influence de nombreuses contrées. La raison fondamentale de cette expansion
territoriale ne visait pas tant la domination politique qu’à combattre le mal
et l’iniquité, à établir la paix et la justice, en d’autres termes à rendre à
Dieu ce qui lui est dû sur terre. Les populations conquises étaient libres de
ne pas embrasser l’islam puisque trois possibilités leur étaient offertes avant
le déclenchement des hostilités (sic) : la conversion, le paiement d’un
tribut qui assurerait leur protection, et en troisième lieu la guerre. De plus,
après la victoire, il n’y avait pas recours à la violence pour imposer la nouvelle
foi. La soumission à l’islam était un acte volontaire. Les populations avaient
accueilli l’islam comme une religion libératrice, véhiculant les idées propres
à relever la dignité humaine bafouée par le despotisme féodal et la tyrannie
politique sous lesquels elles étaient écrasées. Les grands hommes de l’islam
qui portèrent haut l’étendard de la foi islamique ne pouvaient pas s’opposer à
la théorie coranique qui n’habilite pas le croyant à faire usage de la force
pour rallier les non-musulmans à leur religion : ‘Si Dieu l’avait voulu,
il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il égare qui il veut ;
il dirige qui il veut. Vous seriez interrogés sur ce que vous faisiez.’[97] » Par cette méthode, insensiblement, les chrétiens et les Juifs
manquant de ferveur basculaient dans l’islam.
Mais une telle pratique, pourtant canonisée par le Coran, est-elle digne
de Dieu ? Selon l’Apocalypse[98], il s’agit plutôt d’une action du mal : « Nul ne pourra rien
acheter ni vendre s’il n’est marqué du nom de la Bête. » Comme je l’ai déjà dit, Dieu peut bénir
une telle religion, malgré ses pratiques douteuses, pour le salut des âmes. En
effet, historiquement, le christianisme a eu deux propriétés sur les peuples.
D’abord, il les libère. Il leur donne une maturité spirituelle et
intellectuelle qui se traduit vite dans une grande prospérité matérielle. En un
second temps, à cause de la nature d’un peuple devenu riche et cultivé, le
christianisme a pour effet de provoquer un abus de la liberté au profit de la
plus grande décadence. Saint Paul le dénonçait déjà à son époque[99] : « Vous en effet,
mes frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement, que cette
liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair. Mais par la charité
mettez-vous au service les uns des autres. »
À
chaque fois qu’une nation chrétienne est ainsi entrée en décadence, les
guerriers de l’islam sont arrivés et, tel l’aiguillon de la peur, ont forcé les
chrétiens à retrouver leur ferveur ou à disparaître. Par deux fois, Dieu a
préféré livrer des nations chrétiennes à l’esclavage de la soumission ou de la
conversion à l’islam, plutôt que de laisser les fidèles chrétiens se perdre
pour l’éternité (Afrique du Nord puis Grèce asiatique). Cela pourrait se
produire une troisième fois. L’Occident est, de façon très forte, confronté à
cette décadence de la liberté chrétienne. Au nom de quoi en effet voit-on de
nos jours les plus grandes abominations se réaliser dans un calme civique total,
contre ce qu’il y a de plus précieux au monde, à savoir ses enfants, son
conjoint et ses vieux parents ? La famille s’écroule au nom du bonheur
individuel devenu dieu, au nom de l’équilibre de sa vie, de son plan de
carrière ou de ses loisirs. Or, comme par hasard, en même temps que mai 68
faisait de l’hédonisme sa sagesse jusqu’à la mort, il introduisait les guerriers
de l’islam dans ses banlieues. N’y-t-il pas là une surprenante coïncidence, « un esprit d’erreur venant de Dieu »[100],
dirait la Bible ?
« Celui-là
sera un onagre d’homme, sa main contre tous, la main de tous contre lui, il
s’établira à la face de tous ses
frères. »[101] « Voici la durée de la vie d’Ismaël : 137
ans. Puis il expira ; il mourut et il fut réuni à sa parenté. Il habita
depuis
Havila jusqu’à Shur, qui est à l’est de l’Égypte, en allant vers l’Assyrie. Il
s’était établi à la face de tous ses frères. »[102]
Au viie siècle, au moment de la naissance de
l’islam, l’Église chrétienne d’Orient était la religion officielle de l’Empire
romain. Dans sa partie africaine, elle attiédissait le feu de la charité par un
souci trop grand des choses du pouvoir. On adhérait trop souvent à tel ou tel
courant de foi à cause de l’empereur de Constantinople, sans souci réel de la
vérité. On s’enlisait dans des discussions théologiques sans fin qui avaient
abouti à l’apparition de multiples hérésies et schismes. L’islam eut donc peu
de peine à amener à elle les foules, à cause de la ferveur de sa jeunesse. Ceux
qui ne se convertirent pas après la conquête militaire furent respectés mais
réduits à l’état de citoyens de second ordre. Le monde fut donc divisé en deux
religions qui, si elles voulaient subsister, devaient sans cesse réformer leurs
mœurs et convertir leurs regards vers Dieu. L’islam reçut une part de gloire.
Il donna son unité au monde arabe. Par la conquête et une habile occupation, il
déchristianisa le Proche-Orient et l’Afrique du Nord. L’islam édifia une
civilisation originale : agriculture, industrie, commerce se développèrent.
De grandes cités musulmanes eurent bientôt leurs universités célèbres, de
riches bibliothèques: théologiens, philosophes, savants s’y rencontrèrent.
Quant à la genèse de l’islam, elle est la réalisation de la prophétie faite par
Dieu à propos d’Ismaël[103] : « Il s’établira à la face de tous ses frères. »
L’islam n’échappa pas au gouvernement de ce Dieu qui aime l’humilité.
Devenue puissante en quelques années, cette religion nouvelle s’était répandue
de l’Égypte à l’Inde. Parce que l’homme est homme, partout où il réussit, les
chefs musulmans furent contents d’eux. Ils se croyaient dignes du paradis. Le
pouvoir leur faisait perdre la tête. Les musulmans se prirent pour les maîtres
de l’univers. Dieu les divisa donc, très vite, avec l’urgence et la force qui
conviennent à cette religion de la guerre : Sunnites*, chiites*,
ismaéliens sont nés dans le sang et le meurtre des luttes de pouvoir.
Sept siècles plus tard, une deuxième fois, l’islam emporta la victoire
sur un christianisme devenu tiède. Ce fut la perte de
Byzance et de l’Empire romain d’Orient tout entier. Celui qui va en Turquie
constate avec tristesse que bien des mosquées sont des églises reconverties. La
cathédrale sainte Sophie est, pour toute âme orthodoxe*, un mur des
lamentations. Mais les orthodoxes* furent guéris de leurs byzantinades sans fin.
Le fait que l’Église ait
pratiquement disparu en Afrique du Nord et dans d’autres régions du monde pour
être remplacée par l’islam est un désastre, du moins en ce qui concerne la
connaissance et l’amour immédiat de Jésus à court terme. Pourtant, pour celui
qui sait regarder avec le regard de la foi et avec la distance de Dieu, il est
certain qu’il en sortit du bien pour la vie éternelle. Ce fut un bien pour
l’Église qui, divisée et diminuée, en sortit moins sûre d’elle-même, plus
pauvre devant le mystère des permissions de Dieu. C’est un bien pour l’islam
qui l’oblige à constater que la puissance de son extension n’est pas infinie.
Quant aux musulmans qui vivent avec pureté les préceptes du Coran*, mettant au
premier plan Dieu et leurs frères humains et non la recherche du pouvoir au nom
de Dieu, ils sont disposés de l’intérieur à se tourner vers Jésus quand il se
manifeste à eux à l’heure de la mort. Dans les années qui suivirent la mort de
Mahomet (632), l’histoire sainte de
l’humanité est marquée par la pauvreté d’Églises soumises par l’islam en
Orient, mais ferventes dans leur pauvreté, et d’une Église qui, tel le levain
dans la pâte, façonne les peuples d’Occident.
Ce fut aussi un
bien pour le salut des âmes. Les hommes avaient reçu la liberté du Christ. Ils
en avaient abusé pour la transformer en une vie dissolue dans une fausse
liberté. Soumis provisoirement sur cette terre à la soumission de l’islam, ils
furent en fait libérés. L’esclavage de ses propres turpitudes est parfois plus
lourd à porter que celui d’une religion de soumission. L’islam possède en effet
de riches valeurs spirituelles. Il ne fait pas entrer dans le salut,
c’est-à-dire dans une vie intime d’amour pour Dieu, mais il y dispose.
Les musulmans
peuvent devenir de bons serviteurs de Dieu, humbles et attentifs à sa parole.
Pour le moment, ils nient que Dieu ait un fils, non par haine de Dieu mais à
cause de leur zèle de la grandeur de Dieu.
Que se passera-t-il à l’heure
de leur mort, lorsque le Christ leur apparaîtra, accompagné de la Vierge Marie
et de leur Prophète Mahomet ? Refuseront-ils obstinément de le reconnaître
comme Dieu fait homme s’il se présente à eux comme tel ? Seul une obstination
totale dans l’erreur, donc un orgueil incompréhensible pourrait justifier une
telle attitude[104]. Pour la théologie catholique, le cinquième blasphème contre l’Esprit
Saint, l’obstination, est aisé à
comprendre: tout homme qui, face à face avec Jésus, s’obstine à maintenir son
choix définitif et lucide dans le sens de son égoïsme, se met librement en
enfer. Et son enfer est éternel car, dans la lumière de Jésus, le choix est
arrêté pour toujours. Il n’y a pas de fin à l’enfer car la personne obstinée
veut demeurer sans fin dans son péché.
Les musulmans
sont donc disposés à accueillir favorablement la plénitude de la révélation
chrétienne, lorsqu’elle leur apparaîtra à la fin du monde. Il est convenable de
penser que cette religion a été bénie à cause de la confiance d’Abraham,
c’est-à-dire à cause de son attitude très humble et prête à accepter tout de
Dieu parce qu’il est Dieu.
Parallèlement, des centaines de millions d’hommes vivent loin de l’Évangile sur des continents non encore visités par les missionnaires. Pourquoi l’évangélisation des peuples fut-elle si difficile et incomplète ? Les Actes des apôtres montrent que l’Esprit Saint ne voulut pas que l’Évangile soit annoncé tout de suite partout. « Paul voulut aller en Asie mais l’Esprit Saint l’en empêcha. »[105] Cela peut nous paraître scandaleux mais c’est un fait qui explique aussi pourquoi Jésus a tant tardé après le péché originel à s’incarner. Aussi effrayant que cela paraisse pour des chrétiens, l’Esprit n’a jamais voulu que le monde d’ici-bas soit totalement chrétien. De même, il ne voudra jamais qu’il soit entièrement musulman[106]. Qu’on se rappelle à cet égard que la Chine, et son milliard d’habitants, n’est pas chrétienne aujourd’hui à cause d’un malentendu papal et d’un conflit entre jésuites et dominicains. L’Empereur de Chine voulait bien adhérer à la foi, entraînant à sa suite tout son peuple, dans les mains de ses astronomes jésuites. Mais les conditions qu’il y mettait furent dénoncées au pape comme paganisantes par des dominicains trop sourcilleux (peut-être jaloux). N’allons pas trop vite charger ces religieux de la perte de ce peuple. Dieu qui est maître de toute chose sait ce qu’il fait en permettant ce contretemps[107]. Face aux non-chrétiens, l’Église ne peut s’endormir sur ses conquêtes. Le salut de ceux qui ne connaissent pas encore l’amour de Dieu ne peut que l’inquiéter et augmenter en elle prière et zèle pour Dieu. De plus, n’étant pas maîtresse du monde entier, elle se souvient qu’elle doit rester modeste.
Quant aux païens, s’ils ne sont pas encore dans la bergerie de Jésus, ils ont leur propre chemin conduisant au salut qu’ils ignorent encore[108]. Dieu est maître de l’histoire. Il dose toute chose, y compris la permission qu’il laisse à ce que nous appelons le mal (quand il s’agit d’autres formes religieuses que la nôtre).
Prenons l’exemple du pire des paganismes, celui qui parfois va jusqu’à rendre un culte à des démons sanguinaires. C’est encore la main de Dieu qui permet cela. Si ces païens ne savent pas encore que Jésus est le Créateur fait homme, ils l’apprennent au moment de leur mort par la prédication du Christ lui-même qui leur apparaît[109]. Les chemins de la pire des superstitions servent Dieu pour leur salut car lorsque des peuples écrasés par la domination des sorciers dont la puissance vient du démon, découvrent à l’heure de la mort la liberté de l’Évangile, ils se convertissent en masse.
À ce propos, je voudrais rappeler ici l’une de ces mystérieuses permissions de Dieu qui aboutit au salut éternel de grandes nations païennes, quoiqu’à leur perte sur la terre (une véritable fin, apocalyptique, de leur monde). L’histoire nous montre que ce n’est pas la première ni la dernière fois qu’une prophétie à la fois étonnement proche de la réalité et trompeuse[110] dans sa lettre aboutit à la ruine politique d’une nation, donc à son humiliation. Quel exégète biblique accepterait comme authentique une histoire racontant comment Dieu livra un empire de dix millions d’âmes, aussi puissant que l’empire romain… à une armée composée de moins de deux cents guerriers ? Ce n’est pas la Bible qui rapporte cette histoire mais les annales du xvie siècle. Elle concerne l’empire des Incas. Les chroniqueurs espagnols, pour expliquer cette victoire inouïe, rapportent que ce peuple religieux croyait en une prophétie : « Des dieux portant la barbe, montés sur de grands cerfs viendront de l’Orient et apporteront le salut. » Les Indiens d’Amérique du sud sont heureux d’avoir reçu le christianisme. Ils ont été délivrés à la fois des sacrifices humains et du culte des démons grimaçants. Mais ils se souviennent de la façon dont Francisco Pizarro, accompagné de cent soixante aventuriers espagnols, massacra le 16 novembre 1532 en deux heures, par traîtrise, la fleur de leur armée. Le dieu de Pizarro était l’or. Mais, caché dans ce sillage de sang, le Christ se donna aux Indiens.
On raconte qu’avant d’être exécuté, l’empereur inca Atahualpa se vit proposer le baptême par l’aumônier. Il le refusa en disant que si le paradis était dirigé par Jésus-Christ, dieu de ces guerriers adorateurs de l’or, il préférait aller en enfer avec ses idoles[111]. Il agit bien, selon sa conscience, selon cette parole de Jésus[112] : « Eh bien ! Je vous dis que beaucoup viendront du levant et du couchant prendre place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le Royaume des Cieux, tandis que les fils du Royaume (les chrétiens pervers) seront jetés dans les ténèbres extérieures : là seront les pleurs et les grincements de dents. » Si le peuple inca a obtenu le salut, ce n’est certainement pas au sens terrestre du terme.
Nous voudrions une efficacité immédiate et terrestre d’un christianisme en profondeur et en nombre d’adhérents. Dieu ne désire qu’une chose, que tous soient sauvés par l’amour de son Fils. Et puisqu’un christianisme fort au plan social contient des chrétiens fiers politiquement et des clercs sûrs d’eux, à tout point de vue il préférera un christianisme faible, divisé, frappé d’hérésies, honteux des péchés de ses fils perdus mais plus conscient de sa pauvreté.
Le Moyen Âge de la beauté et de la peste
« Lorsque l’Agneau de
Dieu ouvrit le quatrième sceau, j’entendis le cri du quatrième Vivant :
‘Viens !’ Et voici qu’apparut à mes yeux un cheval verdâtre ; celui
qui le montait, on le nomme : la Mort ; et l’Hadès le suivait. Alors,
on leur donna pouvoir sur le quart de la terre, pour exterminer par l’épée, par
la faim, par la peste, et par les fauves de la terre. »[113]
Abordons quelques autres exemples de la fin du monde telle qu’elle fut vécue par les générations précédentes. Au Moyen Âge, l’Occident protégé de la domination de l’islam* voit se développer une civilisation chrétienne. La vie quotidienne des peuples est façonnée par la foi. Les signes de cette richesse spirituelle sont encore visibles dans nos villes. Les cathédrales gothiques élèvent leurs flèches vers le ciel car on cherchait Dieu à cette époque. C’est aussi l’âge de la floraison de la théologie à travers les grandes Sommes.
Dieu regardait cette civilisation non seulement de l’extérieur mais surtout à travers chacune des âmes qui seules comptaient à ses yeux. Il voyait beaucoup de bien mais aussi, c’est fatal, beaucoup de péchés. Pourquoi faut-il que la paix et la réussite religieuse charrient avec elles tant d’orgueil, de certitude de tenir le Ciel ? Pourquoi l’homme a-t-il du mal à être réellement pauvre ? De l’existence de cet orgueil fatal, nous avons une preuve dans la constante persécution des Juifs de cette époque. Leur souvenir du Moyen Âge ne ressemble pas au nôtre. Curieusement, saint Louis de France est pour eux symbole de souffrance, d’errance et de persécution permanente. Or, la haine de ce petit peuple, nous le montrerons, est toujours le signe de la présence, dans une civilisation, d’un amour arrogant de sa propre réussite. Dans une unité religieuse ou nationale, leur petit nombre représente une insupportable résistance spirituelle, un coin de différence. Ils étaient une épine dans l’idée qu’on se fait d’une chrétienté pure et universelle.
Si les chrétiens du Moyen Âge ne discernaient pas leur orgueil, Dieu le voyait. Alors, afin de sanctifier cette génération en danger, il permit la multiplication des guerres, des famines. « Il faut que cela arrive, ne vous alarmez pas », avait-il prévenu dans l’évangile[114]. Il autorisa même que l’islam vienne menacer de très près le magnifique temple de l’Occident chrétien. Les premières croisades étaient une nécessité vitale pour soutenir la chrétienté d’Orient attaquée militairement. Elles ressemblent à tout ce qui se fait à cette époque. Elles sont un élan de foi et de zèle pour Dieu, mélangé à la soif pour la gloire et la possession. Leur réussite puis leur échec ne représentent somme toute que l’action habituelle et mystérieuse de Dieu qui apprend l’humilité à son peuple.
Mais comment expliquer ce qu’il permit à partir de l’année 1347, alors même que la civilisation chrétienne atteignait son apogée ? En cette année, trois galères s’approchèrent par escale de l’Europe, en provenance de Crimée, amenant avec elles le plus terrible des passagers clandestins, la peste. Le fléau, qui sévissait à l’état endémique dans les steppes d’Asie Orientale, se répandit inexorablement au gré des escales, se transmettant de port en port, de bateau en bateau, frappant aveuglement le musulman comme le chrétien. En deux ans (1348-1350), la peste tuera un tiers de la chrétienté latine. Le bilan est pire en proportion que les guerres mondiales modernes. Pendant plusieurs siècles et de façon massive jusqu’en 1722, la peste couvera tel un feu jamais éteint, puis éclatera en de violentes poussées, réapparaissant tous les huit, dix ou quinze ans. Les âmes en sortiront profondément marquées. Au joyeux optimisme du début du Moyen Âge succèdent les danses macabres de la période sans nom. Pourquoi Dieu permit-il une catastrophe d’une telle ampleur, détruisant les élites des villes, faisant tourner en amertume morbide l’œuvre chrétienne entreprise pour lui ? Rappelons qu’il pouvait arrêter le fléau par sa puissance comme il le montra maintes fois par les miracles. Pourquoi aussi une maladie comme celle-là, la « male mort » comme on l’appela à l’époque puisqu’elle ne laisse même pas le temps de se confesser avant de mourir ? Pourquoi permet-il jusqu’à aujourd’hui famines et maladies, guerres et ruine de tout, même de ce qui est bon sur la terre ? C’est la question que soulève avec larmes l’apocalypse de saint Jean* sous le symbole des sept mystères scellés que nul ni au Ciel ni sur la terre ne peut ouvrir, sauf l’Agneau de Dieu. Le dernier de ces mystères, le silence de Dieu[115], fut sans doute le plus terrible pour ces pauvres familles détruites par la peste.
Dieu tient tout entre ses mains. Chaque âme brisée par une vie courte et douloureuse était accueillie et recevait l’explication de tout par la vision de sa croix, lui montrant en un seul regard ce qu’elle serait devenue si elle n’avait pas souffert. Alors ces âmes devenues pauvres entraient au Ciel, là où il n’y a plus de larmes, « où on oublie les angoisses anciennes, où l’on ne se souvient pas du passé de douleur »[116] si ce n’est pour en rendre grâce, puisque c’est grâce à cette croix, vécue ou non dans la foi chrétienne qu’on est si proche de Dieu au Ciel. La peste, la guerre de Cent ans marquèrent les xive et xve siècles en Europe. De même, par la peste, chaque nation reçut sa part de croix et put mesurer à quel point l’homme est peu de chose. Ainsi furent sanctifiées ces générations.
[Chose
probable]
Pourtant, renaissant sans cesse à chaque génération, la bête blessée de l’orgueil[117] repousse. Elle est plus forte et dirige les nations humaines. Ainsi, à la fin du xve siècle, alors que la vie humaine restait fragile et courte, les théologiens catholiques élaboraient des systèmes théologiques rigides où la règle de la foi était conservée à travers beaucoup de menaces, parfois des menaces sur la vie même de celui qui pensait autrement, où la défense de la vérité s’accompagnait d’un goût du luxe matériel, d’un culte pour la beauté. Le monde de la Renaissance est comme toutes les époques un mélange de ce qu’il y a de mieux et de pire dans l’homme. Mais, pour ce qui est de l’Église, encore maîtresse du monde occidental mais déjà contestée en raison des abus de ses hommes de pouvoir, le bilan est ambigu. Devant les excès des papes soucieux de construire de grands temples pour Dieu (et pour que leur nom demeure), des voix s’élevaient et protestaient. De grands saints, poussés par l’Esprit de Dieu, sentaient l’approche du malheur et réclamaient une réforme de l’Église. Mais la décadence était profonde, et plus profond encore était la méconnaissance du clergé catholique vis-à-vis de l’Évangile. L’erreur ne se situait pas dans les dogmes gardés infailliblement par l’Église en raison de la promesse faite à Pierre*. Elle se situait dans l’enseignement concret de l’Évangile, au jour le jour, et dans sa pratique.
En 1514, le dominicain Tetzel avait entrepris de persuader les fidèles que le salut s’opère aisément par les oeuvres. II proposait « les passeports pour franchir l’océan en furie, et arriver tout droit au paradis ». Il utilisait volontiers le dicton : « Sitôt l’argent tinte dans la cassette, sitôt l’âme en faveur de qui l’on donne saute hors du purgatoire ». Le Ciel voyait arriver à l’heure de la mort des hommes bardés de sacrements et d’indulgences, assurés ainsi de leur salut alors que leur cœur ne se souciait que d’eux-mêmes. Que sert à l’homme un sacrement reçu à l’heure de sa mort s’il le prend comme un moyen quasi magique d’aller au Ciel ? Si ce n’est pas l’amour mais la peur de souffrir en enfer qui guide sa vie chrétienne, à quoi lui servent les sacrements ? Le mal était si profond et si dangereux pour le salut de ceux qu’il aimait que Dieu agit. Il utilisa encore son habituelle sagesse : « Il compte les jours des constructions humaines, il les pèse pour voir si elles ont une utilité pour le salut, il les divise et fait naître l’humilité. »[118]
En Allemagne, il trouva un jeune moine augustin, prêtre depuis peu de temps (1507). Son nom était Martin Luther. Il était rongé par l’angoisse de son salut à la vue de ses propres péchés. Lors de son noviciat, il avait été nourri d’une théologie en apparence pleine de dignité, mais hélas fallacieuse. Le salut était promis à ceux qui par leurs œuvres de piété et leurs vertus méritaient le Ciel[119]. Il avait donc essayé d’être vertueux mais tous les jours, il retombait dans les mêmes travers. Il lisait, méditait, cherchait une règle capable de rendre un homme certain de son salut. Dans saint Paul, il lut que l’homme sera sauvé par sa foi, c’est-à-dire par sa confiance en Dieu. Ce fut pour lui un baume de réconfort. Une paix totale l’envahit. À partir de ce jour, il s’opposa aux prédicateurs vendant des indulgences. Poussant plus loin son intuition, son successeur Calvin élabora une théorie selon laquelle ceux qui meurent sans avoir cette confiance en Dieu sont à coup sûr damnés, non de par leur faute mais par un choix mystérieux de Dieu qui ne leur a pas communiqué sa grâce.
Cette thèse excessive, en contradiction avec ce qu’est Jésus, lui fut suggérée par des écrits mal interprétés de saint Augustin. Il n’eut pas l’idée que Dieu proposait sa grâce à tout homme… à l’heure de la mort.
Le protestantisme fut compris par les catholiques comme une véritable hérésie en ce sens qu’il faisait sienne une erreur importante pour le salut. L’Église catholique enseigne que Dieu promet la vie éternelle à celui qui ose l’aimer comme un ami, dans une réciprocité d’épouse adulte. Les théologiens protestants semblaient réduire l’amour à l’attitude confiante d’une épouse incapable d’aider son aimé, en état de minorité légale, trop incapable au plan intellectuel et moral pour penser, hériter et simplement prendre la parole à table. Dieu ne fut bien sûr pas à l’origine d’une telle perte. Luther l’inventa lui-même, à travers une réflexion sincère mais trop nourrie des erreurs du personnel ecclésial catholique de son époque. Luther n’eut pas assez d’audace pour vérifier auprès du rocher de Pierre, ce qu’enseigne réellement la Sainte Église.
Pour comprendre pourquoi Dieu bénit cette Réforme après sa naissance, lui permettant de s’étendre dans près de la moitié du catholicisme, il faut se rappeler la très belle remarque de saint Jean Chrysostome, citée plus haut[120]. C’est ainsi que pense Dieu. Que sert à l’homme d’avoir la plénitude de la révélation s’il s’en sert mal ? S’il y a une hérésie dans la Réforme, il y existe aussi des richesses immenses en oraison, lecture de la Bible, liberté des enfants de Dieu.
Le peuple des protestants trouve souvent l’amour dans l’Écriture Sainte, au-delà de la théologie complexe de ses docteurs. Mais Dieu, en divisant l’Église d’Occident de l’intérieur, fit sortir du bien[121], obligeant le catholicisme à se réformer d’urgence, laissant le protestantisme dans la pauvreté de ses propres divisions, suscitant par les compétitions entre ces confessions un zèle nouveau pour Dieu et les missions[122]. C’est pour ce bien-là et surtout pour l’humilité que suscite l’humiliation que Dieu veut parfois la division. La Bible illustre magistralement cette sagesse par l’histoire de la division d’Israël* en deux nations après la mort de Salomon[123]. Parce qu’il vaut mieux une Église divisée qu’une Église orgueilleuse, il se peut que l’unité des chrétiens (tant désirée depuis quelques années par le courant de l’œcuménisme) ne se fasse que dans l’humiliation extrême vécue au temps de l’Antéchrist* ou encore au moment du retour glorieux du Christ.
Quant aux hommes qui s’adonnèrent à la violence de part et d’autre dans les guerres du fanatisme religieux, qu’advint-il d’eux ? Ils furent disposés au salut par cela même qui faisait leur péché. Jésus nous a prévenus dans les Évangiles[124] : « Celui qui prend l’épée périt par l’épée », ce qui signifie qu’il récolte de sa violence un salaire de souffrance finalisé par sa conversion. Pour ceux qui moururent dans cette violence, sans s’être repentis, Jésus agit comme il le fait pour tout pécheur, comme il le fit pour saint Paul au jour de sa conversion. Il les enveloppe de sa lumière, celle de la vérité sur leur péché, il les fait tomber à terre, par la mort qui les effraie, puis il leur parle de sa voix : « Pourquoi me persécutes-tu ? »[125] Devant cette voix, Paul, de persécuteur religieux devint après trois jours de prostration (correspondant par symbole au purgatoire qui éduque les violents repentis avant leur entrée au Ciel) le plus grand des serviteurs de l’Évangile. Il ne refusa pas la conversion car, s’il agissait ainsi, c’était sincèrement pour Dieu, avec un zèle mal éclairé. Il en fut de même pour la plupart des sectateurs de guerres de religions et même aujourd’hui pour les fanatiques de toute confession.
Nous pourrions prolonger à l’infini notre regard sur l’histoire sainte de l’humanité et faire les mêmes remarques par rapport aux situations multiples d’aujourd’hui. Il n’y a pas de nos jours davantage de malheurs physiques que jadis, au moins dans la partie développée du monde. Mais quand ces événements arrivent, ils peuvent être interprétés comme des signes de la fin du monde tels qu’ils peuvent s’appliquer à chaque génération. Jusqu’à la fin du monde, Dieu et ses anges combattront l’orgueil sans cesse renaissant de chaque génération. Évidemment, lorsque le mal est actuel, il est difficile voire impossible d’en parler de cette manière sans se montrer indélicat. On ne va pas près du lit d’un malade pour lui dire : « Tu apprends l’humilité ! »
Ce regard est de l’ordre de la contemplation, non de la prédication.
[Chose
certaine]
« Par suite de l’iniquité croissante,
l’amour se refroidira chez le grand nombre. Mais celui qui aura tenu jusqu’au
bout, celui-là sera sauvé. Cette bonne Nouvelle du Royaume sera proclamée dans
le monde entier, en témoignage à la face de toutes les nations. Et alors
viendra la fin. »[126]
Le monde entier rejettera la foi. C’est une prophétie souvent enseignée par les Évangiles, par Jésus lui-même, par les apôtres, dans des textes explicites et limpides. On peut être sûr qu’elle se réalisera. Voici, cités sans ordre, quelques textes convaincants :
« L’Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, certains renieront la foi pour s’attacher à des esprits trompeurs et à des doctrines diaboliques, séduits par des menteurs hypocrites marqués au fer rouge dans leur conscience. »[127]
« Sache bien par ailleurs que dans les derniers temps surviendront des moments difficiles. Les hommes en effet seront égoïstes, cupides, vantards, orgueilleux, diffamateurs, rebelles à leurs parents, ingrats, sacrilèges, sans cœur, sans pitié, médisants, intempérants, intraitables, ennemis du bien, délateurs, effrontés, plus amis de la volupté que de Dieu, ayant les apparences de la piété mais reniant ce qui en est la force. »[128]
[Chose
probable]
Une civilisation, après être passée par une longue période de ferveur religieuse, ne peut rejeter Dieu en un instant (c’est ce qu’on appelle l’apostasie*). Origène[129] le montre : « Celui qui atteint un état de perfection de la charité ne va pas abandonner et tomber subitement ; mais il est nécessaire qu’il descende peu à peu et graduellement. » Lorsqu’il s’agit d’un individu, trois étapes sont en général discernables :
1- La négligence de la prière et de la fréquentation de Dieu, perte de l’amour (Agapè).
2- L’oubli progressif du goût de Dieu, perte de la foi et de l’espérance. En conséquence, apparition d’un nouveau principe de vie centré sur le seul bonheur ici-bas.
3- Le rejet de ses commandements moraux devenus invivables car coupés de la charité qui leur donnait sens (perte de la culture chrétienne).
Il en est de même pour une nation. C’est ce que nous enseigne l’histoire de l’Occident chrétien depuis quelques siècles, depuis que l’apostasie est en marche. On appelle ce phénomène la sécularisation d’une société. On peut, de même, discerner dans son chemin trois étapes successives qui se sont préparées l’une l’autre.
La première est très ancienne puisqu’il s’agit de tous les péchés capables de refroidir la charité. Saint Jean* en parle par ces mots : « Eh bien ! Maintenant l’esprit de l’Antéchrist est déjà dans le monde. »[130] Il s’agit de tous les péchés accumulés par les fils de l’Église. Leur accumulation finit par discréditer toute parole de Dieu. Si les Fils de la lumière sont ainsi, c’est que la lumière doit être assez pitoyable.
La seconde trouve alors prise dans le cœur des hommes éloignés de la charité. Il s’agit de l’apparition de toutes sortes de doctrines nouvelles capables de promettre un bonheur sans que Dieu intervienne. Ces doctrines peuvent être nombreuses, parfois même stupides. Leur effet est de supprimer peu à peu les restes de la foi et de rendre irréversible, à cause de la compromission de certains (même minoritaires) de ses membres, le mépris pour l’organe qui porte cette foi, l’Église. Cette étape commence avec l’époque des lumières, au xviiie siècle. Les idéologies athées du xixe siècle en marquent la suite. Elle est en acte de nos jours.
Alors peut intervenir la troisième étape, celle qui propose le projet d’un monde réellement humain et viable, conduisant à la paix civile et donnant les conditions matérielles, psychologiques et même spirituelles d’un bonheur sur la terre et pour l’éternité, mais sans le vrai Dieu, celui de Jésus-Christ, de l’humilité et de l’amour jusqu’à la croix. Cette étape doit s’achever, si l’on suit la lettre des Écritures, par la révélation d’une nouvelle religion mondiale et universelle, celle du « mystère de l’iniquité ». Cette étape approche mais elle est loin d’être réalisée.
Cette description succincte et simplifiée semble laisser entendre qu’il existe un projet organisé par une secte ou un groupement humain sur plusieurs générations pour construire un monde sans Dieu. C’est ce que pensent de nombreux chrétiens face aux attaques anciennes et actuelles contre l’Église. Une telle vision relève de la fiction[131]. Parmi les hommes, bien peu sont capables d’une lucidité sur une si longue période de l’histoire future. Encore moins nombreux sont ceux qui ont une foi suffisamment profonde et une haine du projet d’amour de Dieu suffisamment lucide pour inventer pareil scénario. De fait, le seul être capable d’une telle profondeur dans le mal n’est pas un homme mais un ange d’après les mots de saint Paul : « Souvenez-vous que vous n’avez pas à lutter contre des êtres de chair mais contre les puissances des ténèbres. »[132] Le démon est certainement présent à travers cette histoire même si son rôle est invisible. Il suggère une idée à tel homme prêt à la recevoir, il tente tel groupe humain disposé à accueillir la tentation. La plupart du temps, il laisse agir le temps car l’ivraie semée pousse toute seule parmi le bon grain. Lui a un projet.
Il serait abusif et peu sain de vouloir dévoiler partout l’intervention du démon. Souvent, il se confond avec des lois psychologiques et sociologiques. L’essentiel est de connaître son projet ultime[133]. Il désire que l’humanité entière se révolte contre Dieu et maintienne sa révolte avec fermeté au moment de l’apparition glorieuse du Christ. Devant l’unanimité de la révolte, il espère que Dieu se repentira de son projet, reviendra sur sa volonté de ne donner la vision de son être qu’aux humbles. Mais le démon ne peut rien faire sans la permission de Dieu.
Regardons comment, historiquement, l’apostasie* s’est étendue sur l’Occident en trois phases successives.
[Chose
certaine car déjà réalisée]
« Par suite de l’iniquité croissante, l’amour se
refroidira chez le grand nombre. »[134]
La préparation lointaine de l’apostasie* commence donc avec les péchés des membres de l’Église. Elle est présente dès le début. Autant l’amour et l’humilité donnent envie aux non-croyants d’entendre le message qui rend le regard lumineux, autant le péché rend laid le visage du christianisme. Il faut croire que durant le temps des persécutions l’amour transparaissait davantage que l’égoïsme puisque l’Église ne cessa de croître. « Voyez comme ils s’aiment », disaient les païens. L’Église est indestructible quand le lien qui fait tout son trésor est puissant. Il s’agit de la charité qui unit à Dieu et aux frères. Lorsque cette charité n’est plus vécue (en général parce que les prêtres qui enseignent au peuple de Dieu sa volonté mettent autre chose qu’elle au centre de leur vie et de leur prédication), le danger est proche.
Curieusement, tant que l’Église est minoritaire et en croissance, les générations suivantes semblent ne pas trop lui tenir rigueur pour ses imperfections. Mais lorsqu’elle atteint la totalité du pouvoir politique, rien ne lui est passé par les générations suivantes. Sans doute mûrit-elle le jugement des peuples et, en les libérant, elle les rend capables de critique. Le clergé en particulier, à cause de quelques membres indignes, peut accumuler pour le futur une dette de mépris. Rappelons que si l’Église d’Orient fut détruite en quelques années et remplacée par l’islam*, c’est que les peuples crurent voir plus de simplicité et de sens de Dieu dans cette nouvelle religion. Mais la majorité du clergé servait-il d’abord Dieu ou d’abord l’Empire ?
Dans l’Église d’Occident, le péché qui semble à l’origine de tout est du même ordre, celui d’une relativisation de la charité. Concrètement, cette décadence commence alors que l’Église entre dans une ère de gloire. À partir du xiie siècle, elle règne en maître. Seule la communauté juive a été dispersée dans son sein pour lui rappeler qu’elle n’a pas le pouvoir jusqu’aux recoins de l’humanité. Insensiblement, les chrétiens de cette époque se persuadent de leur perfection et sainteté. Ils s’enorgueillissent et étalent leur puissance. Alors que la ferveur de la foi construit les cathédrales, en même temps, elle réduit les Juifs en esclavage[135]. C’est un signe mauvais. Il révèle un recoin sombre au cœur de la chrétienté.
On constate les plus violents effets extérieurs de cet orgueil trois siècles plus tard quand le clergé catholique perd une partie de sa puissance. Luther et la réforme produisent un schisme. Une partie des nations* chrétiennes le suivent. Alors certains membres des deux Églises sont pris pour un siècle de folie fanatique. Au cours des guerres de religions, qui sont des luttes farouches et sans pitié allant jusqu’au bûcher, ils tentent mutuellement d’imposer la Vraie Doctrine. Ce péché, commun aux réformés et aux catholiques, reste jusqu’à aujourd’hui une dette qui, malgré les actes de repentir du pape Jean-Paul II, n’a pas fini d’être payée.
La racine de ce mal était donc bien antérieure à ces guerres. Elle était
née de l’époque du succès, de la négligence pour l’amour de Dieu et du
prochain. La foi sans la charité conduit au fanatisme. Que n’a-t-on imité saint
François de Sales et sa douceur envers tous !
Toujours est-il que ces excès, obstinément maintenus par les chrétiens
pendant ces siècles, pesèrent comme un joug sur l’Occident. Voltaire en a fait,
par ses dénonciations cinglantes, souvent caricaturales (car oublieuses de
toute la sainteté, des milliers d’âmes simples et dévouées au bien), une arme
terrible contre l’Église jusqu’à la fin du monde. Jusqu’à aujourd’hui, les
sectaires de l’antichristianisme n’ont que trois concepts pour décrire la
totalité de son histoire : guerres de religion, inquisition, Galilée.
L’affaire Galilée est l’un des étendards les plus agités[136]. Il est vrai que l’un des plus grands péchés du personnel de l’Église de jadis fut la tyrannie sur les intelligences. Par peur de l’hérésie, on empêcha les hommes de penser. On soupçonna son frère dès que sa parole sembla un peu différente. Un tel carcan posé sur les intelligences se devait d’exploser. Tout excès finit par être rejeté et Voltaire fut reçu comme un libérateur. Dans la même période, d’autres penseurs se levèrent, ne trouvant plus dans leur Église rigidifiée par la peur, un lieu pour s’épanouir. On rêva d’une société plus libre où Dieu serait adoré sans contrainte, sans dogme imposé mais comme un Père (Rousseau) et un grand horloger de l’univers (Voltaire). Pour qu’apparaissent de telles idées, c’est que déjà l’Évangile et sa liberté n’étaient plus beaucoup compris. Les idées des Lumières, somme toutes innocentes, auraient pu s’évaporer devant le vrai visage de Jésus.
Malheureusement, l’Église fut atteinte par bien d’autres maladies, durables et sans cesse réapparues. Il faut citer en particulier ici le pharisaïsme : « Si tu veux être sauvé, si tu veux communier à la messe et être sauvé, sois parfait. » On entendait par là une parfaite obéissance à Dieu et à son Église à travers un comportement vertueux. Tout cela semble très bon et même très chrétien. C’est pourtant une terrible erreur et d’autant plus dangereuse qu’elle ressemble à la vérité. En effet, la vertu morale et l’obéissance n’ont de raison que l’humilité et la charité. C’est une simple question d’ordre dans l’importance des vertus mais tout en est bouleversé. Innombrables sont les chrétiens parfaits qui doivent se purifier longuement au purgatoire après leur mort tant leur âme est malade. Le jansénisme ne reçut le coup qui devait définitivement le mettre à mort qu’en 1900, grâce à une toute jeune fille, qui chantait au Seigneur dans son Carmel de Lisieux[137] : « Moi si j’avais commis tous les crimes possibles, je garderais encore la même confiance, car je sais bien que tout cela n’est qu’une goutte d’eau dans un brasier ardent ». Le mal était malheureusement durable et profond au point que, jusqu’à aujourd’hui, l’Église est considérée non comme une Vierge au cœur d’enfant (ce qu’elle est réellement en raison de l’Esprit qui la rend sainte) mais comme une femme rigide et moralisatrice.
Un livre d’un théologien protestant, L’avenir selon les prophéties de la Bible[138], permet de synthétiser ce chapitre (avec quelques corrections et ajustements nécessaires, l’auteur n’étant pas exempt de quelques préjugés anticatholiques). Ce théologien montre à quel point le principe premier du jugement de Dieu est celui de la Vie selon la grâce (humilité et charité) :
« Les chapitres 2
et 3 de l’Apocalypse nous offrent, à travers sept lettres de Jésus à sept
Églises, une vision prophétique de l’histoire de l’Église. Cette dernière y est
décrite, non pas telle que l’homme la perçoit et la juge, mais telle que la
voit celui qui a les yeux comme des flammes de feu. La déchéance morale du
christianisme, ainsi que les causes de sa corruption, sont clairement
détaillées. »
Nous
avons là le début de l’histoire de l’Église. En apparence, tout est encore en
ordre. Quelle série de points positifs le
Seigneur ne relève-t-il pas ! Mais ses yeux, qui sont comme une flamme de
feu, décèlent déjà les premiers signes du déclin : « mais j’ai contre toi que tu as abandonné ton premier
amour. » C’est là l’origine de tout éloignement. Même si les
habitudes sont encore intactes, le cœur n’est plus attaché à lui de la même manière.
De plus, les œuvres des Nicolaïtes se manifestent déjà.
Cette
lettre nous présente les grandes persécutions menées aux deuxième et troisième
siècles par les empereurs romains. « Vous
aurez une tribulation de dix jours. » Comme chacun le sait, il y
eut dix persécutions, dont la dernière dura exactement dix ans. Dieu permit de
telles souffrances pour ramener à lui le cœur de l’Église. À l’Église de
Smyrne, aucun reproche n’est adressé. Le feu de la persécution maintient les
cœurs étroitement unis au
Seigneur.
À
ce point, les circonstances ont déjà bien changé. L’Église n’est plus une
étrangère sur la terre ; bien au contraire, elle a désormais un lieu de
domicile fixe, non pas dans le désert, mais « là où est le trône de Satan ». Elle a cherché refuge
dans le monde, dans le lieu même où le prince et dieu de ce monde a dressé son
trône. Constantin le Grand, en embrassant le christianisme, l’a promu au rang
de religion d’État au prix de sa liberté. L’Église est désormais liée au
monde ; celui-ci la tient en son pouvoir et contrôle même les domaines
touchant sa foi. Elle n’est plus l’ekklésia, celle qui a été appelée
en dehors, mais elle est devenue une Église nationale, avec quelques
croyants disséminés ici et là.
Désormais,
nous ne trouvons plus seulement les œuvres des Nicolaïtes, mais ces dernières
se sont érigées en doctrine, en
dogmes. Le verset 14 nous en décrit les conséquences. Nicolaos signifie « vainqueur, ou dominateur, du peuple ».
C’est le règne du pouvoir politique dans l’espérance religieuse. La doctrine de
Balaam avait consisté à donner un conseil de perdition à des fins
intéressées ; ce conseil devait entraîner l’Église à renoncer à sa
position de peuple mis à part, pour manger des mets sacrifiés aux idoles et
s’adonner à la fornication, en communion avec les
Moabites.
Thyatire
représente le système corrompu duquel est issue ce pouvoir. Il transparaît
particulièrement dans les déviations de la papauté du Moyen Âge. La cause n’en
est pas le système papal lui-même, mais le pouvoir politique absolu qu’il
obtient de l’histoire à cette époque. La gloire enfle… Jésabel caractérise désormais
l’assemblée. La doctrine chrétienne n’est plus prêchée à travers une vie
d’amour mais la hiérarchie ecclésiastique exige la reconnaissance absolue, car
elle détient le pouvoir (bras séculier) pour l’imposer par force.
À
Thyatire, le goût du pouvoir remplace donc la charité. Elle utilise cette position
pour poursuivre l’œuvre de Balaam. L’œuvre de Jésabel consiste en effet à
soumettre la religion à une poursuite de finalités mondaines (construction de
temples de pierre plutôt que de temple de chair et d’esprit).
La
manière dont le Seigneur se présente dans cette lettre n’est-elle pas
significative ? « Voici ce
que dit le Fils de Dieu ! » Qu’y a-t-il de plus frappant dans le
comportement des chrétiens de cette époque, si ce n’est le fait qu’ils
réduisent Jésus-Christ au rang d’un simple critère d’unité politique ? On
lui enlève donc sa place de roi du Ciel pour en faire un outil royal terrestre.
À
ce stade, la corruption est déjà trop étendue : le Seigneur ne peut plus
attendre aucun retour de l’ensemble. Mais bien que le Seigneur retire sa lampe
de son lieu parce qu’il ne peut plus la reconnaître comme témoignage, Thyatire
subsistera jusqu’à sa venue.
Nous
avons avec Sardes un nouveau commencement. On ne trouve plus les grands péchés
de Thyatire. Il n’est plus question de culte du pouvoir, d’aspiration à la
suprématie mondiale. Le mal est ici d’ordre négatif : la vie est tout
simplement absente.
Lors
de la Réforme protestante, Dieu divisa l’Église et par là, lui retira son
illusion de toute-puissance sur terre. Par son action bénie, il établit
plusieurs façons de vivre en chrétien. Mais les Églises n’en tirèrent pas
toutes les conséquences, celui d’un retour total à l’esprit d’humilité.
La
Réforme protestante était à l’origine un acte de conversion, mais l’élément
politique s’y mêla très vite car la séparation entre l’ivraie et le bon grain
ne se fait pas entre telle ou telle Église. Elle se trouve dans le cœur des
hommes.
La
férule inflexible de Rome avait suscité bien du mécontentement ; c’est
pourquoi beaucoup utilisèrent la Réforme comme un moyen politique pour lutter
contre le pape. Combien il fut difficile de refuser l’aide offerte par les
princes, les politiciens et les soldats ! Il en fut de même du côté de la
contre-réforme catholique qui fut aussi un acte de conversion incomplète. Ce
n’était plus l’assemblée de Dieu, mais un monde christianisé, avec quelques
chrétiens disséminés çà et là.
À
cette période, les Églises (catholique comme protestantes) ne dominèrent plus
le monde, mais s’appuyèrent sur lui ; elles lui étaient donc assujetties
désormais. « Tu as la réputation
d’être vivant, et tu es mort. » Quelle valeur peut avoir une
confession de foi de la plus pure orthodoxie si la vie de Dieu est
absente ?
Le
Seigneur ne peut plus reconnaître Sardes comme le témoignage ; néanmoins, celle-ci demeurera elle aussi
jusqu’à son retour (Apoc. 3, 3 ; 1 Thess. 5, 2).
Un
double attachement caractérise Philadelphie : à la parole de Dieu d’une
part, et au nom du Seigneur d’autre part. N’est-ce pas justement là ce qui a
caractérisé le puissant réveil de toutes les formes du christianisme que le
Saint-Esprit a opéré après les guerres napoléoniennes ? Dans tous les
pays, dans toutes les Églises (catholique et nationales), la vie a jailli à
nouveau dans les ossements desséchés de la chrétienté. L’Esprit de Dieu a
poussé les croyants ainsi réveillés à centrer leur vie non sur le côté politique
de leur Église, mais sur la parole de Dieu et le nom du Seigneur Jésus.
Certes,
ils n’ont pas tous complètement rompu avec l’orgueil mondain, ni tous eu
connaissance des pensées de Dieu dans la même mesure. Mais n’y avait-il pas un
désir général d’agir en accord avec les principes divins, selon la lumière
reçue ? Notre cœur est tout réchauffé à la pensée de ces hommes qui se
sont consacrés entièrement au service de Dieu, qui ont sondé sa Parole pour en
recevoir sagesse et connaissance, et qui ont marché alors avec lui, animés d’une foi inébranlable, dans
un chemin inconnu ? Jamais le christianisme ne fut autant missionnaire
qu’à cette époque.
Nous
trouvons l’appréciation du Seigneur sur ce réveil en Apocalypse 3, 7-13. Les
lettres à Smyrne et à Philadelphie sont les seules à ne contenir aucun reproche
de sa part. Il se présente à ces deux assemblées dans l’essence même de sa
personne, et donne de précieuses promesses aux vainqueurs.
Mais
là comme partout ailleurs, l’homme a tout gâté.
Philadelphie subsistera certes jusqu’au retour du Seigneur, et sera enlevée à
lui par sa puissance, mais elle ne constituera plus alors qu’un faible petit
résidu. La grande majorité des Philadelphiens n’ont en effet pas vaincu ni tenu
ferme ce qu’ils avaient. De
Philadelphie est donc issue :
Quel
changement ! « Je connais
tes œuvres, — que tu n’es ni froid ni bouillant. Je voudrais que tu fusses ou
froid ou bouillant ! Ainsi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni
bouillant, je vais te vomir de ma bouche. » Laodicée se trouve partout
où l’on s’est arrogé la grâce et attribué présomptueusement la position de
chrétien, où le vocabulaire chrétien est devenu coutumier, où la position
ecclésiastique est en apparence correcte, sans que tout cela exerce une
influence quelconque sur l’âme.
Ne
trouvons-nous pas dans cette Église issue de Philadelphie une description
frappante de notre état actuel ?
La
connaissance abonde, ainsi que les belles paroles, et les brillantes
professions de foi sont tenues en grande estime. Les cercles missionnaires, les
sociétés pieuses, les écoles confessionnelles, et que sais-je encore,
foisonnent.
Je
suis certes loin de condamner tout cela. Mais où sont restées les affections du
cœur ? Où est la foi puissante de nos pères ? Qu’est-il advenu de la
soumission à Dieu jusque dans les plus infimes détails de la vie
quotidienne ? Où trouve-t-on encore des cœurs disposés à porter l’opprobre
pour le nom de Jésus, pour le nom de celui que le monde a crucifié ?
Ne
sommes-nous pas tièdes et mondains ? Notre vie tranquille, le bien-être
économique, ne nous ont-ils pas rendus craintifs face à la souffrance, et
avides de plaisirs ?
Le
Seigneur Jésus, le Témoin fidèle et véritable, se trouve-t-il encore réellement
au centre de notre vie d’assemblée ?
Nous
sommes remplis de honte quand nous considérons ce que nous avons fait du
témoignage qu’il nous a confié. Que Dieu nous donne un esprit brisé, un cœur
brisé et humilié (Psaume 51, 17), afin que nous nous humiliions devant lui et
reconnaissions de manière sincère notre culpabilité.
Telle est l’histoire de l’Église jusqu’à
aujourd’hui aux yeux du Seigneur. Nous vivons dans les derniers jours. Bientôt
le Seigneur Jésus viendra pour enlever son épouse de cette terre. (fin de citation)
« Vous savez ce qui retient aujourd’hui
l’apostasie* et l’Homme impie, de façon qu’il ne se révèle qu’à son moment. Dès
maintenant oui, le mystère de l’impiété est à l’œuvre. Mais que seulement celui
qui le retient soit d’abord écarté. Alors l’impie se révélera. »[139]
De quoi parle saint Paul ? Quelle est cette réalité qui retient
l’apparition de l’apostasie et de l’Homme impie ? C'est, répond saint Thomas d’Aquin[140], l'union et la soumission à
l'Église
Romaine, siège et centre de la foi catholique. Tant que la société demeurera
fidèle et soumise à l'empire spirituel romain, transformation de l'ancien
empire temporel romain, l'Antéchrist ne pourra point paraître. Telle est la
barrière, tel est l'obstacle à l’Antéchrist politique ici-bas, sur terre.
Précisons sa pensée. Au
Ciel, l’obstacle qui empêche la deuxième étape de l’apostasie, la
prédication d’un nouvel
Évangile capable de séduire le monde entier, est le Christ. C’est lui qui
retient là-haut les démons ou les laisse agir. Rien ne se fait sans sa
permission[141]. Lorsque, selon l’Apocalypse
(13, 7), un mauvais esprit est libéré de l’enfer pour un temps, le Christ ne
vise qu’une chose : la formation d’une génération à l’humilité, par là
même où elle pèche. Le démon, quant à lui, vise la perdition des hommes et ne
se réjouit pas que Dieu sache transformer en bien son action criminelle.
Mais au plan terrestre, cette réalité qui retient n’est autre que toute communauté
religieuse ou tout homme « qui porte
le nom de Dieu »[142]. Mais, par-dessus tout, à côté de cet
obstacle, il y a aussi un gardien, chargé de veiller, chargé de le
maintenir ; et ce Gardien, c'est le Pape, Vicaire de Jésus-Christ. Tant
que le
Gardien sera reconnu, respecté, obéi, l'obstacle subsistera, la société
demeurera fidèle à l'empire spirituel romain et à la foi catholique. Mais si ce
Gardien, le Pape, vient à être méconnu, mis de côté, rejeté, l'obstacle
disparaissant bientôt avec lui, l'Antéchrist sera libre de paraître[143].
Pour expliquer la réalité de ce
rôle protecteur de l’Église, il suffit d’être très concret et d’observer les
réalités politiques. À chaque époque, les peuples ont une envie terrible de
suivre le courant dominant de l’idéologie à la mode. Les adultes de 1550
avaient en majorité envie de tuer ou de convertir les hérétiques car le démon de l’air du temps, libéré de
l’enfer, était le culte idolâtrique de la puissance d’une société unifiée
autour d’une religion. Il s’agissait d’un démon de l’orgueil politique.
Aujourd’hui, ce démon a été attaché en enfer et un autre l’a remplacé : le
goût du plaisir, poussé jusqu’aux pires actes d’irresponsabilité. C’est un
démon de l’hédonisme.
Qui a pu, historiquement, mettre un certain frein aux conséquences de ces idéologies dominantes sinon une parole, toujours méprisée mais terriblement insécurisante pour les serviteurs du mal ? Au temps des guerres de religion, les papes furent souvent au-dessous de tout. Alors Dieu suscitait des saints qui dévoilaient aux violents l’état de leur âme (François de Sales, Pierre Canisius etc.). De nos jours, pourquoi la voix du vieux pape Jean-Paul II fut-elle haïe, surtout quand il parlait de la fidélité conjugale et du respect de l’enfant à naître ? N’avait-elle pas le pouvoir terrible de brûler les âmes à l’endroit exact du péché ? On peut dire que, dans les années-luxure, cet homme eut un grand pouvoir pour retenir certains excès de l’Homme impie. Mais il ne fut pas seul. Il y eut aussi l’Église orthodoxe, certains fidèles et pasteurs protestants de sensibilité spirituelle, les nations musulmanes et, partout, des hommes de bonne volonté.
Ainsi, au cours de l’histoire, toute voix qui rappelle qu’il y
aura un jugement où chacun sera pesé selon la droiture du cœur, porte le nom
de Dieu. Au sommet de tout, il convient de mettre l’Église en tant qu’elle
est sainte, c’est-à-dire en tant qu’elle rappelle la primauté des deux
commandements de l’amour (Dieu et le prochain) et leur fondement spirituel,
l’humilité. Quand ses fidèles et ses autorités sont ce qu’ils doivent être,
l’Église est le plus puissant des obstacles mondiaux à l’apparition de
l’antichristianisme car c’est elle qui possède la plus profonde révélation sur
la nature exacte du bien pour lequel l’âme humaine a été créée. Mais d’autres
religions s’en approchent et constituent, dans leur partie lumineuse, un objet
de la haine de Satan. L’islam réalise ce travail par la présence de fidèles qui
gardent dans leur pratique l’ordre voulu par leur Prophète, à savoir 1- la
prière soumise à Dieu, 2- la miséricorde envers le prochain et
3- l’humilité. Il en est de même, affirme le Concile Vatican II, pour toute
tradition religieuse dans la mesure où ses membres cherchent dans les ombres et sous des images un Dieu qu’ils ignorent.
« En effet, tout ce qui, chez
eux, peut se trouver de bon et de vrai, l’Église le considère comme une
préparation évangélique et comme un don de Celui qui illumine tout homme pour
que, finalement, il reçoive la vie. »[144]
Voilà ce que saint Paul entend quand il parle d’un obstacle qui
retient le mystère de l’iniquité. Tant qu’il subsistera de manière visible dans
le monde de la politique ou des médias une voix crédible capable de dénoncer au
nom du vrai Dieu l’idéologie dominante du temps, rien de ce que rêve Satan ne
pourra se faire de manière totale. C’est pourquoi, dans cette première étape de
son travail de sape, Satan vise à discréditer toute parole qui porte le nom de
Dieu et, par-dessus tout, celle de l’Église catholique.
Voilà pourquoi, sans cesse, les péchés, les compromissions des chrétiens du
passé sont rappelés, grossis par les ennemis de l’humilité et de l’amour.
L’Église doit en ressortir défigurée, caricaturée sous cet unique point de vue.
Le jour où elle ne pourra plus parler sans être grotesque, 80% du travail aura
été fait. Mais, je le montrerai, 100% du travail sera accompli lorsque toute parole
venant de Dieu aura été empêchée. En effet, même haïes publiquement et
combattues, ces voix gardent un pouvoir puissant sur la conscience humaine. Les
médias actuels avaient beau déformer les paroles de Jean-Paul II, ce qui
parvient de lumière aux braves gens suffit à jeter le doute. Le cœur de l’homme
a été fait pour Dieu. Il porte la marque profonde de tout ce qui est humble et
amour. C’est le visage du Christ et de son Évangile.
Après la faute des guerres de religions, l’Évangile et ce qui le porte, le christianisme, furent en partie discrédités. Un vide fut alors ouvert dans les élites des nations occidentales, un vide portant sur le sens ultime de la vie, sur l’espoir d’un bonheur à venir. La nature humaine a horreur de ce genre de vide. Ainsi, une place put être comblée par une nouvelle espérance. C’est l’objet de cette deuxième étape. Nous verrons que Satan, qui est caché sous cette histoire, s’est joué du cœur de l’homme qu’il connaît bien. Il l’a fait en plusieurs générations, jusqu’à nos jours, et son travail n’est pas terminé. Historiquement, il a d’abord fait miroiter à l’humanité ce qu’il sait être sa plus profonde aspiration (après, bien sûr, sa soif du vrai Dieu d’amour et d’humilité) : la liberté. Ce fut l’époque des Lumières et des quelques années-lumière de la Révolution française. Mais tout cela n’a duré que le temps d’un rêve. C’est pourquoi, dans un second temps, l’esprit mauvais a ballotté les générations humaines d’espoir en espoir à travers le culte successif des sept péchés capitaux (à partir de 1830).
Lorsqu’elles apparurent, les idées des Lumières furent ressenties par les élites bourgeoises comme un nouvel Évangile, c’est-à-dire une bonne nouvelle annonçant un bonheur futur et possible. On y parle de l’homme et de sa dignité dont l’origine n’a pas de rapport avec le dogme. On y annonce la possibilité d’un monde équilibré et heureux, parce que séparé de l’obscurantisme ancien. Ces idées avaient été déjà largement inventées par les philosophes grecs de l’Antiquité. Elles ne trouvèrent aucune prise dans les hommes du Moyen Âge parce qu’ils trouvaient leur dignité et liberté dans le vrai Évangile d’amour. Après le siècle des guerres de religion, le message du Christ n’avait plus ce pouvoir. Voilà pourquoi l’influence des philosophes fut réelle. Leurs idées aboutirent à la fin du monde ancien.
La Révolution française fut leur première conséquence dans le
monde concret. Elle fut la première tentative pour établir un monde sans
christianisme. Elle ne fut pas une révolution athée ou dirigée directement
contre Dieu (voir les étapes suivantes) mais plutôt contre l’Église et ses
dogmes imposés. Ce qui était reproché à l’Église, c’était de prêcher un Dieu
comme on prêche une prison, où les mots d’obéissance et de soumission
devenaient obsessionnels. La Révolution voulut donner au peuple le Dieu unique,
libéré du dogme liberticide, car découvert par les forces naturelles de la
pensée. Robespierre tenta d’instaurer un culte de liberté à l’Être suprême. Le
20 Prairial an II, il prononça le discours suivant : « L’Être suprême a créé
l’univers pour publier sa puissance. Il a créé les hommes pour s’aider et
s’aimer mutuellement, et pour arriver au bonheur par la route de la vertu.
L’auteur de la nature avait lié tous les mortels par une chaîne immense d’amour
et de félicité. Périssent les tyrans qui ont osé la briser. » L’une de ses premières actions fut de
supprimer les vœux de religion. Il prêcha bien un autre Évangile, déiste et
ouvert au bien de l’homme. Le culte de Dieu à travers la nature fut l’idée d’un
Robespierre convaincu de bien agir pour le bonheur du peuple.
Mais, dans un regard de sagesse chrétienne, on peut dire que cet homme fut aussi un instrument vite dépassé par Satan qui dirigeait patiemment et intelligemment la lutte contre l’Évangile de Jésus. Ainsi, celui qui avait supprimé la peine de mort fit-il faire voter, au nom de la liberté, les années-terreur.
« L'ange me dit :
Les sept têtes sont sept montagnes sur lesquelles la femme est assise : ce
sont aussi sept rois (ou sept
empires), dont cinq sont tombés ; l'un existe encore, et l'autre n'est pas
encore venu ; et, quand il sera venu, il faut qu'il demeure peu. »[145]
Pour Satan, les hommes et les idéologies ne sont que des instruments et il n’hésite pas à susciter des systèmes contradictoires entre eux du moment qu’ils s’éloignent de plus en plus du christianisme humble et charitable. Tous les anti-christianismes lui servent, depuis le puritanisme qui, en durcissant les chrétiens, rend laid le visage de l’Église, jusqu’au capitalisme libéral dont il ne fut même pas à l’origine, la convoitise des hommes d’affaires suffisant à l’expliquer. La Révolution française est une étape importante. Peu importe l’échec de Robespierre, pensaient les jeunes générations qui naquirent après l’aventure napoléonienne, il revient aux générations suivantes de réussir son idéal.
Alors les élites intellectuelles se mirent à repenser le nouveau monde libéré de l’obscurantisme. Il fallait un but concret à l’humanité, apte à lui donner le bonheur. La première trouvaille fut la gloire militaire (épopée napoléonienne), puis juste après sa chute, la première d’une longue série d’idoles, l’argent.
L’humanité s’est alors donnée
successivement aux plus stupides tentatives visant à établir le bonheur sur
terre. Chaque génération, portée par ses élites les plus remuantes, s’est sacrifiée
corps et âme à son idole dominante, allant jusqu’à persécuter toute personne
qui osait parler de ses excès. À partir de 1830, vont être adorés en Occident,
jusqu’à la folie, six des sept péchés capitaux : 1- l’argent (1830-1914),
2- l’envie (1960-1989), 3- l’orgueil national (1870-1918), 4- la colère
nationale (1918-1945), 5- la gourmandise (1945-1968), 6- la luxure
(1968- ?)[146], 7- Il manque au moment où
j’écris la paresse pour que la liste soit complète. Ce péché capital ne viendra
sans doute pas, la pression de la concurrence mondiale rendant éphémères les
tentatives de l’instaurer en Europe. Cela rappelle ce texte (Apocalypse 17, 9) : « C'est ici qu'il faut un esprit doué
de finesse ! Les sept têtes, ce sont sept collines sur lesquelles la femme
est assise. Ce sont aussi sept rois. Cinq ont passé, l'un vit, et le dernier
n'est pas encore venu ; une fois là, il faut qu'il demeure un peu. »
Nous allons montrer à quel
point cette histoire fut horrible. Elle surclassa en nombre de victimes tout ce
qu’on peut imaginer. C’est d’ailleurs vers cette époque (1830) que la Vierge
Marie se mit à apparaître en un cycle qui semble ne pas être achevé. À
Paris, rue du Bac[147], une petite religieuse qui
devint par la suite sainte Catherine Labouré reçut la révélation pour les
chrétiens d’une médaille. La Vierge promit de protéger celui qui la porterait
avec foi. Sur son recto, une femme était représentée, sur son verso, douze
étoiles. Ce jour-là se réalisa matériellement une prophétie donnée au chapitre
douze de l’Apocalypse : « Un
signe grandiose apparut au ciel : une Femme ! Le soleil l’enveloppe, la
lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête. Elle est enceinte
et crie dans les douleurs et le travail de l’enfantement. Puis un second signe
apparut au ciel : un énorme Dragon rouge-feu, à sept têtes et dix cornes,
chaque tête surmontée d’un
diadème. »
L’humanité et l’Église, symbolisées par la femme, entraient en effet dans une ère unique de folie, celle d’une série de philosophies toutes plus primaires les unes que les autres et qui allaient conduire les intellectuels déboussolés à tuer des centaines de millions de leurs frères. Je montrerai comment, malgré la splendide dignité des papes, à cause de la compromission d’une partie des chrétiens, l’Église en est sortie encore davantage discréditée.
Pour cela, rappelons en
quelques traits cette triste énumération. Elle peut être décrite à travers
trois dieux sanguinaires, trois
Molochs, l’argent, la gloire et les plaisirs.
1- et 2- Le premier Moloch fut l’argent et ses deux serviteurs, l’avarice
et l’envie.
Vers 1830, le monde occidental
entrait dans la révolution industrielle. Aussitôt, il parut évident dans les
délibérations des loges humanistes, plutôt composées d’hommes influents et
d’entrepreneurs, que la richesse
était le secret du bonheur. Ne peut-on pas, avec de l’argent, supprimer
toute misère matérielle sur terre ? L’idée se répandit donc en Europe que la liberté de créer des
industries, puisqu’elle enrichirait les capitalistes, finirait par enrichir le
peuple. Il y a une certaine vérité dans cette conception. Mais là où tout
devint fou, c’est que cette vérité devint l’unique dogme, le résumé de toute
sagesse. On se donna corps et âme à elle, sans aucune limite, jusqu’à
l’inimaginable. Le libéralisme pur était né. Il est aujourd’hui mort en
Occident car modéré comme il se doit par des lois sociales. De fait, c’est
l’avarice qui portait cette pensée. La logique des lois du marché que rien ne
vient tempérer provoqua une misère incroyable dans le monde ouvrier transformé
en horde d’esclaves. Malheureusement, une minorité visible parmi les membres du
clergé bénit cette nouvelle philosophie. On la canonisa même en disant aux
ouvriers : « Vous souffrez maintenant mais vous serez heureux dans
l’au-delà ». Cette première compromission ne sera pas la
dernière. À chaque fois, nous le verrons, sans doute par ce « qu’il
convient de s’incarner dans son époque », certains pasteurs de terrain renonceront à être prophète. Leur erreur
s’explique-t-elle par une peur de se mettre à dos les puissants de ce monde,
donc d’être persécutés ? Pourtant, Jésus avait prévenu[148] : « Heureux êtes-vous, quand les hommes
vous haïront, quand ils vous frapperont d’exclusion et qu’ils insulteront et
proscriront votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme. Réjouissez-vous
ce jour-là et tressaillez d’allégresse, car voici que votre récompense sera
grande dans le ciel. C’est de cette manière, en effet, que leurs pères
traitaient les prophètes. Malheur, lorsque tous les hommes diront du bien de
vous ! C’est de cette manière, en effet, que leurs pères traitaient les faux prophètes. »
Karl Marx réagit violemment à
cette injustice en proclamant la haine obligatoire du patron. Il fit de l’envie
un devoir révolutionnaire, pour combattre et éliminer cette race d’exploiteurs.
Il dénonça la religion comme complice, opium du peuple. Il prêcha la révolution
violente et fit miroiter un futur paradis sur terre dans l’égalité des revenus.
Après la Seconde Guerre mondiale, le marxisme devint une mode. Les
intellectuels, la jeunesse estudiantine, beaucoup d’évêques adhérèrent. Comment peut-il sortir du mal d’un projet
généreux et combatif de justice sociale, d’égalité et de partage ? Le plus grand cerveau qu’ait connu l’humanité s’appelait Staline, puis
Mao.
Heureusement, à partir de cette époque, les papes sauveront tous l’honneur. Quelques voix individuelles commencèrent à sentir la monstruosité de ces deux pensées. Mais elles furent souvent dénoncées comme archaïques et moyenâgeuses. L’exemple des divers papes qui se succédèrent à Rome est significatif. Dès 1880, le Pape Léon XIII proclama l’injustice du capitalisme pur et le danger mortel que représentait la réaction marxiste. Il accepta l’énergie du capitalisme, à condition qu’elle soit tempérée par deux contre-forces. Il demanda la création de syndicats ouvriers. Il demanda aux États de tempérer par des lois les abus du marché. Son encyclique Rerum Novarum enthousiasma une partie du clergé. Mais les milieux catholiques bourgeois parlèrent d’un Pape rouge. « Il n’est pas moderne. Il ne comprend rien à l’économie. Qu’il s’occupe de religion et non de politique. » À sa suite, l’un de ses successeurs, Pie XII, montra que, malgré son apparence généreuse, le communisme est « intrinsèquement pervers et criminel ». Une partie du clergé le traita de pape fascisant. Cette accusation est restée collée à sa mémoire.
On ne
connaît pas le nombre des millions de morts qu’usa l’esclavage capitaliste
(sans doute plus de cent millions). En ce xxie
siècle, on sait que le communisme fit cent millions de morts. On ne peut pas
penser la somme des souffrances dont elles ont été la cause. Pourtant, chacune
de ces deux pensées, fut présentée à leur époque comme ce que l’homme avait
fait de plus beau et de plus moderne. Ceux qui affirmèrent cela du stalinisme,
du maoïsme sont encore vivants. Ils sont souvent âgés mais mourront sans
lucidité : « Ce n’est pas le marxisme qui a tué. C’était une idée
généreuse. Ce sont les dirigeant marxistes qui étaient mauvais. » Pour le
tribunal de l’histoire, ces deux pensées apparaissent dans leur monstruosité.
Elles n’ont rien de moderne. Elles sentent la mort comme les deux « péchés
capitaux » qui les portèrent, avarice et envie.
Ces deux
idéologies, fondées sur la divinisation de la richesse matérielle, furent le
premier Moloch imaginé pour remplacer le sens religieux du monde. Le Ciel est intervenu pour annoncer
les crimes marxistes. Le deuxième
secret de Fatima*[149], révélé par la Vierge Marie au Portugal en 1917,
annonce cette période et donne le sens profond de la guerre froide (1945-1989).
La recette que propose la Vierge à l’humanité pour sauver le monde semble sans
rapport avec l’énormité des crimes commis. Elle demande simplement une
consécration :
« Pour empêcher cette guerre, je viendrai demander la consécration de la Russie à mon cœur immaculé et la communion expiatrice tous les premiers samedis du mois. Si ma demande est exaucée, la Russie se convertira et il y aura la paix. Sinon, elle diffusera dans le monde ses erreurs, provoquant des guerres et entraînant la persécution contre l’Église. Les bons seront martyrisés, le Saint-Père souffrira beaucoup et plusieurs nations seront anéanties. À la fin, mon cœur immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira et une période de paix sera accordée au monde. Le Portugal conservera toujours le dogme de la foi. »
3- et 4- Le deuxième Moloch est le culte de la patrie et ses deux
serviteurs, orgueil et colère.
Le premier secret de Fatima*, révélés par la Vierge Marie au Portugal en 1917, annonce la seconde guerre mondiale. La Vierge dit aux enfants:
« Vous avez vu l’enfer, où vont les âmes des pauvres pécheurs. Pour les sauver, Dieu veut instaurer dans le monde la dévotion à mon cœur immaculé. Si elles font comme je vous dis, beaucoup d’âmes seront sauvées et la paix régnera. La guerre prendra fin[150]. Mais si l’on ne cesse pas d’offenser Dieu, une autre, bien pire, se déclenchera sous le règne de Pie XI. Lorsque vous verrez une nuit éclairée d’une lumière inconnue, sachez que c’est le signe suprême que Dieu vous donnera pour vous faire savoir qu’il va punir le monde pour les crimes qu’il a commis[151]. Cette punition sera la guerre, la faim et la persécution contre l’Église et le Saint-Père. »
Dès les années 1870, les loges
humanistes changèrent d’orientation. On prit conscience que le peuple avait
besoin d’un idéal supérieur à l’argent, apte à rivaliser avec les religions
pour le tenir dans la vertu. Ce nouveau dieu s’appellera Patrie. À cette époque, les livres des écoles catholiques comme des
écoles libres exaltent l’amour du pays. En France, l’Allemagne est stigmatisée
(perte de l’Alsace-Lorraine). En Allemagne, on chante déjà Deutschland über alles. La Première Guerre mondiale éclate dans ce
climat d’héroïsme. Peu de jeunes contestèrent le sens du devoir, du sacrifice
de soi et de l’honneur que permet cette guerre. Ils partirent avec l’orgueil de
la patrie sur le front. La boue des tranchées, les morts par millions briseront
une première fois cet élan. En 1914, une seule voix discordante osa s’élever.
Jean
Jaurès n’acheva pas sa prophétie de mort. Il fut assassiné. Le pape
Benoît XV se fit à son tour prophète, dès le début du conflit. Quand
l’empereur François-Joseph lui demanda de bénir ses armées, il répondit : « Je bénis la paix ! »
En août 1914, il se déclare « frappé
d’horreur devant le spectacle de cette guerre où ruisselle le sang chrétien…
Qui dirait que ces peuples descendent des mêmes ancêtres et font partie de la
même société humaine ? Qui les imaginerait frères, fils d’un Père unique
qui est aux cieux ? » Tout au long du conflit, il parle de
« l’horrible boucherie ». Il répète, suscitant l’irritation de la
majorité (donc aussi des catholiques) : « L’Europe se suicide…
l’Europe se déshonore… » Après
son initiative de paix négociée du 1er août 1917 (aujourd’hui, les
principes énoncés sont ceux de l’O.N.U.), il est violemment critiqué par les
deux partis. Monseigneur Tissier, évêque de Châlons-sur-Marne, se fait
porte-parole de la majorité : « Le triomphe coûtera encore
bien du sang, mais chaque goutte qui tombe lave davantage la France, chaque
flot qui coule la pousse vers Dieu ». À Cologne, le cardinal von Hartmann va dans le même sens : « Dieu
a été, il est avec nos héroïques soldats (…) C’est avec Dieu qu’ils sont partis
pour la guerre. » En
chaire de Notre-Dame de Paris, le père dominicain Sertillanges répondit :
« Très Saint-Père, nous ne pouvons pas pour l’instant retenir vos paroles
de paix. Nos ennemis sont demeurés puissants. Vos reproches les ont fait
renoncer aux principes anti-chrétiens qui les guidaient. Nous les
vaincrons. » Il n’était pas
moderne à cette époque d’affirmer que la patrie ne vaut pas le massacre d’une
génération. C’est moderne de nos jours. Le pape Benoît XV mourut incompris. Il
sauva l’honneur de l’Église. Il n’est pourtant toujours pas reconnu pour cela.
Avec la Deuxième Guerre mondiale, c’est la colère qui entraîna les peuples germaniques humiliés. Adolf Hitler vociféra vengeance. Comment était-on moderne en 1941 ? La Wehrmacht et son matériel flambant neuf, la jeunesse sportive de ses soldats représentaient la modernité.
Le culte divinisé des patries, ce faux dieu, a réussi à faire 70 millions de morts en deux guerres mondiales. À cette époque de grande confusion, il fallait être doté d’un fort jugement pour discerner le bien du mal. Face au nazisme, l’attitude des fidèles chrétiens fut en majorité faite d’expectative méfiante et de résistance discrète mais efficace. On ne fit pas exploser des trains. On cacha des enfants juifs poursuivis. Le Magistère de Rome donna dès 1938 tout ce qu’il faut pour discerner. Pie XI publia la seule encyclique en langue allemande Mit brennender Sorge. Rédigée par son successeur, le futur Pie XII, elle y dénonce le Nazisme, les persécutions des chrétiens résistants, leur déportation en camp de concentration. Ailleurs, l’antisémitisme est de nouveau condamné puisque tous les chrétiens sont spirituellement des Juifs. En même temps, il publia une autre encyclique contre le communisme. Ces deux idéologies y apparaissent comme ce qu’elles sont, deux monstres prêts à dévorer les hommes. L’attitude des clergés catholiques, protestants et orthodoxes fut en général faite de dignité et d’aide très concrète aux persécutés. Des milliers d’arbres des justes poussent dans le mémorial de Yad Vachem à Jérusalem. Golda Meir, Premier Ministre israélienne en 1948, remercia le pape : « De toutes les institutions européennes durant la Seconde Guerre mondiale, une seule sauva efficacement les Juifs : l’Église catholique ». La personne de Pie XII en particulier et le clergé catholique dans son ensemble furent remerciés. En France, les petites familles catholiques ou protestantes arrivèrent par leur action discrète à sauver 80% des enfants juifs. Pourtant, à l’époque où j’écris, la pensée dominante a réécrit l’histoire en identifiant l’action des chrétiens à celle de l’État français de Vichy. L’Église, paraît-il, aurait livré en masse les Juifs aux Nazis. C’est un mensonge qui réalise encore un peu plus dans les masses cette prophétie à venir : « …Que seulement celui qui le retient soit d’abord écarté. Alors l’impie se révélera » [152].
5- et 6- Le troisième Moloch, les plaisirs et ses trois serviteurs,
gourmandise, luxure et paresse.
Après la Seconde Guerre mondiale, avec la découverte d’Auschwitz, le monde prit conscience de la monstruosité de la pensée qui venait de s’écrouler. Nul ne pouvait imaginer jusqu’où était allée l’horreur. Les loges humanistes cherchèrent une nouvelle finalité capable d’aboutir au monde parfait rêvé. Unanimement, les peuples sortis de la guerre la trouvèrent dans une valeur cette fois apparemment infaillible : « le bonheur se trouve dans la prospérité retrouvée, par le fruit de son travail et la consommation ». Peut-il sortir du mal d’un tel bonheur librement recherché ? La génération qui eut vingt ans en 1945 raisonna de la manière suivante : « Nous avons manqué de tout. Nous n’imposerons pas cela à nos enfants ». L’Alpha et l’Oméga de l’éducation devint souvent : « Que mes enfants ne manquent de rien. » Cette génération inventa la société de consommation. Elle se délecta dans la gourmandise enfin retrouvée. La croissance économique était là. L’idéologie de la société de consommation anesthésia toute résistance spirituelle. Elle plongea une génération et leurs enfants dans un culte de la matière dont il est très difficile de se désengluer. Les premiers suicides de jeunes parce que la vie n’a pas de sens apparaissent après cette époque.
Leurs
enfants eurent vingt ans en 1968. C’était une génération qui avait été
matériellement gâtée, tout en étant maintenue dans une discipline éducative.
Elle avait fréquenté par habitude culturelle les leçons de catéchisme où elle
avait reçu des restes moraux du christianisme. Après les traumatismes des deux
guerres mondiales dont elle portait la conscience médiatisée, dans une réaction
adolescente, une minorité remuante de la jeunesse s’empara en mai 68 d’un
nouvel idéal de bonheur avec fougue. Cette minorité entraîna la majorité et
créa pour quarante ans une nouvelle pensée dominante. Elle
exalta sans nuance des valeurs opposées à celles qui provoquèrent les deux
guerres, Liberté au
lieu « d’Obéissance », Plaisirs au
lieu de « Sacrifice », Droits au
lieu de « Devoir », individu et mondialisme au
lieu de « Patrie », sexe au
lieu de « mariage », etc. Des slogans devinrent sagesse : « Il est interdit d’interdire »,
« Jouir sans entraves ». La
religion chrétienne fut rejetée avec tout le fatras d’une éducation bourgeoise
et aliénante. Le comportement du pape Pie XII pendant la guerre fut
réinterprété. On s’interrogea sur son silence. On compta comme négligeables ses
actions concrètes pour le salut des Juifs. Partout, on entendait : « Si j’avais été le pape, je serais sorti du
Vatican en portant l’étoile jaune. J’aurais fait un discours solennel. Les
Nazis auraient eu peur de se mettre à dos des millions de catholiques. Pie
XII se fit nazi par haine du communisme. »
Six
péchés capitaux ont été successivement adorés de 1830 à aujourd’hui. Celui qui
est contemporain à la rédaction de ce livre s’appelle la luxure[153]. Il
ne s’agit pas d’une luxure au sens exclusivement sexuel, même si elle obsède la
génération-préservatif. Il s’agit plutôt de cette luxure symbolique qui
consiste à tout sacrifier à son bonheur individuel. « Il n’y a pas de
troisième Moloch », affirme-t-on avec satisfaction en ce début de xxie
siècle. Et si ce troisième Moloch s’appelait jouissance ? Au nom de quoi
en effet voit-on de nos jours une immense épidémie de destruction de ce qui est
le plus sacré, la famille ? N’est-ce pas au nom du bonheur individuel
devenu Dieu, au nom de l’équilibre de sa vie, de son plan de carrière ou de ses
loisirs ? Le dernier prophète de la Bible serait très actuel s’il criait
de nouveau : « Yahvé est témoin entre toi et la femme de ta
jeunesse que tu as trahie, bien qu’elle fût ta compagne et la femme de ton
alliance. Respect donc à tes enfants, et la femme de ta jeunesse, ne la trahis
point ! »[154]
Comment
juger la génération qui, à partir des années 60, fit le prêt à penser ?
Jamais on ne vit se lever génération plus contradictoire. Mais le sommet de ses
crimes n’est pas intellectuel. Il est bien réel, au moins pour celui qui croit
en la vie après la mort. Cette génération poussa son culte du bonheur immédiat
jusqu’à s’attaquer au plus innocent des êtres, l’enfant à naître. Par ses lois
sur l’avortement, qu’elle justifia par la recherche de la liberté et du bonheur
des femmes, elle prit le risque insensé de parier sur la non-existence de l’âme
humaine, envoyant à la mort plus de cent millions d’innocents. Faut-il citer
pour elle ce passage peu connu de Jésus de Nazareth[155] :
« Cette génération est mauvaise. Elle proclame :
‘Si nous avions vécu à la place de nos pères, jamais nous n’aurions tué les
résistants.’ Et elle leur construit de
magnifiques tombeaux. Génération pervertie ! En agissant ainsi, elle se
condamne elle-même. Elle dépasse la mesure de ses pères. »
Cet antichristianisme de la luxure disparaîtra comme les autres. À l’heure où j’écris, des voix s’élèvent pour remettre en question sa folie et ses excès. On ne peut affirmer plus de cinquante ans de suite sans finir par être critiqué que le summum de la libération de la femme, c’est son choix d’avorter. L’image qui restera de la société du xxe siècle finissant est sans doute le préservatif géant et rose dressé sur l’obélisque de la place de la concorde à Paris… Pour les Égyptiens anciens, un obélisque était un rayon pétrifié de la Lumière divine ! Par ses excès, l’idéologie grossière de la luxure est dans la lignée des autres et, comme les autres, elle durera un temps avant de révéler sa perversité.
En 1846, à la Salette[156], Mélanie reçut de la Vierge un étrange secret qu’elle ne révéla que bien plus tard au pape Pie IX. Le 19 septembre 1846, la Vierge lui dit, et c’est le début de son secret :
« Mélanie, ce que je vais vous dire maintenant ne sera pas toujours secret. Vous pourrez le publier en 1858.
Les prêtres, ministres de mon Fils, les prêtres par leur mauvaise vie, par leurs irrévérences et leur impiété à célébrer les saints mystères, par l’amour de l’argent, l’amour des honneurs et des plaisirs, les prêtres sont devenus des cloaques d’impureté. Oui, les prêtres demandent vengeance et la vengeance est suspendue sur leur tête. Malheur aux prêtres, et aux personnes consacrées à Dieu, lesquelles par leurs infidélités et leur mauvaise vie, crucifient de nouveau mon Fils. Les péchés des personnes consacrées à Dieu crient vers le ciel et appellent la vengeance, et voilà que la vengeance est à leurs portes, car il ne se trouve plus personne pour implorer miséricorde et pardon pour le peuple. Il n’y a plus d’âmes généreuses, il n’y a plus personne digne d’offrir la Victime sans tache à l’Éternel en faveur du monde. Dieu va frapper d’une manière sans exemple. Dieu va épuiser sa colère, et personne ne pourra se soustraire à tant de maux réunis. Les chefs, conducteurs du peuple de Dieu, ont négligé la prière et la pénitence, et le démon a obscurci leurs intelligences. Ils sont devenus ces étoiles errantes que le vieux diable traînera avec sa queue pour les faire périr. Dieu permettra au vieux serpent de mettre les divisions parmi les régnants, dans toutes les sociétés et dans toutes les familles. »
Ce secret fut longtemps déclaré
suspect et rejeté à cause de la dureté des prophéties qu’il contient. Il est
vrai qu’en 1850, la majorité du clergé était de bonne qualité. Pourtant,
l’étude de ces époques jusqu’à aujourd’hui montre un étrange défaut. À
l’exception du magistère romain, la majorité visible du clergé semble émoussé.
Son jugement évangélique sur le péché dominant de l’époque semble perpétuellement
anesthésié. À chaque fois, on constate une complicité intellectuelle avec
l’idéologie du temps. Au pire, elle est approuvée en chaire, au mieux, un silence
pesant règne. Les pasteurs de terrain ont-ils du mal à affronter la réaction
scandalisée de la majorité de leurs fidèles, eux-mêmes fils de leur
temps ? Est-ce une bonne façon d’être pasteur selon Jésus[157] : « Car celui qui aura rougi de moi et de mes
paroles dans cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l'homme aussi
rougira de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père avec les saints
anges. »
Pour comprendre ce fait, sans
bien sûr accuser tous les prêtres, il suffit de se pencher sur notre époque.
Être prophète, n’est-ce pas agir selon cette parole de Jésus[158] : « Heureux êtes-vous quand on vous insultera à cause de moi. C’est
bien ainsi qu’on a persécuté les prophètes, vos devanciers. » Pour
être prophète en notre époque, pour mettre en danger son ministère sacerdotal,
que faut-il dénoncer ? Un prêtre qui dénonce en chaire le nazisme
risque-t-il sa vie ? Ceux qui l’ont fait en 1942 furent prophètes. Que risque-t-on
si l’on dénonce aujourd’hui en chaire les crimes de Lénine ? En 1970, on
risquait de perdre son ministère. Aujourd’hui, le grand drame de l’Occident est
l’avortement.
Jean-Paul II parle d’un génocide[159]. On ne peut pas dire qu’il
existe une complicité active dans le clergé pour encourager l’avortement. Le
problème se situe ailleurs. Il s’agit d’un
silence. Pour mieux comprendre le scandale évangélique que constitue
l’absence d’une simple explication théologique, sans passion, de ce drame qui
concerne Dieu, il peut être utile de se référer aux années 1940 en France. Nul
ne pourra trouver une quelconque complicité dans la hiérarchie catholique face
aux lois de Vichy. Mais, visiblement, sans anachronisme, dans une simple confrontation
à l’Évangile, l’absence de réaction du clergé face à ces lois jusqu’en 1942
gêne. N’y a-t-il pas une certaine faute quand celui qui a mission de parler se
tait ? Tout cela est-il vraiment justifié par l’évocation des règles de
paix civile, par un doute sur l’efficacité de la parole ?
À partir des années 1960, et d’une manière sourde aujourd’hui, la révolte s’est mise au grand jour contre les mises en garde des papes successifs. C’est l’époque de la tolérance et de la libération sexuelle (âge de la luxure). On n’a à la bouche que les mots de liberté, d’épanouissement personnel. La contraception artificielle permet pour la première fois de séparer totalement le plaisir sexuel de la fécondité et même de l’amour. Le pape Paul VI, seul contre la majorité des catholiques, mit en garde : « Une telle séparation n’est pas voulue par Dieu. Attention à cette nouvelle forme d’égoïsme »[160]. Ses paroles furent ouvertement brocardées ou simplement relativisées par une majorité du clergé et même des fidèles. À partir de cette époque, la position de Paul VI ou de Jean-Paul II en matière d’amour et de fidélité conjugale est déformée publiquement, présentée comme odieuse, liberticide et ouvertement rejetée. Des supérieurs de Séminaires renvoient des séminaristes surpris à prier le chapelet. Le prêtre est formé à être un animateur social. C’est aussi l’âge du grand espoir marxiste auquel adhèrent beaucoup d’évêques de manière plus ou moins explicite. Après le Concile Vatican II, des bataillons de prêtres et de religieux défroquent. On se libère du poids opprimant des vœux. Le secret de la Salette prend alors tout son sens. Il suffit de changer 1865 par 1965 : « Dans l’année 1865, on verra l’abomination de la désolation dans les lieux saints. Dans les couvents, les fleurs de l’Église seront putréfiées et le démon se rendra comme le roi des cœurs. Que ceux qui sont à la tête des communautés religieuses se tiennent en garde pour les personnes qu’ils doivent recevoir, parce que le démon usera de toute sa malice pour introduire dans les ordres religieux des personnes adonnées au péché, car les désordres et l’amour des plaisirs charnels seront répandus par toute la terre. »
Au contraire, les papes
successifs furent à la hauteur. Ils parlèrent, sans souci d’être politiquement
corrects. Ils ne cessèrent, à partir de Pie IX, de mettre en garde contre le
danger du temps. Ils le faisaient au moment où le danger était là et non
cinquante ans plus tard. Ce fait incontestable est la réalisation d’un rêve
fait vers 1880 par saint Jean Bosco : « Je vis la barque de l’Église qui était agitée par un ouragan
inouï. Elle allait sombrer mais celui qui s’attachait à la robe de saint Pierre
était sauvé… » À chaque fois, en chaire, bien des prêtres
ignorèrent ou relativisèrent ces avis. Capitalisme, marxisme, nationalisme,
hédonisme, libération sexuelle ont été tour à tour la philosophie d’une partie
visible du clergé qui prêche[161]. À chaque fois, la parole de
Pierre fit grincer l’intelligence de cette partie visible et souvent
majoritaire. Cinquante ans plus tard, ce qui avait été source de tant de
scandale devenait une évidence, sans qu’une reconnaissance publique soit rendue
au prophète. À chaque fois au contraire, le Magistère de Rome et l’Église tout
entière en ressortaient plus critiqués. Au
moment où j’écris, des voix se font entendre, y compris dans le clergé
catholique, pour remplacer l’insupportable Magistère de Rome par une assemblée
élue. On supporte de moins en moins sa parole à contretemps. Par le
remplacement du gouvernement théocratique de l’Église par une démocratie
populaire, on pense pouvoir enfin la moderniser et l’adapter à son époque. Il
s’agit des premiers signes d’une nouvelle étape de la lente marche de
l’apostasie* de la foi chrétienne. « Jusqu’à ce que soit achevé
l’écrasement de la force du Peuple Saint… »[162]
À partir d’ici, je suis contraint d’étudier
des événements qui ne se sont pas tous encore produits. Un aspect
nécessairement hypothétique entre en ligne de compte. Cependant, à la lumière
des prophéties déjà citées, sachant qu’elles se réaliseront avec certitude, à
la lumière aussi d’une connaissance des lois sociologiques qui prévalent dans
les nations, il est possible d’éviter l’erreur. Si le détail des événements
futurs ne peut être défini, leurs lignes générales sont plus que probables.
[Chose
probable]
« Tous,
petits et grands, se feront marquer sur la main droite ou sur le front du nom
de la bête ou du chiffre de son nom. C’est ici qu’il faut avoir de la
finesse ! Que l’homme doué d’esprit calcule le chiffre de la bête, c’est
un chiffre d’homme : Son chiffre est 666. »[163]
Quelle sera l’étape suivante, à savoir le nouvel Évangile proposé aux peuples pour le xxie siècle ? Qu’est-ce qui se profile pour remplacer le culte désuet et grossier des sept péchés capitaux ? En regardant les signes de notre temps, essayons d’en déterminer la nature. Les peuples sont plus cultivés. Ils ont besoin d’un sens philosophique à leur vie. Il ne peut s’agir des idéologies comme le marxisme ou le nazisme. Il en est de même pour le culte du phallus et des jouissances charnelles. J’ai montré que ces antichristianismes sont trop épais et contre nature pour durer. Ils ne résistent pas au temps. La conscience des jeunes de notre époque est déjà plus que dubitative face à cette propension de leurs aînés à tout sacrifier à leur liberté sexuelle[164]. Si l’on se réfère aux prophéties, à l’approche de la fin, les derniers antichristianismes seront au contraire des réussites capables de durer et emplies de réelles valeurs aptes à séduire les élus eux-mêmes. Il s’agit, dirions-nous, d’un Évangile, c’est-à-dire de la Bonne Nouvelle d’une voie vers le bonheur.
L’Apocalypse décrit la puissance de chaque antichristianisme sous le symbole du chiffre 666[165]. Ce chiffre n’a cessé depuis des siècles de faire couler de l’encre. Des savants se sont attelés à en calculer les propriétés arithmétiques et ils ont fait des découvertes. Cependant, la parole de Dieu est donnée à tous les hommes, même aux simples, de telle façon que son sens n’échappe pas complètement à ceux qui la lisent et s’en imprègnent. Il est donc impossible que son premier sens appartienne aux savants calculateurs. Il doit exister une signification simple du chiffre 666.
Dans l’Écriture, on voit que certains chiffres sont donnés avec une même signification symbolique. Ainsi, le chiffre 3 signifie la plénitude de la divinité puisque Dieu est en trois personnes. De même, le chiffre 7 signifie la perfection de la création puisque le monde fut achevé le septième jour par le repos de Dieu qui dit que « tout était très bon »[166]. C’est de cette manière qu’il faut regarder le chiffre de la Bête. Plusieurs interprétations peuvent être données qui se rejoignent en une seule. Dieu affirme sans cesse à l’homme qu’il lui a donné six jours pour travailler : « Pendant six jours, tu travailleras et tu feras ton ouvrage. Mais le septième jour est un sabbat pour Yahvé ton Dieu »[167]. Ainsi, si l’homme oublie le septième jour qui est consacré à Dieu, il se marque lui-même du chiffre 6 qui signifie qu’il vit sans Dieu. Il existe bien d’autres textes bibliques qui confirment cette interprétation. Dans la Loi, Dieu commande aux maîtres qui achètent la main-d’œuvre d’un esclave hébreu, de le garder six années puis de le libérer sans qu’il doive rien payer. Si le maître n’agit pas ainsi la septième année, il se marque lui-même du chiffre 6. On trouve ce chiffre 6 (sept moins un) en dehors de la Bible. En philosophie, l’étude de l’homme se fait autour de ses sept dimensions : 1- il existe (métaphysique), 2- il est vivant, 3- il possède un corps physique, 4- il travaille, 5- il aime, 6- il vit en communauté, 7- il est fait par et pour un Créateur. Si la dernière dimension disparaît, il reste le chiffre 6. En conséquence, le chiffre de la Bête, qui est le symbole des Antéchrists* ne signifie pas autre chose que l’homme sans Dieu. C’est pourquoi l’Apocalypse l’appelle un chiffre d’homme.
Tout au long de l’histoire et de plus en plus en ces siècles de sécularisation, l’humanité se marque du chiffre 6. Si le chiffre est répété trois fois, c’est pour signifier que les Antéchrists et en particulier le dernier d’entre eux réaliseront un monde séparé de Dieu et doté d’une certaine perfection divine. Extérieurement, la paix enfin réalisée prouvera la possibilité d’une humanité sans Dieu. Si l’Apocalypse et les autres textes de l’Écriture décrivent ce temps comme un malheur inimaginable, c’est qu’elles regardent les choses intérieurement, à la manière de Dieu. Pour le salut, une paix et une réussite extérieure peuvent être signes de ruine de l’âme.
En ce début du xxie siècle, il est facile de discerner l’étape suivante puisqu’il ne subsiste et prospère, après la chute du communisme (1989), qu’un seul antichristianisme dans les nations post chrétiennes. Il s’agit de l’humanisme sans Dieu, tel qu’il fut pensé dans sa forme modérée à l’époque des Lumières. Cette philosophie semble non seulement s’imposer en Occident mais s’exporter dans le monde entier, en raison de l’action militante des organisations gouvernementales et non gouvernementales.
Il ne faut pas qualifier l’humanisme déjà diffus actuellement d’idéologie athée. L’athéisme militant, qu’il soit communiste, positiviste ou autre, agissait tout autrement en s’efforçant de supprimer activement la religion par le prosélytisme. Il se comportait de manière sectaire et non tolérante (Staline par exemple). Or l’humanisme qui prévaut actuellement ne se proclame pas tel. Il ne se pose pas la question de savoir si Dieu existe ou non. Il préfère reléguer cette question au seul domaine privé, dans le respect de la conscience de chacun. Il en résulte un athéisme pratique. L’homme et la société vivent comme si Dieu n’existait pas. Il se contente d’entretenir de manière calme l’acquis suivant : l’hypothèse Dieu est simplement périmée puisque l’homme descend de la vie animale, par hasard. L’évolution des espèces par les seules lois du hasard est médiatiquement plus qu’une théorie. C’est devenu une métaphysique fondatrice d’une société, un nouveau livre de la Genèse.
« Puisque Dieu n’existe pas, puisqu’il n’y a pas de vie après la mort… », tel est le présupposé du projet. Il est rarement formulé d’une façon aussi claire. Pourtant, il est le fondement de tout. Cet athéisme est concret, l’absence de Dieu étant l’expérience majeure de la vie de tous les jours en Occident. Puisque demain nous mourrons, que pouvons-nous faire pour construire le monde le moins mauvais possible ? La question n’est ni idiote ni condamnable. Elle relève au contraire du bon sens dans un monde sans espérance après la mort. Saint Paul lui-même se l’est posée et y a répondu : « Si le Christ n’est pas ressuscité, mangeons et buvons car demain nous mourrons. »[169] La réponse proposée aujourd’hui est analogue à la différence près qu’elle est élaborée pour fonctionner. L’expérience des erreurs du passé, telle que nous l’avons rapportée[170], permet d’éviter les excès en modérant les lois de l’argent, les lois de l’appétit de la gloire et des jouissances. Tout est dans le juste milieu.
Essayons de nous placer concrètement dans la pensée d’un homme politique athée. Imaginons avec toute la sincérité possible que Dieu n’existe pas mais qu’il nous faut construire le meilleur monde possible, voilà à quoi il ressemblerait :
Cet humanisme est généreux. Il recherche activement, que ce soit par la réflexion ou par l’action politique, comment donner à l’homme toutes les conditions du bonheur. Après avoir tâtonné durant deux siècles, depuis la Révolution française[171], il en est arrivé à la conclusion suivante. Ce qui est le plus important dans l’homme, ce qui fait de lui une personne humaine, c’est sa capacité à agir librement en vue du bonheur, dans le respect de la liberté d’autrui. Tous les mots de cette phrase sont importants et pesés. Tout doit être fait en conséquence pour favoriser cette liberté modérée, tant au plan matériel (recherche de la paix, de la richesse, du bien-être, lutte contre la guerre, la famine, la maladie, les inégalités), qu’au plan spirituel (éducation des hommes à la tolérance, à la fraternité, au respect d’autrui surtout dans le domaine de sa liberté). De telles valeurs, en raison de leur richesse de paix, semblent devoir conduire à moyen terme à la construction d’un monde équilibré offrant à chacun les conditions fondamentales du bonheur. À chacun de le construire dans sa vie personnelle.
J’ai réalisé en m’inspirant de textes officiels de l’ONU et de l’UNESCO une charte du projet d’humanité que ces organisations rêvent de créer. L’intention de leurs membres est réellement positive et humaniste. Il ne s’agit pas de la lire avec un regard excessivement négatif puisqu’on ne peut rien trouver à redire sur le plan humain. Seul un regard de sagesse chrétienne, regard paisible s’il en est mais très contemplatif, peut y discerner le chiffre de l’homme, 666*.
CHARTE DU MEILLEUR MONDE POSSIBLE[172]
1. BUT : Que chacun puisse profiter du
bonheur et des joies de la vie car ils sont ce qu’il y a de plus précieux sur
la terre. La vie est courte.
2. MOYENS : Il convient de donner à tous
les hommes la possibilité d’obtenir ces plaisirs et ces joies. En premier lieu,
il faut mettre au ban de la société toutes les idéologies qui, au cours des
siècles passés se sont rendues coupables de fanatismes et de violences. Toute
guerre doit être définitivement bannie puisqu’elle est source de malheur. Ces
idéologies sont principalement politiques (marxisme, nazisme, fascisme patriotique)
et religieuses (en particulier les religions prosélytes : islam et christianisme)[173].
En second lieu, il
convient de montrer aux peuples que le bonheur décrit a pour fondement la liberté et son corollaire le respect de
la liberté d’autrui. Elle implique certes des droits mais aussi des devoirs.
3. LOIS : Établir des lois civiles
favorisant la liberté dans le respect
d’autrui. Liberté d’aimer celui qui veut bien de cet amour (l’amour n’étant
pas seulement la pulsion sexuelle mais aussi le sentiment, et l’engagement
mutuel pour un temps) ; Liberté de penser et de s’exprimer (dans la mesure
où les idées soutenues respectent la dignité de tous les hommes (articles 1 et
2) ; Favoriser la liberté de donner la vie au moment choisi, à condition
que le nouveau-né soit un enfant normal, doté de toutes les facultés pour
trouver dans les meilleures conditions le bonheur et qu’il ne soit pas
surnuméraire par rapport aux possibilités de la planète ; Liberté de
choisir l’heure de sa mort, surtout lorsque celle-ci approche et supprime la
possibilité du bonheur proposé dans l’article 1 ; Bref, toute liberté apte
à favoriser le bonheur individuel.
4. Établir des lois civiles favorisant le respect de la liberté d’autrui :
Respect de celui qui n’éprouve plus de sentiment et veut quitter son conjoint
(possibilité de divorce) ; Tolérance des actions d’autrui dans la mesure
où elles ne détruisent pas la liberté d’autrui ; Liberté d’arrêter une
grossesse non désirée, tant que l’embryon n’est pas un être humain (doté de
liberté), tout en dénonçant et prévenant (contraception) ses abus qui détruisent
la psychologie féminine ; Devoir envers les enfants qui, n’étant pas des
êtres totalement éduqués dans la liberté, ont besoin d’une éducation réaliste,
avec un pôle d’amour et un pôle d’autorité ; Établir une justice et des
peines adaptées contre ceux qui commettent des délits et des crimes contre
autrui, selon qu’il a été défini libre et digne de respect aux articles 3 et 4.
La peine de mort doit être supprimée mais elle doit être remplacée, dans les
cas les plus graves, par la prison à vie.
5. Favoriser les sciences et les
techniques capables d’aider aux conditions matérielles du bonheur du plus grand
nombre. Nourriture pour tous, santé, richesse, temps pour les loisirs,
protection de la nature, prolongation de la durée de vie, accès à la culture
etc. Favoriser la recherche génétique pour améliorer l’humanité. Il ne s’agit
pas, sauf en matière de maladie et de prolongement de la durée de vie, de
changer l’A.D.N. humain.
6. Développer avec souplesse ces lois en
fonction de l’évolution des mentalités. À terme, les imposer de manière
mondiale. Établir un gouvernement mondial remplaçant le coûteux et dangereux
système des nations. Unifier le monde et supprimer à jamais les armes de destruction
massive, les systèmes de la tyrannie et ses conséquences.
Un tel projet de société n’est certes pas parfait. Il reconnaît avec réalisme son défaut structurel, la nécessité pour l’homme de mourir alors qu’il désirerait vivre toujours. Mais reconnaissons-le avec honnêteté. Si Dieu n’existait pas, ne serions-nous pas les premiers à y adhérer et à y travailler ? Existe-t-il meilleure façon de vivre sur la terre les quelques années où le hasard de l’évolution nous a placés ? Ce projet est si bon (le moins mauvais qu’on puisse imaginer compte tenu de ce que nous sommes) qu’il est difficile d’en inventer un meilleur. L’acceptation du divorce et du vagabondage des amitiés est logique. Pourquoi s’imposer à vie le joug d’une vie commune alors que le bonheur passager se trouve plus rapidement dans la liberté et la spontanéité ? N’y a-t-il pas plus de joie à se revoir qu’à se supporter ? Rien n’empêche bien sûr ceux qui veulent se marier de le faire, s’ils y trouvent le bonheur. Il en est de même pour l’acceptation de l’avortement. L’embryon n’ayant ni âme immortelle ni liberté, pourquoi lui imposer la vie s’il ne vient pas au bon moment ? Il ne s’agit certes pas d’encourager l’avortement pour convenance personnelle (comme dans les excès de la fin du xxe siècle) mais de le prévenir par une contraception efficace. De même, pourquoi vivre dans la maladie et la vieillesse puisque tout se termine dans le néant ?
Cette conception du monde ressemble par beaucoup de ses principes au christianisme. On y parle de droits de l’homme, de respect de sa liberté, de respect d’autrui, recherche du bonheur de l’autre. Beaucoup de chrétiens ne savent plus en discerner les différences. Pourtant, si les conséquences pratiques sont si différentes (divorce, avortement, contraception artificielle, euthanasie, recherche génétique sur la durée de vie) c’est à cause de différences absolues qui touchent la source même, le sens de la vie.
L’une croit en une vie après la mort, l’autre ne s’y intéresse pas. L’une exalte l’amour du prochain, jusqu’au sacrifice de son propre bonheur, l’autre exalte la liberté en vue de la recherche du bonheur personnel. L’une affirme que seul compte ce qui est construit pour durer jusque dans la vision face à face avec Dieu, à savoir l’humilité et l’amour qui se donne. L’autre affirme que seul compte le bonheur personnel car il est urgent d’être heureux, dans un égoïsme modéré, avant que n’arrive la mort.
Il est bien évident que l’humanisme sans Dieu* n’est pas contre l’amour oblatif. Il l’admire de loin. Mais il le place comme l’une des manières, irréaliste mais respectable, dont un homme libre peut donner un sens héroïque à une vie de toute façon vouée au néant. Pour illustrer ce respect, on peut citer en France la reconnaissance en 1905, sous le gouvernement Émile Combes, des sœurs de la charité de saint Vincent de Paul comme association d’utilité publique. Au même moment, tous les autres ordres religieux étaient chassés. On peut aussi citer l’admiration portée à l’abbé Pierre ou à mère Teresa, considérés cependant exclusivement sous l’aspect de leur générosité sociale.
Doit-on affirmer que l’humanisme sans Dieu* prêche l’amour de soi tandis que le christianisme prêche l’amour de l’autre ? Ce serait exagéré. L’intention des humanistes n’est pas là mais, dans ses conséquences, l’humanisme sans Dieu semble conduire plus de gens vers l’individualisme que vers l’amour qui se sacrifie. Ainsi, lorsqu’on étudie les conséquences concrètes de ces deux conceptions du monde, il est plus aisé de manifester leurs différences. Elles changent radicalement le sens de la vie. Il est possible de les étudier dans tous les domaines soulevés par l’éthique moderne face à la pensée des Papes.
« Et le cinquième ange répandit sa coupe sur le
trône de la Bête, alors, son royaume devint ténèbres, et l’on se mordait la
langue de douleur. Mais, loin de se repentir de leurs agissements, les hommes
blasphémèrent le Dieu du ciel sous le coup des douleurs et des plaies. »[174]
Ce texte peut signifier beaucoup de choses. L’humanisme sans Dieu, tel que décrit dans la charte, révèle une tare incorrigible. Le bonheur qu’il propose est parfait à l’exception d’une chose. Il oublie que l’homme ne vit pas seulement de pain, c’est-à-dire de nourriture temporaire. Un tel projet comblerait un monde peuplé de mammifères supérieurs. Mais l’homme porte en lui une angoisse qui explose quand tout va bien. Il a soif de toutes les paroles qui sortent de la bouche de Dieu[175]. Il désire l’éternité. Or cette dernière tentative ne propose pas d’espérance pour l’autre monde. Elle butera tôt ou tard sur cet écueil. Dans les pays qui l’ont déjà réalisé, il existe une incompréhension des hommes politiques devant l’attitude de peuples qui, ayant tout, se plaignent que tout va mal. On se mordait la langue de douleur. Cela se traduira par des épidémies de suicides de jeunes et de vieux. Il y aura nécessairement une mystérieuse propension pour l’alcool ou les drogues, pour le psychologue et l’anxiolytique. Une prise de conscience des élites ne manquera pas de se faire, tôt ou tard : ces peuples unifiés sont malades. Ils manquent de religion…
Pour cette raison, même à un plan strictement sociologique, il est certain que cette belle construction ne pourra être que passagère. Elle ne pourra être le dernier des antichristianismes.
Une deuxième question se pose. Peut-on affirmer, au plan d’un regard de sagesse chrétienne, que l’humanisme sans Dieu tel que je viens de le décrire sera plus terrible pour le salut éternel que les antichristianismes des xixe et xxe siècles ? N’y a-t-il pas là une exagération, un blasphème contre l’humanité ? Que peut-il y avoir de pire que le nazisme ou le communisme, comme le dit jadis le pape Pie XI (Encyclique Mit brennender Sorge).
Je ne parle pas ici du meurtre des corps. Dans ce domaine, le nazisme et le communisme sont au-dessus de tout. Il s’agit du meurtre des âmes, selon la parole de Jésus : « Je vous le dis à vous, mes amis. Ne craignez rien de ceux qui tuent le corps et après cela ne peuvent rien faire de plus. Je vais vous montrer qui vous devez craindre. Craignez Celui qui, après avoir tué, a le pouvoir de jeter dans la géhenne ; oui, je vous le dis, Celui-là, craignez-le. »
En effet, loin de provoquer des massacres, cette philosophie voudra les éviter et les interdire. Mais plus l’humanité approchera de sa fin, plus les textes guerriers et sanglants de l’Apocalypse prendront leur vrai sens, à savoir celui de Dieu, un sens théologal. Il faut toujours se souvenir, en les lisant, que ces paroles sont d’abord esprit et vie avant d’être l’annonce d’événements matériels. « Nul n’aurait eu la vie sauve », c’est-à-dire pour Jésus, nul n’aurait eu la charité sauve. La grande tribulation dont parle le Christ est celle qui s’attaque à la foi, à l’espérance et bien sûr à la charité.
Pris dans ce sens, il est facile de comprendre pourquoi cet antichristianisme-là est le plus dangereux qui ait jamais existé pour les âmes, quoique pas nécessairement le pire à venir. On pourrait multiplier les analyses pour manifester que la voie proposée par l’humanisme sans Dieu consiste en un égoïsme intelligemment géré. Chacun respecte autrui non par souci d’autrui mais parce que c’est en définitive la meilleure solution pour atteindre un bonheur individuel élevé au rang d’absolu. Mieux qu’une analyse, quelques exemples actuels peuvent être éclairants.
1- Il produit de manière maximale de l’individualisme et de l’égoïsme[177]. L’Europe occidentale en donne depuis quelques décennies un modèle à grande échelle. Ce qui caractérise ces sociétés, c’est une augmentation du souci pour la justice sociale. La misère matérielle n’est plus tolérée. Parallèlement, se manifeste une augmentation frappante de l’individualisme. Chacun cherche à construire son bonheur comme il l’entend, en évitant l’effort et la souffrance. Ainsi, l’amour est la chose dont on parle le plus. Lorsqu’il est source de joie sentimentale et de plaisir sexuel, il est aimé. Mais dès qu’il implique effort sur soi-même ou souffrance en vue du bonheur de l’autre, il n’est plus appelé amour. On n’a jamais vu autant de divorces et de ruptures qu’à notre époque. Il en est de même de la maternité et les jeunes filles rêvent de s’épanouir dans leur profession et leur vie de femme. Mais cet enfant ne doit venir que lorsque l’on veut (parfois même et de plus en plus selon un pedigree de perfection). Le xxe siècle finissant n’aura jamais vu autant d’avortements ou d’enfants mal-aimés. On aime également ses parents et on reconnaît leur devoir la vie. Mais lorsqu’ils sont âgés, sans méchanceté, « mais parce que la vie est si prenante », on les confie à des centres spécialisés où ils ont tout ce qu’il faut matériellement mais où ils meurent de solitude et d’abandon. Ces trois exemples pris dans ce qui fait la plus grande richesse de l’homme (ses relations familiales), manifestent à quel point cet humanisme sans Dieu* est très concrètement source d’égoïsme et donc d’une grande clameur de tristesse au Ciel[178]. Le pire semble être qu’une telle société peut tenir des siècles, les soubresauts de la souffrance spirituelle qu’elle porte en elle pouvant être anesthésiés chez les jeunes dans un étourdissement d’occupations, et camouflés chez les personnes âgées qui deviennent des citoyens marginaux. Elle sombre dans l’égoïsme mais pas dans l’inefficacité car les plaisirs ne sont pas l’unique but. On aspire aussi aux carrières, aux honneurs, aux succès techniques, le tout canalisé par des lois bien faites et aptes à contenir les corruptions. Une telle société sécrète, du fait de son succès, beaucoup d’orgueil.
Il est donc probable que l’humanisme sans Dieu, lorsqu’il se manifestera, ne proposera pas autre chose au monde (tout en corrigeant les excès soixante-huitards actuels).
2- Il produit de manière maximale de l’orgueil et du refus de Dieu. Étourdie par un bonheur matériel réel, l’humanité s’exalte déjà. La « sagesse » proposée par l’humanisme sans Dieu, est en Occident une réussite au plan matériel. Elle est souvent explicitement jetée à la face de Dieu. Nous sommes heureux sans lui. L’hypothèse Dieu est devenue inutile. Il s’agit non seulement d’être libre pour jouir de son pouvoir, mais de se prétendre plus « intelligent » que le Créateur lui-même. On voit des signes de cet orgueil dans la tentation perpétuelle de maîtriser la vie. À une époque où des millions d’enfants sont avortés, on n’hésite pas à en concevoir par tous les moyens possibles. Le clonage reproductif est l’étape recherchée au moment où j’écris ces pages. L’homme rêve d’être bientôt créateur lui-même de la vie. Ce rêve sera plus vite qu’on le croit une réalité.
Après avoir manifesté que la Vie éternelle n’est pas donnée à l’égoïsme, il est aisé de comprendre pourquoi cet humanisme sans Dieu est, au plan théologal, le pire qu’on ait jamais vu. En nourrissant l’égoïsme d’une manière très profonde, en le rendant viable à travers une apparence de bonheur individuel, il façonne efficacement chacun dans la recherche de soi. Étant très séducteur et capable d’anesthésier jusqu’à la conscience de vivre dans l’égoïsme, il est capable plus que tout autre antichristianisme terrestre d’entraîner le refus de l’amour au moment de la mort. Quand un nazi tue puis est tué au nom de sa croyance raciale, il commet un crime contre l’humanité, mais sa propre vie lui paraît souvent moins importante que son idole patriotique[179]. Il y a donc en lui un certain sens du sacrifice individuel. Il en est de même pour un communiste et sa passion (haineuse envers les riches) du bonheur social des pauvres. Quand un humaniste moderne se regarde, il ne voit pas qu’il est égoïste. Il peut se croire longtemps généreux puisqu’il respecte, dans sa recherche de bonheur, la recherche d’autrui. Pourtant, son seul centre d’intérêt est lui-même. Ainsi, cette forme de pensée est capable de disposer plus que tout autre système politique un peuple entier à se plonger en enfer lorsque le vrai Évangile, celui de l’amour jusqu’au mépris de soi, est proposé. Quelle difficulté en effet pour un homme habitué à ne penser qu’à son plaisir, de choisir dans une conversion totale l’amour fidèle jusqu’au mépris de soi-même.[180]
Pourquoi Dieu le
permettra-t-il ?
[Chose certaine]
« Nous
savons que nous sommes de Dieu et que le monde
entier gît au pouvoir du Mauvais. »[181]
La question qui se pose maintenant est de savoir pourquoi Dieu permettra à cet antichristianisme de s’étendre dans le monde entier à l’approche de la fin du monde. Au long du chapitre précédent, nous avons pu trouver, aux malheurs matériels et politiques qu’il a permis jusqu’à aujourd’hui, quelques explications dans son projet de salut universel. Mais il s’agit ici de malheurs spirituels qui, en développant de manière grave l’égoïsme et l’orgueil, semblent mettre en danger le salut éternel de toute une génération.
Quel bien peut-il sortir de cela ? Un bien immense en vérité puisque le Seigneur va jusqu’à affirmer à propos de ces événements : « Lorsque vous verrez tout cela, soyez dans la joie et redressez la tête car votre Rédemption est proche. » Dieu ne se contente pas de regarder les réalités extérieures et politiques. Il lit au fond des cœurs. Et que discerne-t-il dans les peuples d’Occident qui vivent déjà dans un tel humanisme sans Dieu* ? Un grand égoïsme vécu dans le bien-être matériel, mais aussi beaucoup de souffrances spirituelles. Le livre de la Sagesse les décrit de manière saisissante[182] : « Oui, les jugements de Dieu sont grands et inexplicables, c’est pourquoi il a permis que des âmes sans instruction s’égarent. Ils gisaient enfermés sous leurs toits, bannis de la providence éternelle. Ils furent dispersés, en proie à de terribles frayeurs, épouvantés par des fantômes. Car le réduit qui les abritait ne les préservait pas de la peur ; des bruits effrayants retentissaient autour d’eux, et des spectres lugubres, au visage morne, leur apparaissaient. Aucun feu n’avait assez de force pour les éclairer, et l’éclat étincelant des étoiles ne parvenait pas à illuminer cette horrible nuit. » L’humanisme athée n’arrive en effet qu’à anesthésier les plaies vives de l’absence de Dieu. Il ne peut entièrement retirer du cœur des hommes la soif de désirer plus qu’un vague bonheur humain et passager. Pour exprimer cette douleur terrible de ceux qui n’ont plus de foi en l’amour, Jésus s’exprime ainsi[183] : « Malheur à celles qui seront enceintes ce jour-là et à celles qui allaiteront. » Cette image symbolise tout le malheur de ceux qui, attachés à la terre comme unique possibilité de bonheur, voient à l’heure de leur fin que même ce bonheur est vain.
On pourrait multiplier dans l’Écriture les exemples de descriptions de la douleur spirituelle. Le désespoir est en fait plus terrible que la souffrance matérielle accompagnée d’espérance. L’image du monde actuel et de tout humanisme sans Dieu est à rechercher dans les maisons de retraite. On y vit bien, on y est nourri et lavé et même parfois aimé. Pourtant, l’âme des personnes âgées se meurt de solitude. Dieu connaît cette souffrance. Il discerne les abîmes infinis de pauvreté qui s’y creusent. Il sait qu’en définitive le monde de l’antichristianisme, à cause de ces souffrances, dispose les âmes à la Vie éternelle. Nul ne peut soupçonner l’allégresse de ces pauvres gens. À l’heure de la mort et de l’apparition du Christ, lorsqu’ils découvrent que tout cela n’était que mensonge, la plus grande partie des hommes se précipitera vers l’amour, incapable de s’obstiner dans l’égoïsme dont ils connaissent les fruits amers. Rappelons que seul le blasphème obstiné contre l’amour, maintenu fermement à l’heure de la mort, conduit en enfer.
[Chose probable]
L’humanisme sans Dieu semble être, si l’on suit la lettre des prophéties, une simple étape. Si l’on suit la lettre des Écritures saintes, plusieurs passages montrent qu’il y a une place pour quelque chose de plus profond. Saint Paul parle explicitement[184] d’un aspect bien plus terrible : « Avant la fin, il doit se révéler l’Homme impie, l’Être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu. » Nous verrons dans la section suivante de quoi il s’agit.
Troisième
étape
La révélation de l’Adversaire
[Chose certaine pour le fait, probable quant à l’idéologie][185]
« Alors
l’Impie se révélera, et le Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa
bouche, l’anéantira par la manifestation de sa Venue. »[186]
On peut citer à titre d’application de ce texte un extrait du secret de La Salette[187] :
« En l’année 1864, Lucifer* et un grand nombre de démons seront détachés de l’enfer. Ils aboliront la foi peu à peu et même dans les personnes consacrées à Dieu. Ils les aveugleront de telle manière, qu’à moins d’une grâce particulière, ces personnes prendront l’esprit de ces mauvais anges. Plusieurs maisons religieuses perdront entièrement la foi et perdront beaucoup d’âmes. Les mauvais livres abonderont sur la terre et les esprits des ténèbres répandront partout un relâchement universel pour tout ce qui regarde le service de Dieu. Ils auront un très grand pouvoir sur la nature. Il y aura des Églises pour servir ces esprits. Des personnes seront transportées d’un lieu à un autre par ces esprits mauvais, et même des prêtres, parce qu’ils ne seront pas conduits par le bon esprit de l’Évangile, qui est un esprit d’humilité, de charité et de zèle pour la gloire de Dieu. On fera ressusciter en apparence des morts et des justes. Il y aura en tous lieux des prodiges extraordinaires, parce que la vraie foi s’est éteinte et que la fausse lumière éclaire le monde. »
L’existence de Dieu étant explicitement reconnue, verra-t-on l’humanité entière se révolter consciemment contre lui, contre son désir de l’humilité et de l’amour ? C’est de cela qu’il s’agit ici.
Saint Paul[188] affirme qu’avant le retour du Christ, une dernière étape dans la voie de l’apostasie* doit se réaliser. Il est très difficile de la décrire et d’en parler tant elle paraît de nos jours improbable et inimaginable. Nous n’en sommes visiblement pas rendus là. Pourtant, il convient de faire effort. Ce qui est incroyable aujourd’hui peut être normal demain. Aucun homme du xviie siècle, aussi lucide soit-il, ne pourrait croire à un livre parlant du xxe siècle et de ses divers Antéchrists aux centaines de millions de morts. L’apparition de la Salette, parce qu’elle décrivait de telles horreurs, fut d’ailleurs tenue en suspicion par le clergé malgré la reconnaissance officielle de l’Église.
Les paroles de saint Paul ne se réaliseront pas seulement de manière imagée : « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. »[189] Les divers égoïsmes et les orgueils de tous les temps n’en sont que des préfigurations. Ces prophéties se réaliseront historiquement et à la lettre. Saint Paul précise sa pensée. Pour lui, à la fin du monde, ce qui est caché sous l’iniquité actuellement en chemin se révélera à tous en plein jour.
Or qui est le maître d’œuvre de tout si ce n’est Lucifer, l’ange révolté ? C’est lui qui organise l’histoire au-delà de son apparente anarchie. L’ordre qu’il y cache s’unifie dans un principe, une haine pour l’humilité et l’amour. Logiquement, on peut affirmer que le péché ultime de la fin du monde consistera en une reconnaissance mondiale de Lucifer* dans sa révolte contre Dieu. Il ne peut y avoir pire péché dans l’humanité puisque, pour la première fois, il est lucide. Lorsque l’heure sera venue, lorsque les religions anciennes auront disparu, laissant un vide et une soif spirituels dans le cœur des hommes, un dernier Antéchrist proposera au monde une religion nouvelle parlant de Vie éternelle. Il s’agira de la religion de l’Ange de Lumière, Lucifer.
Ce qu’est « le mystère de l’iniquité »
[Chose certaine]
Il faut d’abord se souvenir avec précision de l’histoire des anges et de l’origine des démons, ces anges devenus mauvais. Leur révolte constitue ce que saint Paul appelle le mystère de l’iniquité, à la racine de tout mal. C’est elle, nous le verrons, qui doit se révéler et être proposée de manière explicite à l’humanité vers la fin du monde. Je le raconte ici de manière imagée, en utilisant à la façon humaine l’artifice d’un dialogue entre Dieu et les anges. Il s’agit bien sûr d’une façon simple d’exposer les choses. Que le lecteur ne se trompe pas. Le monde des purs esprits n’utilise pas de mots. Les anges n’ont jamais eu de corps. Ils sont de purs esprits. Il est très difficile de comprendre vraiment ce que peut être, et comment peut vivre une personne qui n’a pas de corps[190].
Au
premier instant de leur création, création qui précéda celle des hommes, tous
les anges étaient bons. Le plus grand d’entre eux, Lucifer, par la beauté de
son être était le chef-d’œuvre de Dieu. Les autres anges n’en éprouvaient pas
de jalousie. Bien au contraire, en contemplant sa perfection, ils se faisaient
une idée de l’infinie grandeur du Dieu caché qui venait de les créer. Tous les
anges aimaient Dieu, affirme saint Thomas d’Aquin. Ils n’avaient que
reconnaissance pour ce qu’ils venaient de recevoir de sa main, l’existence, la
vie, la beauté. Ce spectacle de la création leur faisait crier d’une seule
voix : « Gloire à Dieu au
plus haut des Cieux. »
S’ils
l’aimaient, ils ne pouvaient par contre le connaître, sinon de loin. Même pour
le plus intelligent des anges, Dieu reste le Mystère par excellence.
L’intelligence des esprits célestes a beau être de loin supérieure à la nôtre,
elle reste limitée. Comment un vase fini (l’ange) pourrait-il contenir l’Infini
(Dieu) ? Ils se contentaient donc de connaître Dieu à travers les effets
de sa puissance. En se regardant eux-mêmes, en regardant les autres anges, ils
voyaient comme dans un miroir le reflet lointain du Créateur. Cette vie paisible
et contemplative leur plaisait. Le monde aurait pu rester ainsi pour
l’éternité.
Pourtant,
alors que la création était encore toute nouvelle, Dieu parla. Il s’agit d’une pensée, d’une révélation transmise directement
dans l’intelligence de chaque ange. Pour mieux manifester la Bonne Nouvelle
qu’il annonça aux anges, on peut la décomposer en trois paroles distinctes.
1-
Dieu dit : « Je vous ai
créés pour que vous me voyiez face à face. » Cette première
révélation est bouleversante pour un ange, bien plus que pour un homme, car
l’ange a la capacité d’en saisir immédiatement toute la portée. Voir Dieu face
à face signifie pour eux l’impensable. Il leur était impossible d’espérer par
eux-mêmes un tel bonheur. Ils savaient bien plus que nous l’infinie profondeur
du mystère divin et la limite de leurs capacités intellectuelles. Voir Dieu
face à face, cela signifie comprendre son Mystère avec le regard même dont Dieu
se comprend. Or une telle chose est impossible. Pourtant, les multitudes
d’anges avaient bien entendu. Ils crurent donc, ils adhérèrent à cette parole
de Dieu, malgré son caractère impensable, sachant que rien n’est impossible à
Dieu. Lucifer le premier crut. Avec lui, les chérubins, les séraphins et tous
les ordres célestes désirèrent voir se réaliser cette promesse. Cette adhésion
s’appelle la foi. Mais déjà, en ce premier instant, Dieu savait que Lucifer
croyait pour un autre motif que le petit archange Michel.
2-
Dieu parla encore : « Je
suis doux et humble de cœur. Nul ne peut me voir face à face s’il n’est tout
amour et toute humilité. » Les anges savaient, par leur
contemplation naturelle, que Dieu ne pouvait les avoir créés que par amour.
Mais ils découvrent avec stupeur en cet instant que Dieu est amour. Leur
contemplation naturelle les invitait plutôt à admirer en premier lieu
l’intelligence du Créateur, sa lumière. Le monde angélique leur paraissait
davantage beauté que bonté. Par sa parole, Dieu les invita à bouleverser entièrement
leurs conceptions habituelles. Quand Dieu affirme qu’il est amour avant tout,
quand le Tout-puissant révèle qu’il se considère comme le serviteur de tous
(humilité), il manifeste que la perfection naturelle des Chérubins n’est rien à
ses yeux comparée à l’amour. Son ordre de préférence n’est pas celui que donne
la noblesse mais celui que donne le cœur. Il leur demande une conversion
totale. Devenir amour est la condition nécessaire pour toute entrée dans la
vision béatifique.
Là
se situe l’épreuve terrible pour les anges : renoncer à eux-mêmes. C’est
déjà difficile pour un être humain qui est chaque jour confronté à ses
imperfections. Cela l’est beaucoup plus pour un pur esprit, image parfaite de
la perfection de Dieu. L’orgueil est un défaut plus proche des anges que des
hommes. Cette abnégation, nous l’avons dit, est indispensable car la vie
proposée est surnaturelle.
3-
Une troisième parole fut prononcée : « Après vous, je vais créer de petits êtres liés à un corps de
chair. Homme et femme, je les ferai. Ils auront des enfants. Vous deviendrez
pour eux anges gardiens. Conduisez-les à moi. »[191] Cette révélation
était extrêmement concrète, si concrète qu’elle avait le pouvoir de discerner
qui parmi les anges était humble de qui ne l’était pas. La Bible dit[192] : « Dieu sépara la lumière des
ténèbres ». Cette simple phrase nous montre qu’il se produisit une
rupture entre la présomption des uns et l’amour des autres. C’est le contenu de
cette révélation première qui provoqua ce premier drame de la création, le mystère premier de l’iniquité. En effet, dans
l’instant qui suivit, un de ces instants célestes qui mesure la pensée des
anges, une voix cria : « Je ne
servirai pas »[193]. Le plus beau de
tous,
Lucifer, avait parlé, devenant pour toujours le Satan. Lucifer est le plus
grand des anges, c’est-à-dire le plus puissant au point de vue intellectuel,
le plus proche de Dieu par sa perfection spirituelle. Lucifer respecte Dieu. Il serait aberrant d’affirmer que les anges veulent du mal à
leur Créateur. Ils savent qu’ils lui doivent tout. Le problème de Lucifer
est qu’il voyait en lui le sommet de tout l’univers devant qui tout genou
fléchit. Il avait surtout dès cet instant premier le sens de sa dignité à lui,
Lucifer, de sa place de chef de tous les anges. L’ordre premier, instauré par
Dieu au début de la création et fondé sur la puissance spirituelle, lui donnait
la première place, qui lui convenait tout à fait. Lucifer n’était pas contre la
création des êtres humains, ces esprits limités et chétifs liés à des corps matériels
; à condition, toutefois, qu’ils soient dans la hiérarchie des êtres de l’univers,
c’est-à-dire au-dessous des anges, juste au-dessus des animaux.
Mais
il comprenait qu’il en serait autrement. L’ordre qui plaisait à Dieu n’était
pas en fin de compte celui que confèrent les titres de noblesse
intellectuelle, mais celui que confère l’humilité, la petitesse et surtout la
capacité d’aimer. Or, dans cet ordre-là, l’homme et la femme étaient des
créatures mieux bâties pour triompher. Un ange qui est une intelligence pure,
aime dans la mesure où il a compris que quelque chose est digne d’être aimé.
Aimer, pour lui, signifie « vouloir s’unir à ce qu’il a compris être un
bien ». L’homme, au contraire, avec son intelligence limitée, a la
capacité d’aimer sans même comprendre. Il peut aimer son Dieu dans une foi et
une confiance aveugle. Dans ce qu’il a de meilleur en lui, l’homme peut aimer
un ami jusqu’à donner sa vie pour lui, donc au-delà de ce qui est logique.
C’est cette manière d’aimer qui plaît au Tout-puissant au point que, plus il
trouve en face de lui un être semblable, plus il se donne à lui et l’établit
haut dans la hiérarchie des êtres.
Lucifer
scrutait, en pensée, la nature humaine. Il y discernait l’homme avec sa
psychologie portée à comprendre le monde, à le transformer, et la femme avec sa
psychologie davantage portée à comprendre avec son cœur. Plus que l’homme, la
femme l’obsédait. Le projet de Dieu lui apparut alors en pleine lumière, avec
ses conséquences terribles pour son orgueil. Lui, Lucifer, et tous les esprits
célestes avec lui, les Chérubins, les Séraphins et les Trônes, les Dominations,
les Vertus, les Puissances, les
Principautés, les Archanges et les Anges, étaient appelés par Dieu à s’abaisser
à servir ces êtres de boue et d’os, à les protéger et les conduire durant un
séjour terrestre, pour qu’ils deviennent, en fin de compte, plus grands
qu’eux. Alors, Lucifer fut saisi d’envie. Plus que pour l’homme, il fut
pris d’une hostilité pour la femme et il proclama à la face du ciel : « Je ne servirai pas. » Il
devint, en un instant, d’une manière parfaitement lucide, le héraut de la
défense des « droits » de Dieu et de la défense de la place
hiérarchique des anges. Il proclama sa révolte.
Lucifer
étant le plus spirituel des anges, il eut par ses arguments une influence
terrible sur le reste du Ciel. La Bible dit que le dragon rouge feu (couleur
symbolisant la colère) balaya le tiers des étoiles du ciel[194]. Ce nombre n’est
pas à prendre nécessairement au sens propre mais il manifeste tout de même que
les démons sont nombreux (le tiers des anges). Son influence vint sans doute de
la noblesse de ses arguments. Il prétendit n’agir ainsi que pour le bien de
Dieu. Son argument aurait eu encore plus de poids si, comme le pensent certains
théologiens, les anges avaient connu dès le début le projet de l’incarnation du
Fils de Dieu en Jésus-Christ. Un tel projet ne peut être que scandaleux aux
yeux des esprits purs.
Lucifer
était-il vraiment le défenseur des droits de Dieu ? Son amour pour lui
était-il la vraie raison de sa révolte ? Beaucoup d’anges ne s’y
laissèrent pas prendre (les deux tiers si l’on prend les textes à la lettre).
L’Apocalypse parle ainsi : « Alors
une bataille s’engagea dans le ciel : Michel et ses anges combattirent le
dragon. Et le dragon riposta, appuyé par ses anges, mais ils eurent le dessous
et furent chassés du Ciel »[195]. Ce combat ne se fit
pas avec des épées d’acier mais avec le glaive de la vérité. Un simple
archange, c’est-à-dire un esprit des hiérarchies inférieures, fut le premier à
dénoncer le mensonge de Satan : « Ce
n’est pas pour Dieu que tu luttes mais pour toi. Si tu aimais vraiment Dieu tu
obéirais à sa volonté. Ce qui t’importe, c’est de rester le premier. C’est
l’orgueil qui t’a aveuglé. Mais qui est comme Dieu ? »[196] Michel, par cette
parole de vérité entraîna à sa suite ceux que Lucifer ne put séduire.
La
Bible ne cesse de confirmer cet orgueil primitif de Lucifer, qu’il sut si bien
camoufler en grandeur de sentiment. Isaïe, parlant de lui, déclare : « Comment es-tu tombé du ciel, étoile
du matin, fils de l’aurore ? Comment as-tu été jeté sur la terre, vainqueur
des nations ? Toi qui avais dit en ton cœur : j’escaladerai les
Cieux, au-dessus des étoiles de Dieu j’élèverai mon trône. Je m’égalerai au
très haut. »[197] Quant à Jésus, il
n’hésite pas à affirmer que Satan fut menteur dès l’origine[198]. Il fut le prince
du mensonge. En effet, il n’y a pas de plus grand mensonge que d’appeler bien
ce qui est mal.
Que
sont devenus les anges depuis l’éclat de leur création et la chute de certains
d’entre eux ? Ils furent divisés en deux groupes selon le choix qu’ils
firent de servir ou de lutter contre le projet de Dieu. Les anges bons furent
immédiatement introduits dans la vision de Dieu et, depuis ce jour comme
aujourd’hui, ils ne la quittent jamais. Les anges mauvais se séparèrent de Dieu
et Jésus affirma que leur rupture ne cesserait jamais. Lucifer et ses anges
sont damnés pour l’éternité. Certains chrétiens pensent que l’éternité de
l’enfer est contradictoire avec la bonté de Dieu. Ils pensent que Dieu
pardonnera un jour son péché à Lucifer et le prendra auprès de lui. Ils parlent
ainsi car ils comprennent mal le mystère de leur choix, à savoir d’une manière
terrestre et trop humaine. L’homme tant qu’il est sur la terre peut toujours
revenir sur ses fautes. Dieu le reçoit alors et lui pardonne. L’ange, quant à
lui, est trop intelligent pour être soumis à ces revirements. Quand un ange
choisit, il sait ce qu’il choisit. En un instant, il pèse le pour et le contre,
et son intelligence, comme une lame tranchante, ne laisse rien dans le vague.
Lucifer et ses anges savaient ce qu’était l’enfer, ce vide de Dieu. L’enfer ne
leur a pas paru un mal si terrible face à la perte de cet autre bien qu’ils mirent
à la place suprême dans leur cœur : la première place. Dieu aurait
beau pardonner infiniment à Lucifer, celui-ci répondrait indéfiniment :
« J’ai raison ».
Voici le combat qui est caché sous la
dénomination « mystère de
l’iniquité ». Ses conséquences sur notre humanité sont
aisées à déduire.
Satan, celui qui rampe sur la terre
Que font les démons maintenant ? La Bible affirme « qu’ils furent précipités sur la terre »[199]. Cette phrase mystérieuse signifie que leur unique obsession, l’objet de
toute leur activité, c’est l’humanité. Les démons, logiques avec leur choix
originel, désirent détruire l’homme, surtout au plan spirituel. Leur ennemi
premier est tout ce qui rappelle, de près ou de loin, l’humilité ou l’amour
généreux (d’où leur haine particulière pour la nature féminine orientée par la
maternité). S’ils pouvaient arriver à faire que l’homme, ce soi-disant chef
d’œuvre, se joigne lucidement à leur révolte, leur victoire leur semblerait complète[200]. Ils espèrent, de cette manière, démontrer à Dieu son erreur grossière,
la stupidité de ses plans. Ils souhaiteraient obtenir le rétablissement de
l’ancien ordre qui leur plaisait, l’ordre de la noblesse fondée sur des droits
de nature. Ils croient pouvoir arriver à faire fléchir Dieu, à le faire revenir
sur son histoire d’humilité et d’amour.
Dieu laissa à Lucifer devenu Satan (celui qui divise et tente l’homme) et
à ses démons une certaine latitude pour agir de manière parfois très concrète
auprès des hommes. Dans sa limpidité, Dieu savait que les propositions fallacieuses,
les tentations, permettraient à ceux qui l’aiment de le choisir plus librement.
Les démons et leurs roueries devinrent donc, sans même le soupçonner, les
serviteurs du plan de Dieu pour la vie éternelle des hommes.
Dès le commencement, dès la création d’Adam et Ève, ils agirent dans ce
but. À cette époque, Satan apparut de manière visible et proposa de manière
claire le mystère de l’iniquité : « Choisissez
vous-mêmes ce qui est le bien et le mal. Vous ne mourrez pas mais vos yeux
s’ouvriront et vous deviendrez comme des dieux. C’est de
cela que Dieu a peur ! »[201]
Depuis le péché originel et jusqu’à nos jours, les démons se sont faits
en apparence plus discrets. Ils passent leur temps à tenter les hommes, se
cachant dans leur psychologie, se fondant avec leur cerveau. Ils le tentent par
ses pulsions charnelles (vanités, richesses et plaisirs) car ils comprennent
que la voie qui conduit au rejet de l’humilité et de l’amour commence par des
péchés moins graves mais plus immédiats pour les humains. Comme ils passent
leur temps à s’occuper de péchés charnels, les démons qui sont des créatures
spirituelles, sont dits par la Bible rampants sur la terre[202].
Mais il semble être annoncé que, vers la fin du monde, Satan redeviendra
devant les hommes ce qu’il est, à savoir Lucifer, un être spirituel que seul
intéresse le péché spirituel. Toute cette histoire devient essentielle si on le
comprend. Vers la fin du monde, il est annoncé que ce qui était clair aux temps
d’Adam et Ève sera de nouveau visible dans l’humanité. Selon saint Paul[203], « l’Adversaire
se révélera, se produisant lui-même comme Dieu », à travers l’action d’un
dernier Antéchrist, pour que l’humanité le suive lucidement. La Genèse
rejoindra l’Apocalypse, de manière visible pour tous.
Cela est-il imaginable ? Pour répondre à cette question, il convient de se souvenir qu’un culte explicite de Lucifer existe depuis toujours. De nos jours, il est certes marginal mais il prend deux formes intéressantes à décrire. Les grandes religions n’ont cessé de lutter contre lui sans jamais aboutir tout à fait.
Les satanistes sont, à la différence des lucifériens, des philosophes et non des croyants. Leur culte est purement symbolique[204]. Ils ne croient pas en l’existence réelle des démons mais admirent la mythologie chrétienne de leur révolte. En fait, tout cela est pour eux un instrument provocateur pour inciter au culte de l’Homme (666*). C’est une philosophie de la chair et de l’esprit humain. L’individualisme et l’intelligence y sont prédominants. Le satanisme a été formalisé et structuré. Le Docteur Anton Szandor Lavey créa aux États-Unis The Church of Satan. Il déclara l’année 1966, an 1 de l’ère satanique. En 1969 parut la Bible satanique qui aujourd’hui se vend à des milliers d’exemplaires à travers le monde et ce dans différentes traductions.
Les lucifériens sont au contraire de véritables croyants. Il ne s’agit plus chez eux de simple philosophie mais d’une religion de Lucifer (nom de l’ange révolté, debout dans la noblesse de sa lutte contre Dieu). Les lucifériens sont très spirituels puisqu’ils prétendent connaître et adhérer explicitement à la révolte de l’Ange déchu. Ils croient en son existence et le vénèrent comme leur Dieu.
• Selon eux, Dieu existe. Il est le créateur du Ciel et de la terre, des anges et des hommes.
• Le paradis consiste à voir Dieu face à face et, par là même, à posséder la plénitude de la connaissance et de la puissance divine.
• Mais Dieu se rendit responsable d’une faute impardonnable. Originellement, il avait créé le monde selon un ordre parfait. L’esprit le plus intelligent régnait sur les autres. Le paradis était dû par nature aux anges en premier, puis aux hommes en fonction de leur intelligence puisqu’ils avaient été créés pour cela.
• Or Dieu se repentit de son œuvre et décida de mesurer le don de sa gloire et de sa puissance à l’humilité et à la capacité d’aimer. Lucifer fut le premier à protester et à manifester à Dieu, lucidement, à quel point il se fourvoyait. Il le fit pour l’honneur du Créateur Tout-Puissant, ne voulant pas se résoudre à l’auto-mutilation de sa toute-puissance.
• Les lucifériens vénèrent Lucifer, comme un maître spirituel. Ils font de son combat le leur. Ils espèrent participer à sa puissance en l’aidant dans sa révolte.
• Les rituels qui accompagnent cette religion sont pacifiques (pas de sorcellerie ni de sacrifices). Ils sont le fait d’hommes libres et fiers, de collaborateurs de l’Ange révolté, conscients de la justesse de leur exigence.
• Le signe le plus répandu chez les lucifériens est sans contredit le symbole de Baphomet (bouc) et le Pentagramme inversé. Ils renversent les symboles chrétiens car ils croient en la possibilité d’un antichristianisme parfait. Ils se donnent comme métaphysique et comme valeurs morales l’inverse même de ce qu’enseigne cette religion.
Au plan moral, leurs convictions sont celles de Lucifer au jardin d’Eden.
• Être maître de sa connaissance et de son choix personnel de ce qui est bien et mal, pour être comme Dieu.
• Mettre en premier dans sa vie le développement de ses capacités de connaissance et de maîtrise de soi, afin de vaincre les faiblesses imposées à la nature humaine après le péché originel.
• Accéder à la maîtrise de l’arbre de vie (par la science biologique), pour vaincre le dernier ennemi imposé par Dieu, la nécessité de mourir.
• Se tenir droit devant les adversités et la mort. Ne jamais baisser sa garde dans une demande de pardon ou de pitié, même face à la séduction du Christ à l’heure de la mort.
• Uni à Lucifer à l’heure de la mort, exiger de Dieu le don de la Vision béatifique comme un droit et un mérite de nature pour tout esprit.
En attendant l’entrée dans la vie éternelle, les lucifériens encouragent leurs adeptes à la recherche du bien-être individuel, intelligemment géré.
• Profiter de la vie, ne se priver de rien. Faire ce dont on a envie, suivre ses instincts, sans en abuser. Ils n’apprécient pas l’homme esclave de ses pulsions car sa libre révolte s’en trouve diminuée.
• Vivre dans la liberté. Explorer avec enthousiasme les plaisirs de la vie.
• Le suicide est désapprouvé car la vie est passagère, donc précieuse.
Le luciférisme rappelle les premiers chapitres de l’humanité dans le livre de la Genèse. À la fin du monde, il est probable que le dernier antichristianisme ressemblera à cela, mais de manière universelle et mondiale. Au plan théologique, il s’agira donc du plus grand antichristianisme imaginable. En effet, il ajoutera aux autres une parfaite lucidité de l’enjeu. Il n’y aura plus l’excuse de l’ignorance (athéisme ou agnosticisme). L’humanité le suivra en sachant que Dieu existe. Les hommes spirituels comprendront alors à quel point les divers antichristianismes précédents n’étaient que des étapes, nécessaires car préparatoires et ordonnées vers cette religion ultime. Il y a en effet une lecture luciférienne du sens de l’histoire qui tend, d’orgueil en orgueil, vers cet orgueil de plus en plus mûr et responsable.
Est-il
possible qu’un culte de Lucifer devienne une religion
mondiale ?
[Chose probable]
L’humanité dans son ensemble peut-elle aller jusque là ? Au plan des prophéties, il semble ne pas y avoir de doute. Nous l’avons vu, l’Écriture parle souvent, de manière explicite, d’une telle unanimité dans le rejet de Dieu. Elle ne parle pas seulement d’un rejet de Dieu compte tenu des effets de son action (ou de son inaction). Elle parle d’un rejet de Dieu en lui-même. Faut-il voir dans un texte comme celui de saint Paul une exagération apocalyptique ? Ce serait une exception. La réalité a plutôt tendance à dépasser en gravité les écrits prophétiques.
Au plan d’une connaissance philosophique des sociétés humaines, rien ne s’oppose à une telle extrémité, à condition de préciser ceci : chaque être humain est capable de liberté. Mais les conditionnements sociologiques limitent cette liberté. Il n’existe pas sur terre d’unanimité totale ni pour le mal ni pour le bien. Il est inimaginable que tous les membres d’une communauté humaine choisissent comme un seul homme telle ou telle philosophie. Le nazisme, même après sa grandiose réussite contre la France (1940), eut toujours des opposants cachés mais lucides. De même, le fait de lutter contre Dieu de manière libre et consciente, c’est-à-dire en sachant qu’il existe et ce qu’il veut, ne peut manquer de paraître à quelques-uns comme ce que c’est, une folie vertigineuse.
L’humanité dans son ensemble constitue une structure où chaque individu peut être conditionné et entraîné vers des actions qu’il ne ferait pas seul. Dans certaines conditions, comme prise de folie, une communauté peut prendre un tel ascendant sur les individus qu’elle semble les entraîner inéluctablement dans la direction de l’ensemble. Le pape Jean-Paul II appelait ce mécanisme une structure du péché. Il employait cette expression dans l’analyse sociologique du nazisme en Allemagne. Chaque Allemand, pris individuellement, se serait sans doute révolté à l’idée de l’extermination par la guerre de millions d’hommes innocents. Pourtant, le peuple [presque] tout entier (apparemment en tout cas) parut entraîné dans un enthousiasme communicatif (désir de revanche nationale, misère matérielle et morale, charisme de son guide) et applaudit l’idée d’une guerre.
Il semble que ce même mécanisme permette d’expliquer certains comportements ultimes et limites de l’humanité tels qu’ils sont annoncés pour la fin du monde. Ces événements sont terribles au plan spirituel. Le culte explicite de Lucifer dans sa révolte première peut ressembler fortement au blasphème contre l’Esprit Saint tel que nous l’avons défini[205].
Pourtant, il ne faut pas confondre. Une apparence de blasphème contre l’Esprit n’est pas nécessairement sa réalité. Il peut arriver qu’un groupe d’hommes se mette à rejeter Dieu tout en sachant qu’il existe, mais sans savoir, à cause de l’entraînement d’une folie collective, ce qu’il fait vraiment. « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »[206], disait Jésus à propos de ce peuple qui avait vu ses miracles, l’acclamait… avant de rire devant sa mort.
L’observation des comportements humains dans les sociétés occidentales donne une certaine idée de ce que sera l’orgueil collectif de la fin. Je voudrais donner quelques exemples capables d’illustrer la possibilité d’une révolte contre le bien et le vrai, même explicitement connus. Une humanité peut être tellement attachée à sa liberté qu’elle rejette l’idée même de Dieu, pour ne pas subir ses règles morales.
À Fatima[207]* en 1917, la Vierge apparut. Quelques enfants prétendirent la voir. Elle leur parla ainsi : « Mon fils va donner à l’humanité un signe grandiose qui sera visible pour tous. »[208] Pour celui qui sait interpréter ce genre de textes apocalyptiques, le sens premier est facile à découvrir. Le ciel symbolise l’intelligence et le cœur humain. Ce qui est annoncé n’est autre qu’une série de signes donnés à l’intelligence, des signes évidents, des preuves[209] de l’existence de Dieu et de sa révélation.
Or, durant l’été 1917, ce signe se produisit matériellement. À grand
renfort de publicité journalistique, une nouvelle parvint au monde entier
depuis le Portugal. Devant cent mille personnes dont beaucoup, dignitaires
notoires de la Franc-maçonnerie*, étaient venues pour se moquer, le soleil
s’était mis à danser. Le miracle avait duré plus d’un quart d’heure. On
comprend l’importance de cette annonce. Une hallucination collective peut
frapper un peuple de croyants fanatisés. Mais les observateurs rationalistes et
avertis y échappent toujours. Un tel signe prouvait alors en un certain sens
l’existence d’une présence mystique à Fatima.
Mais, dans cette histoire et pour ce qui concerne notre sujet, l’essentiel n’est pas là. En effet, on aurait pu espérer, de la part d’une humanité en quête du sens de la vie, un début de questionnement intéressé. « Cela est-il vrai ? Y a-t-il eu contre-enquête de la part d’équipes scientifiques différentes ? » Au lieu de cela, la réaction de ceux qui font l’opinion du monde fut un black out total. Aucune revue scientifique ne prit la peine de publier une étude critique du phénomène ou sa contre-vérification. Tout cela passa par pertes et profits. Une sorte de consensus sembla régner dans les organes officiels de recherche : « Cela ne mérite même pas vérification. Cela n’a pas eu lieu parce que cela n’est pas possible. »
Pas possible ? Parce que Dieu n’existe évidemment pas ? Jésus disait : « Même si un mort ressuscitait, ils ne croiraient pas. »[210] Ils ne croient pas parce qu’il leur est pénible de croire et d’en tirer les conséquences. Mieux vaut ne pas se poser de questions plutôt que de perdre la liberté de faire sa volonté. En l’occurrence, la volonté du monde occidental de l’époque était de gagner une guerre dérisoire, quitte à massacrer toute une génération.
Un autre exemple de black out volontaire de ceux qui font l’opinion mérite d’être cité. Il concerne la question de l’origine du monde et les apports de la science à cette question philosophique. Le pape Paul VI était un excellent philosophe. Il s’intéressait beaucoup aux progrès des sciences de la vie. Il était admiratif devant la structure intelligente et extrêmement complexe du monde minéral et vivant. Il se rendait compte que chaque découverte nouvelle manifestait avec davantage de force l’action organisatrice d’une Intelligence supérieure. En 1968, il prononça le discours suivant[211] :
« La science ramènera l’homme à Dieu. Un célèbre savant a dit : ‘Plus j’étudie la matière, plus je découvre l’esprit.’ Celui qui scrute la matière voit qu’il existe des lois. Ce monde qui semblait opaque et inerte est une merveille et le pape pense que ce sera précisément la science qui ramènera à Dieu les masses, les hommes modernes, la jeunesse, elle qui semblait les en éloigner. Lorsqu’il sera devenu sage et vraiment intelligent, le monde dira : 'Je dois tirer la leçon de ce que je vois. Ce n’est pas moi qui ai créé tout cela. Le monde a été créé par quelqu’un qui a répandu sa sagesse sur toute chose'. »
C’est donc la science elle-même qui oblige à être religieux et celui qui est intelligent doit se mettre à genoux et dire : « Dieu est là. » Le scientifique Einstein avait déjà fait ce cheminement[212] : « Je désire savoir comment Dieu a créé le monde. Je m’intéresse à la pensée de Dieu, le reste, tel ou tel phénomène, est détail. »
Lorsqu’on fait beaucoup de science, on se rend compte que l’hypothèse philosophique de l’existence d’un Créateur est loin d’être inintelligente. Plus que cela, la probabilité pour qu’un simple vivant unicellulaire apparaisse par hasard est calculable[213]. Elle ne laisse aucun doute. Que le hasard seul soit à l’origine de la vie est une théorie aussi aberrante que l’apparition, par un phénomène d’entassement dû au hasard d’atomes et de molécules, d’un super-ordinateur moderne. Une Intelligence est nécessairement intervenue. Il est certain, pour toute personne qui réfléchit à ce qu’est l’A.D.N., que la génétique va permettre dans les années à venir de résoudre le problème de l’évolution. C’est la lecture et la comparaison de l’A.D.N. des espèces proches qui dévoilera que, loin d’être due au hasard, il y a là-dessous l’ingénierie d’une formidable intelligence. En France, une telle hypothèse philosophique ne mérite même pas d’être seulement évoquée. Elle est exclue car politiquement incorrecte. Nous avons là l’image, à l’échelle d’un pays, du mécanisme sociologique qui sera peut-être pratiqué de manière universelle vers la fin du monde. En tout état de cause, la France montre que la voie d’un aveuglement volontaire entretenu par ses élites est un phénomène sociologique possible.
L’humanité est donc capable de tout parce qu’elle est un troupeau qui suit majoritairement le berger qui domine son époque. Il suffit que les conditions sociologiques soient favorables et la pire aberration peut être majoritairement crue avec enthousiasme. Il n’est donc absolument pas exclu que, lorsque le christianisme et les religions auront été suffisamment affaiblis, un prédicateur s’adresse au monde et lui révèle l’existence d’une révolte initiale, celle de Lucifer* et de ses anges. Au moment où j’écris, une paix mondiale explicitement luciférienne n’est pas près de s’imposer au monde. Les grandes religions sont encore trop présentes. En sera-t-il de même dans cent ou deux cents ans?
« Jésus disait à la foule : ‘Quand vous voyez un nuage monter au couchant, vous dites aussitôt qu’il va pleuvoir, et c’est ce qui arrive. Et quand vous voyez souffler le vent du sud, vous dites qu’il fera très chaud, et cela arrive. Esprits faux ! L’aspect de la terre et du ciel, vous savez le juger, mais le temps où nous sommes, pourquoi ne savez-vous pas le juger ?’ »[214]
Avant de rapporter qui sera le dernier Antéchrist* et quelle sera son oeuvre, il convient de regarder les signes qui précéderont sa venue. Il sera l’épreuve ultime de l’Église. Il sera aussi l’épreuve ultime de toutes les religions : « Il s’élèvera au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu »[215]. Dieu n’abandonnera pas par surprise l’humanité à une telle lutte. Des avertissements puissants seront donnés au monde entier pour qu’il se prépare à ne pas succomber aux tentations.
Quand viendra l’Antéchrist de la fin du monde ? En premier lieu, on doit affirmer que l’Antéchrist ne viendra pas avant que le monde ne soit parfaitement disposé à le recevoir. Il est évident que, s’il était né au xiie siècle, il n’aurait pu avoir que peu d’influence sur une société imprégnée de religion. C’est donc qu’une longue préparation sera opérée par le maître de ces oeuvres, Satan lui-même. Ainsi, pour que puisse apparaître avec succès une civilisation mondiale explicitement ennemie de Dieu, il faudra d’abord qu’ait existé une humanité sans Dieu. C’est ce qu’on appelle l’apostasie*. Cela ne se fera ni plus vite ni plus lentement que ne le permettent les lois sociologiques qui gouvernent l’évolution des mentalités. Lucifer sait patienter, telle l’ivraie qui pousse à son rythme dans les champs. En ce début du troisième millénaire, quoi qu’en disent les prophètes alarmistes, le monde n’est pas encore prêt. Certes l’Occident a rejeté en grande partie le christianisme pour vivre d’humanisme mais l’Occident n’est pas le monde. De grandes nations africaines restent profondément chrétiennes ou musulmanes. L’Amérique du Sud aime le Christ. L’Inde est presque restée imperméable aux athéismes et demeure profondément religieuse. Tous ces pays et bien d’autres sont puissamment spirituels, selon leurs formes diverses de croyance et ne sont pas prêts à se soumettre au diktat mondial d’une philosophie humaniste sans Dieu. Un long travail de sape reste à accomplir. C’est d’ailleurs ce travail d’apostasie qui sera l’un des signes les plus sûrs de la proximité de la venue du règne de l’Antéchrist.
Nous avons raconté au chapitre précédent comment le christianisme avait été attaqué à la fois de l’intérieur et de l’extérieur depuis plusieurs siècles. Ce fut même la première religion à subir ces assauts car seule sa spiritualité et sa maturité extrêmes pouvaient produire par réaction des philosophies sans Dieu. L’islam*, quant à lui, sera attaqué d’une autre manière qu’il nous faut essayer de découvrir. La crise de cette religion semble en effet être l’instrument qui conduira au rejet des religions dans leur ensemble.
[Selon la tradition
musulmane… Au lecteur d’en juger]
J’ai montré au chapitre 3 l’origine mystérieuse de l’islam. Cette religion, non voulue explicitement par Dieu mais plutôt par la volonté des hommes, fut bénie* après sa naissance au point de devenir la deuxième en nombre. Ainsi se réalisait la promesse faite à Abraham que son fils Ismaël donnerait un peuple nombreux[217].
L’islam est une religion qui a connu deux époques : avant la reconquête de la Mecque, durant l'exil à Médine, elle a reçu deux valeurs morales fondamentales qui sont l’humilité de la servante et la miséricorde (à ne pas confondre avec l'humilité de l'ami et la charité, valeurs fondamentales chrétienne).
Mais dès que tombèrent du ciel les Sourates invitant à prendre les armes, l’islam se durcit. Il eut des défauts de jeunesse d’ailleurs prophétisés par Dieu, à savoir une farouche autonomie (« il sera un onagre d’homme ! »), une grande agressivité guerrière (« il aura un arc »[218]), son sans-gêne (« il s’établira à la face de tous ses frères », c’est-à-dire à la place même des autres religions), sa capacité à exaspérer tous les hommes (« sa main sera contre tous, la main de tous contre lui »). Celui qui fréquente l’islam de l’extérieur se rend compte très vite de la réalité de ces défauts. Or ces défauts humains sont quasi inséparables de l’islam en tant que religion. Mahomet a fondé l’islam de telle manière qu’il est non seulement une manière d’adorer avec humilité le Dieu d’Abraham, mais aussi un système politique guerrier[219]. C’est une réalité qui ne manquera pas d’être utilisée à l’approche de la fin du monde par le démon tentateur. En effet, Satan tente les communautés humaines par là où il le peut. Il ne fait souvent qu’exagérer une qualité, la transformant en défaut. Ainsi, tenté par Satan, le christianisme de la liberté des enfants de Dieu devient, on l’a vu plusieurs fois au cours de l’histoire, le culte du libertinage individuel. De même, s’il faut corrompre l’islam et sa guerre aux règles chevaleresques, ce ne pourra être qu’en le transformant en un hideux massacreur de veuves et d’orphelins.
Comment se produira la lutte de l’Antichristianisme contre l’islam ? Avant de se pencher au plan sociologique sur ce sujet pour discerner ce qui se réalisera probablement dans l’avenir, il est intéressant de lire ce que croient les musulmans eux-mêmes. Rappelons que, très souvent, l’histoire a montré que les religions ou les peuples recevaient de la part de Dieu la révélation prophétique véridique de leur avenir.[220]
Explicitement, dans le Coran, le Prophète
Mahomet annonce, de manière semblable aux chrétiens, la venue de l’Antéchrist
et sa lutte contre les musulmans. Les signes de l’Heure dans la théologie musulmane
sont les suivants[221] : « Nous croyons aux
signes de l’Heure (qui sont) : la sortie de l’Antéchrist, la descente de
Jésus fils de Marie du ciel, nous croyons au lever du soleil du côté de
l’occident (lieu habituel de son coucher), à la sortie de la bête du lieu (de
son refuge). »
Parmi les signes majeurs de l’Heure, on peut retenir[222] :
– Le lever du soleil du côté de l’occident (lorsque la puissance et le pouvoir appartiendront à l’Occident) ;
– La fumée (lorsque la confusion se fera dans les esprits musulmans entre le vrai et le faux) ;
– Le Mahdi* (venue d’un grand prophète islamique) ;
– L’apparition de la bête (qui sera un piège pour les croyants, séduisant les mauvais musulmans en prêchant le faux) ;
– L’Antéchrist (celui qui s’exaltera contre la religion. Le prophète pleurait quand il évoquait sa venue) ;
– La grande guerre contre l’islam (Gog et Magog) ;
– L’apostasie des foules musulmanes ;
– Le retour de Jésus fils de Marie*, et la restauration de l’islam pour l’éternité.
Une dernière prophétie de Mahomet est importante à citer. Elle semble donner la clef des autres : « L’islam a commencé étranger. Il finira étranger. » Le sens en paraît évident. Il s’agit de l’annonce explicite d’une diminution de puissance, d’un cheminement de la religion islamique vers la pauvreté, la petitesse et la faiblesse. Cette prophétie ressemble fort à celle qui s’applique au christianisme[223]. Comment est-il possible que l’islam, si puissant aujourd’hui, connaisse une telle diminution ?
En islam, il n’existe pas de Magistère papal, apte à donner, comme dans le catholicisme, l’interprétation authentique des textes de l’Écriture Sainte. C’est pourquoi, un peu à la manière des protestants, chaque musulman est invité à interpréter les textes. Lorsqu’il s’agit de textes apocalyptiques, on trouve donc à peu près la même diversité de conceptions, depuis la plus féroce à la plus mystique. Pourtant, parmi toutes les interprétations, deux principales s’opposent de nos jours, celle des guerriers fanatiques et celle (trop rare) des musulmans spirituels pour qui la miséricorde et l’humilité plaisent à Dieu. Cette interprétation des spirituels semble la plus authentique. Il convient d’en rapporter le scénario :
« Tout commencera par la venue du Mahdi. Dieu enverra un grand imam dont la mission
consistera à préparer le peuple musulman à l’épreuve. Au sens étymologique, le Mahdi signifie celui qui est bien guidé. Le mot dérive
d’un verbe Hada qui signifie guider.
Le prophète Mahomet s’est servi de ce mot dans son sens littéral quand il
dit : ‘Je vous recommande ma tradition et la tradition de mes califes
orthodoxes et bien guidés après moi.’ En pratique, dans le vocabulaire religieux,
le Mahdi désigne « un homme de la famille du Prophète »[224] qui viendra à la fin des temps, remplira la terre
de justice et d’équité après qu’elle aura été remplie d’injustice et
d’iniquité. Mais
la prédication du Mahdi sera accompagnée de celle d’une bête qui sera un piège.
Elle sera suscitée par Dieu pour éprouver la foi de ceux qui sont réellement
fidèles, afin de les distinguer de ceux qui n’aiment Dieu que pour un motif de
gloire politique terrestre. En effet, celui qui suivra la bête séduisante, loin
de suivre la voie de Dieu, s’en éloignera. »
Aussi les musulmans spirituels
pensent-ils de plus en plus que la Bête est
déjà venue. Elle est pour eux Ibn Abdul Wahhab (1703-1792), le fondateur du
totalitarisme islamique dans le sunnisme. Il est né à Uyaynah, dans la région
de l’Arabie appelée Nejd, où est actuellement située la ville de Ryad, dont le
prophète lui-même avait prédit que de ce lieu pourraient naître désordre et
corruption[225]. Depuis les commencements de
l’enseignement de Wahhab, vers la fin du xviiie
siècle, son culte est associé aux massacres de tous ceux qui s’opposaient à
lui. L’ayatollah
Khomeney est probablement son alter ego
chiite puisqu’il réalisa pour la première fois de manière puissante et
politique, dans le sang de ses ennemis, ce que rêvait Wahhab.
« Vers cette même époque paraîtra l’Antéchrist
(en arabe, le Dajjal). Par ses mensonges, c’est lui qui rendra conscient le
monde non musulman du danger mortel que représente tout l’islam pour le monde
entier. Il sera juif. Il aura la caractéristique physique d’être borgne. Il
attirera beaucoup de musulmans à lui car il donnera à boire et à manger. Les
musulmans seront tentés de le suivre et de renoncer à leur foi. Ses critiques
contre l’islam seront écoutées dans le monde. Il ne fera pas dans la nuance. Il
ne distinguera pas le bon musulman du mauvais. La raison de cette
confusion sera l’action violente, les assassinats perpétrés par des membres
pervertis parmi les musulmans. Le Prophète Mahomet dit que ces pervers seront
de nationalité arabe. Quatre femmes qui fréquentaient le Prophète Mahomet
rapportent qu’il a dit : ‘Malheur aux Arabes[226] !’
Les compagnons questionnèrent alors : ‘Dieu nous détruira-t-il, alors que
parmi nous il y aura des bienfaisants ?’ – Oui, c’est parce qu’en vous se
multiplieront les péchés (fornication, violence et autres).’ »
L’éminent Cheikh Al Qardaoui
pense que nous sommes en période de Dajjal,
car l’être humain ne regarde plus que d’un œil. C’est la vision matérialiste du
monde qui, effectivement, séduit et conduit au rejet de la religion une part de
la jeunesse musulmane. L’Antéchrist serait déjà né. D’autre part, le monde
actuel a tendance à distinguer de moins en moins les musulmans fidèles de leur
caricature fanatique. La confusion est en marche et la méfiance monte. Depuis
l’année 2001 de l’ère chrétienne, banale année 1422 de l’ère musulmane, une
inquiétude sourde envahit la communauté musulmane. En effet, les prophéties se
mettent en place, une à une. La situation de la jeunesse est inquiétante. Partout
dans le monde, l’Arabie Saoudite paye la construction de mosquées et installe
des imams qui prêchent l’islam violent et fanatique du Wahhabisme. L’écrivain
Bangladais Zeeshan Ali a décrit la situation de manière touchante :
« Les Musulmans du Bangladesh vivant aux U.S.A., sont de bons musulmans.
Mais, du fait d’un manque d’instruction, ils ne se rendent pas compte lorsque
leurs croyances sont détournées par les imams Wahhabites*. Or, aux U.S.A., 80%
des mosquées sont financées et animées par l’Arabie Saoudite[227]. Ces mosquées sont sous le
contrôle des imams Wahhabites, qui prêchent l’extrémisme aux jeunes. Ils les
poussent à accuser leurs propres pères d’hérésie, de péchés et
d’incroyance. » « Malheur
aux Arabes ! »[228]
« Après un temps où la violence se radicalisera
de part et d’autre commencera la grande guerre contre l’islam, la bataille
finale que le Prophète appelle ‘Gog et Magog*’. Le monde entier, accompagné des
démons, se liguera contre le peuple musulman, mené par l’Antéchrist. Le passage
coranique parlant de la guerre se réfère à un épisode biblique, lié à une
prophétie d’Ézéchiel[229].
L’Apocalypse (20, 7-9) en fait le symbole de la guerre finale : ‘Les mille
ans écoulés, Satan, relâché de sa prison, s’en ira séduire les nations des
quatre coins de la terre, Gog et Magog, et les rassembler pour la guerre, aussi
nombreux que le sable de la mer ; ils monteront sur toute l’étendue du
pays, puis ils investiront le camp des saints, la Cité bien-aimée. Mais un feu
descendra du ciel et les dévorera.’ Le premier signe de sa venue sera le
suivant : il réussira à susciter une réunion des armées du monde entier
sur le territoire même de la terre sainte, l’Arabie. »
On comprend le tremblement apocalyptique qui saisit en 1991 (guerre du Golfe), les musulmans du monde entier, quelle que soit leur confession, lorsque ce signe se réalisa à l’appel même d’un Arabe, le roi d’Arabie Saoudite. Selon certains théologiens musulmans, dont Acha’Raoui, cette guerre sera menée par l’Occident matérialiste et dominateur. Sa puissance sera inouïe.
« La guerre se terminera mal pour l’islam, au
moins dans sa dimension politique. Le Prophète Mahomet annonce explicitement
qu’un feu naîtra à Aden (au Yémen), qui chassera les habitants. Les royaumes
musulmans seront détruits. Pire, la destruction ira jusqu’à l’inouï. Tous les
lieux saints de l’islam seront anéantis : la Kaaba de La Mecque*, la ville sainte de Médine seront
détruites. La ville de Jérusalem*, troisième lieu saint, sera
perdue. Devant une telle ruine politique, un tremblement saisira la
communauté musulmane dans son ensemble. Les foules, traumatisées par ce qui
leur paraîtra être un abandon de Dieu, renonceront en masse à la religion. Le
Prophète annonce pour la fin du monde ce grand mouvement d’apostasie. Le
vice se répandra partout. »
Cette destruction de l’islam politique, cet
appauvrissement de l’islam religieux provoquera la réalisation de la prophétie
de
Mahomet citée plus haut : « L’islam
a commencé étranger. Il finira étranger. » Un Hadith (une confidence reçue de Mahomet
lui-même) de Muslim rapporte que malgré ces épreuves, il
subsistera toujours, jusqu’à la fin du monde un petit reste de croyants. Ils
seront de fidèles musulmans comme au temps béni* de Médine. « Il y aura
toujours une partie de ma communauté qui combattra ouvertement dans la voie de
la vérité jusqu’à la fin des temps. »
« Ainsi taillée par
Dieu, la communauté musulmane, loin de disparaître, connaîtra un renouveau
intérieur unique. Elle sera
faible en nombre mais les quelques musulmans qui resteront seront fidèles,
humbles et priants. Selon le Prophète, les musulmans fidèles
mangeront (seront nourris) par le dikrh, le Rappel d’Allah, la prière récitée
cinq fois par jour. ‘Soubhannallah ! Hamdoulillah ! Allahouakbar !’ Aux yeux de
Dieu, ce sera la victoire réelle de l’islam car l’âge d’or du commencement
réapparaîtra. Rendus politiquement minoritaires, les musulmans seront
semblables à ceux de Médine. À cette époque, la seule épée était la foi en
Dieu. »
Alors viendra la fin du monde. Issa (Jésus) le fils de Maryama (Marie) descendra du Ciel. D’après Abou-Horaïra, le Prophète a dit : « L’heure dernière ne viendra pas tant que le fils de Marie* ne sera pas descendu parmi vous en qualité d’arbitre équitable. Il brisera la croix, il mettra à mort le porc, il supprimera le tribut. Alors l’argent sera si abondant que personne ne voudra plus l’accepter. » Hadith*
Ainsi est annoncé explicitement
le retour de Issa-Jésus, fils de
Marie. Face à sa venue, tous les êtres humains seront croyants et une
prosternation vaudra mieux que le monde et ce qu’il contient. Issa (Jésus)
apparaîtra au minaret blanc de la Mosquée de Omeyyades à Damas, et tuera Dajjal*, l’Antéchrist, près de
Ramallah, aujourd’hui en Palestine. Les négateurs qui sentiront l’odeur de
Jésus mourront. « Le Commandeur des croyants lui dira : ‘Viens
diriger notre prière’ et Issa répondra : ‘Non, continue à diriger la
prière car vous êtes de la communauté de Mahomet, chacun peut présider la
prière de l’autre.’ »
Ces événements peuvent-ils
vraiment se produire ? Qu’on me permette de donner ici mon avis personnel,
à travers l’observation sociologique de l’islam actuel et l’observation du
passé. Les mêmes causes produisant
souvent les mêmes effets, il est en effet possible de se servir de l’histoire
des Juifs contre les Romains pour deviner l’avenir.
Sur le mémorial des martyrs de la résistance contre le nazisme, à Lyon, une épitaphe proclame : « L’homme qui ne se souvient pas de l’histoire se condamne à la revivre. » Si les hommes pouvaient se souvenir de toute l’histoire, cette phrase prendrait sens[230]. En effet, une guerre s’est jadis produite dont on ne peut manquer de remarquer qu’elle ressemble fort à ce qui est en train de se préparer pour l’islam. Il s’agit de la guerre religieuse des Juifs contre les Romains au premier siècle de notre ère. Flavius Josèphe était général de l’armée juive. Après sa capture par les Romains, il mit par écrit ses souvenirs, avec la précision d’un témoin de l’intérieur. Son livre s’intitule La guerre des Juifs. Le premier intérêt de son ouvrage est qu’en le lisant, hormis les armes utilisées, on se croirait dans l’actualité. Rien ne semble avoir changé. Les mentalités sont les mêmes. Les années qui précédèrent la guerre des Juifs contre les Romains ressemblent aux nôtres depuis 1979. Un phénomène semblable se produit dans l’islam. Une secte musulmane, appelée Wahhabite* et dont le siège est l’Arabie Saoudite, reproduit l’erreur des Juifs en l’appliquant aux prophéties reçues de Mahomet.
Les révoltes juives contre Rome furent sporadiques dès la fin du premier siècle avant Jésus-Christ. La guerre elle-même ne commença qu’en 66 après Jésus-Christ et aboutit en l’an 70 à la ruine totale de toute vie nationale et politique juive. Cette guerre couva donc un siècle avant d’éclater. Le général romain Titus prit Jérusalem* et fit raser ce qui restait du Temple. Un tiers, exactement un tiers des Juifs présents dans le monde à cette époque périt durant le conflit (un million cent mille victimes). Ce fut la plus terrible bataille de l’Antiquité et elle réalisa pour la seconde fois après la guerre Babylonienne de Nabuchodonosor (début du VIe siècle av. J.-C.) une prophétie de Moïse [231] :
« Lorsque tu n’auras pas servi Yahvé ton Dieu
dans la joie et le bonheur que donne l’abondance de toutes choses, Yahvé suscitera
contre toi une nation lointaine, comme l’aigle qui prend son essor. Ce sera une
nation au visage dur. Elle t’assiégera dans toutes tes villes, jusqu’à ce que
soient tombées tes murailles les mieux fortifiées. Tu mangeras la chair de tes
fils et de tes filles dans cette détresse où ton ennemi te réduira. Vous ne
resterez que peu d’hommes, vous qui étiez aussi nombreux que les étoiles du
ciel. Parce que tu n’auras pas obéi à la voix de Yahvé ton Dieu, Yahvé te dispersera
parmi tous les peuples, d’un bout du monde à l’autre. Parmi ces nations, il n’y
aura pas de repos pour la plante de tes pieds, mais là Yahvé te donnera un cœur
tremblant, des yeux éteints, un souffle court. »
La cause de cette guerre fut, selon Flavius Josèphe, une prophétie mal comprise. Les Juifs avaient en effet reçu dans la Bible des textes concernant la venue du Messie et la fin du monde. Mais ils pouvaient signifier deux choses. Certains Juifs appelés zélotes, minoritaires en nombre mais très actifs, croyaient fermement que le Messie serait un militaire puissant qui imposerait sa loi au monde entier : « En ce jour-là, Israël* triomphera. Les rois des nations serviront Israël ! Ils lui apporteront leurs richesses. La nation qui ne te servira pas périra. Les richesses du Liban viendront chez toi. Ils s’approcheront de toi, humblement, les fils de tes oppresseurs, ils se prosterneront à tes pieds, tous ceux qui te méprisaient. »[232]
D’autres Juifs, les anawim, pensaient que le Messie serait un homme humble et pauvre qui prendrait sur lui les péchés du monde entier pour ouvrir aux hommes le paradis de Dieu : « Sur lui reposera l’Esprit de Yahvé. Son inspiration est dans la crainte de Yahvé. Il jugera mais non sur l’apparence. Il n’élèvera pas la voie. Il sera humble, monté sur un ânon, le petit d’une ânesse. Il jugera les faibles avec justice, il rendra une sentence équitable pour les humbles du pays. » [233]
Or, l’histoire l’a montré par la suite, ce sont les Juifs spirituels qui avaient raison. Pourtant, Dieu laissa agir les zélotes. Leur révolte contre les Romains couva pendant près d’un siècle. Au début, dans les vingt années qui précédèrent l’ère chrétienne, ils étaient peu nombreux. Ils passaient de maison en maison, les yeux exorbités, répandant leur message de folie : « Il faut commencer la guerre contre les envahisseurs romains, par tous les moyens. Dieu sera avec nous. C’est écrit dans les prophéties. Ils ne peuvent gagner. Au moment voulu, si nous croyons en lui, il nous les livrera. Il combattra pour nous. Notre peuple est appelé à régner sur le monde entier ! » Le peuple dans sa majorité se méfiait de ces fous. Mais il ne fut pas assez spirituel pour lutter fermement contre eux. Leurs paroles trouvaient un écho dans leur orgueil national humilié par l’occupation. Les zélotes voulaient à tout prix une guerre. Pour l’obtenir, étant faibles, ils commencèrent par la pratique de l’assassinat terroriste. Les sicaires se mêlaient à la foule pour poignarder dans le dos des sentinelles romaines, pour tuer les Juifs collaborateurs. L’un d’eux a laissé son nom. Il s’appelait Barrabas.
En 66 après Jésus-Christ, une dernière provocation réussit. Les zélotes du Temple de Jérusalem* refusèrent d’offrir de l’encens pour l’empereur de Rome. Cette provocation ne fut pas tolérée par Néron qui envoya son meilleur général, Vespasien, à la tête des légions. La foi des zélotes était totale et rien ne réussit à l’ébranler. Attendant chaque jour le miracle de Dieu, ils réussirent à enfermer une foule immense dans Jérusalem* afin qu’elle participe au combat final. Ils montrèrent alors leur perversité en transformant le Temple saint en coupe-gorge, y assassinant sans vergogne ceux parmi le peuple qui leur paraissait manquer de ferveur fanatique. Lorsque le peuple fut exterminé, le Temple rasé, leur foi ne faiblit pas. Là où ils purent se réfugier, ils continuèrent d’organiser des embuscades, jusqu’au suicide. Plus la situation était désespérée, plus leur certitude de la proximité de l’intervention divine augmentait. En fin de compte, tout ceci aboutit à la ruine totale pour 1900 ans de tout judaïsme politique. L’Empire romain interdit cette religion rebelle et dispersa le peuple hors de Palestine. Les Juifs devinrent errants à travers le monde, persécutés et faibles. Leur État ne fut recréé qu’en 1948.
Flavius Josèphe donne une explication théologique de cette folie des fanatiques. Ils furent aveuglés par un esprit venant de Dieu, dit-il. Ils crurent en une série de prophéties messianiques que Dieu rendit volontairement ambiguës[234]. Dieu voulut en un certain sens cet aveuglement, afin de les sauver dans la vie éternelle. Pourtant, raconte Josèphe, il les avertit par des signes nombreux[235]. Son moyen est toujours le même, comme pour toutes les puissances terrestres. Il livre l’homme à son orgueil. L’aveuglement produit l’échec. L’échec conduit à l’humiliation puis à la réflexion. Enfin naît un commencement d’humilité. La sagesse de Dieu sur tout ce qui vit en ce monde est résumée par la Vierge Marie*: « Dieu renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles. »
Celui qui connaît l’islam de l’intérieur est frappé de voir à quel point un scénario semblable se profile. À l’heure où j’écris ces lignes, les acteurs semblent être en place. Cette fois, ce n’est pas un peuple de trois millions d’âmes qui est en jeu mais le sort d’un milliard de musulmans face au reste du monde. Les musulmans spirituels sont tout aussi rares qu’au temps de Jésus étaient rares les pauvres de Yahvé (les Anawim). Les zélotes juifs trouvent leur équivalent actuel chez les Wahhabites* arabes, les gardiens de la Révolution iranienne, les Talibans afghans, les G.I.A. algériens, etc. Ces gens sont minoritaires mais violents et actifs. Ils blasphèment sans cesse l’islam par leurs crimes horribles mais sont persuadés que tuer certaines femmes et certains enfants, même musulmans, sert la cause d’Allah. La grande majorité des musulmans est, comme à l’époque de la guerre des Juifs, dans l’expectative, balançant entre une haine revancharde envers l’Occident impérialiste et la crainte de l’évidente folie fanatique des islamistes. Ils ne sont donc pas réellement aptes à saisir le danger mortel que représente pour eux la minorité fanatique.
Enfin, il semble que tout cela vienne de Dieu car les prophéties reçues à travers Mahomet sur la fin du monde ressemblent à celles des Juifs au temps de Néron. Elles sont tout autant ambiguës. On peut les interpréter de deux façons opposées et nul pape musulman ne viendra dire quelle est la vraie.
Pour les rares musulmans spirituels, l’islam va bientôt régner sur le monde car, par l’action purificatrice de Dieu, il va être rendu humble, pauvre et fervent. Au nom d’Allah le miséricordieux, Dieu se plaît à ce qui est humble et miséricordieux. Au contraire, pour les musulmans islamistes, voici venir la grande guerre de l’islam. Elle aboutira à la soumission de la terre entière au pouvoir politique de l’islam (de leur islam sinistre). Voici le scénario de la fin du monde tel que l’ont reconstruit les islamistes fanatiques, en prenant ici et là ce qui les arrangeait dans les prophéties de Mohamed. « Tout commencera effectivement par la venue du Mahdi*. Vers la fin des temps, Allah suscitera la venue d’un grand imam, couramment appelé ‘Mahdi’ par le Prophète Mahomet. Par sa prédication, il renouvellera de l’intérieur le zèle des musulmans. Ils retourneront à la Mosquée et reprendront leur zèle pour la guerre sainte. »
Selon eux, il est évident que le Mahdi est déjà venu. Il ne peut être qu'Ibn Abdul Wahhab (1703-1792)[236], le fondateur de la spiritualité de la guerre sainte en Arabie Saoudite. Au xixe siècle, le fondateur du royaume Saoudien, Ibn Saoud, institua le Wahhabisme comme croyance officielle. Il peut aussi s’agir de l’ayatollah chiite Khomeney qui prit le pouvoir en Iran chiite en 1979. Il suscita un espoir immense. Il humilia les deux Satans, U.S.A. et France. Il stimula par son exemple dans l’islam du monde entier le zèle pour la guerre sainte.
« Après la venue du Mahdi apparaîtra l’Antéchrist
(le Dajjal). Il sera juif et haïra l’islam. Par ses paroles menteuses, il
réussira à réunir une coalition militaire du monde entier contre l’Umma (la
communauté musulmane). Le signe du début de la grande guerre contre l’islam
sera visible par tous. Les armées de l’Antéchrist se réuniront sur la terre
sainte elle-même, la terre de l’Arabie. Des Arabes pervers, des traîtres,
coopéreront à ce blasphème. Ce sera une armée immense. Face à elle, les forces
musulmanes seront faibles. On ne leur donnera aucune chance de gagner. Mais
Allah sera avec les musulmans. Alors, au dernier moment, quand tout semblera
perdu, Il interviendra lui-même au cours du massacre qu’on appellera Gog et
Magog*. Les textes saints le disent explicitement, la défaite de l’Occident
sera totale [237] :
‘‘Et toi, fils d’homme, prophétise contre Gog. Tu diras : ‘Ainsi parle le
Seigneur Yahvé. Je me déclare contre toi, Gog, prince, chef de Méshek et de
Tubal. Je te ferai faire demi-tour, je te conduirai, je te ferai monter de
l’extrême Nord et je t’amènerai contre les montagnes saintes de mon peuple. Je
briserai ton arc dans ta main gauche et je ferai tomber tes flèches de ta main
droite. Tu tomberas sur les montagnes d’Israël, toi, toutes tes troupes et les
peuples qui sont avec toi. Je te donne en pâture aux oiseaux de proie de toute
espèce et aux bêtes sauvages. Tu tomberas en plein champ, car moi, j’ai parlé,
oracle du Seigneur.’’’ On mettra sept mois à enterrer leurs cadavres[238]. Alors
commencera le règne de l’islam sur le monde entier. Jésus, le Messie, apparaîtra.
Il brisera le christianisme. Les non-croyants seront soumis à Allah. Ceux qui
refuseront seront retranchés de la terre. »
À la lecture de ces prophéties, on comprend la grande colère et l’espoir eschatologique de musulmans arabes fervents comme Oussama Bin Laden quand ils virent, pendant la guerre du golfe de 1991, les armées occidentales s’installer en Arabie Saoudite, à la demande du roi lui-même. Ils comprirent que l’heure de la grande guerre était arrivée. Ils y virent la réalisation du signe des temps. Ils déclarèrent une Fatwa[239] de malédiction sans merci à la royauté arabe saoudienne qui s’était rendue coupable du blasphème suprême en appelant les armées chrétiennes sur le territoire saint : « Malheur aux Arabes ! » dirent-ils en se référant à une prophétie de Mahomet pour la fin du monde. Depuis cette époque, de la même manière que les zélotes juifs au temps de l’Empire romain, les islamistes fanatiques ont décidé qu’ils obtiendraient par tous les moyens leur guerre contre l’Occident. Ils sont prêts, s’il le faut, à multiplier les attentats et les provocations pendant un siècle. Ils auront leur guerre puisqu’elle leur paraît nécessaire. Sans elle, l’islam ne pourra obtenir d’Allah la domination sur le monde entier.
À notre époque, les prémices de cette guerre sont tous là. On se demande qui pourra empêcher les événements de se produire. La haine s’est trop répandue pour être arrêtée sans que le sang soit versé. Depuis les années 1980, une partie de l’islam est tentée par le fanatisme[240]. Toute une jeunesse musulmane croit servir Dieu en entraînant le maximum de gens dans un désir de revanche, dans une guerre sainte et sans pitié contre tout ce qui n’est pas cette forme exaltée et politique de la religion. La haine et le désir de vengeance ne sont pas seulement affaire de zèle religieux. L’islam est blessé dans son orgueil politique et cherche revanche. L’Occident l’a colonisé pendant deux siècles. La science des pays chrétiens et la puissance financière qui en sort sont une constante provocation à l’islam réduit au sous-développement. La perte de la Palestine, terre considérée comme à jamais musulmane, ne passe pas. Tout cela exacerbe la haine, de manière finalement assez semblable à celle de la jeunesse allemande de 1933. Une partie visible et remuante de l’islam veut la guerre. Incapable de s’armer, elle médite des plans d’attentats. Le rêve le plus grand de milliers de jeunes consiste à mourir martyrs en tuant des Juifs ou des occidentaux. Dans certains pays, on s’attaque aux chrétiens, aux Juifs et aux musulmans modérés. On tue, au hasard d’une rencontre, en confessant le nom d’Allah. Le sang est désiré. Des rêves d’attentats nucléaires hantent les nuits fiévreuses des fanatiques.
[Chose indécise]
De deux choses l’une. Soit la violence éclate et produit une grande guerre pour les Occidentaux, juifs et chrétiens. Dans cette hypothèse, la partie combattante de l’islam risque bien de périr écrasée par la guerre qu’elle aura elle-même voulue[241]. « Qui prend l’épée périt par l’épée. »[242] Il se peut que le rêve de la bombe atomique islamiste soit un jour réalisé. Si elle est utilisée comme ils en rêvent, contre Tel Aviv, New York ou Paris, il est certain que les armes occidentales seront plus fortes. Une réplique rapide et déterminée écrasera toute cette haine accumulée, comme cela se produisit à Hiroshima pour les kamikazes shintoïstes japonais.
Soit le monde et les musulmans modérés, dans un éclair de lucidité, arrivent à contenir la haine des islamistes.
Dans les deux cas, comme tout ce qui est démesuré, le fanatisme déjà visible provoquera dans les générations musulmanes à venir et dans le monde entier un rejet dégoûté de tout ce qui porte le nom d’Allah. C’est une loi universelle de la sociologie. Tout ce qui est excessif provoque l’excès inverse, tôt ou tard. Qu’on se rappelle le phénomène somme toute analogue connu par l’Allemagne dans la première moitié du xxe siècle. Les excès revanchards et fanatiques des nazis eurent l’effet suivant dans la génération de leur fils : gauchisme et pacifisme. De même, il est probable que les ruminations haineuses et obsessionnelles des pères islamistes finiront par produire dans les fils un désir avide de plaisirs et de richesses à l’Occidentale... loin de cet Allah aux mains rouges de sang. À ce moment-là, l’islam ne résistera ni à ses fautes passées ni surtout à la fragilité de ses bases théologiques : « Le Coran est, paraît-il, dicté mot à mot par Dieu, dira-t-on de toute part ; Dieu n’est-il pas bien ignorant pour faire de telles erreurs scientifiques ? » Le christianisme fit à la Renaissance sa révolution exégétique. Il le put car il ne considéra jamais la Bible comme dictée par Dieu. L’islam ne pourra suivre, semble-t-il, un tel chemin. L’islam ayant été considérablement affaibli[243], il sera possible à l’Antéchrist de s’attaquer à sa survie même.
Mais l’histoire particulière de la crise de l’islam aura à coup
sûr, dans les deux cas, une répercussion sur les religions dans leur ensemble. Toutes les religions auront à en
subir le contrecoup, tout ce qui porte le nom de Dieu[244]. Il est probable que la loi du balancier
décrite dans l’histoire par Hegel se produira.
Il est possible d’imaginer, sans trop de risque d’erreur, pour de simples
raisons sociologiques, un scénario tel que celui-ci, en trois âges :
1- Après ces trop prévisibles
malheurs à venir du fait d’une partie de l’islam en crise fanatique, le monde
occidental réfléchira sur ses erreurs. Il est possible qu’il fasse
l’autocritique de son matérialisme grossier, la grossièreté de son culte du
phallus au temps des années SIDA. Il y aura probablement un retour au religieux
dans le sens noble du terme. Nous verrons que d’autres conséquences plus
politiques pourraient sortir de ces malheurs comme la fin de l’organisation du
monde sous forme de nations[245], une Jérusalem entièrement juive, selon la fameuse prophétie de Jésus[246].
2- Quelques décennies plus
tard, se lèvera une nouvelle génération à qui on aura raconté les grands
malheurs dus à cette guerre religieuse. Par réaction aux récits de ces
horreurs, il se pourrait qu’elle réagisse à la manière d’un nouveau mai 68,
semblable au plan religieux à celui qui fit rejeter avec violence la notion de
patrie[247]. On ne voudra plus entendre parler d’aucune religion. On sera allergique
à tout ce qui évoque la vie après la mort, le paradis. On se souviendra que
c’est au nom de tels concepts que les martyrs d’Allah se faisaient sauter avec
leurs victimes au temps des kamikazes. Ainsi pourrait se réaliser la prophétie
de saint Paul : « Auparavant doit venir
l’apostasie… »
3- Sera-ce la fin de
l’histoire ? Une telle affirmation méconnaît l’âme humaine. Elle est
fondamentalement religieuse en ce sens qu’elle ne peut, à l’image des animaux,
se passer des réponses aux pourquoi. C’est pourquoi on peut prévoir que,
deux ou trois générations plus tard, il se lèvera encore une autre jeunesse.
Elle n’aura pas connu la guerre de religion. Elle aura été élevée dans le rejet
de toute religion, qualifiée de fanatisme. Elle aura des questions sur le sens
de la vie, des angoisses. Il n’y aura plus de réponses possibles, les grandes
traditions spirituelles ayant disparu. Alors, il est probable que tous les
obstacles auront disparu pour qu’apparaissent des sectes religieuses nouvelles,
inconnues jusqu’alors. Tous les avertissements auront disparu devant celui qui
tire les décors du monde. L’ange déchu pourra enfin révéler au monde sa
religion de la liberté. Ainsi pourrait se réaliser la suite de la prophétie de
saint Paul : « Il doit se
révéler, l’Homme impie, l’être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus
de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à
s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme
Dieu. Vous vous rappelez, n’est-ce pas, que quand j’étais encore auprès de vous
je vous disais cela... » Loin
d’être la fin de l’histoire, tout cela annonce d’autres errances, d’autres
malheurs et tâtonnements.
[Chose
certaine]
Le peuple juif est à mettre à part. Il mériterait à lui seul tout un chapitre tant son destin est particulier. Choisi par Dieu depuis 4000 ans, il reste signe jusqu’à aujourd’hui pour toutes les nations*. Cependant, ce qui lui arrive présente la caractéristique suivante : tout lui arrive de manière charnelle et non de manière mystique. Par exemple, si une terre sainte lui est promise, il s'agit d'une terre physique (la Palestine) et non, comme pour l'Église, d'une terre spirituelle (la grâce de Dieu et la gloire du paradis). En fait, ce qui arrive aux Juifs n'est autre que le récit sous forme politique du vrai combat, celui des âmes en marche vers la vie éternelle, tandis que le Prince de l'iniquité les réclame pour l'enfer. C'est ce qui fait de ce peuple, au sens le plus « fondamentaliste » du terme (à la manière témoin de Jéhovah), un peuple prophétique.
C’est une charge bien lourde à porter qui lui a valu au cours de son histoire les plus grandes réussites et les plus grands malheurs. Citons à titre d'exemple :
– Trois exils à l'étranger (Egypte, Mésopotamie, et le dernier en date qui a duré 1900 ans) et trois rentrées en la Palestine, la terre explicitement promise à Abraham ;
– Trois exterminations majeures de près d'un tiers du peuple (par Nabuchodonosor, Titus, et Hitler) et trois renaissances ;
– Deux constructions du Temple et une troisième annoncée, non encore réalisée.
Celui qui doute de la nature prophétique de ce peuple devrait relire ce
texte de Moïse qui résume tout[248] : « Si tu obéis vraiment à la voix de Yahvé ton
Dieu, toutes les bénédictions que voici t'adviendront et t'atteindront ;
car tu auras obéi à la voix de Yahvé ton Dieu. Mais si tu n'obéis pas à la voix
de Yahvé ton Dieu, Yahvé suscitera contre toi une nation lointaine, des
extrémités de la terre, comme l'aigle qui prend son essor. »
D’après saint Paul, Dieu voulut la subsistance d’Israël* par une de ses volontés mystérieuses : « Il fait miséricorde à qui il veut et il endurcit qui il veut. » Saint Paul aurait pu ajouter « jusqu’au moment qu’il veut » car il est certain que les Juifs voient[249] qui est Jésus et le reconnaissent comme Messie au moment de la mort individuelle de chacun. Au Ciel, il n’y a plus un seul Juif (c’est-à-dire un homme qui attend la venue du Messie). Il n’y a plus que des hommes face au Messie.
Il fallait que le judaïsme subsiste sur la terre. Israël* devait demeurer pour les nations un signe grandiose annonçant le retour du Christ et la fin du monde. C’est ce que veut signifier saint Paul en écrivant : « Que sera la conversion d’Israël (au Christ) sinon une résurrection d’entre les morts ? »[250] On peut même dire qu’Israël est et sera l’un des signes les plus importants donnés au monde de la fin de toutes choses et de la signification de cette fin.
Le Seigneur, dans les Évangiles et dans l’épître de saint Paul aux Romains, donne sept prophéties concernant l’avenir de ce peuple et le retour du Christ :
1- Il annonce que le Temple de Jérusalem* sera détruit[251] : « En vérité, je vous le dis, il ne restera pas ici pierre sur pierre qui ne soit jetée. » Et le Temple sera remplacé par un temple consacré aux idoles : « Vous verrez l’Abomination de la désolation installée dans le Temple saint. »
2- En second lieu, le Seigneur annonce que le peuple juif sera déporté parmi toutes les nations[252] : « Il y aura une grande détresse sur la terre et colère contre ce peuple. Ils tomberont sous le tranchant du glaive et ils seront emmenés captifs dans toutes les nations. »
3- En troisième lieu, il y aura des malheurs et des massacres perpétrés contre ce peuple[253] : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi. Pleurez plutôt sur vous et sur vos enfants ! Car voici venir des jours où l’on dira : ‘Heureuses les femmes stériles, les entrailles qui n’ont pas enfanté, et les seins qui n’ont pas nourri !’ Alors, on se mettra à dire aux montagnes : ‘Tombez sur nous ! ' Et aux collines : ' Couvrez-nous !’ »
4- En quatrième lieu, ce peuple reviendra dans la terre d’Israël et prendra de nouveau possession de la ville sainte[254] : « Jérusalem sera foulée par les païens jusqu’à ce que soit accompli le temps des nations. » Le retour du peuple d’Israël sur sa terre marquera donc la fin du temps accordé aux païens pour inaugurer un temps de grâce accordé à Israël[255].
5- En cinquième lieu, l’arche d’alliance sera
retrouvée [256] : « Il y avait dans cet
écrit, qu'averti par un oracle, le prophète se fit accompagner par la tente et
l'arche, lorsqu'il se rendit à la montagne où Moïse, étant monté, contempla
l'héritage de Dieu. Arrivé là, Jérémie trouva une habitation en forme de grotte
et il y introduisit la tente, l'arche, l'autel des parfums, puis il en obstrua
l'entrée. Quelques-uns de ses compagnons, étant venus ensuite pour marquer le
chemin par des signes, ne purent le retrouver. Ce qu'apprenant, Jérémie leur
fit des reproches : ‘Ce lieu sera inconnu, dit-il, jusqu'à ce que Dieu ait
opéré le rassemblement de son peuple et lui ait fait miséricorde.’ »
6- En sixième lieu, le Temple de Jérusalem
rebâti [257] : « Alors le Seigneur
manifestera de nouveau ces objets, la gloire du
Seigneur apparaîtra ainsi que la Nuée, comme elle se montra au temps de Moïse
et quand Salomon pria pour que le saint lieu fût glorieusement consacré. »
Depuis cette époque, on le comprend, une tradition court dans le
peuple juif : Avant la manifestation du Messie, le Temple sera rebâti,
plus beau que jadis, pour recevoir le Tabernacle saint et son contenu : le
bâton du grand prêtre
Aaron, la manne et les tables de la loi. Lorsque les chrétiens les entendaient
parler de leur espérance, ils l’interprétaient en pensant à leur future conversion.
Ils se disaient que le troisième Temple ne serait pas fait de main d’homme mais
qu’il annonçait le jour où ils adoreraient Dieu en esprit et vérité. Cette
interprétation ne semble pas, tout en n’étant pas exclue, être la plus judicieuse[258]. Le texte du livre des
Maccabées ne parle pas d’un temple spirituel mais de l’arche d’alliance que
Moïse avait fait façonner. Il convient donc d’être attentif. Lorsque l’arche
d’alliance reparaîtra, ce sera un grand signe donné à l’humanité de la proximité
de la venue du Messie.
7- Enfin Jésus annonce[259] : « Vous ne me verrez plus jusqu’à ce qu’arrive le jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. » Saint Paul confirme la réalité de ce dernier signe qui accompagnera immédiatement le retour du Christ dans sa gloire : Israël se convertira et reconnaîtra Jésus comme étant le Messie[260]. « Leur mise à l’écart de l’Alliance fut une réconciliation pour le monde. Que sera leur admission sinon une résurrection d’entre les morts. » Ces deux textes semblent lier intimement le retour du Christ et la conversion d’Israël. Cela signifie-t-il que le jour où ils accepteront le Messie, celui-ci se montrera à eux de nouveau, ou l’inverse ? Toute la question, au plan du signe des temps, est ici.
Une chose peut par contre être affirmée sans risque. Ces sept prophéties seront, d’une façon grandiose, signes du retour du Christ car elles ne se réaliseront pas seulement d’une manière perpétuelle comme on l’a dit des guerres et des tremblements de terre, mais d’une manière matérielle, historique, à une date fixée par Dieu, de la même façon que celles qui sont déjà réalisées. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les trois prophéties déjà réalisées. Elles seront donc tout à fait adaptées au regard de tous les hommes, même des non spirituels.
1- Ainsi vit-on en 70 après Jésus-Christ le général romain
Titus raser complètement le Temple de Jérusalem*. Il réalisa sans le savoir la
première des prophéties, quarante ans (chiffre biblique de l’épreuve) après la
mort de Jésus.
2- Puis, en 135, à la suite d’une deuxième révolte juive, le
reste de la population fut déporté. L’Empereur romain fonda une nouvelle ville
à la place des ruines de Jérusalem, Aelia
Capitolina. Sur le lieu du Temple, il construisit un temple dédié à
Jupiter. Pour les Juifs, l’Abomination de
la désolation dont parle le prophète Daniel (9, 27) était dans le Temple
saint.
3- Les malheurs et les persécutions ne cessèrent de s’abattre sur les communautés juives dispersées, jusqu’aux massacres de millions de Juifs à Auschwitz. Là, un tiers des Juifs furent exterminé (6 millions sur 18 millions). Ce chiffre n’avait donc pas un sens uniquement symbolique dans la Bible[261].
4- Enfin, en 1948, la création du nouvel État d’Israël en
Palestine marque une nouvelle étape, celle de la quatrième prophétie. Elle
n’est pas encore pleinement réalisée puisque Jérusalem n’est pas redevenue une
ville entièrement juive. Si on en suit la lettre, il est certain qu’un jour,
Jérusalem sera entièrement juive. « Jérusalem sera foulée par les païens
jusqu’à ce que soit accompli le temps des nations. »
Ce retour dans la terre de Palestine, réalisé il y a à peine soixante ans, est un avertissement très explicite de la proximité des événements de la fin. Jérusalem est encore divisée. Des nations (musulmanes et chrétiennes) foulent le sol de Jérusalem-Est. Les musulmans entrent dans une haine exaltée d’Israël. Ils se promettent de les détruire et de les jeter à la mer. Un tel combat est dramatique car, semble-t-il, perdu d’avance. Gamaliel[262] disait en effet aux Juifs de son temps à propos de la jeune Église chrétienne : « Laissez ces gens tranquilles. Si leur succès vient de Dieu, vous ne pourrez rien contre eux. S'il vient des hommes, ils disparaîtront d’eux-mêmes. » Les musulmans devraient tenir compte de ce conseil en ce qui concerne le jeune État juif. Après la ruine et les défaites successives qui marquent leur histoire depuis 1948, ils devraient imiter la sagesse du président égyptien Sadate qui fit la paix avec Israël.
De fait, il semble que c’est impossible. Sadate est qualifié de Traître et il fut assassiné. Ils ne peuvent comprendre car leur foi leur dicte que la Palestine est à jamais terre d’islam*. Cet aveuglement leur vient de Dieu. Il les égare[263] ici-bas pour mieux les sauver dans l’au-delà. Il faut que leur orgueil soit abaissé, comme il l’a été pour les chrétiens et les Juifs. Si l’on suit leurs propres prophéties telles que nous les avons rapportées précédemment, cette obstination aboutira probablement à leur ruine politique totale et, par là, à la profonde découverte de leurs propres limites. Ce sera un douloureux chemin d’humilité. Ils perdront définitivement leur gloire politique mondiale. Ils perdront certainement Jérusalem*.
Le jour où Jérusalem deviendra entièrement juive, où l’esplanade des Mosquées redeviendra le mont du Temple, alors sera réalisée la quatrième prophétie. Si l’on suit la lettre de la prophétie de Jésus, il est probable que de manière concomitante se terminera l’organisation nationale du monde. On instaurera un gouvernement mondial pour que jamais plus il ne puisse y avoir de guerre. Au départ, ce mondialisme se fondera sur des valeurs de tolérance et de respect du spirituel. Nous verrons plus en détail[264] comment il tournera en quelques décennies en un humanisme explicitement antireligieux.
Ce début du xxie siècle voit s’accumuler la réalisation de prophéties de l’Écriture : les temps se rapprochent...
[Chose
certaine]
Cette histoire terrible et future de l’Antéchrist, est dans les mains de Dieu. Il sait ce qui est le mieux pour notre salut et pour celui du monde entier. C’est un scénario de gloire en vue de la révélation lumineuse de son amour. Toutes les communautés humaines, toutes les religions sont passées une à une au crible de la souffrance, pour l’humilité des hommes.
L’Église catholique n’y échappera pas. Nous allons décrire plus loin jusqu’où doit aller son abaissement, à l’image de son Seigneur. Mais, avant cela, elle y sera préparée. Cette mission terrestre sera confiée à Marie, la mère de Jésus. Au pied de la croix, seule une femme croyait et vivait de l’intérieur, debout, la mort de son Dieu. Elle ne douta pas un seul instant que Dieu son Fils était en train de sauver le monde. Jésus l’avait dit et cela lui suffisait. Cette confiance unique ne se retrouve même pas chez saint Jean* pourtant présent à la croix, pourtant appelé le disciple que Jésus aimait. Il y est par amitié mais pense que tout est fini. La preuve nous en est donnée dans son Évangile. Ce n’est qu’en voyant le tombeau vide et le linceul à sa place, comme affaissé, qu’il crut. Tous les autres disciples se sauvèrent. Mais, ce qui est le plus étonnant, c’est que la plénitude des grâces reçues permettait à Marie de vivre la passion en comprenant. Elle n’était pas une simple spectatrice confiante mais aveugle. Elle était une collaboratrice, une co-rédemptrice.
Il en sera de même à la fin du monde lorsque l’Antéchrist triomphera. L’Église visible (symbolisée dans l’Évangile par la vie de saint Pierre) sera si petite, tellement réduite aux seuls domaines des cœurs et sans vie extérieure et politique qu’on la croira morte pour toujours. « Les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur elle ! » ricanera-t-on de tout côté en reprenant la promesse visiblement manquée de Jésus. Qui pourra songer qu’au moment même où les portes de l’enfer sembleront avoir extérieurement tout détruit, Dieu triomphe comme à trois heures le jour de la mort de Jésus ? Qui croira que c’est absolument l’inverse aux yeux de Dieu, que tout est accompli et que le retour glorieux du Christ est tout proche ? Personne ne pourra imaginer cela sauf ceux qui auront la même foi que Marie*. Seule une foi invincible, digne de la mère de Dieu, tiendra en ces heures dernières. Tous les autres faibliront aussi sûrement que Pierre* face à ce qu’il ne comprit pas. Voilà pourquoi, avant la fin du monde, Dieu a confié à sa mère la mission de lui préparer une Église faite de petites gens semblables à elle (symbolisée par la vie de saint Jean, Jean 21, 22). Il est essentiel que leur intelligence possède la même lucidité que Marie. Ils comprendront parfaitement le mystère de l’espérance tel qu’il est décrit ici. Ils pourront alors accomplir la mission de Marie à la croix, offrir au nom de tous les hommes le « oui » définitif de l’humanité à Dieu. Ils baptiseront l’humanité dans l’eau et l’esprit (dans l’eau de leur humilité et le feu de leur amour). Tout sera alors accompli. On le voit, leur mission sera le Mystère (au sens le plus théologal du terme) ultime de l’histoire. Saint Bernard, parlant de ce fait des derniers temps, annonce :
« C’est par Marie que le salut du
monde a commencé, et c’est par Marie qu’il doit être consommé (...) Mais dans
le second avènement de Jésus-Christ, Marie doit être connue et révélée par le
Saint-Esprit afin de faire par elle connaître, aimer et servir Jésus-Christ.
Les raisons qui ont conduit le Saint-Esprit à cacher son épouse pendant sa vie,
et à ne la révéler que bien peu depuis la prédication de l’Évangile, ne
subsisteront plus. »[265]
Saint Louis-Marie de Montfort[266]* est intarissable sur ce thème[267] :
« Dieu veut donc révéler et découvrir
Marie, le chef-d’œuvre de ses mains dans ces derniers temps. Comme elle est
l’aurore qui précède et découvre le Soleil de justice, qui est Jésus-Christ,
elle doit être connue et aperçue, afin que Jésus-Christ le soit. Étant la voie
par laquelle Jésus-Christ est venu à nous la première fois, elle le sera encore
lorsqu’il viendra la seconde, quoique non pas de la même manière.
Enfin
Marie doit être terrible au diable et à ses suppôts comme une armée rangée en
bataille, principalement dans ces derniers temps, parce que le diable, sachant
bien qu’il a peu de temps, et beaucoup moins que jamais pour perdre les âmes,
il redouble tous les jours ses efforts et ses combats ; il suscitera bientôt
de cruelles persécutions, et mettra de terribles embûches aux serviteurs
fidèles et aux vrais enfants de Marie, qu’il a plus de peine à surmonter que
les autres.
C’est
principalement de ces dernières et cruelles persécutions du diable qui
augmenteront tous les jours jusqu’au règne de l’Antéchrist, qu’on doit entendre
cette première et célèbre prédiction et malédiction de Dieu, portée dans le
paradis terrestre contre le serpent : ‘Je mettrai une hostilité entre
toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance. Elle-même t’écrasera
la tête, et tu mettras des embûches à son talon.’
Jamais Dieu n’a fait et formé qu’une inimitié, mais
irréconciliable, qui durera et augmentera même jusqu’à la fin : c’est
entre Marie, sa digne Mère, et le diable, entre les enfants et serviteurs de la
Sainte Vierge, et les enfants et suppôts de Lucifer* ; en sorte que la
plus terrible des ennemies que Dieu ait faites contre le diable est Marie*, sa
sainte Mère. (...) C’est premièrement parce que Satan étant orgueilleux,
souffre infiniment plus d’être vaincu et puni par une petite et humble servante
de Dieu, et son humilité l’humilie plus que le pouvoir divin. (...) Ce que
Lucifer a perdu par orgueil, Marie l’a gagné par son humilité ; (...) Non
seulement Dieu a mis une inimitié, mais des inimitiés, non seulement entre
Marie et le démon, mais entre la race de la Sainte Vierge et la race du démon.
C’est‑à‑dire que Dieu a mis des inimitiés, des antipathies et haines
secrètes entre les vrais enfants et serviteurs de la Sainte Vierge et les
enfants et esclaves du diable ; ils ne s’aiment point mutuellement, ils
n’ont point de correspondance intérieure les uns avec les autres. Les enfants
de Bélial, les esclaves de Satan, les amis du monde (car c’est la même chose),
ont toujours persécuté jusqu’ici et persécuteront plus que jamais ceux et
celles qui appartiennent à la Très Sainte Vierge, comme autrefois Caïn persécuta
son frère Abel, et Esaü son frère Jacob, qui sont les figures des réprouvés et
des prédestinés. Mais l’humble Marie aura toujours la victoire sur cet
orgueilleux, et si grande qu’elle ira jusqu’à lui écraser la tête où réside son
orgueil ; elle découvrira toujours sa malice de serpent ; elle éventera
ses mines infernales, elle dissipera ses conseils diaboliques, et garantira
jusqu’à la fin des temps ses fidèles serviteurs de sa patte cruelle. »
Nous verrons plus loin que c’est la prière de ces chrétiens des derniers temps qui provoquera le retour de Jésus. Concrètement, il faudrait être aveugle pour ne pas voir que Marie* a déjà commencé son travail de préparation. La première de ses apparitions[268] (car son travail de préparation consiste en une prédication aussi concrète et directe que le sera le retour du Christ à la fin) date de 1830. Elle donne à sainte Catherine Labouré une médaille[269]. Elle la rend même miraculeuse tant elle espère que ceux qui la porteront méditeront son message. Sur son verso, Marie fait représenter un M qui porte une croix. L’archevêque de Paris, à qui l’on soumit la médaille en vue de l’imprimatur, se demandait s’il n’aurait pas mieux valu un M au pied d’une croix. De fait, il y avait là un symbole surprenant, à faire frémir les protestants. Il signifie plusieurs choses très profondes concernant le rôle de Marie comme co-rédemptrice[270]. Mais pour ce qui concerne la fin du monde, sa signification est éloquente. M signifie ceux qui vivent de la spiritualité de Marie. La croix symbolise leur fidélité au Christ. Tout cela annonce que, vers la fin du monde, la vie du Christ ne pourra plus subsister dans les cœurs sauf chez ceux qui auront la même foi qu’elle. Au-dessous de ce M, les deux cœurs de Jésus et Marie sont présents pour que nul ne doute, quoiqu’il arrive, que c’est leur amour qui permet tout[271]. Depuis cette première apparition, Marie ne cesse d’insister, de revenir, d’éduquer. À La Salette[272] (1846), elle prononça l’avertissement solennel de se tenir prêt : « Voici le temps des temps, la fin des fins. » Dans l’Église catholique d’Occident, minée depuis les années 70 par une crise de perte de la foi, on constate que tout le renouveau, quel qu’il soit, a un rapport étroit avec Marie. Est-ce un signe grandiose du temps où nous nous trouvons[273] ?
Ce paragraphe peut surprendre. Il est motivé par des faits. Sainte Thérèse est avec Marie* l’un des grands signes annoncés pour que nous nous préparions à la venue de l’Antéchrist. Le pape Pie X la considérait comme la plus grande sainte des temps modernes. En voici la raison. Cette jeune fille n’a vécu que 24 ans et est morte en 1897 usée par la tuberculose au Carmel de Lisieux. Elle raconte elle-même sa vie dans trois petits cahiers adressés à sa prieure. Son message n’a rien de nouveau. Il est l’Évangile, vécu comme Jésus le veut. Elle aime Jésus et, brisée par la maladie et par de terribles tentations, l’aime encore avec confiance. Mais, chose encore plus remarquable, elle vit et meurt au moment même où se manifestent en France de graves persécutions contre l’Église. Quelques années après sa mort, des milliers de religieux seront expulsés de leur couvent par les baïonnettes de l’armée. Elle n’ignore rien de tout cela mais n’en parle pas une seule fois. Elle ne parle que de son amour pour Dieu. On pourrait l’expulser, elle fixerait avec confiance Jésus. Cette attitude paisible nous est donnée comme un grandiose signe des temps. Elle doit être imitée sous peine de se rendre incapable de vivre les mystères de la fin du monde comme Jésus le souhaite. Concrètement, l’attitude angoissée de certains chrétiens d’aujourd’hui, nourris de textes d’apparitions qu’ils interprètent matériellement, est à bannir. Sainte Thérèse est témoin de la vraie attitude chrétienne, la confiance. « Quand bien même il (Jésus) me tuerait, je l’aimerais encore » dit-elle quelques jours avant sa mort. Il doit en être de même face aux signes de plus en plus précis de la venue de l’Antéchrist. Quand bien même nous serions le dernier à le connaître en ce monde, nous savons qu’il reviendra ! De même, l’exemple de Thérèse condamne le fait de regarder trop souvent le démon et son action, la politique et son caractère désespérant, les pécheurs et leur haine de l’Évangile. Nous savons que ces mystères existent mais pourquoi en être troublé puisque Jésus est Dieu ? Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus n’est autre que cet Énoch et cet Élie* qui doivent revenir à la fin du monde. C’est ce que nous allons expliquer dans le paragraphe suivant.
[Chose
indécise à cause des multiples sens possibles]
L’Apocalypse de saint Jean* annonce la venue de deux témoins qui prophétiseront avant d’être mis à mort[274] :
« Mais je donnais à mes deux témoins
de prophétiser pendant 1 260 jours, vêtus de sacs. Ce sont les deux oliviers et
les deux flambeaux qui se tiennent devant le maître de la terre. Si on
s’avisait de les malmener, un feu jaillirait de leur bouche pour dévorer leurs
ennemis (...) Mais quand ils auront fini leur témoignage, la Bête qui surgit de
l’abîme viendra guerroyer contre eux, les vaincre et les tuer. Et leurs
cadavres, sur la place de la grande cité, Sodome ou Égypte comme on l’appelle
symboliquement, là où leur Seigneur fut crucifié, leurs cadavres demeurent
exposés aux regards des peuples, des races, des langues et des nations, durant
trois jours et demi, sans qu’il soit permis de les mettre au tombeau. Les
habitants de la terre s’en réjouissent et s’en félicitent car ces deux
prophètes leur avaient causé bien des tourments. Mais passés trois jours et
demi, Dieu les ressuscita et les remit sur pied, au grand effroi de ceux qui
les regardaient. »
Ce texte est une allégorie dont les sens, volontairement multiples, concernent les chrétiens de tous les temps. Mais, vers la fin du monde, il prendra une signification encore plus forte.
Traditionnellement, on considère que les deux témoins qui doivent venir à la fin des temps sont Énoch et Élie*, les deux hommes justes dont l’Écriture raconte qu’ils ne moururent pas mais furent enlevés au ciel. Énoch fut le septième patriarche après Adam. La Bible le caractérise d’une seule phrase[275] : « Énoch marcha avec Dieu, puis il disparut car Dieu l’enleva. » Quant à Élie, il disparut dans un char de feu sous les yeux du prophète Elisée[276]. Certains théologiens juifs et chrétiens pensèrent donc que ces deux prophètes attendaient au paradis terrestre et devaient venir physiquement à la fin du monde annoncer la venue puis le retour du Christ. Cependant, si l’on regarde de près les Écritures, on doit parler autrement. En effet, le Seigneur affirme que le prophète Élie qui devait revenir n’était autre que Jean-Baptiste, le fils d’Elisabeth[277] : « Et lui, si vous voulez m’en croire, il est cet Élie qui doit revenir. Que celui qui a des oreilles entende ! » Il ne peut donc s’agir matériellement de cet Élie qui a vécu au temps de la reine Jézabel, mais plutôt d’un homme revêtu de l’esprit d’Élie, c’est-à-dire de sa spiritualité.
Il en sera de même à la fin du
monde. Et pour connaître ce que peuvent représenter les spiritualités d’Énoch
et d’Élie, il suffit de regarder leur vie. Ainsi, Énoch représente la fidélité
intérieure puisqu’il est seulement dit de lui qu’il marcha avec Dieu. Quant à Élie, il est remarquable par le
zèle qui le brûlait à l’égard du
Seigneur. Ce zèle était exercé à travers des actes violents mais très
efficaces. Il n’hésita pas à faire cesser toute pluie durant son ministère pour
conduire les hommes à la conversion. Il commence son ministère ponctué de
fléaux de la manière suivante[278] : « Élie le
Tishbite, de Tishbé en Galaad, dit à Achab : ‘Par Yahvé vivant, le Dieu
d’Israël que je sers, il n’y aura ces années-ci ni rosée ni pluie sauf à mon
commandement.’ » De même, il leur prouva la vanité du dieu Baal en
ridiculisant ses prophètes par un défi où le vrai Dieu devait répondre. Il fit
mettre à mort les serviteurs de Baal. L’esprit d’Élie est donc celui de
l’intransigeance de la foi, celui de la fidélité extérieure et manifestée au
Seigneur. De même, Jean-Baptiste n’hésita pas à reprocher publiquement, au
risque de sa vie, son péché d’adultère à Hérode. Il fut réellement rempli de ce
zèle de l’honneur de Dieu.
Jean-Baptiste était
effectivement revêtu de l’esprit d’Élie, de son zèle pour la foi et le
comportement juste. Au mépris de sa vie, il n’hésita jamais à dire la vérité.
Face à face, il reprocha à
Hérode son fait[279] : « Il ne t’est pas
permis d’avoir la femme de ton frère. »
Les deux témoins qui doivent revenir avant la fin du monde ne sont donc pas physiquement Énoch et Élie. Cette prophétie désigne que tout au long de l’histoire et surtout à la fin du monde, deux témoignages complémentaires rappelleront aux pécheurs la vanité de leur vie. L’un sera plus féminin et doux (Énoch), l’autre viril et source de fléaux (Élie). Ils seront complémentaires, à l’image de Dieu qui est mère et père. C’est toujours de cette manière symbolique quoique bien réelle qu’il faut interpréter le premier sens du livre de l’Apocalypse, avant de rechercher ses réalisations historiques. Ainsi, les 1260 jours de la vie des deux témoins, c’est-à-dire trois ans et demi, signifient que les deux témoins ont la même mission que le Christ dont la prédication dura trois ans et demi. De même, leurs cadavres qui doivent rester sans vie trois jours et demi signifie qu’ils vivront la même passion que le Christ puis ressusciteront comme lui.
Ainsi, les deux témoins qui doivent venir à la fin du monde pour témoigner de Dieu peuvent représenter, dans leur premier sens qui est spirituel, la vie contemplative qui est l’esprit d’Énoch et la vie apostolique qui vit du zèle d’Élie. Énoch et Élie doivent être considérés comme présents à chaque époque à travers les moines d’une part (Énoch) et d’autre part les nombreux apôtres (Élie), à travers surtout tous les chrétiens contemplatifs ou apostoliques qui vivent de la sainteté de leur vocation.
Dans un autre sens, spirituel aussi mais davantage politique, les deux témoins représentent l’Église chrétienne et Israël*. C’est ainsi que durant des siècles, avant la naissance de l’islam, seules ces deux religions témoignaient aux yeux du monde du Dieu d’Abraham.
Cependant, à la fin du monde, lorsque Israël commencera de se rapprocher du Christ et du christianisme, le monde n’aura plus que deux religions issues d’Abraham et témoignant devant l’Antéchrist, le judéo-christianisme et l’islam. Selon cette interprétation, si l’on suit le texte de l’Apocalypse, elles sont les deux oliviers, c’est-à-dire, selon saint Paul[280], les deux témoins de Dieu. Chacune avec sa grâce, ces religions témoignent de Dieu qui agit toujours de deux manières : douceur et force. Le christianisme exalte l’amour de Dieu comme Énoch, l’islam est le témoin de l’intransigeance de la pureté de la foi au Dieu unique (comme Élie*). Leur témoignage uni deviendra, pour le monde, insupportable. C’est pourquoi l’Apocalypse parle de la guerre que leur fera le démon, jusqu’à les détruire. Vers la fin du monde, lorsque l’Antéchrist commencera ses attaques contre Dieu, les divisions et les oppositions entre le christianisme et l’islam paraîtront moins importantes devant la gravité du danger. Ainsi, il est probable que le rapprochement commencé par le pape Jean-Paul II à Assise en 1986[281] est prophétique d’une unité bien plus intense, la foi de chacun étant respectée. Ces deux religions ne périront cependant pas de la même façon. Chacune sera attaquée par ce qui fait sa faiblesse. Le christianisme le sera par sa tendance à la naïveté et à l’innocence qui fait que, de l’intérieur, il est aisément corrompu ; l’islam par son épée, qui tente certains de ses membres au fanatisme et lui attire des réponses armées efficaces.
Une troisième interprétation n’est pas exclue[282]. Dieu aime à multiplier les modes de réalisation de ses prophéties. Il s’agit de celle qui pense que les deux témoins seront des prophètes suscités par Dieu à la fin du monde et dont l’efficacité apostolique sera immense. L’abbé Augustin Lemann commente[283] : « Le second champion de la vérité chrétienne contre l'Antéchrist sera une phalange de Docteurs, suscitée par Dieu pour ces temps d'épreuve. Jamais les docteurs, astres bienfaisants, n'ont manqué à l'Église. Mais ce qu'il y aura alors de particulier, c'est que cette phalange de docteurs recevra, pour le soutien et la consolation des bons, une plus grande intelligence de nos Saintes Écritures. Le prophète Daniel en a fait l'annonce dans un autre passage de son livre, également consacré à la persécution de l'Antéchrist : ‘Les impies, dit-il, agiront avec impiété, et tous ces impies n'auront pas l'intelligence, mais ceux qui auront la science de Dieu comprendront.’ [284] Ce qui signifie que tandis que les impies, frappés d'aveuglement, accompliront les dernières prophéties, comme autrefois les Juifs, sans les comprendre, les docteurs de l'Église, inondés de nouvelles lumières et pénétrant les passages les plus obscurs de ces prophéties, y trouveront l'explication des événements de cette époque, et, prémunissant les fidèles contre les artifices de l'Antéchrist, ils les maintiendront dans la fermeté et la confiance, dans l'attachement à l'Église et à ses divins enseignements, au prix même de la vie. La prophétie de Daniel ajoute : ‘Et les docteurs du peuple en instruiront beaucoup, et ils tomberont sous le glaive, par la flamme, par la captivité, et par des brigandages prolongés.’[285] Remarquable est cette expression : les docteurs du peuple ! Mais quoi ! Ce titre de docteurs que décerne le prophète, n'est-il pas réservé dans l'Église ? Ne demeure-t-il pas l'apanage des intelligences d'élite qui ont consumé leurs veilles à l'acquisition, souvent ardue, de la vérité ? On dit : les docteurs de l'Église, mais les docteurs du peuple ? Admirons les délicatesses divines : Ce titre de docteur, juste récompense du talent uni au travail, l'Esprit Saint l'attribue également, et avec infiniment de justesse, à des petits parmi le peuple que la grandeur de leur foi a transformés en apôtres. Qui n'en a rencontré sur son chemin de ces docteurs du peuple ? Quelque obscur ouvrier, une humble servante, des enfants même. Il tombait de leurs lèvres comme des jets de lumière : c'est l'amour qui les faisait jaillir, l'amour qui voit aussi loin, souvent plus loin que l'intelligence. »
Ces apôtres vivront de la confiance aimante d’Énoch et du zèle d’Élie et ramèneront à Dieu beaucoup d’hommes. Cette interprétation est même, si l’on considère la façon dont Dieu nous sauve, aussi certaine que les autres. Dieu ne peut laisser les hommes affronter l’époque de l’Antéchrist* sans proposer à ceux qui seront attentifs toutes les armes de la survie spirituelle. S’il envoie sa mère dans de nombreuses apparitions, c’est qu’elle est la plus capable de former des âmes contemplatives. Mais il lui adjoint de nombreux témoins afin que toutes les sensibilités entendent le message. Certains sont déjà venus et, unique parmi tous les autres, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus brille au cœur de l’apostasie* en marche. Son témoignage est le même que celui d’Énoch : « Elle marcha avec Dieu, puis elle disparut car Dieu l’enleva ! » À la fin du monde, lorsque l’Antéchrist viendra, les hommes croyants n’auront qu’à l’imiter, marcher avec Dieu dans le secret de la charité. Alors Jésus reviendra et les enlèvera.
Vers la fin du monde, avant que
le règne de l’Antéchrist* ne rende toute prédication impossible, il est
probable que le Seigneur suscitera de nouveaux Élie qui prêcheront dans le monde entier l’Évangile. C’est ce que
Jésus semble annoncer (semble car ces
textes ont plusieurs niveaux de sens) : « Cette bonne nouvelle sera
annoncée dans le monde entier, en témoignage à la face de toutes les nations.
Et alors viendra la fin. »[286] Saint Louis-Marie
Grignon de Montfort[287]* décrit les apôtres des
derniers temps de la façon suivante[288] :
« Ces grandes âmes, pleines de grâce
et de zèle, seront choisies pour s’opposer aux ennemis de Dieu, qui frémiront
de tous côtés, et elles seront singulièrement dévotes à la Très Sainte Vierge,
éclairées par sa lumière, nourries de son lait, conduites par son esprit,
soutenues par son bras et gardées sous sa protection, en sorte qu’elles
combattront d’une main et édifieront de l’autre. D’une main, elles combattront,
renverseront, écraseront les hérétiques avec leurs hérésies, les schismatiques
et leurs schismes, les idolâtres avec leur idolâtrie, et les pécheurs avec
leurs impiétés ; et, de l’autre main, elles édifieront le temple du vrai
Salomon et la mystique cité de Dieu. Mais qui seront ces serviteurs, esclaves
et enfants de Marie ? Ce seront un feu brûlant, ministres du Seigneur qui
mettront le feu de l’amour divin partout. Ce seront comme des flèches dans la
main du puissant[289], dans
la main de la puissante Marie pour percer ses ennemis. Ce seront des enfants de
Lévi, bien purifiés par le feu de grandes tribulations et bien collés à Dieu,
qui porteront l’or de l’amour dans le cœur, l’encens de l’oraison dans l’esprit
et la myrrhe de la mortification dans le corps, et qui seront partout la bonne
odeur de Jésus-Christ aux pauvres et aux petits, tandis qu’ils seront une odeur
de mort aux grands, aux riches et aux orgueilleux mondains.
Ce
seront des nuées tonnantes et volantes par les airs au moindre souffle de
l’Esprit Saint, qui, sans s’attacher à rien ni s’étonner de rien, ni se mettre
en peine de rien, répandront la pluie de la parole de Dieu et de la vie
éternelle ; ils tonneront contre le péché, ils gronderont contre le monde,
ils frapperont le diable et ses suppôts, et ils perceront d’outre en outre,
pour la vie ou pour la mort, avec leur glaive à deux tranchants de la parole de
Dieu, tous ceux auxquels ils seront envoyés de la part du Très‑Haut.
Ce
seront des apôtres véritables des derniers temps, à qui le Seigneur des vertus
donnera la parole et la force pour opérer des merveilles et remporter des
dépouilles glorieuses sur ses ennemis ; ils dormiront sans or ni argent
et, qui plus est, sans soin, au milieu des autres prêtres, et ecclésiastiques
et clercs ; et cependant ils auront les ailes argentées de la colombe,
pour aller avec la pure intention de la gloire de Dieu et du salut des âmes, où
le Saint-Esprit les appellera, et ils ne laisseront après eux, dans les lieux
où ils auront prêché, que l’or de la charité qui est l’accomplissement de toute
la loi.
Enfin,
nous savons que ce seront de vrais disciples de
Jésus-Christ, qui marcheront sur les traces de sa pauvreté, humilité, mépris du
monde et charité, enseignant la voie droite de Dieu dans la pure vérité, selon
le saint Évangile, et non selon les maximes du monde, sans se mettre en peine
ni faire acception de personne, sans épargner, écouter ni craindre aucun
mortel, quelque puissant qu’il soit. Ils auront dans leur bouche le glaive à
deux tranchants de la parole de Dieu. Ils porteront sur leurs épaules
l’étendard ensanglanté de la Croix, le crucifix dans la main droite, le
chapelet dans la gauche, les sacrés noms de Jésus et de Marie sur leur cœur, et
la modestie et mortification de Jésus Christ dans toute leur conduite.
Voilà
de grands hommes qui viendront, mais que Marie fera par ordre du Très-Haut pour
étendre son empire sur celui des impies, idolâtres et Mahométans. Mais quand
cela sera-t-il ? Dieu seul le sait : c’est à nous de nous taire, de
prier, soupirer et attendre : Expectans
expectavi. »
Ils seront des hommes humbles, bons, emplis de l’esprit de Marie qui les aura formés pour ainsi dire sur ses genoux. Ils prêcheront l’Évangile comme jamais on ne l’a fait depuis l’époque apostolique. Ce sera un témoignage conforme au cœur de Jésus. Ils n’éteindront pas la mèche qui fume dans les cœurs comme le font ceux qui enseignent avec violence. Ils ne piétineront pas les âmes mais témoigneront par la douceur, toucheront les cœurs[290]. Mais cela ne signifie pas que l’effet sera durable. Lorsque Jésus entra à Jérusalem, il fut acclamé par le peuple tout entier. Les gens le voyaient monté sur un ânon et vivaient la Parole du prophète Zacharie[291] : « Sois sans crainte, fille de Sion ! Voici que ton roi vient, monté sur un petit d’ânesse. » Quelques jours plus tard, cette même foule réclamait la mort de Jésus. Il en sera de même pour l’Église à la fin du monde. Le martyre vécu par les hommes de Dieu en ce temps-là, martyre sans doute plus intérieur que physique à cause des progrès de la spiritualisation du monde, ressemblera point par point à celui de Jésus. La vie de l’Église des derniers temps sera d’ailleurs à son image. Mais quelle différence y a-t-il entre martyre spirituel et martyre sanglant ? Pourquoi pas la délation, la déformation caricaturale du message, l’interdiction de parler et toutes les formes modernes de la désinformation dont l’Église est déjà victime de nos jours.
[Chose
certaine pour le fait, indécise pour le comment]
L’Église est une communauté d’hommes et de femmes que l’Esprit Saint considère dès cette terre, malgré les péchés, comme son épouse. À la différence des autres religions, le christianisme a reçu de Dieu, dès ici-bas, la révélation qu’il est possible de l’aimer… comme un ami intime. Il ne s’agit pas seulement de l’amour du serviteur (islam), de l’amour confiant d’une épouse soumise et incapable (Réforme protestante) mais du cœur à cœur réciproque le plus intime et réactif. En ce sens, l’Église est sainte.
Mais, si l’on se penche sur la vie concrète des chrétiens, l’humilité et l’amour pour Dieu et le prochain sont rares. En ce sens-là, l’Église est loin d’être sainte. Alors Dieu a décidé de se la préparer. Jusqu’à la fin du monde, en vue de sa venue, il va la rendre limpide et aimante. Il agit à sa manière, de cette manière qui lui est propre, la croix.
[Chose
certaine pour le fait, indécise pour les détails]
Il l’a déjà utilisée pour Jésus durant sa vie terrestre. Dieu avait voulu que la mission de Jésus ne s’arrête pas à la seule prédication de l’Évangile mais aille jusqu’au don personnel et volontaire de sa vie sur la croix. De même, l’Église qui est son épouse, après avoir prêché l’Évangile à toutes les nations*, sera conduite intérieurement à se préparer à un martyre mystérieux, identique dans son esprit. Avant cela, il y aura une lente préparation, à travers des générations de croyants. Ce changement progressif de mentalité sera visible pour ceux qui sauront regarder. Ce sera un grand signe de la proximité du retour du Christ. Pour discerner à l’avance ces signes, il suffit de se souvenir que le modèle de la fin de l’Église n’est autre que la fin de Jésus, passion, sépulcre, résurrection se déclinent pour l’Église en victoire de l’Antéchrist, silence, retour du Christ. Mais bien avant que ne viennent ces moments, l’Église ressemblera dans son histoire à la vie de Jésus. Déjà nous pouvons discerner cette ressemblance. Essayons de la suivre pas à pas.
Ceux qui ont connu l’Église avant le Concile Vatican II savent à quel point elle était différente de celle d’aujourd’hui. Ce n’est pas un phénomène français mais universel. Auparavant l’Église, sûre d’elle-même à travers son clergé à cause de la vérité dont elle se savait détentrice, ne s’adressait jamais aux autres religions. Il eut été inimaginable au temps de Pie IX (fin du xixe siècle) ou de Pie XII (milieu du xxe) qu’un pape s’abaisse à recevoir les délégués des autres religions pour prier ensemble. C’est pourtant ce qu’a réalisé Jean-Paul II. D’autres faits significatifs de ce changement radical de mentalité sont à citer. Paul VI renonce après le Concile Vatican II à se faire porter dans un fauteuil surélevé puis il vend pour les pauvres sa triple couronne pontificale. Jean-Paul II est allé plus loin, allant jusqu’à embrasser la terre des nations qu’il visitait. Ces signes d’humilité suscitèrent le courroux des intégristes, outrés de voir la Sainte Église s’abaisser ainsi.
Pourtant, si l’on regarde la vie de Jésus, on discerne dans les mois qui précédèrent sa passion le même changement d’attitude. Alors qu’il ne s’adressait qu’aux Juifs, allant jusqu’à dire à une pauvre femme étrangère qui lui demandait la guérison de sa fille : « Les petits chiens ne doivent pas manger le pain des enfants »[292], il se met soudain à parler à des païens, à des Grecs. Il ne leur dit pas quelque chose de banal mais leur annonce sa passion ! « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits. »[293] Nous avons dans la pauvreté actuelle de l’Église, si ressemblante à celle de Jésus, un grandiose signe des temps. En effet, l’humilité et la charité sont les conditions de l’entrée dans la gloire. Plus nous voyons l’Église humble et aimante, plus nous pouvons être certains du travail accompli par l’Esprit Saint et de la proximité du retour du Christ. Mais nous pouvons aussi être sûrs que le Christ ne reviendra pas avant que cette pauvreté ne soit devenue totale, semblable à celles de Jésus et Marie à la croix. Saint Paul l’affirme : « Avant sa Venue (la Parousie* du Christ) doit venir l’Homme Impie... »[294]
Sans trop forcer l’analogie entre la vie de Jésus et celle de l’Église, nous voudrions établir quelques parallèles très visibles qui peuvent démontrer un peu plus la proximité de l’Heure Sainte de l’Église[295]. Ils peuvent aussi aider les chrétiens qui vivent mal les temps actuels à mieux les comprendre. Les abaissements de Jésus vers la fin de sa vie furent précédés par des oppositions de plus en plus fortes. Il vit un nombre important de disciples le quitter[296], ses paroles furent passées au crible et déformées par les chefs du peuple et certains désirèrent le tuer[297]. Jusqu’à la fin, ces oppositions se durcirent au point que ses grands miracles eux-mêmes devinrent des motifs de mort[298]. L’Esprit Saint permit que ces luttes se produisent pour que le cœur humain de Jésus, frappé de souffrances, s’appauvrisse. Certes, Jésus n’était pas orgueilleux, lui en qui on n’a jamais pu trouver de péché ! Mais la souffrance eut en lui pour effet de créer des abîmes de pauvreté. C’est une propriété de la souffrance. Rien ne peut produire plus de pauvreté qu’elle : « Par sa passion, Jésus a appris l’obéissance. »[299]
Depuis que l’apostasie* est en marche en Occident, il en est de même pour l’Église. Il y eut même de grands saints pour l’annoncer aux papes. Lorsque les États du Vatican furent envahis par les armées italiennes (1870) à l’occasion de sa réunification, le pape Pie IX prononça une sentence d’excommunication contre tous les auteurs de cette injustice. Il s’enferma au Vatican et se considéra dès lors comme prisonnier. Saint Jean Bosco vint le trouver pour lui dire en substance : « Cela vient de Dieu ! Ne vous y opposez pas. Souvenez-vous de la prophétie donnée à saint Pierre* par notre Seigneur : ‘Quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te mettra ta ceinture pour t’emmener où tu ne voudrais pas aller’[300]. Cette parole se réalise aujourd’hui. » Le pape n’excommunia pas Jean Bosco car il l’aimait mais il ne put comprendre la portée de ses paroles. Le cheminement se fit à travers ses successeurs.
[Chose
indécise pour les détails]
Il est possible de décrire les souffrances et les appauvrissements subis par l’Église romaine depuis cette époque. La première d’entre elles fut la perte de la foi dans des couches de plus en plus nombreuses de la société. En contemplant la vie de Jésus, on s’aperçoit que, plus encore que des luttes extérieures, il eut à souffrir d’oppositions sourdes à l’intérieur du cercle de ses amis. La plus terrible d’entre elles fut le fait de son apôtre Judas. Sa révolte éclate[301] après qu’une femme pleurant ses péchés et pleine de reconnaissance pour la douceur de Jésus à son égard eut versé sur ses pieds un parfum de grand prix : "Pourquoi ce parfum n’a-t-il pas été vendu trois cents deniers qu’on aurait donnés à des pauvres ?" Jésus lui répondit : "Laissez-la. C’est pour le jour de ma sépulture qu’elle devait garder ce parfum. Les pauvres en effet, vous les aurez toujours avec vous ; mais moi, vous ne m’aurez pas toujours." L’attitude de Judas est compréhensible. Trois cents deniers représentent un salaire ouvrier d’une année. Le geste d’amour gratuit de la femme lui parut une perte considérable par rapport à l’annonce de l’Évangile, qui est un message d’attention aux plus pauvres. Judas ne saisissait pas l’unité totale entre les deux commandements de l’amour, entre l’amour de Dieu et l’amour des pauvres.
Il s’agit là sans aucun doute d’un signe des temps qui apparaîtra dans l’Église vers la fin du monde. Comment pourrait-il en être autrement ? J’ai montré que le dernier antichristianisme séduirait le monde entier en raison des riches valeurs d’humanisme (sans Dieu) qu’il intégrera. Il y eut jadis des chrétiens généreux mais peu clairvoyants pour se laisser séduire au nom de l’amour de Dieu, par le fanatisme religieux ou encore par le nationalisme et le marxisme. Comment pourrait-il en être autrement de l’humanisme sans Dieu* qui ressemble beaucoup plus à l’Évangile du Christ ? L’humanisme fait même partie du christianisme mais celui-ci sait le consacrer au Dieu aimé. De nos jours, nous avons vu apparaître dans l’Église un courant de pensée très puissant qui réduit l’Évangile à la lutte pour le bien social. Ses membres sont familièrement qualifiés sous l’étiquette de progressistes ou de libéraux parce qu’ils semblent en harmonie avec le progrès du monde. Ils se caractérisent par une sourde opposition aux décisions des papes jugées en décalage par rapport à notre temps. Ils critiquent en particulier ses positions en matière de comportement sexuel. « De quoi se mêle-t-il ? Chacun est libre de mener sa vie privée selon sa conscience. » La liberté, telle est sans doute aux yeux de ce courant le qualificatif le mieux choisi pour résumer l’Évangile. « Il est l’Évangile de la liberté. » Il est surprenant de constater comme une petite variation d’interprétation peut avoir de conséquences. Nous disions précédemment que l’Évangile se spécifie d’abord dans l’amour de Dieu et du prochain... L’amour de Dieu et du prochain est premier, la liberté conséquence.
Ainsi, pour le courant progressiste, l’encouragement de l’Église pour la vie consacrée, la prière, paraît être une perte de temps et d’énergie pour l’action sociale. Il ressent ces dons comme Judas ressentit le gaspillage d’un parfum de grand prix. L’amour gratuit de Jésus aimé et servi comme un époux au jour le jour paraît n’être le fruit que d’une fuite du monde. Ce courant de pensée ne se séparera jamais de l’Église par un schisme bien qu’il le soit par le cœur.
Ne constituera-t-il pas un signe des temps très significatif car analogue à ce qu’on voit dans la vie de Jésus ? Vers la fin du monde, il est probable que le progressisme* humaniste ira en s’approfondissant. Il supportera de moins en moins l’infaillible fidélité intellectuelle des papes à l’Évangile. À l’image de Judas au moment de sa tentation, il aura sans doute un rôle de coopération dans l’œuvre qui aboutira à la fin de l’Église visible[302]. Il livrera l’Église pour sa perte à l’Antichristianisme final[303]. Nous ne faisons pas oeuvre de prophète mais seulement d’observateur des idées et de leurs conséquences probables.
[Chose
indécise pour les détails]
Un autre signe des temps, tout aussi significatif, mérite d’être
rapporté. Quelques jours avant sa mort, Jésus eut un geste incompréhensible
pour les apôtres. Il voulut se comporter avec eux comme s’il était leur
esclave. Il se mit à laver les pieds de ceux qui étaient à table. Par ce geste,
Jésus fit une révélation que jamais aucune autre religion, pas même le
judaïsme, n’a soupçonnée : Dieu, le Tout-Puissant, maître et Seigneur de
l’univers, est humble[304]. Mais Pierre* ne voulut pas se
laisser faire : « Seigneur,
toi, me laver les pieds ? Jésus lui répondit : – Ce que je fais, tu
ne le sais pas à présent ; par la suite tu comprendras. Pierre lui
dit :
– Non, tu ne me laveras pas les pieds, jamais ! Jésus lui répondit : – Si
je ne te lave pas, tu n’as pas de part avec moi. »[305] Pierre n’agit ainsi qu’à cause
de son amour de Jésus, mais d’un amour mal éclairé. Il eut le sens de sa
dignité de Maître et Seigneur. Son cœur était généreux mais absolument
incapable de pensées divines. Pour lui, un Messie est fait pour devenir un roi
politique ou spirituel. Un maître de vérité est fait pour avoir raison. Mais
pour Jésus, un Messie est fait pour être le serviteur de tous jusqu’à en
mourir.
Là encore il convient d’être attentif car l’Église, conduite sur le même chemin d’abaissement que Jésus, connaîtra nécessairement de la part de certains de ses membres la même réaction. Il existe d’ailleurs depuis le Concile Vatican II un courant de pensée qui ressemble à s’y méprendre à saint Pierre le jour du lavement des pieds. Familièrement, il est qualifié de mouvement intégriste* car il rêve de voir l’Église avec l’intégrité des traditions qui firent sa force au temps passé. Ces croyants sincères rêvent d’une Église sûre de sa Vérité, ne s’abaissant pas à s’adresser aux autres religions en courant le risque, qu’ils considèrent comme actuel, d’être mis au même niveau qu’elles. Ils voudraient une liturgie de gloire, comme au temps des fastes, et non celle instaurée par les papes après le Concile. Ils n’arrivent pas à se rendre compte que le monde a changé, qu’il n’est plus chrétien en Occident. Aussi, la défense de la liberté religieuse, selon la conscience de chacun, leur paraît s’opposer aux décrets faisant du christianisme la religion des États du temps où ceux-ci étaient catholiques. Alors, tel saint Pierre* devant Jésus ceint d’un tablier, ils ne reconnaissent plus leur Église en tenue de servante. Ils vont jusqu’à enseigner : « Les papes depuis Jean XXIII et le Concile Vatican II sont peut-être des antipapes. L’abomination de la désolation[306] est dans le Temple Saint, c’est-à-dire aux sommets de l’Église atteints par l’apostasie*. » Ils oublient qu’il est impossible que ce texte des Évangiles se réalise de cette manière à cause de la promesse solennelle de Jésus faite aux papes : « J’ai prié pour que ta foi ne défaille pas. »[307] Ils interprètent mal des textes qu’ils savent pourtant adressés à tous les papes légitimement élus, jusqu’à la fin du monde. Cette contradiction torture leur esprit.
Mais, si l’on compare leurs agissements au comportement de saint
Pierre qui les prophétise, on ne peut nier que leur révolte est liée à leur
bonne volonté et à leur amour (mal éclairé) du
Seigneur. Saint Pierre se laissa finalement laver les pieds. Mais force est de
le constater, parce qu’il ne changea pas vraiment, sa confiance ne fut pas
assez forte. Il s’enfuit. Il ne put dire : « J’étais avec mon Dieu au
pied de sa croix. » Il en sera de même à la fin du monde pour ceux parmi
les chrétiens qui rêveront encore d’une Église intègre et glorieuse. Ils ne
tiendront pas. Ils s’enfuiront à la vue de la destruction spirituelle à venir.
Ils n’auront pas, comme ceux parmi les chrétiens qui se seront laissé former
par Marie, la capacité de vivre de l’intérieur dans l’espérance la victoire
finale de l’Église enfin devenue grande aux yeux de Dieu. Ils se diront plutôt,
relisant fiévreusement les promesses de Jésus : « Les portes de
l’enfer ne l’emporteront pas sur elle ! »[308], que tout cela n’était
peut-être que vanité... Ils passeront par les mêmes doutes que Pierre après
l’arrestation et la mort de Jésus, doutes qui l’amenèrent à renier trois fois.
Il y aura dans leur souffrance un signe des temps important.
On pourrait multiplier la description de ces signes dans l’Église. Nous ne voudrions en rapporter que trois autres qui me paraissent importants en ce début de xxie siècle, alors que les chrétiens sont encore secoués par les effets du Concile Vatican II. Le premier concerne la liturgie, le second la papauté*, et le troisième la dernière pentecôte d’amour.
[Chose
probable]
La liturgie est un objet de conflit si important en Occident depuis le Concile Vatican II qu’il convient de montrer qu’elle est aussi signe de notre époque et de la proximité du retour du Christ. L’art a de tout temps été signe de la mentalité des époques. Ainsi, le xiiie siècle, époque de la civilisation chrétienne où tout s’unifie autour du Christ, brille par l’harmonie des cathédrales gothiques qui ressemblent à des vaisseaux en marche vers la lumière. En ce temps, il n’existe pas d’art profane et tout, peinture, sculpture, musique, sert Dieu. La Renaissance, qui est le siècle de la redécouverte de valeurs humaines autonomes du christianisme, se caractérise par ses oeuvres profanes aux lignes classiques. L’époque moderne et contemporaine qui se caractérise par l’oubli progressif de Dieu a été source d’un art de plus en plus profane et aujourd’hui torturé, non figuratif et parfois même sans vie apparente, marqué du même désespoir que le monde qui ne croit plus devoir espérer un salut après la mort. L’art est donc un signe philosophique de chaque époque.
Il en est de même au plan
théologique, mais l’art s’appelle ici
liturgie. Le temps de l’Église a un
sens plus profond puisqu’il annonce le retour du Christ. Or la liturgie de
l’Église suit le même cheminement par étape que celle qu’on peut discerner dans
les Évangiles autour du Christ jusqu’à sa mort. Durant sa vie terrestre, Jésus
reçut de la part de ceux qui l’entouraient des marques qui étaient des signes
de leur attachement à son égard. Il fut honoré diversement au cours de sa vie
apostolique. Il y eut un temps caché de persécution et de fuite en Égypte.
C’est le temps de la petite enfance. Il correspond pour l’Église aux trois
cents ans des persécutions romaines. Les églises sont alors des caves et des maisons.
La liturgie est pauvre et confidentielle.
Les trois ans de vie apostolique du Christ peuvent se diviser en trois temps. Il y eut un temps plus caché au moment où les Juifs commencèrent à entendre parler de lui. De même, l’Église, au commencement de sa reconnaissance dans l’Empire romain d’Occident, au temps des invasions barbares, est encore peu puissante au milieu des peuples païens. Elle se réunissait dans des églises intimistes et ne célébrait que derrière un voile le mystère de l’eucharistie. En Occident, l’art roman est l’empreinte de cette époque.
Au cours de sa vie, Jésus connut ensuite un moment de gloire extérieure. Les gens venaient de tout Israël* pour écouter sa parole et voir ses miracles. On voulait le toucher, le faire roi. De même, l’Église connut une époque de gloire. Elle dominait le monde, pouvant excommunier les rois et leur enlever leur trône. Au Moyen Âge et jusqu’à la Révolution française, sa liturgie devint somptueuse, riche et solennelle, à l’image du pouvoir spirituel (et matériel) qu’elle possédait. C’est le temps du gothique, de l’art flamboyant qui s’élève en flèches vers le ciel.
Dans une troisième phase de sa vie apostolique, Jésus connut de plus en plus la lutte et les abandons. On vint moins l’écouter. Il fut souvent de plus en plus seul. Il en est de même pour l’Église depuis le siècle des Lumières et de plus en plus actuellement. Alors, poussée par l’Esprit Saint, l’Église changea de liturgie. Après le Concile Vatican II, elle l’appauvrit, la rendit plus familiale en insistant davantage durant la Messe sur l’aspect « repas intime » de la Cène de Jésus et moins sur la gloire du Sacrifice universel de la croix. L’Église avait bien sûr le droit d’agir ainsi, puisant dans l’immense richesse des trésors de l’Évangile. Mais elle fut contestée. Pourtant, elle donnait aux chrétiens l’un des plus grands signes des temps de la fin.
Nous pouvons être sûrs que d’autres signes seront donnés par la liturgie dans le futur, à mesure que s’approchera l’Heure Sainte du martyre de l’Église. Les chrétiens de ces époques futures devront y être attentifs et, chaque fois que les signes de petitesse s’approfondiront, se réjouir « et redresser la tête car leur Rédemption s’approche »[309]. Cette liturgie de pauvreté sera poussée très loin, à l’image de Jésus. Sa dernière liturgie, celle de son sépulcre, fut accomplie par des laïcs qui n’étaient même pas ses compagnons de route mais de simples admirateurs[310]. Il n’eut pas droit au parfum de l’embaumement. Il en sera de même pour l’Église...
[Chose
probable]
Verra-t-on, vers la fin, avant la venue de l’Antéchrist, des papes annoncer explicitement la proximité de l’épreuve ? C’est une question difficile qui appelle deux réponses car le pape a deux rôles principaux dans l’Église :
1- Il est le Maître de la Vérité délégué par Jésus pour que notre connaissance de Dieu ne se fourvoie pas : « Affermis tes frères. »
2- Il est aussi le Berger suprême délégué pour conduire l’Église vers la Venue du Christ : « Sois le berger de mes brebis. »[311]
1- Elle sera explicitement annoncée par Pierre en tant que Magistère
Le fait que l’Église doive subir un martyre relève, en tant que doctrine théologique, du ministère du pape comme Maître de vérité (Magistère). Il est donc probable que vers la fin des temps les papes annonceront ce martyre ou sa possibilité, de la même façon que Jésus l’a annoncé à ses disciples. Curieusement, la chose est devenue réalité depuis quelques années. Qu’on se réfère à l’enseignement rapporté précédemment et tiré du Catéchisme de l’Église catholique[312]. C’est la première fois que, historiquement, le Magistère rappelle, en usant de son infaillibilité habituelle, un tel enseignement de l’Écriture.
Quoi qu’il arrive dans le futur, et quoi qu’en disent aujourd’hui des membres de la mouvance intégriste, il est impossible qu’un pape élu légitimement se mette à prêcher en tant que pape autre chose que l’Évangile de Jésus. Toute l’histoire de l’Église le montre. Nous avons eu des papes assassins, adultères, polygames même, mais jamais de pape hérétique[313]. À l’inverse, tous les autres sièges apostoliques, sans exception, ont connu des évêques douteux et même hérétiques. Un seul échappe à cette règle, celui du successeur de Pierre*. La raison en est simple. Jésus a promis. Il est Dieu et il a la puissance de tenir sa promesse. Il est donc certain que, quelles que seront les décisions solennelles des papes futurs au plan de la foi et de la morale, elles viendront de Dieu.
Un récit romancé récent, passé presque inaperçu, semble indiquer
une prise de conscience de plus en plus forte d’une partie des chrétiens à
l’égard de la proximité de la passion de l’Église. Dans son roman L’anneau du
pêcheur, Jean Raspail[314] rapporte une parabole qu’il
faut lire pour comprendre ce que pourrait être le témoignage final des papes.
Ce récit romancé raconte qu’à Rome, dans la crypte souterraine du Vatican où
reposent la plupart des papes de l’histoire, près du tombeau de Jean XXIII, une
pierre tombale sans date porte sur le côté l’inscription Benedictus. Elle est très récente puisqu’elle fut posée en 1994.
Elle contient les restes d’un homme pauvre, décédé dans le sud de la France.
Son corps fut ramené par un évêque au service de l’État du
Vatican. Or cet homme était pape, un
vrai pape de l’Église catholique romaine, dont la lignée apostolique remonte à
la fin du xive siècle.
À cette époque, un grand schisme eut raison de la papauté d’Occident et la
divisa en deux puis bientôt en trois papes. Or, l’un d’eux, Clément VII, fut élu en Avignon selon les règles canoniques.
En fin de compte et pour mettre fin au schisme, les trois papes furent déposés
par un Concile (Constance, 1417). Un quatrième pape fut élu, à l’origine des
actuels papes de Rome. Loin de renoncer, le successeur de Clément VII, nommé
Benoît XIII (Benedictus PP. XIII),
résista dans le sud de la France et en Espagne. Il eut un successeur, puis un
autre et, les uns après les autres, de moins en moins connus, de plus en plus
pauvres, la lignée des papes prénommés Benoît perdura jusqu’à aujourd’hui.
Devenus mendiants, ils ne gardaient plus sur eux que trois objets témoins de
leur gloire passée, l’anneau papal ou anneau
du pêcheur donné au pape Benoît XIV, un calice pour leur office de prêtre,
et une étole rouge, couleur du martyre. Ils trouvaient toujours quelques jeunes
vocations pour adhérer à leur Église parallèle et la faire durer, jusqu’au
dernier d’entre eux qui se trouva seul et incapable de s’assurer un successeur.
Il fut rejoint par la crise religieuse de l’Occident. Il mourut en 1994 auprès
d’un prêtre envoyé par Rome, alors qu’il s’était mis en marche vers cette
ville. On trouva dans ses papiers, outre le récit d’une aventure de sept
siècles, la prophétie suivante :
« J’ai vécu longtemps et j’ai vu le monde
changer. Il y a des choses que je sais. Je dirai de quelle façon. C’est pourquoi
je dois aller à Rome. Avant cinquante ans, plus tôt peut-être, deux forces s’y
opposeront et le pape se souviendra du destin du pape Pedro de Luna et de ses
trente-deux successeurs qui ne laissèrent aucune trace sur cette terre. »
Le pape Jean-Paul II, raconte Jean Raspail, fut frappé par cette histoire. Il fit transférer les restes de Benoît à Rome. Le fait que cette succession de papes ait duré jusqu’à aujourd’hui sous le nom de Benoît (Béni*), et qu’elle ait émaillé son histoire par des miracles réalisés ici ou là, lui parut une marque de l’action de Dieu. Ces papes ne sont-ils pas une prophétie vivante, une image de l’avenir de la papauté de Rome ? D’après le roman de Jean Raspail, le commentaire de Jean-Paul II fut le suivant[315] :
« La simplicité de Benoît, son humilité, son
dénuement, sa naïveté, sa solitude, sa fonction pontificale réduite à celle des
premiers âges, quand l’apôtre Pierre*, tout aussi seul, errait sur les routes
de l’Empire sans grand espoir d’être écouté... Pierre était le commencement.
Benoît ressemble à une fin qui aurait été anticipée. Tout cela a profondément
ému le Saint-Père. À ses proches il a dit que viendrait un jour où
l’enseignement de l’Église serait unanimement rejeté parce que devenu
inapplicable au regard de la morale admise et de la religion du progrès. Il a
dit que l’Église catholique serait déchirée, ses gros bataillons prêts à
s’incliner. Il a dit que la conscience internationale contre laquelle il s’est
déjà élevé sans succès enjoindrait au pape de se soumettre, lui-même ou l’un de
ses proches successeurs, qu’un concile l’imposerait à la lumière d’une nouvelle
lecture de l’Évangile, et qu’il ne resterait plus au pape qu’à quitter Rome et
disparaître, comme Benoît. Pour traverser encore d’autres siècles, comme
Benoît. L’un et l’autre sont des fugitifs. »[316]
Quelle est la vérité de ce récit ? Peu importe. Il est prophétiquement vrai. Il raconte, mieux encore qu’un long traité de théologie, ce que j’entends par témoignage final de la papauté.
2- En tant qu’il est le « pasteur universel », il semble que
Pierre essayera de fuir sa passion et d’en dispenser ses frères
Si l’on suit les Écritures, il semble que le dernier pape et ses prédécesseurs immédiats seront signes de la proximité du retour du Christ sans le vouloir. La papauté essayera d’y échapper. C’est ce que signifie un texte de l’Évangile qui exprime allégoriquement ses dernières heures. Jésus venait de ressusciter. Pierre, repentant de ses reniements, était venu à lui. Jésus le confirma dans son rôle de premier parmi les apôtres et lui dit solennellement les paroles suivantes :
« En vérité, en vérité, je te le dis. Quand tu
étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture et tu allais où tu voulais. Quand
tu auras vieilli, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te mènera où
tu ne voudras pas. Il signifiait en parlant ainsi le genre de mort par laquelle
Pierre devait glorifier Dieu. »[317]
Ce texte est évidemment une allégorie. Il s’adresse à la personne de Simon-Pierre*, mais aussi, profondément, à ce qu’elle représente. Appliquée à la personne de Pierre, la prophétie s’est réalisée de manière très forte. L’hagiographie ancienne raconte que, lors de la persécution inaugurée par l’Empereur Néron après l’incendie de Rome, Pierre se sauva seul hors de la ville, laissant les fidèles en proie au martyre. Ce fut sans doute un effet de son tempérament à la fois héroïque s’il s’agit de mourir vite et faible quand il faut durer dans l’épreuve. En route, il rencontra le Christ qui se dirigeait vers Rome. Pierre lui dit : « Où vas-tu, Seigneur ? » Quo vadis ? Il lui fut répondu : « Je vais à Rome pour y mourir à ta place. » Alors Pierre, contrit, retourna à Rome où il fut crucifié. Il demanda à l’être la tête en bas, conscient de son indignité à subir la même passion que son maître. Tout cela est visiblement une prophétie. Elle annonce symboliquement la manière dont la papauté sera conduite elle-même vers son Heure.
Il peut arriver qu’un homme soit prophète sans le vouloir. Ainsi Caïphe, qui était grand-prêtre à l’époque de la vie apostolique de Jésus, dit-il à ses confrères : « Vous ne voyez même pas qu’il est de votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière. »[318] Et l’évangéliste comprend cette parole en disant : « Il ne dit pas cela de lui-même mais, étant grand-prêtre cette année là, il prophétisa que Jésus allait mourir pour la nation. » De même, à la fin des temps, la papauté sera certainement conduite par l’Esprit Saint à prononcer des paroles et à subir des événements qui seront signes de la fin prochaine. Elle le fera en résistant. Mais elle le fera. Avec difficulté sans doute, elle imitera Jésus dans un comportement significatif de sa dernière heure. En cela, elle sera signe des temps[319].
Le martyre de l’Église, qui sera un événement historique, et qui se réalisera à l’heure voulue par Dieu, concerne donc le rôle du pape en tant que berger qui conduit le troupeau de Dieu vers son sacrifice et sa glorification. Il conviendra donc de scruter les décisions de fond concernant la Pastorale de l’Église (la manière utilisée par Pierre* en tant que Pasteur des brebis pour conduire l’Église vers le retour du Christ), avec l’œil de l’espérance théologale. Il est certain qu’elles seront invisiblement dirigées par l’Esprit vers le Golgotha et la gloire.
Saint Jean Bosco fit un rêve[320] concernant les épreuves à venir de l’Église. Il voyait que seuls survivaient au naufrage ceux qui s’appuyaient sur trois blancheurs : Marie, Jésus dans son eucharistie et le pape pour sa foi toujours vraie. Ce rêve est non seulement prophétique mais aussi théologique[321].
[Chose
probable]
« Les disciples amenèrent l’ânesse et l’ânon.
Puis ils disposèrent sur eux leurs manteaux et Jésus s’assit dessus. Alors les
gens, en très nombreuse foule, étendirent leurs manteaux sur le chemin ;
d’autres coupaient des branches aux arbres et en jonchaient le chemin. Les foules
qui marchaient devant lui et celles qui suivaient criaient : ‘Hosanna au
fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna au plus
haut des cieux !’ Quand il entra dans Jérusalem, toute la ville fut
agitée. ‘Qui est-ce ?’, disait-on, et les foules disaient : ‘C’est le
prophète Jésus, de Nazareth en Galilée.’ »[322]
Tout au long de cet ouvrage, j’ai montré que la vie de Jésus dans son ensemble est l’icône de celle de l’Église. C’est le même Esprit Saint qui les dirige dans une même direction et selon une même méthode.
Cette identification entre l’Église et son époux sera poussée très loin. Les contemplatifs, ceux qui lisent de l’intérieur l’histoire, y trouveront au moment voulu les signes pour discerner les temps. Ils pressentiront où en est l’humanité en observant l’attitude de l’Église, en la comparant à celle de Jésus.
Avant sa semaine Sainte, Jésus connut un dernier moment de gloire terrestre. Cela fut inattendu tant les luttes le pressaient de partout. Alors qu’il entrait dans Jérusalem*, les foules vinrent à lui et l’acclamèrent. Il ne faut pas s’illusionner sur la qualité spirituelle de ces acclamations. La plupart des personnes ne savaient pas pourquoi elles agitaient des palmes et criaient « Hosanna au Fils de David ! » Elles suivaient le mouvement de masse. La preuve en est que la même foule, quelques jours plus tard, demanda qu’on crucifie Jésus et qu’on délivre Barabbas[323]. Sans le savoir, en agissant ainsi, la foule réalisait une prophétie ancienne. Ainsi, tout dans l’Écriture, jusqu’au dernier iota, devait être accompli. « Exulte avec force, fille de Sion ! Crie de joie, fille de Jérusalem ! Voici que ton roi vient à toi. Il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne, sur un ânon, le petit d’une ânesse. Il retranchera d’Ephraïm la charrerie et de Jérusalem les chevaux ; l’arc de guerre sera retranché. Il annoncera la paix aux nations. Son empire ira de la mer à la mer et du Fleuve aux extrémités de la terre. »[324]
De même, avant la semaine Sainte de l’Église, il y aura une dernière acclamation, faite d’enthousiasme communicatif. Ce sera l’Hosanna de l’histoire de l’Église[325]. Il s’agira d’un événement visible. Il ne s’agira pas de cette gloire intérieure de l’heure du sépulcre. Nous parlons ici d’une gloire terrestre. Les foules humaines reconnaîtront à l’Église devenue humble la riche valeur de civilisation qu’elle apporte à l’humanité. Médiatiquement, l’Église catholique sera considérée et admirée. Elle recevra de Dieu, pendant quelques années, l’autorisation d’enseigner son message sans qu’il soit déformé par les médias. À cette occasion, il est probable que l’Évangile sera une fois de plus annoncé à toutes les nations. Sa parole de vie sera proposée une dernière fois au monde. Il sera entendu, quoique de manière éphémère.
La Vierge Marie semble décrire ce moment dans le secret de La Salette[326] :
« Au premier coup de son épée
foudroyante, les montagnes et la nature trembleront d’épouvante, parce que les
désordres et les crimes des hommes percent la voûte des cieux. Paris sera brûlé
et Marseille englouti[327] ;
plusieurs villes seront ébranlées et englouties par des tremblements de terre.
On croira que tout est perdu ; On ne verra qu’homicides, on n’entendra que
bruits d’armes et que blasphèmes. Les justes souffriront beaucoup. Leurs pénitences
et leurs larmes monteront jusqu’au Ciel, et tout le peuple de Dieu demandera
pardon et miséricorde, et demandera mon aide et mon intercession. Alors
Jésus-Christ, par un acte de sa justice et de sa grande miséricorde pour les
justes, commandera à ses anges que tous ses ennemis soient mis à mort. Tout à
coup les persécuteurs de l’Église de Jésus-Christ et tous les hommes donnés au
péché périront, et la terre deviendra un désert[328].
Alors se fera la paix, la réconciliation de Dieu avec les hommes. Jésus-Christ
sera servi, adoré et glorifié. La charité fleurira partout. Les nouveaux rois
seront le bras droit de la sainte Église, qui sera forte, humble, pieuse,
pauvre, zélée et imitatrice des vertus de Jésus-Christ. L’Évangile sera prêché
partout, et les hommes feront de grands progrès dans la foi, parce qu’il y aura
unité parmi les ouvriers de Jésus-Christ et que les hommes vivront dans la
crainte de Dieu. Cette paix parmi les hommes ne sera pas longue. Vingt-cinq ans
d’abondantes récoltes leur feront oublier que les péchés des hommes sont cause
de toutes les peines qui arrivent sur terre. »
Beaucoup de révélations privées[329]* annoncent la dernière Pentecôte d’amour de l’Église. Le message de La Salette décrit vingt-cinq ans d’abondantes récoltes[330]. Actuellement, le message du Christ n’est pas médiatiquement audible. La génération qui tient les médias le déforme par peur que sa vérité n’enflamme les cœurs. Mais l’histoire provoquera un retournement. La génération de mai soixante-huit passe et la génération suivante vit dans un désert spirituel. Suite à un fléau dont nous ne pouvons que supputer la nature[331], les peuples chrétiens s’ouvriront un temps à la foi. Il conviendra de profiter de ce temps de grâce et d’enseigner l’Évangile[332].
Ainsi se réalisera une dernière fois de manière visible, médiatique et selon sa lettre, la prophétie fameuse de Jésus : « L’Évangile sera prêché à toutes les nations. Puis viendra la fin. » Toutes les nations, sans en exclure aucune (les nations chrétiennes, musulmanes, bouddhistes, hindouistes, animistes, humanistes), entendront le message de Jésus. Ce sera le dernier signe donné avant le temps de l’Antéchrist* final.
Que l’Église puisse une dernière fois faire entendre la vérité ne signifie pas qu’elle sera reçue. Tout cela sera éphémère. Les forces du mal auront trop pris les âmes. Les conditionnements sociologiques de l’histoire rendront possible la dernière prédication et ces mêmes conditionnements la rejetteront ensuite. Le balancier de l’histoire se retournera vite. Une génération plus tard, des jeunes se lèveront et diront : « La religion n’apporte que des malheurs et de la domination. Elle opprime la liberté des hommes. » De fait, cette génération sera mue par une puissante soif de liberté et de plaisirs. Elle ne supportera pas les contraintes de l’amour vrai. Elle étayera son discours sur les faits de l’histoire lointaine ou récente. L’Inquisition ecclésiastique et la crise violente de l’islam* seront évoqués, pêle-mêle. On libérera de nouveau le bandit Barabbas que dénonçait l’Église[333]. Alors nulle parole de Dieu ne sera plus écoutée. Il ne sera plus temps de parler mais de prier[334].
Qu’on me permette de donner ici mon opinion. Au moment où j'écris (toute fin du xxe siècle), ce temps de gloire de l’Église me semble proche. L’Église arrive à ce moment de son histoire où il lui faut monter vers Jérusalem. Comme le Christ persécuté, elle a été contrainte de prendre depuis deux cents ans un ton plus humble. Depuis le Concile Vatican II, elle s’est mise à parler aux païens[335]. Elle ne cesse de ressembler à Jésus dans sa dernière année d’apostolat. Depuis quelques temps, à travers la voix du grand pape de Marie*, Jean-Paul II, elle commence à annoncer son Heure future. En cela aussi elle imite Jésus[336]. Tout cela constitue sans aucun doute une série de signes des temps. Si cette intuition spirituelle est juste, il semble que l’Église va devoir bientôt monter sur un ânon d’humilité et parler, peut-être une dernière fois. Ensuite, son message ne sera plus oral. Il sera le témoignage d’un sacrifice ultime.
Deux
textes de l’Écriture sont importants pour la connaissance de la venue et de
l’œuvre du dernier Antéchrist[337] :
« Lorsque vous
verrez l’abomination de la désolation dont a parlé le prophète Daniel,
installée dans le lieu saint (que le lecteur comprenne !), alors que ceux
qui sont en Judée s’enfuient dans les montagnes... »[338]
« Nous vous le demandons, frères,
à propos de la Venue de notre Seigneur Jésus-Christ et de notre rassemblement
auprès de lui, ne vous laissez pas trop vite mettre hors de sens ni alarmer par
des manifestations de l’Esprit, des paroles ou des lettres données comme venant
de nous, et qui vous feraient penser que le jour du Seigneur est déjà là. Que
personne ne vous abuse d’aucune manière. Auparavant doit venir l’apostasie et
se révéler l’Homme impie, l’être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève
au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant
jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant
lui-même comme Dieu. Vous vous rappelez, n’est-ce pas, que quand j’étais encore
auprès de vous je vous disais cela (...) Sa venue à lui, l’Impie, aura été
marquée, par l’influence de Satan, de toutes espèces d’œuvres de puissance, de
signes et de prodiges mensongers, comme de toutes les tromperies du mal, à
l’adresse de ceux qui sont voués à la perdition pour n’avoir pas accueilli
l’amour de la vérité qui leur aurait valu d’être sauvés. Voilà pourquoi Dieu leur
envoie une influence qui les égare, qui les pousse à croire au mensonge en
sorte que soient condamnés tous ceux qui auront refusé de croire la vérité et
pris parti pour le mal. »[339]
Avant tout, si l’on
suit la lettre des Écritures Saintes, on peut dire sans hésiter que la foi des
chrétiens tient pour certaines onze affirmations concernant l’Antéchrist de la
fin du monde[340] :
1- L'Antéchrist sera une épreuve pour les bons, un châtiment éducatif
pour les pauvres pécheurs, une voie de perdition pour les pervers ;
2- L'Antéchrist sera un
homme, un individu ;
3- L'Antéchrist ne sera
pas Satan incarné, ni un démon sous une apparence humaine, mais un membre de la
famille humaine, un homme, rien qu'un homme ;
4- L'Antéchrist sera
séducteur par certaines qualités de sa personne ;
5- Les débuts de
l'Antéchrist seront humbles et peu remarqués ;
6- L'Antéchrist grandira et fera des conquêtes ;
7- L'empire de
l'Antéchrist deviendra universel ;
8- L'Antéchrist fera une guerre acharnée à Dieu et à l'Église ;
9- L'Antéchrist se fera
lui-même passer pour le serviteur du vrai Dieu, mais il servira en fait un faux
dieu ;
10- C'est au moyen de prodiges diaboliques que l'Antéchrist prétendra
démontrer qu'il sert le vrai Dieu ;
11- La domination et la
persécution de l'Antéchrist seront passagères. L'Homme de péché sera
détruit.
La
première question qui se pose est la suivante. Qui est l’Antéchrist ?
Est-il un homme fait de chair et de sang ou le symbole personnifié d’une
idéologie, d’un anti-Évangile ? Les deux thèses ont été soutenues par les
théologiens. Pourtant, si l’on regarde les textes de l’Écriture Sainte qui nous
annoncent sa venue, ils semblent trancher sans ambiguïté pour un Antéchrist
homme, fait de chair et de sang. Saint Jean, dans sa première épître, ne cesse
de distinguer l’esprit de l’Antéchrist
et l’Antéchrist. Le premier est une forme de pensée : « Tout
esprit qui ne confesse pas Jésus n’est pas de Dieu. C’est là l’esprit de
l’Antéchrist. »[341]
Au contraire, l’Antéchrist doit, selon lui, venir à une époque bien précise
comme vient un faux prophète : « Petits
enfants, voici venue la dernière heure. Vous avez entendu dire que l’Antéchrist
doit venir ; et déjà maintenant beaucoup d’Antéchrists sont venus, à quoi
nous reconnaissons que la dernière heure est là. »[342]
Son enseignement concorde en tous points avec celui de saint Paul cité
ci-dessus. Il semble que la prédication unanime des apôtres a consisté à
rappeler que le Christ ne reviendrait pas dans sa gloire avant que ne vienne
l’Antéchrist. Chaque génération de chrétiens eut son Antéchrist dont la venue
fut permise par Dieu pour approfondir la fidélité de ses disciples et leur
pauvreté dans la lutte. Pour eux, cet Antéchrist fut donné comme le signe de la
fin de leur monde. Cela se réalisa très concrètement puisque, depuis que le
monde est monde, il n’existe pas de génération qui n’ait eu sa part de malheurs
politiques, guerres, famines, etc.
Cependant,
la fin des fins, celle qui précède la résurrection des morts, est aussi l’ère
d’un Antéchrist particulier dont les autres ne sont que des préfigurations.
Ainsi, à moins de forcer les textes de l’Écriture, il semble certain que
l’Antéchrist est un humain qui prêche avec succès une forme ultime
d’Antichristianisme. Cela concorde d’ailleurs avec tout ce que l’histoire nous
montre des antichristianismes. Une idée, quelle qu’elle soit, ne brille puissamment
que si elle est incarnée par un homme talentueux qui sait enthousiasmer les
foules. L’exemple le plus typique de cette nécessité d’une incarnation est
l’histoire du nazisme. Cet antichristianisme est épais dans ses principes.
Établir la valeur des hommes sur une base strictement raciale est indigne d’un
siècle cultivé et du peuple de Goethe. Qu’un barbare du xve siècle avant notre ère[343]
ait pu élaborer une telle doctrine pour défendre sa tribu contre les menaces
d’une autre, cela peut se comprendre. Mais qu’une nation chrétienne y sombre
presque tout entière et avec émotion, cela dépasse la raison. Hitler est un Antéchrist,
l’un des plus puissants que l’humanité ait connus. À ce propos, citons la
prophétie étonnante de sainte Odile*[344],
morte en 720 et patronne de l’Alsace. Dans l’une de ses visions, elle attribue
à Hitler le qualificatif d’Antéchrist :
« Ecoute, écoute, ô mon
frère. J’ai vu la terreur des forêts et des montagnes. L’épouvante a glacé les
peuples. Il est venu le temps où la Germanie sera appelée la plus belliqueuse
des nations de la terre. Elle est arrivée l’époque où surgira de son sein le
guerrier terrible qui entreprendra la guerre du monde et que les peuples en
armes appelleront l’Antéchrist, celui qui sera maudit par les mères pleurant,
comme Rachel, leurs enfants et ne voulant pas être consolées. Vingt peuples
combattront dans cette guerre. Le conquérant partira des rives du Danube. La
guerre qu’il entreprendra sera la plus effroyable que les humains aient jamais
subie. Ses armées seront flamboyantes et les casques de ses soldats seront
hérissés de pointes qui lanceront des éclairs pendant que leurs mains
brandiront des torches enflammées. Il remportera des victoires sur terre, sur
mer et jusque dans les airs, car on verra ses guerriers ailés, dans des
chevauchées inimaginables, s’élever dans le firmament pour y saisir les étoiles
et les projeter sur les villes et y allumer de grands incendies. Les nations
seront dans l’étonnement et s’écrieront : ‘D’où vient sa force ?’ La
terre sera bouleversée par le choc des combats. Les fleuves seront rougis de
sang, et les monstres marins eux-mêmes s’enfuiront épouvantés jusqu’au fond des
océans. Les générations futures s’étonneront que ses adversaires n’aient pu
entraver la marche de ses victoires. Des torrents de sang humain couleront
autour de la montagne, ce sera la dernière bataille Ultima pugna. Cependant, le conquérant aura atteint l’apogée de ses
triomphes vers le milieu du sixième mois de la deuxième année des hostilités,
ce sera la fin de la première période, dite de victoire sanglante. II croira
alors pouvoir dicter ses conditions. La seconde partie de la guerre égalera en
longueur la moitié de la première. Elle sera appelée tempus divisioni],
la période de la diminution. Elle sera féconde en surprises qui feront frémir
les peuples. Dans la troisième période, tous les peuples spoliés recouvreront
ce qu’ils ont perdu et quelque chose de plus. La région de Lutèce sera sauvée
elle-même à cause de ses montagnes bénies et de ses femmes dévotes. Pourtant,
tous auront cru à sa perte, mais les peuples se rendront sur la montagne et
rendront grâce au Seigneur. Car les hommes auront vu de telles abominations
dans cette guerre que leurs générations n’en voudront plus jamais. Malheur
pourtant encore à ceux qui ne craignent pas l’Antéchrist, car il suscitera de
nouveaux meurtres. Mais l’ère de la paix sous le feu sera arrivée et l’on
verra les deux cornes de la lune se réunir à la croix, car en ces jours, les
hommes effrayés adoreront Dieu en vérité, et le soleil brillera d’un éclat
inaccoutumé. »[345]
Mais
Hitler n’est pas le dernier Antéchrist. Les Écritures nous décrivent son œuvre
avec suffisamment de précision pour que nous puissions le reconnaître au moment
de sa venue. Hitler fut avec Lénine, Staline, Pol Pot, Mao, l’un de ces
terribles
Antéchrists en matière de persécutions extérieures : « Celui qui tue
le corps »[346],
dirait Jésus, mais dont l’âme reconnaît assez facilement la perversité.
L’Antéchrist final sera plus terrible au plan de la vie divine. Il sera celui
« qui, après avoir tué le corps, a le pouvoir de jeter dans la géhenne
l’âme et le corps. »[347]
[Chose probable]
« Quatre royaumes
viendront qui n’auront pas la force du précédent. Et, au terme de leur règne,
au temps de la plénitude de leurs péchés, se lèvera un roi au visage fier,
sachant pénétrer les énigmes. Sa puissance croîtra en force (non en raison de
sa propre puissance), il tramera des choses inouïes, il prospérera dans ses
entreprises, il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par son
intelligence, la trahison réussira entre ses mains. Il s’exaltera en son cœur
et détruira un grand nombre par surprise. Il s’opposera au Prince des princes
(le Christ) mais, sans acte de main, il sera brisé. Elle est vraie la vision
qui a été dite. »[348]
Le
dernier Antéchrist naîtra, confie la Vierge Marie aux enfants de la Salette, d’une fausse vierge hébraïque et d’un évêque[349].
Pour celui qui sait lire le genre
apocalyptique utilisé, la traduction est simple. Il sera le fruit, en raison de
toutes ses pensées, d’un judéo-christianisme
mal orienté. La fausse vierge symbolise la foi d’Israël et l’évêque la foi
chrétienne qui, loin de se tourner vers Dieu, cherche une réussite terrestre.
Des prophéties de l’Écriture, nous pouvons déduire qu’il sera un homme brillant
intellectuellement. Il analysera les réalités de son époque de manière
perspicace et il s’en fera une idée précise à partir de la connaissance de
l’homme selon toutes ses dimensions. Si l’on suit saint Paul, ces brillantes
capacités ne seront pas seulement naturelles. Elles seront aidées et surélevées
par une influence satanique[350].
Faut-il en conclure qu’il aura fait un pacte lucide avec Lucifer* ?
Certains théologiens ont cru pouvoir déduire cela du texte de saint Paul cité
au début du chapitre. De fait, le texte[351]
suggère une telle interprétation mais ne le prouve pas vraiment. Je penche
personnellement pour cette thèse. Mon opinion est fondée sur plusieurs
observations et déductions[352].
Ceci étant dit, il s’agit d’hypothèses. De plus, elles ne préjugent pas du fond
d’une âme.
L’essentiel
n’est pas là. Le dernier Antéchrist, par blasphème direct contre l’Esprit Saint
(ce que nous appelions un culte luciférien)
ou par humanisme convaincu et sincère (implicitement
sataniste[353]),
servira sans le savoir ou en le sachant, le démon. Satan, quant à lui, sait ce
qu’il fait. Sa lutte à lui est « théologale », explicitement et consciemment
orientée contre la charité.
La
deuxième « qualité » de l’Antéchrist sera son exceptionnel talent
pour la parole. Non seulement ce qu’il dira sera intelligent, mais il saura
grâce à un grand charisme pédagogique l’exposer à tous. Il ne fera pas que
convaincre, il enthousiasmera. Il aura cette qualité qui fait les grands hommes
politiques et leur permet d’entraîner les peuples dans de grandes réalisations.
Enfin, et
c’est la troisième qualité qu’il est possible de déduire des textes prophétiques,
l’Antéchrist saura prouver la vérité de ses dires par des réalisations
efficaces. Il produira vraiment du bien, de grandes oeuvres humaines dont nous
essayerons de définir la nature. Les trois qualités, intelligence, parole et efficacité font aussi les grands apôtres
chrétiens mais eux savent mettre les qualités humaines et charismatiques que
Dieu leur donne au service de l’Évangile.
Peut-on
savoir ce que le dernier Antéchrist proposera aux nations pour les séduire et
réussir dans ses entreprises ? Quelle est la nature de l’antichristianisme
de la fin ? À partir de l’Écriture, nous savons qu’il sera pour les hommes
la meilleure chose qui puisse exister en vue du bonheur terrestre. Mais,
au regard de Dieu, il sera la pire car il produira efficacement dans l’esprit
des peuples de l’égoïsme et de l’orgueil.
Quelle
est donc l’idéologie, le projet de société le plus capable de produire égoïsme
et orgueil ? Je pense que le dernier antichristianisme sera une forme
politique du blasphème contre l’Esprit saint. Le monde entier, sachant que Dieu
existe et connaissant ses projets, se décidera à construire lucidement un monde
dont il est absent. Il s’agit, nous l’avons montré, d’un péché explicitement et
consciemment tourné contre la charité.
[Chose certaine
pour le sens général, indécise pour le comment concret]
Pour
comprendre son oeuvre, Jésus[354]
invite à se référer aux prophéties du prophète Daniel. Voici les deux
principales :
« (...) et après
soixante-deux semaines, un messie sera supprimé, et il n’y a plus pour lui (de
place). La ville et le sanctuaire seront détruits par un prince qui viendra. Sa
fin sera dans le cataclysme et, jusqu’à la fin, la guerre et les désastres
décrétés. Et il consolidera une alliance avec un grand nombre. Le temps d’une
semaine ; et le temps d’une demi-semaine, il fera cesser le sacrifice
perpétuel et l’oblation et sur l’aile du temple sera l’abomination de la
désolation jusqu’à la fin, jusqu’au terme assigné pour le désolateur. »[355]
« Je regardais, moi Daniel, et
voici : deux anges se tenaient debout, de part et d’autre du fleuve. L’un
dit à l’homme vêtu de lin (le Christ) qui était en amont du fleuve. Quand se
produiront ces choses inouïes ? J’entendis l’homme vêtu de lin, qui se
tenait en amont du fleuve. Il leva la main droite et la main gauche vers le
ciel et attesta par l’Eternel Vivant : ‘Pour un temps, des temps et un
demi-temps, et toutes ces choses s’achèveront quand sera achevé l’écrasement de
la force du Peuple Saint.’ J’écoutais sans comprendre ; puis je dis :
Mon Seigneur, quel sera cet achèvement ? Il dit : Va, Daniel ;
ces paroles sont écrites et scellées jusqu’au temps de la Fin. Beaucoup seront
lavés, blanchis et purifiés ; les méchants feront le mal, les méchants ne
comprendront point ; les savants comprendront. À compter du moment où sera
aboli le sacrifice perpétuel et posée l’abomination de la désolation, 1290
jours. Heureux qui tiendra et atteindra 1335 jours. Pour toi, va, prend ton
repos ; et tu te lèveras pour ta part à la fin des jours. »[356]
Ces deux
prophéties nous sont données selon un genre littéraire apocalyptique. Le
Seigneur utilise cette manière symbolique de s’exprimer lorsqu’il veut nous
amener à comprendre des événements qui à ses yeux se ressemblent mais peuvent
se produire plusieurs fois au cours des époques. Leur première réalisation est
racontée dans le livre des martyrs d’Israël*[357].
Sur ordre des princes grecs, on interdit le culte de Dieu. On transforma le
temple de Jérusalem* en un sanctuaire dédié à Zeus Olympien[358]. On punit de mort ceux qui
s’obstinaient à garder la religion du Dieu unique. Ces événements du passé sont
l’image de ce qui se produira à la fin du monde, en raison de l’Antéchrist, non
pas seulement à l’échelle du culte extérieur en Israël mais dans le temple des
cœurs humains sur toute la terre. En s’appuyant sur ces textes et sur ce qui
est discernable dans l’évolution du monde post-chrétien, essayons de nous faire
une idée de l’œuvre de l’Antéchrist.
Lorsque,
par suite de l’apostasie* grandissante dans le monde entier, les forces
spirituelles de ceux qui adorent Dieu auront suffisamment diminué, Satan jugera
que l’heure est venue. Les quatre royaumes annoncés à Daniel[359]
symbolisent toutes les guerres, les idéologies, les forces de destruction qui
ne cessent d’affaiblir l’Église et les religions[360].
Alors, Satan inspirera à un homme de commencer à agir. L’Antéchrist, car c’est
de lui qu’il s’agit, entreprendra de parler à quelques personnes puis, très
vite, à cause de la force de conviction de ses arguments, on viendra plus nombreux
l’écouter. « Sa puissance croîtra en force », affirme Daniel[361],
« non par sa propre puissance ».
C’est que, caché derrière lui, inspirant son discours et l’électrisant, Satan
sera présent. Il lui communiquera en raison de ses pouvoirs
1- Lecture
satanique de l’histoire
[Chose indécise]
Parmi les charmes séducteurs, Daniel et
l'Apocalypse s'accordent à signaler, comme devant certainement présenter plus
de dangers, le charme de la voix et de l'éloquence : Et il fut donné à
la bête une bouche qui proférait de grandes choses[362]. De
grandes choses !
« Depuis que le monde existe, les
hommes se sont divisés et entretués. Ces guerres plaisaient aux Puissances
mauvaises de l’au-delà dans la mesure où, divisant les hommes, elles pouvaient
les maintenir dans l’humiliation et l’humilité[363]. Mais, malgré les fléaux que ces
esprits mauvais ne cessaient d’envoyer ou de permettre[364], l’humanité mûrit.
L’âge
des convoitises : Au début de l’humanité, on se battait pour conquérir la
terre. On était animé par les trois convoitises bassement charnelles.
L’âge
des religions : En évoluant culturellement, les hommes ne perdirent pas
leur zèle pour le pouvoir, les richesses et les plaisirs. Ils les mirent au
service des religions. Les plus primitives soumettaient l’homme à des idoles de
bois. Les plus élaborées eurent en commun de prêcher l’humilité, la négation de
soi au profit d’un Dieu. De fait, elles ne visaient qu’à maintenir l’homme dans
sa condition d’esclave. Sous le masque de l’agneau, elles servaient d’opium du
peuple.
L’âge
des idéologies politiques : Pour se libérer, avec les siècles, l’humanité
s’efforça de rejeter les religions. Croyant devenir plus libre, elle se donna à
des utopies politiques. Elles furent nombreuses et insensées. Il en sortit des
guerres encore plus terribles car on tuait tout homme qui pensait autrement,
sans aucune limite, l’idole pouvant tout permettre.
L’âge
de l’humanisme sans Dieu : Dans une étape suivante, calmée par la vision
des crimes, on inventa l’humanisme athée et le devoir de tolérance. On parla de
l’urgence d’être heureux avant le vide du néant. On parla de paix, de respect
d’autrui et on tenta de l’imposer à travers une autorité mondiale. Mais cet humanisme
matérialiste finit par être partout rejeté car sans espérance. C’est que
‘l’homme ne vit pas seulement de pain’[365]. Il a soif de vie éternelle. Il
est un animal religieux.
Parallèlement, la connaissance scientifique
de la nature ne cessait de progresser. Devant sa complexité, on finit par comprendre
que l’existence d’un créateur n’était pas un mythe. On découvrit la source
profonde de l’éternel mal-être de l’homme. L’âme de l’homme, faite pour vivre
libre et ne pas mourir, mourait du faux espoir où l’avaient plongée[366] les religions de la soumission et
les idéologies anciennes. »
2- La
proposition d’une nouvelle religion de l’Homme
[Chose indécise]
L'ange déchu ayant choisi l'Antéchrist comme
chef visible de la suprême bataille à livrer contre le Christ et son Église, il
lui communiquera quelque chose des charmes naturels et incomparables que l'Éden
contempla autrefois avec étonnement dans Lucifer, charmes qui ne lui ont pas
été retirés, mais dont il abuse pour faire le mal. Sous cette influence
occulte, le sublime, dans la bouche du fils de perdition, s'unira au
blasphème ; et cette tentation du sublime sera si attrayante, que les élus
seraient séduits, s’ils pouvaient l'être[367] :
« Arrivée à la plénitude du savoir et
de l’expérience, l’heure est venue pour l’humanité d’adhérer à la sagesse qui
peut la combler tout entière. Après des siècles d’errance, le monde est mûr
pour se donner à la vraie religion, l’Évangile éternel voulu par le Créateur,
celui qui libère l’homme de toutes ses peurs.
Les faux Évangiles affirmaient que l’homme
devait être un serviteur. Le vrai affirme qu’il a été créé pour être un dieu.
Il a été fait pour la liberté et la puissance, pas pour la dépendance. Il le
peut dès ici-bas.
L’humanisme sans Dieu disait que la vie
s’arrête avec la mort, plongeant l’humanité dans l’exclusive recherche du
bonheur immédiat et dans la désespérance[368]. Au contraire, cette vie n’est
qu’un commencement. Après la mort, l’homme vit[369]. De l’autre côté du voile, il lui
est proposé, pour l’éternité, liberté et dignité. Cela se réalise très
concrètement par l’apparition du dieu suprême, ‘celui qui porte toute vraie
lumière’[370]. L’homme qui choisit la liberté,
qui refuse librement la dépendance que lui propose le faux dieu[371], prolongera sa puissance[372] dans l’autre monde pour
l’éternité, dans la communion intellectuelle avec le projet grandiose de l’Ange
de Lumière.
Ainsi pacifiée et maîtresse d’elle-même, l’humanité
va enfin s’appartenir. Elle va se mettre debout. Libérée de l’angoisse du
néant, en contact spirite avec l’autre monde, elle va connaître la pleine
possession d’elle-même[373]. Rien ne lui sera plus impossible.
L’humanité deviendra maîtresse de son destin, décidant elle-même ce qui est
bien ou mal. »
Ce
discours ressemble beaucoup à l’Évangile du Christ. On y parle même d’un Dieu,
d’une vie après la mort. Il n’y a plus d’athéisme. Il est aisé de se laisser
abuser, même en étant chrétien.
Le
message de l’Antéchrist plaira. Rappelons qu’il s’adressera à une génération du
futur, une génération qui n’aura plus de religion[374].
L’humanité le recevra avec enthousiasme car elle aura bu jusqu’à la lie le
désespoir de l’humanisme athée. Il sera ressenti par la majorité des hommes
comme vrai. Il enthousiasmera les nations* avides de bonheur, de liberté et
surtout d’une espérance éternelle. Plus encore que les autres, une partie des
chrétiens de cette époque se mettra au service de ce grand projet. Leur sens de
l’amour du prochain les y poussera. C’est l’Évangile de Jésus, les
entendra-t-on proclamer partout. Jésus n’a pas voulu autre chose que cela. La
gloire de Dieu, c’est l’homme debout[375].
Le texte
de Daniel décrit cette séduction exercée sur le peuple de Dieu en ces
termes : « Il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par
son intelligence, la trahison réussira entre ses mains. »[376]
Car il s’agit d’une trahison, d’une apparence du christianisme dont j’ai montré
la fausse ressemblance[377].
Très vite, poussé par l’enthousiasme des peuples séduits, l’Antéchrist progressera
en popularité.
L’abbé Augustin Lemann[378] affirme
comme une certitude que c’est au moyen de prodiges diaboliques que l'Antéchrist
prétendra démontrer que sa religion est celle de Dieu. « L'avènement de cet impie aura lieu selon la puissance de Satan,
avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs. »[379] C'est
par des miracles, dit-il, aussi nombreux qu'éclatants, que Jésus-Christ avait
prouvé sa filiation et sa mission divine. « Les oeuvres que mon Père m'a
donné d'accomplir, ces oeuvres que j'opère, rendent témoignage de moi, et
prouvent que c'est le Père céleste qui m'a envoyé » ; l'Antéchrist
aura la prétention d'établir également sa fausse divinité sur des prodiges
extérieurs. C'est avec l'aide de Satan, par sa puissance, qu'il les accomplira.
Mais ces miracles seront-ils réels ?
Cependant,
ces faits extraordinaires n'atteindront jamais la réalité des vrais miracles
divins. Ils ne pourront jamais dépasser les limites des lois fondamentales de
la physique ou de la biologie (résurrections d'un cadavre, mouvement
instantané, guérison instantanée d'une maladie ou d'un handicap, apparition ex
nihilo de matière, etc.). Ce seront en fait des prodiges extraordinaires du
type de ceux que nous montre déjà la science actuelle : réanimation de
patients en mort approchée, mouvement rapide, guérison étonnantes mais
progressive de graves maladies et gestion profonde des lois de la matière. La
réalité de ces faits ne fait donc aucun doute même s'ils n'exigent pas la
toute-puissance divine.
Pourtant,
une dernière fois, Dieu permettra que des voix s’élèvent pour manifester la
vraie nature de cet homme. Avec netteté et précision, ils profiteront des
derniers moments de liberté pour prêcher. L’apocalypse de saint Jean* présente
symboliquement ces voix sous la figure de deux témoins[380].
Ils ne sont pas autre chose que tous ceux qui, à cette époque avancée en apostasie*,
auront gardé un sens suffisamment profond du projet de Dieu sur le monde pour
l’expliquer. Ils sont, selon une expression de saint Paul[381]
« Tout ce qui porte le nom de Dieu », c’est-à-dire selon le Concile
Vatican II[382],
toute religion qui dispose l’homme à attendre le salut non de ses propres force
mais de la grâce que Dieu donne aux humbles et aux assoiffés d’amour. La
première d’entre toutes est évidemment la religion de Jésus puisqu’elle ne fait
pas que disposer au salut mais le donne déjà à travers la prière du cœur et les
sacrements de la charité. Ainsi, il est probable et même certain que Dieu
suscitera un pape ou des apôtres qui diront : « Le salut oui ! Mais
avec le vrai Dieu ! Ne confondez pas avec ce faux Dieu. Rappelez-vous
l’avertissement de saint Paul : ‘Si un ange venu du ciel vous annonçait un évangile
différent de celui que nous avons prêché, qu’il soit anathème !’[383]
Dieu est humilité, amour jusqu’à mourir. Il n’est pas le Dieu du pouvoir et de
la liberté orgueilleuse ! »[384]
Le vrai Évangile de Jésus sera prêché à tous. Chacun
l’entendra (sans doute grâce aux moyens de communication encore plus développés
que ceux d’aujourd’hui). Ainsi se réalisera une dernière fois la parole :
« Il faut d’abord que l’Évangile soit prêché à toutes les nations. »[385]
Pourtant, il ne sera pas reçu. Les hommes seront trop attachés à eux-mêmes pour
se soucier ou désirer le vrai paradis céleste, celui de l’amour crucifié et
ressuscité. Le message de l’Antéchrist correspondra beaucoup plus à leurs
désirs. L’Église et le pape de cette époque seront pauvres et humbles de cœur
comme jamais ils ne l’auront été au cours de l’histoire. Une si profonde
qualité aura été préparée par les décennies précédentes et les humiliations de
la progression de l’apostasie*. L’Église sera revêtue de l’esprit de douceur
d’Énoch* et de la force d’Élie*. Mais l’Église ne sera pas seule. Les religions
seront alors si faibles et si peu nombreuses en fidèles qu’elles ne songeront
plus à se faire la guerre. Le vrai oecuménisme sortira des souffrances
spirituelles de la fin. Les hindouistes prieront avec les chrétiens, les
musulmans croyants avec les Juifs, chacun dans le respect des convictions de
l’autre, unis dans la confession commune. Le
paradis n’est pas donné à l’orgueil. Il l’est à l’humilité.
Le
témoignage de l’islam sera devenu assez semblable à celui de l’Église, selon ce
que j’ai cru pouvoir dire de ses épreuves futures[386].
Il aura appris la pauvreté et la pureté de sa foi, à cause de l’apostasie de
ses masses dégoûtées des crimes et des guerres du passé. Les derniers musulmans
fidèles, rendus humbles par les malheurs subis dans leurs défaites militaires,
diront : « Des membres de notre religion se sont conduits en
fanatiques par le passé. Ils ont, par leurs crimes et les atrocités commises au
nom d’Allah, précipité le rejet par les générations suivantes du nom de Dieu.
Pardon pour leurs crimes. Dieu n’en fut pas responsable mais les hommes et leur
orgueil. Le Dieu d’Abraham n’est pas ce Dieu du culte de l’homme. Il aime
l’homme quand il est humble et miséricordieux. Il a créé l’homme et attend de
lui adoration et soumission. Il nous donnera dans l’autre monde le bonheur
éternel auprès de lui. »
À cette
époque de la fin, Israël* sera en paix. D’après les prophéties, il sera revenu
dans sa terre de Palestine, installé de nouveau dans Jérusalem unifié.
L’attitude du peuple juif devant l’Antéchrist sera analogue à celle du reste du
monde. La plus grande partie sera séduite par son message. Ils y verront même
le Messie de la gloire annoncé par la Bible et qui doit venir pour régner sur
toutes les nations, pour instaurer la paix. Quelques-uns, peu nombreux,
resteront fidèles à la foi d’Abraham et des prophètes, dénonçant conjointement
aux chrétiens et aux musulmans le faux messianisme, le messianisme luciférien de l’Homme impie.
Ce dernier combat spirituel sera terrible et sans merci. Il
ne se fera pas d’abord avec des armes d’acier mais dans les cœurs. Aux yeux de
Dieu, tout échec en ce domaine de la part du peuple de ses saints serait bien
plus terrible que le meurtre car c’est de la vie éternelle qu’il s’agit. C’est
pourquoi l’Apocalypse et les diverses prophéties de l’Écriture décrivent ces
combats de l’Antéchrist comme des guerres et des meurtres abominables,
inimaginables. De fait, il est probable que l’Antéchrist ne triomphera que par
des armes spirituelles, celles de ses idées, de son intelligence, de ses ruses[387].
C’est ainsi. Plus l’humanité approchera de son terme et se spiritualisera, plus
ses guerres seront celles de l’Homme sans Dieu contre l’Homme au service de
Dieu. Ce sont les deux conceptions opposées du monde, celles de Dieu et celle
de
Lucifer. Elles sont, révélées à la face du monde de manière explicite, le
combat sous-jacent, depuis la création du monde, toutes les tribulations de
l’humanité. Alors sera réalisée la prophétie de saint Paul[388] :
« Auparavant doit se révéler l’Homme impie, l’Être perdu, l’Adversaire,
celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un
culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se
produisant lui-même comme Dieu. »
[Chose certaine pour
l’aspect général, indécise pour le particulier]
La fin des nations, le
gouvernement mondial
« Et la puissance fut donnée à la Bête
sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue, sur toute nation. » Apocalypse,
13, 7.
Cette accumulation d'expressions ne laisse aucun doute sur
l'universalité de l'empire de l'Antéchrist. Il deviendra, soit par lui-même,
soit par ses lieutenants, maître du monde.
L’Histoire
et le démon qui la manipule auront puissamment préparé les peuples au nouvel
évangile de l’Homme libéré. Très vite, porté par l’enthousiasme des nations*
devant son projet politique, l’Antéchrist étendra son pouvoir sur le monde
entier : « Il consolidera une alliance avec le grand nombre. »[390]
Il n’aura d’ailleurs que l’opposition de quelques groupes spirituels isolés à
son action puisque le monde entier, disposé par des années d’apostasie*, sera
en communion avec lui, selon saint Paul [391] :
« Mais que seulement celui qui le retient soit d’abord écarté. Alors
l’impie se révélera. »
Il sera
très efficace. Soit lui personnellement, soit le courant de l’histoire qui
l’aura précédé de peu, établira un gouvernement mondial. L’Évangile fait même
de la disparition des nations l’un des signes important du temps de la fin.
« Jérusalem sera foulée aux pieds par des païens jusqu’à ce que soient
accomplis les temps des nations. »[392]
Il semble que cet événement sera politiquement visible et qu’il s’accomplira
parallèlement à la récupération par l’État d’Israël de la totalité de Jérusalem[393].
Intelligemment et avec respect des différentes mentalités humaines, le dernier
Antéchrist centralisera le gouvernement du monde en un seul endroit. Il fera
des nations (France, Belgique, etc.) de simples provinces. Le but de cette
œuvre sautera aux yeux de tous, bannir à jamais les guerres nationales ou
religieuses. Les armées nationales seront dissoutes au profit d’un corps
d’armée mondial chargé de bannir toute guerre locale. Ce sera une réussite.
« Quand les hommes diront paix et sécurité (...) », commente saint
Paul[394].
Il saura mettre les sciences et les techniques au service de tous. Il
supprimera définitivement la famine. Ceci ne veut pas dire que les techniques
et les sciences soient mauvaises. Cela veut dire qu’il saura, de manière unique,
par leur efficacité et son organisation humaniste, les mettre au service de sa
déduction. De même, la médecine fera reculer la maladie de manière unique et
universelle. L’Antéchrist multipliera les lois de ce genre et il réussira. Il
établira pour la première fois dans toute l’histoire de l’humanité une paix
universelle. Chacun pourra le constater.
Ce sera bien sûr
aux yeux de Dieu une fausse paix, c’est-à-dire non fondée sur la charité mais
sur l’intérêt commun. Elle sera réelle, palpable. Le commerce mondial en sera
dopé, le capital des anciennes nations croîtra sans effets pervers trop
visibles, étant encadré par des lois sociales justes. Chacun sera obligé de
constater la réalisation des promesses. On se réjouira en disant :
« Maintenant que la paix est acquise sur le monde, rien ne sera plus
impossible à l’homme, prolonger la durée de la vie, conquérir de nouveaux
espaces habitables, vivre de loisirs dans le travail et de travail dans le
loisir, profiter des joies les plus douces ou les plus fortes. Ce sera un
véritable paradis sur terre. » La puissance de l’Antéchrist semblera alors
définitivement consolidée devant les nations.
[Chose certaine pour le fait, indécise pour la manière]
Sûr de sa force, « il s’exaltera dans
son cœur et détruira un grand nombre par surprise »[395]. En effet, il
saura discerner le risque considérable que représentent les restes des
religions pour la durée de son oeuvre. Il sera intelligent et ne négligera pas
la puissance des idées. Il connaîtra la faille de son système d’humanité coupée
du vrai Dieu, cette soif insatiable du cœur de l’homme vers l’amour absolu, la
Lumière infinie, en un mot vers le Dieu d’amour, le Dieu de Jésus-Christ. Sans doute ce danger lui
paraîtra-t-il d’autant plus réel que l’Église, dans un dernier sursaut (les
deux témoins), aura su prêcher avec un certain succès les failles présentes
dans son humanisme en adoration devant le faux dieu froid du pouvoir et de la
liberté solitaire. Aussi, appuyé sur ses premiers succès, il proposera aux
peuples la loi suivante :
« Être debout, digne et maître de soi
devant son éternité, voilà le bien le plus précieux de l’homme, celui qui lui
permet de se réaliser en plénitude. Or, depuis des siècles les dirigeants religieux
ou politiques ont abusé de la faiblesse des plus petits, de leurs angoisses, et
leur ont proposé des systèmes de pensée qui les tenaient dans la dépendance.
Souvenons-nous de l’Histoire. Nous devons protéger la liberté de nos enfants et
leur éviter de se laisser séduire par les derniers adeptes de ces idéologies ou
de ces sectes religieuses. En conséquence, et pour le bien de tous, il est
temps d’établir une loi interdisant toute prédication publique ou privée des
idéologies politiques et des sectes religieuses du passé. »
Quelle
sera la réaction des hommes devant une telle proposition ? Elle sera sans
doute empreinte d’une certaine gêne, à cause de la liberté d’expression qui
apparaîtra diminuée, et de cette nostalgie du vrai Dieu qui ne saurait être
entièrement effacée de la nature humaine. Mais l’Écriture Sainte est formelle
sur ce point. L’Antéchrist entreprendra une lutte contre le peuple de Dieu[396]
et réussira. C’est même, si l’on suit saint Paul et Daniel, le signe majeur qui
devra précéder le retour du Christ : « Toutes ces choses s’achèveront quand sera achevé
l’écrasement du Peuple Saint. »[397]
En agissant ainsi, l’Antéchrist réalisera en plénitude les nombreuses
prophéties de l’Écriture : « Il
s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu, il s’assoit en personne
dans le sanctuaire de Dieu, il se produit lui-même comme Dieu »[398], puisqu’il se juge digne d’établir
sur l’univers les lois décidant de toutes choses, le bien et le mal, l’origine
de la vie, son but et la manière de la vivre, le sens de la vie éternelle.
Lorsque l’Écriture affirme qu’il établira son siège dans le sanctuaire de Dieu,
elle ne veut pas signifier autre chose. Peut-être ira-t-il jusqu’à installer
le siège de son gouvernement dans un lieu symbolique de ce pouvoir suprême
(Jérusalem*, Rome) ? L’essentiel n’est pas là. L’essentiel est qu’il se
produira comme le Maître suprême de la vérité (Magister), comme le berger de tous (Pastor Ovium) et même comme l’organisateur de toutes les fêtes et
réjouissance de l’humanité nouvelle (Pontifex
maximus). Ces trois titres, attribués traditionnellement aux papes de
l’Église catholique, sont une délégation des titres de Dieu. En ce sens-là,
l’Antéchrist* sera le serviteur de l’Antidieu
des derniers temps. On voit que celui qui, à cette époque, vivra profondément
de sa foi chrétienne n’aura aucun risque de le confondre avec un vrai pape.
C’est aussi en ce sens qu’il faut interpréter les prophéties de Jésus annonçant « l’Abomination de la désolation
dans le temple saint »[399].
Ce serait un contresens d’imaginer la présence d’un Antipape légitimement élu
par l’Église.
[Chose certaine pour le fait, indécise pour la
manière]
L’Antéchrist final installera sa royauté dans les cœurs humains et sur les nations. Sa religion sera de manière ultime celle du 666* puisque l’homme devenu Dieu adorera dans la paix la puissance de l’ange révolté. Ses méthodes ne laisseront place à aucune ambiguïté. Au contraire, le vrai pape et la vraie Église de cette époque auront à subir un martyre, très souvent annoncé par l’Écriture et qu’il faut contempler maintenant :
« Quand tu
étais jeune, dit Jésus au pape Pierre[401], tu mettais toi-même ta ceinture
et tu allais où tu voulais ; quand tu seras devenu vieux, tu étendras les
mains et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas. Il indiquait
ainsi, commente saint Jean, par quel genre de mort Pierre devait glorifier
Dieu. Ayant dit cela, il lui dit : ‘Suis-moi’. Se retournant, Pierre
aperçoit, marchant à leur suite, le disciple que Jésus aimait, celui-là même
qui, durant le repas, s’était penché sur sa poitrine et avait dit : ‘Seigneur,
qui est-ce qui te livre ?’ Le voyant donc, Pierre* dit à Jésus :
‘Seigneur, et lui ?’ Jésus lui dit : ‘S’il me plaît qu’il demeure jusqu’à
ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi.’ Le bruit se répandit
parmi les frères que ce disciple ne mourrait pas. Or Jésus avait dit à
Pierre : ‘Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne,’ et
non : 'Il ne mourra pas'. »
Je l’ai dit, ce texte est l’annonce, sous forme symbolique,
de la fin de l’Église. Il s’agit d’un exemple typique du style des prophéties
de Jésus. Pierre* est vraiment mort martyrisé et Jean de vieillesse, le jour où
le Seigneur est venu le chercher par son apparition à l’heure de sa mort.
Pierre y figure comme le symbole de l’Église visible, hiérarchique. Cette
partie de l’Église est composée de tous ceux qui ont reçu une mission
officielle d’évangélisation dans le monde (pape, prêtres, évêques, personnes
consacrées). Elle ne cesse de paraître aux yeux de tous par ses interventions
extérieures, ses prédications. Jean symbolise pour sa part cette partie de
l’Église qui se laisse moins voir car elle siège au fond du cœur des chrétiens
par la prière. Jean ne fut-il pas le contemplatif par excellence, celui qui
prit Marie* chez lui ? Dans un autre sens et pour montrer la
correspondance de toute l’Écriture, Pierre et l’Église hiérarchique sont Élie*, puisqu’ils doivent témoigner
comme lui de la vérité devant les peuples. L’Église dans son intériorité est
symbolisée par Jean dans les évangiles et par Énoch dans l’Ancien
Testament puisque, comme lui,
elle « marche avec Dieu »[402].
Ainsi, le texte de saint Jean raconte comment se produira le martyre final de
l’Église.
Appuyé sur ses succès antérieurs, l’Antéchrist rendra les
religions illégales dans le monde entier. Il fera adopter une interdiction
définitive de prêcher ou de rendre un culte même privé à travers les anciennes
religions liées à l’humilité ou à n’importe quelle divinité inventée par le
passé. Seule la religion du Dieu de l’homme libéré de toute soumission sera
tolérée. Chacun sera invité à consacrer son temps à la construction du monde
d’ici-bas, au-delà des superstitions que la peur suscite. Le culte de Dieu ne
pourra donc subsister qu’au fond de la conscience individuelle, domaine
incontrôlable par définition aux autorités politiques. Les enfants devront être
protégés des superstitions religieuses, en foi de quoi il ne sera pas autorisé
aux parents de les influencer par leurs propres croyances. Il n’est pas sûr
que, dans le domaine privé, la contrainte de cette loi aille plus loin. Le
monde de l’Antéchrist respectera les libertés privées. Ce sera même une de ses
forces, accompagnée d’un réel bien-être matériel. Il ne sera d’ailleurs pas
nécessaire de faire davantage. L’homme ne recherche pas le vrai Dieu quand il
n’a pas besoin de lui pour être heureux. Par contre, au niveau politique, la
loi sera sévère.
L’Écriture est nette sur ce point[403] :
« La corne (la puissance de l’Antéchrist) grandit et s’étendit en
direction du pays de la Splendeur (le pays où l’on adore Dieu, à savoir les
religions et en premier celle du Christ). Elle grandit jusqu’aux armées du ciel
(ceux qui servent Dieu), précipita à terre des armées (les apôtres qui luttent
pour l’Évangile) et des étoiles (des docteurs qui enseignent la bonne direction
à suivre) et les foula aux pieds. Elle s’exalta même contre le Prince de
l’armée (le Christ), elle abolit le sacrifice perpétuel (pour les Juifs, il
s’agit de l’holocauste du Temple et, pour les chrétiens, de la messe et de tous
les sacrements de l’Église), et renversa le fondement de son autel (le pape sur
qui l’Église est bâtie) et l’armée (les serviteurs de Dieu). Sur le sacrifice
elle posa l’iniquité (c’est-à-dire qu’elle déclara mauvais tout culte divin) et
renversa à terre la vérité. Elle agit et elle réussit. »
Ce texte comme tous les autres traitant du même sujet ne
laisse aucun doute sur l’ampleur de la destruction opérée par l’Antéchrist. Il
ne laissera rien subsister de l’Église vivante, surtout pas le sacerdoce. Il ne
subsistera que les cadavres du passé (bâtiments du culte transformés à d’autres
usages, écrits anciens transformés en pièces archéologiques). L’Apocalypse
décrit symboliquement ce fait : « Leurs cadavres demeurent exposés
aux regards des peuples, des races, des langues et des nations, durant trois
jours et demi, sans qu’il soit permis de les mettre au tombeau. Les habitants
de la terre s’en réjouissent et s’en félicitent ; ils échangent des
présents, car ces deux prophètes leur avaient causé bien des tourments. »[404]
Rien ne permet d’être définitif sur les méthodes qu’il
emploiera. Beaucoup de théologiens du passé affirmèrent à partir de ces textes
et de la vie de saint Pierre qu’il s’agirait d’un martyre sanglant, d’une mise
à mort physique des quelques milliers d’hommes que sont dans le monde le pape,
les évêques et les prêtres. C’est une chose en définitive assez facile à
réaliser dans un monde confiant devant sa liberté. Mais ce sens littéral du
martyre n’est pas une certitude. Pour faire disparaître le sacerdoce de la vie
des peuples, il suffit, après l’avoir vu s’affaiblir durant des siècles, de
l’empêcher de s’exercer : convocation d’un faux concile oecuménique le
ridiculisant, surveillance, emprisonnement, déportation, toutes méthodes
policières dans un monde où rien n’est laissé au hasard[405].
Je ne peux affirmer qu’une chose de manière certaine. Vers la fin du monde, de
par l’action de l’Antéchrist, le dernier pape vivra un sacrifice total dans son
ministère désormais banni de la terre. Il sera crucifié comme saint Pierre dans
son âme de pasteur (et peut-être aussi dans son corps). Afin que le caractère
qui fait le prêtre ne subsiste en personne, il est possible que son martyre
s’accompagne de celui des prêtres.
Pour se
faire une opinion définitive, il convient ici de citer le texte d’une
apparition privée officiellement reconnue par l’Église. Le troisième secret de
Fatima[406]* est
rapporté ainsi par Lucie[407] :
« Après
les deux parties que j’ai déjà exposées, nous avons vu sur le côté gauche de
Notre-Dame, un peu plus en hauteur, un ange avec une épée de feu dans la main
gauche. Elle scintillait et émettait des flammes qui devaient, semblait-il,
incendier le monde. Mais elles s’éteignaient au contact de la splendeur qui
émanait de la main droite de Notre-Dame en direction de lui[408]. L’ange, indiquant la terre avec
sa main droite dit : ‘Pénitence ! Pénitence ! Pénitence !’ Et nous vîmes,
dans une lumière immense qui est Dieu, quelque chose de semblable à la manière
dont se voient les personnes dans un miroir, un évêque vêtu de blanc, nous
avons eu le pressentiment que c’était le Saint-Père.
Nous vîmes divers autres évêques,
prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet
de laquelle il y avait une grande croix en troncs bruts, comme s’ils étaient en
chêne-liège avec leur écorce. Avant d’y arriver, le Saint-Père traversa une
grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant,
affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il
trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux
au pied de la grande croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs
coups avec une arme à feu et des flèches. Et de la même manière moururent les
uns après les autres les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses et
divers laïcs, hommes et femmes de classe et de catégories sociales différentes.
Sous les deux bras de la croix, il y avait deux anges, chacun avec un arrosoir
de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs et avec
lequel ils irriguaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »
Une
objection importante doit être faite ici. Parler d’un martyre de l’Église visible
ne s’oppose-t-il pas à la promesse de Jésus faite à Pierre* :
« Pierre, tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église et les
portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur elle. »[409]
Appuyé sur une telle parole, ne doit-on pas affirmer qu’il y aura toujours dans
le monde un sacerdoce ministériel et donc un pape ?
Pour
répondre à cette objection, il convient de rappeler une autre promesse du même
type faite à Marie au jour de l’Annonciation : « Il sera grand et
sera appelé fils du Très-Haut. Le Seigneur lui donnera le trône de David son
père, il régnera sur la maison de Jacob et son règne n’aura pas de fin. » Il convient de relire cette prophétie
divine en regardant la croix de Jésus. Il existe une distance entre ce texte
pris à la lettre et sa réalisation. Jésus est-il grand à la croix ?
Certainement pas extérieurement mais…
spirituellement. Pourtant, Marie eut le cœur assez dilaté pour croire que les
prophéties de gloire étaient accomplies ici et maintenant. À la fin du monde,
il existera quelques chrétiens semblables à Marie qui comprendront, en
contemplant le sacrifice final de Pierre, que les portes de l’enfer sont
vaincues.
Il ne
faut pas se tromper sur le sens réel des paroles de Dieu. Qu’on se souvienne du
trouble analogue qui saisit la réflexion juive de l’Ancien Testament
dans la tension d’une foi enseignant sans ambiguïté que « Dieu comble de
biens les hommes droits et renvoie les riches les mains vides » et la constatation quotidienne de l’inverse. Cette
dramatique expérience fut source d’une mutation spirituelle majeure depuis le
livre de Job vers celui de la
Sagesse, en préparation de la venue de Jésus. Au temps de leur gloire, les
Juifs tuaient comme hérétiques les prophètes qui osaient annoncer, chose
impossible en raison de la présence réelle de Dieu, la destruction du Temple de
Jérusalem. Il fallut plusieurs ruines et déportations d’Israël* pour que
certains comprennent que ce qui importe à Dieu, c’est le temple spirituel du
cœur de chaque homme.
Il faut
remarquer que Dieu se plaît dans d’apparentes contradictions. On en est frappé
à l’évocation des nombreux exemples qui jalonnent l’Écriture ou la vie des
saints. Voici l'anecdote. Depuis son entrée en prison, les « voix »
de Jeanne d'Arc (sainte Catherine, sainte Marguerite, saint Michel) l'avaient
comme abandonnée. Or voici qu'un soir elles reviennent. Jeanne d’Arc, bouleversée
et consolée, leur demande si elle sera sauvée. Les voix, unanimes et
rassurantes, lui répondent : « Oui,
tu seras sauvée. Et par grande victoire ! » Evidemment, Jeanne
se réjouit fort, et se prépara à la venue de Charles VII, son roi, qu'elle
imagina toute la nuit déjà en chemin. Or, le lendemain, c'est Monseigneur
Cauchon qui vint la trouver, lui annonçant que, puisqu'elle s'était de nouveau
habillée en homme, elle serait brûlée vive le matin même. Les gens furent
frappés, tandis qu'on la conduisait au bûché, par la douleur de ses
appels : « Jésus ! Jésus
! » Ses voix lui avaient-elles menti ? Jeanne, dans un grand
sanglot, le crut d’abord. Juste après sa mort, elle comprit à quel point ses
voix avaient dit vrai, plus vrai qu’elle ne l’imaginait mais elle parlaient du
« salut éternel ».
Pour le
théologien, l’opposition apparente entre foi et réalité, loin d’être une
torture, constitue le lieu théologique par excellence, le lieu des découvertes.
Deux vérités apparemment contradictoires, dont l’une procède de la foi (les
portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur l’Église) et l’autre de l’expérience
(l’Église disparaîtra de façon visible de la surface du monde) et qui sont comparables
à deux silex durs qu’on frotte. La lumière en jaillit. Quand nous voyons
horreur, martyre sanglant ou échec politique, Dieu voit victoire, règne éternel
et gloire. Pour lui, la victoire réelle est celle qui se termine en Vie éternelle
(donc, encore et toujours humilité et charité). Elles le seront de fait car le
pape et le clergé de cette époque seront disposés à faire de leur sacerdoce et
de leur vie une offrande d’amour, une dernière messe unie à la Messe éternelle
de Jésus. Le Ciel entier sera ébranlé devant leur sainteté et le retour du
Christ ne sera plus lointain. Tel est l’objet du chapitre suivant.
« Cette génération
est une génération mauvaise. Elle demande un signe et de signe, il ne lui sera
donné que le signe de Jonas. Car, tout comme Jonas fut dans le ventre du
monstre marin durant trois jours et trois nuits, de même le Fils de l’homme
sera dans le sein de la terre durant trois jours et trois nuits. »[410]
« Le
soir venu, il vint un homme riche d’Arimathie, du nom de Joseph, qui s’était
fait lui aussi disciple de Jésus. Il alla trouver Pilate et réclama le corps de
Jésus. Alors Pilate ordonna qu’on le lui remette. Joseph prit donc le corps, le
roula dans un linceul neuf et le mit dans un tombeau neuf qu’il s’était fait
tailler dans le roc. »[411]
La disparition de l’Église catholique et de tout ce qui porte le nom de Dieu (les autres religions prêchant l’humilité) sera un signe des temps semblable à celui donné aux Juifs par la mise au tombeau de Jésus. Il existera des hommes justes, qui ne seront pas nécessairement des chrétiens de l’intimité, pour sentir la gravité de l’événement. Il s’agira en effet d’un acte irréparable. Au plan de sa signification symbolique, en effaçant politiquement le nom de Dieu de la terre, en le remplaçant par son propre nom ou par celui de son maître Lucifer, l’Antéchrist* dépassera la mesure de tous les péchés commis dans le monde. Caché derrière cet acte, Satan paraîtra au conseil de Dieu[412] et pourra dire : « Regarde l’humanité. En ce jour, elle se révolte tout entière contre toi. Respecte donc la volonté de tes créatures réunies et donne la béatitude à ceux qui refusent de s’abaisser. Ce sera justice. »[413]
L’aliah de l’Église, l’Église
du silence
Disparition du pape
[Chose probable]
Lorsque
ce sera réalisé, il semblera ne plus y avoir sur la terre ni d’Église du Christ
ni de religion autre que celle de Lucifer. Mais Dieu ne voit pas les réalités
comme les hommes. Il discernera une véritable Église. Ce ne sera pas une Église
visible de l’extérieur comme le sont les communautés qui peuvent se réunir dans
des temples de pierres. Ce sera une Église composée d’un petit nombre de
chrétiens isolés, ne se connaissant pas les uns les autres, mais au cœur saint.
Ils n’auront plus de pape pour les maintenir dans la vraie foi, ils n’auront
plus d’eucharistie pour les nourrir de la présence de Jésus. Saint Paul,
pressentant la pauvreté des chrétiens de cette époque, lance en une phrase
toute la spiritualité qui sera la leur : « Dès lors, frères, tenez
bon, gardez fermement les traditions que vous avez apprises de nous
(c’est-à-dire de toute la succession des papes et des saints), de vive voix ou
par écrit. Que Jésus lui-même, ainsi que son Père qui nous a aimés, consolent
vos cœurs et les soutiennent. »[414]
Des papes, il ne leur restera plus que le souvenir et la
possibilité d’être fidèles aux enseignements de jadis. Le pape de cette époque
sera probablement devenu un homme solitaire et errant. Poussé par l’Esprit et
méditant sur le mystère en train de se réaliser, il se mettra en chemin vers
Jérusalem, à l’image du Christ. Le Christ disait lui-même : « Mais aujourd’hui, demain et le
jour suivant, je dois poursuivre ma route, car il ne convient pas qu’un
prophète périsse hors de Jérusalem. »[415] C’est l’ Aliah de l’Église, son
retour à Jérusalem, à la maison...
[Chose probable]
La disparition de l’eucharistie pose problème[416].
Peut-il y avoir Église sans la présence réelle de Jésus dans
l’eucharistie ?
Depuis quatre siècles, dans l’Église catholique, les
prêtres ont eu tendance à identifier le chemin de la grâce de Dieu à la seule
pratique des quatre sacrements suivants : baptême, confirmation,
pénitence, eucharistie. Cette tradition est un effet de la formation au
sacerdoce[417].
C’est une excellente spiritualité... pour les prêtres.
Mais le fait qu’elle ait remplacé les grandes théologies mystiques
canonisées par l’Église fut une erreur. Les grands Docteurs mystiques
comme sainte Thérèse d’Avila, saint Jean de la Croix, saint Thomas d’Aquin
disaient que l’eucharistie était une des
voies de la grâce. C’est une nuance essentielle. Pour eux, l’eucharistie
est le mode le plus inouï, le plus
extraordinaire, par lequel Dieu a inventé de se donner. Mais l’origine de
toute grâce n’est pas Jésus-eucharistie, c’est Jésus « tout court ».
Jésus peut obtenir l’intimité qu’il désire avec l’homme par bien d’autres
moyens : la contemplation de la nature, la musique, le silence, le désert
et, par-dessus tout car source de tout, le
cœur à cœur de l’oraison. Marthe Robin disait à propos de l’Eucharistie :
« Dans la communion
eucharistique, Dieu se donne dans un acte extérieur qui est en lui-même un
plaisir, une consolation, une joie pour l’âme... La communion ne suppose pas
toujours la vertu. On peut communier et se rendre coupable du corps et du sang
du Christ. Quelqu’un a dit : ‘on trouve des chrétiens qui communient tous
les jours et sont en état de péché mortel... Mais, on ne trouvera jamais une
âme qui fasse oraison tous les jours et demeure dans le péché’. Si on me
proposait de choisir la rencontre avec le Christ dans l’eucharistie ou dans
l’oraison, je choisirais sans hésiter l’oraison car c’est elle qui donne tout
son sens à la communion. L’adoration est le but de la communion et c’est elle
qui lui donne sa valeur. » [418]
Une ermite commentait : « Jésus eucharistie ne vient
sous les espèces du pain que dans le but de nous mendier quelques secondes de présence
et de les transformer, dès que nous le comprenons, en une perpétuelle présence
que nous ne quittons jamais, qui demeure indépendamment des espèces du pain et
du vin et que nous pouvons retrouver à chaque moment, à volonté, en nous
tournant vers notre intériorité. »[419]
La vie mystique est infiniment plus riche que le mode sacramentel.
La vie mystique (la charité (Agapè) pour Dieu et le prochain) intègre toutes
les différentes manières de la vivre (les spiritualités) mais ne peut être
réduite à une seule de ces spiritualités. Jésus veut venir habiter le cœur des
hommes. Si une voie lui est fermée, il passera par une autre.
Vers la fin du monde, des événements semblables à ceux
vécus par l’Église russe au temps des soviétiques se produiront. Privés de prêtres
et de messe, les fidèles apprendront à vivre du Christ comme Marie au temps du
sépulcre, par la prière du cœur à cœur. Et, en cette époque, l’Église
catholique sera bien vivante, plus que jamais.
[Chose probable]
Des trois blancheurs citées par saint Jean Bosco, il ne
leur restera plus que Marie*[420].
Les chrétiens de cette époque sauront vivre de son esprit. Ils méditeront à son
école la parole de Dieu écrite dans les Évangiles. Le sacrifice final de
l’Église visible sera vécu par eux avec une charité proche de celle de Marie à
la croix. Elle provoquera le retour du Christ. Il ne résistera pas à la supplication
humble et aimante de ceux qui vivront ces derniers moments[421].
Les
chrétiens de la fin du monde auront surtout pour nourriture le cœur à cœur de
la prière. Jésus les comblera de sa présence. « Là où l’épreuve abonde, la
grâce surabonde. »[422]
Jamais on n’aura vu fleurir une sainteté aussi grande qu’en ce temps de sépulcre.
L’Antéchrist croira avoir détruit définitivement tout christianisme de la
terre. Or il fleurira aussi beau qu’à la croix et au tombeau dans le cœur de
Marie. Ce sera une foi humble car coupée de toute possibilité de triomphe
extérieur. Elle sera confiante car sûre de la proximité du retour du Christ.
Elle sera amoureuse car elle jaillira en contemplation pour Jésus vu à
l’intérieur de la prière. Elle sera attentive aux autres puisqu’on priera
beaucoup en cette époque pour les pauvres tenus loin de Dieu par l’Antéchrist.
[Chose probable]
Saint
« Les
plus grands saints, les âmes les plus riches en grâce et en vertus, seront les
plus assidus à prier la Très Sainte Vierge et à l’avoir toujours présente comme
leur parfait modèle pour l’imiter, et leur aide puissante pour les secourir.
J’ai
dit que cela arriverait particulièrement à la fin du monde, et bientôt, parce
que le Très-Haut et sa très sainte mère doivent former de grands saints qui
surpasseront autant en sainteté la plupart des autres saints, que les cèdres du
Liban surpassent les petits arbrisseaux, comme il a été révélé à une sainte
âme, dont la vie a été écrite par M. de Renty. »
« Le
pouvoir de Marie sur tous les diables éclatera particulièrement dans les
derniers temps, où Satan mettra des embûches à son talon, c’est‑à‑dire
à ses humbles esclaves et à ses pauvres enfants qu’elle suscitera pour lui
faire la guerre. Ils seront petits et pauvres selon le monde, et abaissés
devant tous comme le talon, foulés et persécutés comme le talon l’est à l’égard
des autres membres du corps ; mais, en échange, ils seront riches en grâce
de Dieu, que Marie leur distribuera abondamment, grands et relevés en sainteté
devant Dieu, supérieurs à toute créature par leur zèle animé, et si fortement
appuyés du secours divin, qu’avec l’humilité de leur talon, en union avec
Marie, ils écraseront la tête du diable et feront triompher Jésus-Christ. »
[Chose certaine]
C’est ce que se demande Jésus avant de mourir en croix. La réponse est oui, sans aucun doute, selon une autre de ses paroles : « À cause des élus, ils seront abrégés, ces jours-là. »[425] Ils seront abrégés non seulement pour qu’il y ait toujours présents sur la terre quelques disciples du Christ qui prient pour leurs frères, mais surtout parce que la ferveur de leur désir bouleversera le Ciel. À cet égard, le peuple russe livre une analogie intéressante. Après soixante-dix ans de communisme, le sacrifice de la messe avait entièrement disparu de certaines régions. Pourtant, la foi était gardée, fidèlement, par la prière et l’action de quelques femmes. Brutalement, sans que personne ait pu le prévoir, le communisme s’écroula, comme par le souffle du Christ. Mais la foi était restée intacte durant toutes ces années.
Le retour de l’islam de Médine
[Selon moi… Au
lecteur de juger]
Dieu ne
discernera pas que des chrétiens. Il verra, ici ou là, des musulmans fidèles
dont la prière ressemblera à celle de Job dans son épreuve : « Je
sais, moi, que mon Rédempteur est vivant et qu’il se lèvera le dernier dans la
poussière. Et moi, après mon éveil, de ma chair, je verrai Dieu. »[426]
Ils auront été appauvris par l’épreuve, détachés par la vision de l’apostasie*
de leurs coreligionnaires, de leurs rêves passés d’un islam* mondial[427].
Il ne leur restera plus qu’Allah et la confiance qu’ils lui portent. Ceux qui
n’auront pas réalisé cette oeuvre de purification ne tiendront pas. Ils
s’écrouleront devant la constatation de la victoire de l’Antéchrist. En ces
jours, le petit reste des musulmans fidèles n’aura plus pour les soutenir
l’appel à la prière du muezzin, le Ramadan public, le pèlerinage dans les lieux
saints. Il ne leur restera plus que l’aumône qu’on peut camoufler en action
sociale, le Coran qui nourrit l’âme de sa beauté venant du Très-Haut et la
prière d’adoration secrète, au fond d’une chambre secrète. Nourris de leurs
propres prophéties, ils prieront Dieu d’envoyer le Messie Jésus, lui qui doit
revenir à la fin du monde. Ils supplieront Mariam, sa mère immaculée,
d’intercéder pour cela auprès d’Allah. Et leur prière sera reçue du Ciel. On se
réjouira de voir des serviteurs si fidèles et on saura, en voyant les abîmes de
pauvreté de leur cœur, qu’ils seront grands au Ciel lorsqu’ils sauront qui est
vraiment Jésus.
Il existera des justes dans toutes les religions. Ici et là, des cœurs chercheront Dieu, gardant fidèlement les traditions reçues des pères, les semences de l’Esprit Saint[428] qui les dispose au salut.
La conversion d’Israël
[Chose certaine
pour le fait. Pour la manière, au lecteur de juger]
« La
venue du Messie glorieux est suspendue à tout moment de l’histoire à sa
reconnaissance par tout Israël dont
une partie s’est endurcie dans l’incrédulité
envers Jésus. Saint Pierre le dit aux Juifs de Jérusalem après la
Pentecôte : ‘Repentez-vous et convertissez-vous, afin que vos péchés
soient effacés et qu’ainsi le Seigneur fasse venir le temps de répit. Il
enverra alors le Christ qui vous est destiné, Jésus, celui que le Ciel doit
garder jusqu’au temps de la restauration universelle dont Dieu a parlé dans la
bouche de ses saints prophètes’. Et saint Paul lui fait écho : ‘Si leur
mise à l’écart fut une réconciliation pour le monde, que sera leur assomption,
sinon la vie sortant des morts ?’ L’entrée de la plénitude des Juifs dans le salut messianique, à la suite de la plénitude des païens, donnera au
Peuple de Dieu de réaliser la plénitude
du Christ dans laquelle Dieu sera
tout en tous. » [429]
Qu’en
sera-t-il du peuple juif ? J’ai rappelé[430]
que saint Paul annonce explicitement leur conversion au Christ à la fin du
monde. Il le fait en une phrase brève, lapidaire : « Que sera leur
admission sinon une résurrection d’entre les morts ? » Saint Paul lie donc
la conversion d’Israël à la résurrection. Or l’Église sait que cette
résurrection se produira après le retour du Christ.
Faut-il
donc en conclure que le peuple juif ne reconnaîtra le Messie que lorsqu’il se montrera à lui,
c’est-à-dire au moment même de son retour ? Cela paraît être une
interprétation possible. Si des siècles de christianisme n’ont pu les amener à
Jésus, c’est que Jésus se réserve de se révéler lui-même. Jusqu’à aujourd’hui,
chaque Juif découvre le Messie au moment où il lui apparaît, c’est-à-dire à
l’heure de sa mort. Lorsque son cœur est bien disposé, il le reconnaît, l’aime
et le suit dans la Vie éternelle. Il est possible qu’il en soit de même pour la
dernière génération de Juifs.
Mais ce n’est pas l’interprétation la plus sûre. Le peuple
juif est depuis toujours un signe donné visiblement, ici-bas, dans les réalités
politiques. Je l’ai montré, Israël* a reçu la mission d’être un peuple
particulier. C’est son histoire politique, datée, qui réalise successivement
des textes de l’Écriture, dont le sens spirituel est valable pour tous les
peuples. Tout semble donc indiquer une véritable conversion historique et
nationale se produisant peu avant le retour du Christ, selon la lettre
de la prophétie de
Jésus[431] :
« Vous ne me verrez plus jusqu’à ce qu’arrive le jour où vous direz :
‘Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur’. » Rien n’exclut que ce
peuple, d’abord exclu de l’Alliance par la faute de ses théologiens, devienne
vers la fin du monde, lorsque les nations chrétiennes auront apostasié, l’Église Catholique.
Peut-on
savoir de quelle manière Dieu les disposera à la conversion ? Fera-t-il
quelque chose de spécial pour eux qui se sont séparés de lui à travers l’action
de leurs ancêtres ? Lorsqu’on se trouve devant une telle question, il faut
chercher s’il n’existe pas une allégorie biblique où Dieu manifeste comment il
se réconcilie un ancien ami[432].
Or il en existe au moins deux dont le récit peut éclairer ce mystère. Le
premier est une parabole de
Jésus racontant l’histoire d’un homme qui avait deux fils[433].
Le deuxième concerne ce chapitre puisqu’il raconte la manière dont Dieu peut
préparer, longtemps à l’avance, une réconciliation. Il s’agit de l’histoire de
Joseph[434] :
Joseph était le fils préféré de son père
Jacob car il était le seul enfant de l’épouse qu’il aimait, Rachel. Pour le lui
prouver, Jacob lui avait fait faire une tunique bariolée, signe extérieur de sa
préférence. Or ses dix frères se mirent à le jalouser. Ils ne cessaient de
l’importuner, se moquant des rêves prémonitoires qu’il faisait et leur
racontait. Un jour, son père l’envoya porter de la nourriture aux champs pour
ses frères qui y gardaient les troupeaux. Ceux-ci le virent venir de loin et
décidèrent de le tuer. Ils se saisirent de lui, le jetèrent dans un puits et,
avisant une caravane de marchands qui passait, le vendirent pour la somme de
vingt pièces d’argent. Ils égorgèrent un agneau, mirent le sang sur sa tunique,
et la montrèrent au père en disant : « Certainement, un fauve l’aura
dévoré ». Jacob fut inconsolable.
Il reporta son affection sur un second fils de Rachel, né pendant sa
vieillesse. Benjamin naquit et sa mère mourut en le mettant au monde. Joseph
fut vendu comme esclave en Égypte. Le pharaon remarqua ses talents. Il l’éleva
et en fit le premier de ses serviteurs. Il lui confia la responsabilité de
nourrir le pays tout entier.
Cette
histoire, au-delà de sa lettre, est une allégorie. Joseph vendu par ses frères
puis établi comme maître du pain de toute la terre d’Égypte n’est autre que la
figure de Jésus qui, après sa mort douloureuse, put donner le pain du Ciel à
toutes les nations païennes. Rachel sa mère, préférée de Jacob et morte en
mettant au monde le petit Benjamin symbolise et annonce Marie, la mère de
Jésus, morte dans son cœur de mère au pied de la croix en mettant au monde
l’Église. Il suffit de lire le texte pour apercevoir des correspondances étonnantes.
En gardant la même méthode et en remplaçant le personnage
de Joseph par Jésus, celui de Pharaon
par Dieu le Père, de l’Égypte par les
nations chrétiennes, de Rachel par Marie, de Benjamin par l’Église, des dix frères pécheurs par le
peuple juif, on assiste comme dans
une pièce de théâtre à la suite des temps. En effet, le récit raconte ensuite
comment Joseph, devenu maître du pays d’Égypte, se réconcilia avec ses dix
frères criminels :
Puis il advint une grande famine sur toute la terre.
L’Égypte (l’Église contenant les païens), gardée par l’intelligence de
Joseph, ne manquait de rien. Jacob et ses fils (le peuple d’Israël) n’eurent
bientôt plus rien et, apprenant que l’Égypte vivait dans l’abondance, ils
décidèrent de s’y rendre et d’acheter à prix d’or du pain. Mais Jacob ne voulut
pas que son fils Benjamin (l’Église chrétienne) accompagne les dix autres
frères, redoutant quelque chose pour sa vie. Arrivés en Égypte, ils furent
reçus par Joseph qui les reconnut. Mais eux ne le reconnurent pas car il était
vêtu en Egyptien (le visage du Christ est aujourd’hui caché pour les Juifs sous
les traits d’un persécuteur du passé).
Alors,
volontairement, Joseph leur parla mal et dit les soupçonner d’être des espions
venus observer la faiblesse du pays. Eux nièrent et se proclamèrent onze frères
fils d’un même père et poussés par la famine vers l’Égypte pour y acheter du
pain.
Joseph fit semblant de ne pas les croire. Il garda Siméon en otage, exigeant
d’eux qu’ils reviennent avec leur plus jeune frère
Benjamin pour prouver leur bonne foi. Ils partirent donc, inquiets et
mortifiés, se demandant si Dieu ne leur faisait pas ainsi payer leurs crimes
envers Joseph. Arrivés devant Jacob, ils lui racontèrent les exigences du
maître de l’Égypte mais lui ne voulut pas laisser partir Benjamin, effrayé pour
sa vie.
La famine se fit plus dure sur le pays. Il
fallut, sous peine de mort, retourner en Égypte. Alors Jacob (que Dieu appelle
aussi Israël) laissa partir son fils Benjamin avec eux. Les fils d’Israël
arrivèrent donc devant Joseph qui les reçut bien, fit libérer Siméon et les
invita à sa table. Ils ne le reconnurent toujours pas. Alors qu’ils
s’apprêtaient à partir, Joseph dit à son intendant : ‘Tu cacheras la coupe
en argent, celle dont je me sers pour lire l’avenir, dans le sac du plus
jeune’. Les fils d’Israël étaient partis depuis peu, lorsque Joseph dit à son
intendant : ‘Rattrape-les, reproche-leur le vol’. L’intendant le fit. Mais
eux nièrent en disant : ‘Fouille nos sacs. Celui chez qui on trouvera la
coupe mourra et nous, nous serons tes esclaves’. ‘Soit, répondit l’intendant,
celui chez qui on trouvera la coupe sera mon esclave et les autres seront
libres de partir’. On fouilla les sacs et on trouva la coupe chez Benjamin.
Alors les fils d’Israël déchirèrent leurs vêtements et revinrent vers la ville.
Ils entrèrent dans la maison de Joseph. Juda, celui-là même qui avait pris la
décision de le vendre aux marchands[435], lui dit en substance :
‘Benjamin est le seul fils qui reste à notre père depuis que Joseph a disparu.
S’il ne revient pas, notre père mourra et je porterai la culpabilité de sa
mort. Alors laisse partir l’enfant et prends-moi comme esclave à sa place.’
Devant cette attitude noble de ses frères,
Joseph ne put se contenir plus longtemps. Il fit sortir tous les Égyptiens
présents et éclata en sanglots. Il leur dit : ‘Je suis Joseph, mon père
vit-il encore ?’ et ses frères ne purent lui répondre car ils étaient bouleversés
de le voir. Alors Joseph dit à ses frères : ‘Approchez-vous de moi. Ne
soyez pas tristes de m’avoir vendu ici en Égypte car c’est pour préserver vos
vies que Dieu m’a envoyé devant vous’.
Tel est
le résumé des épreuves que Joseph imposa à ses frères avant de se révéler à
eux. Il voulut voir de ses yeux s’ils avaient changé, s’ils se comporteraient
avec Benjamin comme ils s’étaient comportés avec lui. Or les frères ne
voulurent pas livrer Benjamin, ni à la
mort, ni à l’esclavage. Au contraire, Juda, l’un des coupables, se proposa
pour être esclave à sa place.
De même, vers la fin du monde, il est probable que Jésus mettra
à l’épreuve ses frères juifs. Benjamin semble symboliser l’Église, du moins ses
restes à la fin du monde. Jésus voudra vérifier si les Juifs se comportent
mieux avec l’Église qu’avec lui jadis. Les derniers papes seront-ils contraints
par les événements de se réfugier en Israël ? Seront-ils protégés par les
chefs et le peuple juif ? Prendront-ils la décision d’empêcher sa destruction
totale par les forces de l’Antéchrist* ? Refuseront-ils avec héroïsme,
risquant leur propre vie, que l’Église de la fin soit tuée ou réduite en
esclavage ? Il semble en tout cas, si l’on suit cette allégorie
prophétique, qu’ils ne se comporteront plus de la même manière qu’au temps de
Jésus[436].
Certains théologiens de jadis affirmèrent que le dernier pape reviendrait
mourir à Jérusalem : « Il ne convient pas qu’un prophète meure en
dehors de
Jérusalem*. »[437]
Dieu se plaît en effet à réaliser de manière historique ce qu’il veut signifier
au sens le plus spirituel.
Alors, bouleversé par le changement des Juifs, Jésus se
révélera à eux dans toute sa gloire de Roi de la Terre. Ainsi se réalisera dans
la plus grande vérité la parole du prophète : « La gloire à venir de ce Temple rebâti dépassera l’ancienne, dit
Yahvé Sabaot, et dans ce lieu je donnerai la paix, oracle de Yahvé
Sabaot. »[438]
La conversion du peuple
Juif sera-t-elle suivie immédiatement par le retour glorieux du Christ ?
C’est certainement le signe le plus fort à attendre. Et deux textes en parlent
:
– Romains 11, 15 :
« Car si la mise à l'écart des
Juifs fut une réconciliation pour le monde, que sera leur admission, sinon une
résurrection d'entre les morts ? »
– 2 Thessaloniciens 2,
8 : « Alors l'Impie se
révélera, et le
Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa bouche, l'anéantira par la
manifestation de sa Venue. »
Ces deux textes, pris au
sens propre, lient la conversion d'Israël et la fin de l'Antéchrist à des
événements magnifiques et glorieux : la venue du Christ, etc.
Beaucoup de chercheurs
ont alors fait le rapprochement avec les textes sur le règne du Christ pendant
mille ans sur terre.
Alors le Magistère de l'Église s'exprima, condamnant l'espoir de cette
conception millénariste. Ainsi, il n'y a pas à attendre sur terre, même de
manière mitigée, un temps de puissante victoire universelle du Christ sur
terre. Ce serait illusoire : ce serait méconnaître la nature humaine non
purifiée qui, dès qu'elle a un succès, se corrompt dans l'orgueil.
Reste donc que tout cela annonce
autre chose : le retour du Christ dans sa gloire et la fin de ce monde,
comme nous l’étudierons plus loin.
[Chose certaine]
La
question du salut des foules qui auront été séduites par l’Antéchrist et se
seront éloignées de Dieu est essentielle. Dieu lui-même, par son silence, aura
permis une telle victoire du culte de l’homme, probablement accompagné du culte
spirituel de l’Ange révolté*. Comment expliquer qu’il pousse si loin sa permission
du mal ? Comme le disaient les membres de la secte du Temple solaire, se
serait-il dégoûté de ce monde au point d’abandonner les hommes au démon et à
son entreprise de damnation de l’humanité ? Désespérés de ce monde, les
membres de cette secte ne cessèrent de se suicider vers 1995 pour rejoindre le
Christ. Il ne saurait bien sûr en être ainsi et leur action relève d’un manque
de connaissance de Dieu. Dieu ne permet rien qui ne serve en définitive au
salut des hommes.
L’Écriture
Sainte livre de nombreux textes éclairants. Rappelons quelle sera la vie des
hommes qui auront suivi l’Antéchrist dans son projet de monde sans Dieu. Le
monde dans son ensemble, c’est-à-dire la très grande majorité des hommes, se
retrouvera sur une terre habitable et correctement gérée. On n’y manquera de
rien au plan matériel mais il n’y aura plus de vraie nourriture pour les
âmes. La religion de l’Antéchrist ne proposera pas le vrai Dieu, mais un dieu
digne, solitaire et froid, Lucifer.
Or
« l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la
bouche de Dieu »[440].
Il y aura donc une grande famine spirituelle, si terrible, dit Jésus,
« que si ces jours n’avaient été abrégés, nul n’aurait eu la vie (spirituelle)
sauve »[441].
Devant
cette soif du vrai Dieu et de son amour, il y aura deux réactions. Certains,
les plus faibles, souffriront sans comprendre que c’est l’absence du vrai Dieu
qui les consume. Comment pourra-t-il en être autrement puisque nul prophète ne
sera là pour le leur révéler. Il y aura en ce temps une multiplication des
angoisses, des névroses et des suicides. On cherchera la lumière mais on ne la
trouvera pas car, ajoute saint Mathieu[442] :
« Aussitôt après la tribulation, le soleil s’obscurcira, la lune ne
donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel et les puissances des
cieux seront ébranlées. » Ce texte n’a pas en premier lieu, comme toujours
en matière apocalyptique, une signification matérielle. Il signifie que, du
fait de la disparition de l’Église et des grandes religions qui parlent
d’humilité ou d’amour, le soleil de la Vie éternelle aura disparu. Aucun homme
ne sera là pour révéler
Jésus, le Prince de cette Sagesse, aux âmes. La lune (qui reflète les rayons du
soleil et les adoucit) n’est autre que tout ce qui reflète Dieu comme dans une
image pour le monde. Jésus dans son humanité, Marie, les saints vivants ou
morts, les religions qui portent quelque reflet du vrai Dieu... Le fait que la
lune ne donne plus sa lumière signifie donc une disparition de tout ce qui peut
être signe de la présence du Dieu d’humilité et d’amour pour l’homme. Les
étoiles qui tombent du ciel représentent les prédicateurs qui, avant la venue
de l’Antéchrist, indiquaient la route du Ciel mais, après, ne montreront plus
que la terre à bâtir.
Faut-il
ajouter à ces terribles épreuves des derniers temps un ébranlement soudain et
effrayant de la nature ? Faut-il admettre que la mer mugira
matériellement, poussée par un grave dérèglement du climat ? Certains
théologiens l’affirmèrent jadis, en donnant un sens matériel aux textes. Ils
annoncèrent même une pluie matérielle d’étoiles filantes et, pour les semaines
qui précéderont le retour du Christ, la menace d’un astre errant qui se dirigera
vers la terre, jetant dans l’effroi le monde de l’Antéchrist.
Ces
interprétations ne sont pas à mépriser totalement[443]
mais elles ne sont pas nécessaires. Plus la fin du monde approchera, plus leur signification sera spirituelle.
Dieu n’aura pas besoin, dans le monde de l’Antéchrist, de frayeurs matérielles
pour disposer les hommes au salut. Le monde se sera considérablement spiritualisé
et les hommes seront beaucoup plus fragiles psychologiquement que par le passé.
Si l’on veut détacher un solide cultivateur mérovingien de sa terre, il faut
lui en montrer le peu de valeur par la rigueur des saisons et diverses épreuves
matérielles (grêles, famine,
pillage). Si l’on veut accomplir un travail de purification sur un jeune
citadin attendri par le confort d’une vie facile, il suffit bien souvent de le
laisser face à ses propres réflexions sur le sens de sa vie. L’humanité sera
comblée dans son corps par toutes les richesses et sécurités mais, dans son
âme, elle subira la souffrance. Dieu
verra du Ciel cette souffrance. Il verra aussi à quel point elle creusera chez
les hommes de bonne volonté une soif du vrai salut, celui qui est fondé non sur
la puissance mais sur l’amour. Il en sera heureux. Ainsi, le monde de
l’Antéchrist, bien que prévu pour une toute autre finalité, disposera les
peuples au salut d’une manière unique. Beaucoup
seront purifiés.
L’égoïsme
qu’il produira sera accompagné d’un tel désespoir spirituel qu’il provoquera
plus de soif de Dieu que de soif de cette liberté vaine et sans signification
donnée par la religion du dernier Antéchrist[444].
De même,
l’apparition dans le ciel du signe du fils de l’homme n’est pas à prendre
nécessairement (quoique, dans un second sens, pourquoi pas) au sens le plus
matériel, comme si une croix devait se dessiner matériellement dans le ciel.
Cette prophétie se réalisera très concrètement dans l’histoire, selon les
multiples niveaux de sens que j’ai décrits tout au long de ce livre. Mais seuls
les vautours[445],
c’est-à-dire les contemplatifs, comprendront qu’il s’agit du martyre des
croyants fidèles : « Mes paroles, dit Jésus, sont esprit et elles
sont vie. »[446]
C’est l’Esprit qui vivifie, la chair ne
sert de rien. Ainsi, dans le monde dominé par l’Antéchrist*, tout sera prêt
pour le grand spectacle final. Le cœur des peuples séparés de Dieu mourra de
soif spirituelle. Les derniers croyants mourront d’espérance et d’attente.
Ainsi, il devient possible de comprendre pourquoi Dieu permettra l’apparition
et la réussite de l’Antéchrist.
Le secret de La Salette[447] confirme ces dires, en appelant pour cette
époque les contemplatifs à discerner les signes du dernier des temps.
« Combattez, enfants de lumière, vous, petit nombre qui y
voyez. Car voici le temps des temps, la fin des fins. »
« Voici
le temps. L’abîme s’ouvre. Voici le roi des rois des ténèbres. Voici la bête
avec ses sujets, se disant le sauveur du monde. Il s’élèvera avec orgueil dans
les airs pour aller jusqu’au Ciel. Il sera étouffé par le souffle de saint
Michel Archange. Il tombera… »
[Chose probable]
L’Antéchrist
et ceux qui le suivront avec l’enthousiasme des débuts s’efforceront de nier la
réalité du feu de l’âme assoiffée du vrai Dieu. Ils auront essayé de le faire
disparaître en donnant aux hommes une religion et une espérance après la mort.
L’Antéchrist fera tout pour supprimer le feu par sa nouvelle religion, ouverte
à l’éternité, du culte de l’Homme divinisé. Mais son succès, étant mensonger,
ne durera que le temps d’un enthousiasme passager. Son nouveau monde craquera
de tous côtés, miné par un mal invisible.
En réalité, le feu qui brûlera son nouveau monde
viendra du plus profond de l’âme humaine. L’âme de l’homme ne souffre pas
seulement de la peur de mourir. Elle se désespère inconsciemment tant qu’elle
ne trouve pas celui qui n’est que Lumière
infinie, Amour total, humilité parfaite[448].
Elle a été créée par le vrai Dieu dans son mystère Trinitaire, Père, Fils et
Saint-Esprit. Elle est faite pour lui correspondre comme dans un mystère
d’épousailles parfaites. Le cœur de l’homme est comme un creux fait pour le
plein qu’est Dieu. Lucifer*, malgré la noblesse de sa nature, sa puissance
intellectuelle, son immortalité, n’est qu’un
succédané de Dieu, une pâle imitation. L’adorer ne mène à rien de durable.
Malgré tous ses succès matériels, il n’y peut rien. Il ne peut combler le
creux.
Ce
problème se traduira très concrètement dans le monde de l’Antéchrist par la
subsistance des épidémies de désespoir et de suicide. Alors, il s’efforcera de
trouver une solution. Il s’efforcera d’étourdir l’humanité dans la recherche
d’un nouveau défi pour l’empêcher de trop penser. Il ne manquera plus qu’une
œuvre à réaliser, s’attaquer à la mort[449].
La mort fut imposée par Dieu aux hommes après le péché originel.
Elle devint pour Lui une alliée car, de manière puissante et égalitaire, elle
remettait les riches et les pauvres devant leur vraie condition. Il est
difficile à un homme de mourir et de rester orgueilleux. Par ce mode, bien des
hommes se réformèrent et furent sauvés.
Or, il convient de remarquer que le livre de la Genèse
traite en deux temps la question de la mort. Juste après le péché originel,
Dieu commença par rendre impossible toute forme d’immortalité sur la terre[450] :
« Yahvé Dieu dit : ‘Voilà que l’homme est devenu comme l’un de nous,
pour connaître le bien et le mal ! Qu’il n’étende pas maintenant la main,
ne cueille aussi de l’arbre de vie, n’en mange et ne vive pour toujours !’ Et
Yahvé Dieu le renvoya du jardin d’Éden pour cultiver le sol d’où il avait été
tiré. Il bannit l’homme et il posta devant le jardin d’Éden les chérubins et la
flamme du glaive fulgurant pour garder le chemin de l’arbre de vie. »
Ce texte indique la limite ultime qu’assignera Dieu à la
puissance et aux réalisations de l’Antéchrist. Jamais Dieu ne permettra qu’il
réussisse à supprimer la mort. Il s’y efforcera, à force de science et de
biologie. Mais la présence des Kérubim,
l’ordre supérieur des Anges, portant le nom hébreu de « lumière de la
connaissance », indique une volonté arrêtée de ne pas laisser faire.
Un autre texte de la Genèse parle de la mort[451] :
« Lorsque les hommes commencèrent d’être nombreux sur la face de la terre
et que des filles leur furent nées, les fils de Dieu trouvèrent que les filles
des hommes leur convenaient et ils prirent pour femmes toutes celles qu’il leur
plut. Yahvé dit : ‘Que mon esprit ne soit pas indéfiniment responsable de
l’homme, puisqu’il est chair; sa vie ne sera que de 120 ans’. » Ainsi,
d’après la Bible, alors que les hommes vivaient auparavant cinq cents ou six
cents ans, à la suite d’un péché mystérieux, Dieu raccourcit considérablement
cette durée. J’ai toujours cru à une interprétation symbolique de ce texte,
jusqu’à ce que la génétique se mette à soupçonner la présence dans l’A.D.N.
d’une simple programmation de la vieillesse par le ralentissement des divisions
cellulaires. De nos jours déjà, la génétique essaye de prolonger chez l’animal
les divisions cellulaires qui sont à la base de la conservation des vivants
dans une longue jeunesse. S’il est impossible de supprimer la mort, il est
possible par contre de rallonger considérablement la durée de la vie.
Dans les décennies qui précéderont et accompagneront la venue
de l’Antéchrist*, l’humanité essayera probablement de forcer la porte de
l’arbre de vie dont parle le livre de la Genèse[452].
L’arbre de Vie voulu par Dieu pour les hommes est celui de la Vie éternelle
dans la vision de Dieu[453].
L’arbre de vie tel que l’entendra l’Antéchrist sera la vie éternelle et
autonome sur terre. Cet arbre symbolise le paradis terrestre, objet des
convoitises des hommes depuis la chute originelle. Il s’efforcera d’en percer
le secret génétique[454].
Le jour où le gouvernement mondial réussira à faire naître des enfants capables
de vivre plusieurs siècles, le signe de l’Arbre de vie sera donné aux hommes.
L’humanité en sera changée. Si les hommes retrouvent la capacité à vivre longtemps
sur terre, la procréation relèvera de l’État, ainsi que la contraception
obligatoire. La fécondité et la naissance d’un enfant deviendront davantage affaire
de science que d’union amoureuse d’un couple. Cela se fera contre les volontés
les plus explicites de Dieu, lui qui lia jadis fécondité et amour conjugal, vie
courte sur terre et humilité de l’homme. Ce signe est de grande importance
puisqu’il rejoint le fondement même de la révélation biblique sur le sens de la
vie terrestre.
La décision de prolonger la vie sur terre constituera le
dernier tremblement apocalyptique. Ce sera aussi le dernier des signes
sensibles donné à l’humanité. Toute l’Écriture sainte aura été accomplie. La
Genèse et Apocalypse se rejoindront. Les
méchants feront le mal et les méchants ne comprendront pas. Le jour où ce
rêve sera tenté, ce jour-là, on pourra dire : « L’Écriture est accomplie ». Tout ce qui était annoncé est achevé.
La coupe des iniquités est pleine. Le Messie revient[455].
Il
est probable que les hommes sentiront confusément qu’ils auront commis un
blasphème direct contre les volontés de Dieu : « Les nations sur la
terre seront dans l’angoisse, inquiètes du fracas des flots et de la mer. Des
hommes défailliront de frayeur dans l’attente de ce qui menace le monde habité
car les puissances des cieux seront ébranlées. »[456]
[Chose probable]
« Aussitôt après la tribulation de ces
jours-là, le soleil s'obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les
étoiles tomberont du ciel, et les puissances des cieux seront ébranlées. Et
alors apparaîtra dans le ciel le signe du Fils de l'homme ; et alors
toutes les races de la terre se frapperont la poitrine ; et l'on verra le
Fils de l'homme venant sur les nuées du ciel avec puissance et grande
gloire. »[457]
Certains textes des Écritures et
en particulier la lettre de l’Apocalypse ne cessent de décrire sous forme
physique (tremblement de terre, chute d’étoiles, etc.) les épreuves de la fin.
Tout au long de cet ouvrage, j’ai voulu montrer à quel point le sens de ces
fléaux se spiritualiserait de plus en plus jusqu’à la fin. Cependant, il
convient de nuancer ce point de vue. Le Christ nous y invite : « Car je vous le dis, en vérité :
avant que ne passent le ciel et la terre, pas un i, pas un point sur l'i, ne
passera de la Loi, que tout ne soit réalisé. »[458]
Rien n’empêche donc (et c’est
l’opinion de saint Thomas d’Aquin) que des terreurs physiques reviennent vers
la fin. Nous avons d’ailleurs un signe de la vérité de cette opinion dans la
fin de la passion de Jésus. Sa vie est, je l’ai sans cesse montré, une parabole
de la fin de l’humanité. Le chemin par lequel Jésus apprit l’humilité[459] sera
le même pour son corps, l’humanité… C’est le même Esprit qui agit partout dans
cette histoire.
Or l’Écriture nous rapporte les
faits suivants, qui se produisirent juste avant la mort du Christ [460] :
« À partir de la sixième heure,
l'obscurité se fit sur toute la terre, jusqu'à la neuvième heure. Et vers la
neuvième heure, Jésus clama en un grand cri : ‘Eli, Eli, lema sabachtani’,
c'est-à-dire : ‘Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?’
Quant au centurion et aux hommes qui avec lui gardaient Jésus, à la vue du
séisme et de ce qui se passait, ils furent saisis d'une grande frayeur et
dirent : ‘Vraiment celui-ci était fils de Dieu !’ »
Il s’agit bien là de signes
matériels, palpables, et non de signes spirituels. Il est probable que, juste
avant le retour du Christ, il en sera de même pour l’humanité toute entière.
Ces catastrophes naturelles, dont la liste est actuellement abondamment
imaginée par nos modernes écologistes, auront un puissant effet de conversion
sur les cœurs. À cette époque, l’humanité s’imaginera avoir définitivement
vaincu la plupart des aléas de la nature. Elle se sera beaucoup ramollie.
L’apparition d’astéroïdes menaçants, de signes climatiques inédits pourrait
remettre les coeurs dans la voie d’une certaine humilité… Comment peut réagir
une humanité confiante en sa puissance et habituée à tout maîtriser lorsque le
malheur fond sur elle ?
« Aussitôt après
cette tribulation, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière,
les étoiles tomberont du ciel et les puissances des cieux seront ébranlées. Et
alors apparaîtra dans le ciel le signe du Fils de l’homme. Et alors toutes les
races de la terre se frapperont la poitrine. Et l’on verra le Fils de l’homme
venant sur les nuées du ciel, avec grande puissance et grande gloire. Et il
enverra ses anges avec une trompette sonore, pour rassembler ses élus des
quatre vents, des extrémités des cieux à leurs extrémités. »[461]
Daniel, en parlant de la fin
de l’Antéchrist, écrit : « Il sera brisé sans acte de main. »[462]
Saint Paul va dans son sens : « Le
Seigneur fera disparaître l’Impie par le souffle de sa bouche, l’anéantira par
la manifestation de sa Venue. »[463]
[Chose indécise]
On le
voit, ces textes multiples ne laissent pas de doute. La venue du dernier
Antéchrist précédera et annoncera le retour glorieux du Christ. Le Seigneur
affirme avec netteté : « Quand vous verrez cela, redressez-vous et
relevez la tête car votre Rédemption est proche. »[464]
Toute la
question est d’interpréter ce mot « proche ». Combien de temps durera
le monde soumis au culte de l’Homme à travers le culte explicite de
Lucifer* ? Durera-t-il quelques années seulement ? Lorsque la
dernière prophétie sera réalisée, combien de temps faudra-t-il précisément
attendre ? Pour répondre à ces questions, seuls des principes généraux
sont certains. Dieu laissera durer ce monde sans espérance suffisamment de
temps pour qu’il puisse produire des fruits que l’Antéchrist ne prévoira pas, à
savoir de la souffrance donc de l’humilité et du désir pour le vrai Dieu. Mais
il le fera cesser par son retour glorieux assez vite pour que des élus aient la
vie sauve. « Et si ces jours-là n’avaient été abrégés, nul n’aurait eu la
vie sauve ; mais à cause des élus, ils seront abrégés, ces
jours-là. »[465]
D’après
le prophète Daniel, la durée du règne de l’Antéchrist sera courte :
« Le temps d’une semaine (temps symbolisant ce que vit une génération humaine),
il consolidera une alliance avec un grand nombre et le temps d’une
demi-semaine, il fera cesser le sacrifice et l’oblation (donc, semble-t-il,
quelques années). »[466]
Ailleurs[467],
il parle de la manière suivante : « À compter du moment où sera aboli
le sacrifice perpétuel et posée l’abomination de la désolation, 1290 jours.
Heureux celui qui atteindra 1335 jours. » 1290 jours représentent la durée
du ministère public de Jésus (trois ans et demi). Ce chiffre signifie non un
temps réel (du moins pas nécessairement) mais une mission. Appliqué à l’Église,
il symbolise les siècles de son existence sur terre. Les chrétiens qui ont
gardé ou garderont la foi dans leur cœur[468],
ont été et seront appelés à la même mission que le Christ, sauver le monde. Ils
seront les prêtres du monde, c’est-à-dire qu’il leur appartiendra d’offrir à Dieu
des supplications pour l’âme de leurs contemporains éloignés de la vraie Vie.
Heureux donc ceux qui, tout au long de l’histoire de l’Église (déjà près de
2000 ans), ont gardé et garderont intacte leur confiance en Dieu.
Quant aux 1335 jours (1290 jours + 45), ils symbolisent non
seulement les trois années et demie de la vie apostolique de Jésus, mais aussi
le temps très court qui va du sépulcre, jusqu’à la Pentecôte. Heureux aussi
ceux qui garderont la foi durant les trois jours du sépulcre de l’Église (3
jours symboliques) et jusqu’au retour glorieux du Christ (après 40 jours
symboliques). Ils seront l’Église de la fin du monde de la même manière que Marie*
fut à elle seule toute l’Église pendant les trois jours du sépulcre et les
jours d’errance et de doute avant la Pentecôte.
Concrètement,
tous ces chiffres symboliques ne nous avancent pas beaucoup. Il est impossible
de savoir avec certitude quelle sera la durée exacte du règne de l’Antéchrist
(et peut-être de ses successeurs). Une seule chose est certaine : Dieu
n’annonce plus aucun événement nouveau sur terre hormis la Venue du Christ qui
« fera disparaître l’Impie par le
souffle de sa bouche, l’anéantira par la manifestation de sa Venue »[469].
Il n’y aura donc plus cette fois d’autre temps.
J’ai longtemps
hésité à propos de cette durée. Je n’arrive pas à conclure. J’ai essayé de
comparer à ce qui s’était jadis passé, lors de la fin de certains mondes particuliers. Des prophéties anciennes,
adressées à l’Égypte antique, parlaient déjà de fin du monde. On m’a rapporté qu’une inscription hiéroglyphique du
temple de Philae dit : « Les
temples seront désertés. Les dieux seront oubliés. Les écrits deviendront
obscurs et nul ne pourra plus les déchiffrer. La fin du monde approche. » La
fin du monde, en ce qui concerne l’Égypte antique, ne fut que la fin d’un
monde. 1700 ans après l’assassinat du dernier moine de Philae, l’humanité est
toujours sur terre. Il y a ici une analogie avec la fin de l’Église et des religions.
En conséquence,
deux opinions peuvent être soutenues :
1- Première hypothèse :
Sans trop s’avancer, il est probable que les hommes qui seront présents sur
terre, lorsque sera donné le dernier des signes (la tentative de conquête de
l’arbre de vie), seront encore en majorité vivants lors du retour du Christ. Ce
temps d’attente ne durera pas plus que l’espace d’une génération, selon le sens
littéral de cette parole de Jésus[470] :
« En vérité je vous le dis, cette génération ne passera pas que tout cela
ne soit arrivé. » Jusqu’alors réalisée de manière cachée, à travers la succession
des morts individuelles, cette parole le sera d’un coup par le retour glorieux
du Christ. Plusieurs arguments étayent cette opinion. Les prophéties
concerneront, cette fois, l’Église universelle et la totalité des nations* de
la terre. Elles seront toutes réalisées. Rien d’autre ne sera annoncé. Les événements
rapportés dans le livre de la Genèse se seront produits en sens inverse, au sens littéral du terme. Ainsi,
l’Alpha et l’Oméga, la Genèse et l’Apocalypse se seront rejoints. Déjà de nos
jours, les tours de Babel[471]
modernes se dressent dans presque tous les pays comme symbole de leur orgueil.
L’unification des langues[472]
est en voie de réalisation dans l’anglais. Les nations commencent à penser leur
disparition au profit d’un gouvernement mondial[473].
Le rêve d’une prolongation de la vie humaine tente déjà les généticiens[474].
Il s’agit donc bien du temps des temps,
de la fin des fins[475],
de même que le livre de la Genèse raconte le commencement du commencement.
Combien
d’années ? Les exemples du
passé montrent la diversité des temps accordés par Dieu aux impostures
politiques. Parmi les divers antichristianismes apocalyptiques, on peut citer
l’exil à Babylone du peuple juif qui dura soixante-dix ans[476].
Le communisme athée en Russie dura soixante-douze ans. L’exode dans le désert
dura quarante années[477].
Hitler tint l’Allemagne durant douze ans et le monde en guerre durant six ans.
Rarement, au cours de l’histoire, un régime politique monstrueux aura
duré plus que le temps d’une vie humaine. Or l’Antéchrist, celui qui accomplira
les dernières prophéties, sera un homme, pas un dieu.
2- Deuxième hypothèse : Il existe une
autre hypothèse, peu probable et peu étayée quoique légitime. Rien
n’empêche que l’Antéchrist ait des successeurs. Ce monde sans autre religion
que celle de la collaboration avec Lucifer peut durer plusieurs siècles. Au
risque de décevoir, lorsqu’on regarde dans l’Écriture sainte la façon dont Dieu
utilise le mot « bientôt »,
on reste hésitant. Un texte de l’Apocalypse est à cet égard significatif[478] :
« Ces paroles sont certaines et vraies ; le Seigneur Dieu, qui
inspire les prophètes, a envoyé son Ange pour montrer à ses serviteurs ce qui
doit arriver bientôt. Voici que mon retour est proche ! Heureux celui qui garde
les paroles prophétiques de ce livre. »
Ce texte est lu depuis deux mille ans par des générations de chrétiens qui
sont invités à y croire. De fait, ces paroles se réalisent puisque les gens meurent
vite, donc bientôt. C’est le bientôt
de Dieu ! J’ai expliqué que le monde de l’Antéchrist, quoique centré sur
l’Homme et le culte de la gloire, n’est pas un monde où l’on se damne davantage
que dans les autres époques. La détresse spirituelle y est source de
rédemption, comme au temps de l’Ancien Testament où Dieu se taisait. Il se peut
donc que Dieu laisse faire, qu’il observe jusqu’où peut aller la folie des
habitants de la planète bleue.
Dans cette hypothèse, que feront-ils,
perdus, seuls, comme une tête d’épingle dans une galaxie de cent mille
années-lumière, à la conquête de la gloire ? « Et Yahvé dit :
‘Voici que tous font un seul peuple et parlent une seule langue, et tel est le
début de leurs entreprises ! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable
pour eux.’ »[479]
Il se peut donc que Dieu laisse tourner le monde et observe du Ciel sa folie,
comme aux jours de Babel. Ils conquerront de nouvelles planètes. Ils
s’efforceront de sortir du système solaire. Ils lutteront pour vaincre la mort.
Ils pratiqueront le spiritisme avec l’autre monde. Tout cela se fera dans une
perpétuelle et pitoyable guerre intérieure. Le dieu qui les illuminera sera
sans amour… Ce sera un monde de petits vieux, spirituellement usés, moralement
désespérés, ossements desséchés. Mais, inconsciemment ou consciemment, ils
seront assoiffés d’un désir brûlant pour le vrai Dieu.
[Chose certaine]
Alors,
finalement, le Christ apparaîtra. Ce ne sera pas une simple grâce spirituelle
mais une apparition aussi réelle et visible que celle de Marie à Bernadette de
Lourdes. Il se montrera d’un seul coup aux yeux de chair, exactement de la même
façon que le voient ceux qui meurent de nos jours. Il s’agit du même mystère
que celui que j’ai décrit en racontant la mort individuelle de chacun[481].
Le Christ ne viendra pas seul mais accompagné du Ciel entier (la Bible appelle
cela les nuées du ciel), des milliers d’anges pour ce jour de fête et de
terreur (Dies irae), des saints du passé et de tous les pays, enveloppés
de lumière. Les anges auront revêtu, pour ce jour, une apparence corporelle qui
dévoilera leur esprit aux mille lumières[482].
En tête,
la Vierge Marie, dans son corps physique glorifié apparaîtra simple. Plus un être est saint, plus il
est simple. On s’écriera de toute part en la voyant, à l’image des pauvres mots
de sainte Bernadette : « Elle a les yeux bleus ». Ce sera une
couleur d’âme, qui ne se décrit pas avec des mots, une transparence de pureté
intérieure où chacun lira qu’elle n’a jamais péché. Tout le monde verra ce
grand spectacle en un seul regard. Quand Dieu veut faire grand, il en prend les
moyens.
Chacun
verra le Ciel lui apparaître comme s’il était seul au monde. « Comme
l’éclair, en effet, part du levant et brille jusqu’au couchant, ainsi en
sera-t-il de l’avènement du fils de l’homme. »[483]
Chacun aura son apparition personnelle et, en même temps, chacun verra qu’il
n’est pas le seul. Les enfants s’extasieront et diront à leurs parents :
« Dieu est lumière et amour ! Et nous ne le savions pas ! »
Chaque
homme réagira devant la Révélation de cette gloire selon les dispositions de
son cœur. Les quelques fidèles qui auront su rester fidèles à leur attente du
retour du Christ seront
debout, attitude que la Bible réserve
à l’ami. Dans leur joie, ils ne pourront dire autre chose que merci. Leur
sainteté leur sera révélée. Ils comprendront que c’est leur prière qui provoque
cette explosion de gloire. Semblables à Marie, ils en seront troublés[484].
À genoux, c’est-à-dire repentants, les hommes de bonne volonté,
jusque-là soumis à l’Antéchrist, pleureront en disant :
« Nous ne
savions pas que tu étais ainsi. Nous croyions, on nous l’avait dit, que tu
n’étais qu’un mauvais esprit, un dieu jaloux de son pouvoir. Pardon pour nos
péchés. Fais de nous ce qu’il te plaira. »
Mais,
dans l’apparition de Jésus, ils ne discerneront ni jugement ni condamnation.
Nous avons une image de l’accueil qu’il réserve à tout homme quel qu’il soit à
l’heure ultime. Il en sera en ce jour-là comme de la parabole rapportée par
Jésus dans son Évangile :
« Un
homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : ‘Père, donne-moi la
part d’héritage qui me revient.’ Et le père fit le partage de ses biens. Peu de
jours après, le plus jeune partit pour un pays lointain où il gaspilla sa
fortune en menant une vie de désordre. Quand il eut tout dépensé, il commença à
se trouver dans la misère. Il eut faim et décida de retourner chez son père,
voulant se présenter à lui comme le dernier de ses serviteurs. Le voyant
arriver de loin, le père l’aperçut et fut saisi de pitié. Il courut se jeter à
son cou et le couvrit de baisers. Le fils lui dit : ‘Père, j’ai péché
contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils’ (...)
Mais le Père dit à ses domestiques : ‘Vite, apportez les plus beaux
vêtements pour l’habiller et mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux
pieds. Allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons, festoyons car mon fils
que voilà était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.’ »[485]
Il le
prépare par la famine ressentie sur la terre. Il le fait revenir à lui par le
désir qu’il a d’être heureux. Puis il devance ses paroles, se montre à lui tel
qu’il est, et au moindre signe de repentir, il lui promet la gloire des Noces
éternelles. Comment douter de Dieu à la lecture de textes tels que
celui-ci ?
Les Juifs[486],
face à la constatation des faits, diront : « Jésus, Messie, gloire à
toi au plus haut des cieux ! » Ils réaliseront ce jour-là la
prophétie de Jésus : « Vous ne me verrez plus jusqu’à ce que vous
disiez : ‘Béni soit celui qui vient au nom du
Seigneur !’ »[487]
De même, les quelques musulmans fidèles diront avec un étonnement qui les
laissera sans force : « Jésus, Fils de Marie, tu es Dieu. Tu es
vraiment mort sur la croix pour nous ! Tu nous proposes ton amitié et la vie
éternelle dans la vision face à face ! Nous ne le savions pas. Nous te
choisissons tel que tu es, Jésus. Nous ne serons plus tes serviteurs mais, si
tu le veux, nous serons tes amis. » Ce sera une immense clameur de joie et
les peuples, ceux qui auront le cœur pauvre, se précipiteront vers Jésus, vers
les saints du Ciel. On s’élancera vers lui à la mesure de la soif qu’on en
avait éprouvée sans le savoir ou en le sachant. En un moment, chacune des vies
qui peupleront la terre décidera de son destin pour l’éternité.
Mais,
bien sûr, il n’y aura pas que des pauvres de cœur sur la terre en cette époque.
Il y aura aussi beaucoup d’orgueilleux et parmi eux, l’Antéchrist. En un
instant, en raison de la simple apparition du cœur du Christ, ses constructions
n’auront plus de sens. Il en sera fini du monde créé par lui. L’adoration du
dieu arrogant et présomptueux paraîtra vaine à tous les cœurs justes,
c’est-à-dire à la majorité des hommes. Chacun voudra le vrai Dieu de l’humilité
et de l’amour.
L’Antéchrist ne sera pas rejeté, malgré tout le mal
spirituel qu’il aura fait. Il sera visité, lui tout seul comme tous les autres
hommes, par Jésus et il se verra proposer le salut. Il comprendra alors (s’il
ne l’avait déjà compris) que le Messie était mort pour lui aussi et qu’il
serait mort tout de même pour lui s’il avait été le seul habitant de la terre.
Mais l’Antéchrist sera porté à refuser. Après s’être battu toute une vie pour
la dignité de l’homme libre, indépendant, debout, en un mot orgueilleux,
comment pourra-t-il accepter la victoire de Jésus, l’Homme humble et aimant ?
Voyant en un instant son oeuvre, son monde séparé du vrai Dieu détruit de
l’intérieur et vidé de ses sujets, il est évident qu’il sera tenté par son
propre péché et par la présence de Satan.
Lucifer, le chef des anges révoltés, exactement comme à
l’heure de la mort individuelle de chacun, recevra l’autorisation de se
montrer, de s’adresser aux hommes. Il leur tiendra ce langage, à tous, dans un
dernier discours intérieur particulièrement séducteur :
« N’avez-vous
pas été heureux et puissants sur la terre durant toutes ces années grâce à moi
et à mes serviteurs ? Allez-vous renoncer maintenant à ce bonheur, d’un
seul coup, parce qu’on vous en propose un autre ? Mais ne comprenez-vous
pas ce que veut ce Jésus ? Il vous veut humbles et dépendants alors que
vous êtes faits pour la liberté, le pouvoir, la décision autonome du bien et du
mal. Il vous veut aimants alors que vous pouviez jusqu’ici vivre sans dépendre
de personne. Refusez avec moi ce pitoyable paradis ! Restez ce que vous avez
toujours été, des hommes debout ! »
Ce discours ne séduira que peu d’hommes, à sa grande
fureur. Seuls les orgueilleux capables de maintenir leur choix devant la
révélation d’un si grand amour, le suivront. Le livre de l’Apocalypse commente[488] :
« Mais la Bête (l’idéologie de l’orgueil) fut capturée, avec le faux
prophète (l’Antéchrist) – celui qui accomplit au service de la Bête des
prodiges par lesquels il fourvoyait les gens ayant reçu la marque de la Bête et
les adorateurs de son image –, on les jeta tous deux, vivants, dans l’étang de
feu, de soufre embrasé (…) Il maîtrisa le Dragon, l’antique Serpent – c’est le
Diable, Satan –, et l’enchaîna pour mille années (ici, dans ce sens qui est le
dernier, mille années signifient l’éternité). » Un autre texte de
l’Apocalypse, du même genre, semble indiquer que l’Antéchrist suit Satan en
enfer : « Alors le diable, leur séducteur, fut jeté dans l’étang de
feu et de soufre, y rejoignant la Bête (c’est-à-dire l’idéologie d’un monde
sans vrai Dieu) et le faux prophète (l’Antéchrist), et leur supplice durera
jour et nuit, pour les siècles des siècles. »[489]
Pour Judas, Hitler et d’autres[490],
ces prophéties de damnation sous-entendent toujours : « s’il ne se
convertit pas au dernier moment. » Il n’en demeure pas moins vrai, comme
pour tous les hommes dont j’ai montré le choix décisif à l’heure de la mort[491],
que plus l’orgueil et l’égoïsme sont importants, plus la conversion est
difficile.
La plupart des hommes, après avoir été abreuvés pendant des
années du vide spirituel créé par l’Antéchrist, reconnaîtront n’avoir aimé
qu’eux-mêmes en recherchant les joies sensibles. Ils le reconnaîtront devant le
Christ et devant tous les saints. Ils comprendront la gravité de l’égoïsme qui
se déguise en amour tout en rejetant l’époux qui lasse, les parents âgés qui
meurent seuls, les enfants malvenus. Ils comprendront à la vue du Christ ce
qu’est le vrai amour et seront prêts à prendre tout le temps qu’il faut pour se
purifier. Le livre de l’Apocalypse raconte, à travers les symboles d’une
bataille, ces conversions provoquées par la Venue du Christ[492] :
« Tout le reste fut exterminé par l’épée (la parole de vérité) du
Cavalier, qui sort de sa bouche, et tous les oiseaux (les contemplatifs) se
repurent de leurs chairs. » Il y aura en effet au Ciel une grande joie
devant la foule immense du peuple qui se convertira. Ce sera la joie de la
Victoire de l’amour. On verra des prostituées, jusque-là adonnées aux péchés,
se convertir et, telle Marie-Madeleine, pleurer en essuyant les pieds de Jésus
avec leurs cheveux[493].
On verra des hommes d’argent renoncer à leur fortune et, tel le publicain Lévi,
arriver les mains vides devant Jésus. Mais celui qui maintiendra son orgueil
jusqu’au bout, celui-là sera perdu.
Après le
retour du Christ, le temps sera comme suspendu. Ceux qui auront choisi de
l’aimer vivront ces heures en sa présence dans une extase perpétuelle. Ils ne
pourront détacher leur âme de sa vue. Ils ne verront pas seulement sa beauté
physique mais aussi celle de son cœur. Tous les symboles utilisés jadis par le
Seigneur auprès de sainte Marguerite-Marie prendront sens. Au même moment, ceux
parmi les sauvés qui auront à purifier quelque chose seront éloignés de sa vue.
Cela ne durera qu’un instant mais pourra leur paraître des heures, des années
tant ils aimeront et ne supporteront pas son absence. Le purgatoire est fait
ainsi. Il ne dure sans doute pas longtemps en temps objectif mais sa durée
intérieure peut sembler aussi longue que des siècles. « Avez-vous vu mon
Bien-aimé ? »[494]
Ceux qui auront refusé le Christ seront aussi sur la terre en ces instants mais
ils fuiront. Ils ne se sauveront pas dans d’autres lieux, le Christ étant
présent partout à la fois devant leur regard. Ils fuiront en eux-mêmes en
essayant de détourner leurs pensées de son regard insoutenable. Ils
crieront : « Va-t-en. Ne vois-tu pas que nous ne voulons pas de toi
ni d’aucun de ceux qui sont avec toi. Pourquoi restes-tu ainsi ? Veux-tu
donc nous torturer ? » Leur choix de la solitude sera, on le voit à
travers ces mots, définitif.
Il est
inutile d’insister davantage sur le retour du Christ car sa venue a déjà
amplement été décrite[495].
La mort individuelle de chacun est exactement, point par point, le même mystère
et, à une nuance près, tout le monde le verra en même temps.
Pour
conclure ce chapitre, il faut se reposer la question fondamentale déjà formulée
ci-dessus. Pourquoi Jésus permettra-t-il, avant son retour, que l’apostasie*
s’installe jusqu’à supprimer toute trace extérieure et visible de la présence de
Dieu ? Nous voyons maintenant comme dans un grand panorama le bien qui en
sortira : beaucoup d’humilité pour la majorité des hommes vivant sans
espoir de vrai bonheur dans un monde où tout matériellement dispose au
bonheur ; une grande espérance pour ceux qui auront gardé la foi, mais
toute pauvre devant l’absence de tout signe extérieur du retour du
Christ ; une charité inégalée, enfin, pour les chrétiens de cette époque.
Il en sortira une grande victoire. Avec saint Paul, devant la confusion du
démon définitivement vaincu, chacun s’écriera : « La mort a été
engloutie dans la victoire ; où est-elle, ô mort, ta victoire ? Où
est-il, ô mort, ton aiguillon ? Mais grâce soit à Dieu, qui nous donne la
victoire par notre seigneur Jésus-Christ. »[496]
La
preuve suprême que Dieu nous aime,
C’est
que le Christ reviendra nous chercher
Alors que nous ne l’attendrons plus.[497]
[Chose certaine]
À la fin des temps, le Royaume de Dieu
arrivera à sa plénitude. Après le jugement universel, les justes régneront pour
toujours avec le Christ, glorifiés en corps et en âme, et l’univers lui-même
sera renouvelé : « Alors l’Église sera consommée dans la gloire
céleste, lorsque, avec le genre humain, tout l’univers lui-même, intimement uni
avec l’homme et atteignant par lui sa destinée, trouvera dans le Christ sa
définitive perfection. » Cette rénovation mystérieuse, qui transformera
l’humanité et le monde, la Sainte Écriture l’appelle « les cieux nouveaux
et la terre nouvelle ». Ce sera la réalisation définitive du dessein de
Dieu de ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ, les êtres célestes
comme les terrestres.[498]
Le jour
du Seigneur, son retour glorieux visible d’un bout à l’autre de la terre,
mettra fin aux naissances et aux morts. La terre telle qu’elle est n’aura plus
ni sens ni utilité, les hommes ayant tous sans exception fait leur choix pour
l’éternité. Saint Paul
raconte ainsi ce qui se produira alors[499] : « Je vais vous dire un mystère. Nous
ne mourrons pas tous, mais nous serons transformés. En un instant, en un clin
d’œil, au son de la trompette finale, car elle sonnera, la trompette, et les
morts ressusciteront incorruptibles, et nous, les vivants, nous serons
transformés. Il faut en effet que cet être corruptible revête l’incorruptibilité,
que cet être mortel revête l’immortalité. »[500]
Les
paroles de saint Paul sont claires. Si nous sommes présents sur la terre au
jour du retour du Christ, nous ne
mourrons pas. Nous serons tous, sans exception, dispensés de la mort et ce
sera le premier cadeau de noces de la part de Dieu. J’ai montré que les
dernières générations de l’humanité seront extrêmement cultivées et
intellectualisées, même si elles auront tendance à se donner à un culte
antichristique. Leur sensibilité sera affinée, beaucoup plus sensible au vide
spirituel. C’est pourquoi la mort n’aura plus vraiment d’utilité. Le règne
désespérant de l’Antéchrist et le retour glorieux du Christ seront des événements
si puissants qu’ils suffiront à rendre tous les genoux chancelants. Les damnés
eux-mêmes seront dispensés de mourir, leur choix final étant parfaitement
lucide et définitif.
[Chose certaine]
L’univers
sera donc peuplé de deux sortes d’humains. Les anciens, ceux qui seront déjà
passés par la mort, seront présents. Ils auront accompagné le Christ ou le
démon le jour de la Parousie*. Mais ces personnes-là n’auront pas leur corps de
chair. Ils seront face à la dernière génération de l’humanité, bien en chair.
Avant la
résurrection de la chair, l’homme est privé d’une partie de son être. Il
conserve bien sûr la partie essentielle de son être, son esprit, ses pensées et
ses choix profonds. Mais les N.D.E. (Near Death Experiences) semblent indiquer
qu’il conserve aussi la partie psychique de son être. Il voit, il entend. Il
garde malgré la disparition de l’organe du cerveau, avec une acuité très
grande, tous les souvenirs sensibles accumulés durant la vie terrestre et que
la vieillesse fait parfois oublier. Cette découverte de la survie de la vie
sensible est récente en Occident. On la doit aux études du Docteur Raymond
Moody sur les personnes victimes d’un arrêt cardiaque[501]. Par contre le corps charnel a disparu. Son absence
ampute le mort des sens du toucher et du goût qui lui sont liés. Ce manque est
très peu gênant. Ceux qui sont déjà au Ciel sont parfaitement heureux. Comment
pourrait-il en être autrement puisqu’ils voient Dieu ?
Pourtant
Dieu ne nous laissera pas éternellement amputés d’une partie de nous-mêmes. En
cet instant, la trompette sonnera[502], dit saint Paul. Cette trompette symbolise la voix
du Christ. Tout pouvoir lui a été remis par Dieu. L’Esprit Saint qui repose sur
lui est décrit dans la Bible comme une trompette ou un tonnerre à cause de sa
force[503]. C’est à lui qu’appartient, à travers son humanité,
de donner un tel commandement.
Il
donnera un ordre à ses anges. Eux, utilisant leur puissance naturelle sur cette
matière qu’ils façonnent depuis la création du monde, récolteront de la terre
et, à partir de ses éléments, reconstitueront le corps physique complet,
parfait et en pleine jeunesse de tous les morts, les saints comme les damnés.
Ce sera leur corps à eux, reconstitué précisément mais débarrassé de ses
défauts. Les handicapés renaîtront en pleine possession de tous leurs moyens,
les trisomiques ne porteront les stigmates de leur handicap que comme une
gloire de leur âme plus humble. Chaque mort, en un éclair, réintégrera son
propre corps dont elle reconnaîtra chacune des fibres.
Je ne
veux pas signifier par là que ce corps sera fait avec les mêmes éléments
matériels qui ont déjà servi durant notre vie terrestre (atomes et molécules)[504]. L’Église affirme que notre corps de ressuscités
sera notre vrai corps physique, aussi
palpable et capable de manger que celui de Jésus après sa résurrection.
La résurrection de la chair fait partie de la foi.
À cela, on pourrait, semble-t-il, objecter le texte de saint Paul dans sa
première lettre aux Corinthiens[505] : « On est semé ici-bas corps psychique,
on ressuscite corps spirituel. S’il y a un corps psychique, il y a aussi un
corps spirituel. » L’interprétation de ce texte pourrait conduire à
affirmer l’apparition d’un corps qui n’est plus fait de matière mais qui, de
fait, est celui d’un pur esprit. Les anges eux-mêmes ne se façonnent-ils pas
parfois des apparences de corps que l’on peut voir et toucher ?[506] Or les Évangiles ne cessent de le rappeler, saint
Paul n’a pas voulu dire cela. Jésus prouve à
Thomas dans son apparition qu’il a un vrai corps : « Mets ton doigt
dans mon côté, ne soit pas incrédule, soit croyant. »[507] Avec son autorité infaillible, l’Église a confirmé
qu’il s’agit bien d’une résurrection de
la chair, c’est-à-dire des molécules palpables qu’un fantôme ne possède
pas. Il s’agira bien de notre corps physique mais il sera, aussi bien pour les
saints du Ciel que pour les damnés, débarrassé de tous ses défauts. Ces défauts
ne serviront plus à rien puisque notre choix aura été fait. Les damnés et les
saints réintégreront la perfection de leur être, pour que chacun puisse vivre
comme il le désire, loin de Dieu ou près de lui. Déjà au temps du prophète
Daniel, les Juifs savaient que tous les morts sans aucune exception
ressusciteraient un jour : « Une multitude, ceux qui dorment au pays
de la poussière s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour
la réprobation et l’horreur éternelle. »[508] Dieu rendra à chacun son corps, respectant même
chez les damnés la liberté qui les a conduits à choisir l’horreur éternelle
d’une vie sans amour[509]. Saint Paul, en parlant d’un corps spirituel, voulait
signifier que les saints comme les damnés réintégreront leur corps parfaitement soumis et adapté à leur esprit.
Notre
corps sera spirituel en ce sens qu’il obéira tout entier à notre esprit. Les
damnés eux-mêmes seront dotés de cette liberté à une nuance près : leur
esprit sera malade de l’absence de Dieu. Il brûlera de l’intérieur du feu de ce
manque. Ainsi, malgré la présence d’un corps doté d’incorruptibilité et parfaitement
soumis à leur volonté, ils n’en profiteront pas. Que sert à l’homme d’avoir une
santé physique parfaite et un contrôle de son psychisme s’il n’est pas
heureux ? Cela se répercutera d’ailleurs dans leur apparence. Leur corps
sera doté d’une grande vitalité mais leur visage sera sans cesse déformé par
les effets de leur égoïsme choisi. Tout leur malheur viendra de leur esprit
orienté vers un choix pervers. Ils ne penseront qu’à eux-mêmes, à leur
obsession tendue vers leur propre réalisation, mais ils ne pourront réaliser ce
but loin de Dieu qui seul aurait pu les combler. Ils écumeront de colère.
Toutes les passions mauvaises seront leur lot quotidien puisqu’ils chercheront
le bonheur, c’est-à-dire Dieu, tout
en refusant la nature et les conditions de ce bonheur (l’humilité du repentir).
C’est une contradiction interne, choix de leur liberté, que la Bible appelle
« l’horreur ».
Les humbles, quant à eux,
recevront de la part de Dieu ce même corps, doté de la même perfection. Mais,
pour eux, tout sera surélevé en gloire. Comment pourrait-il en être autrement
puisqu’ils verront Dieu ? La Trinité emplira leur esprit, comblant en
béatitude tous leurs désirs. En conséquence, leur sensibilité et leur corps
seront plus que soumis totalement à leur esprit après le miracle de la
résurrection. Ils s’en trouveront glorifiés, c’est-à-dire dotés de pouvoirs
venant de Dieu. Des propriétés nouvelles et inimaginables apparaîtront[510]. Saint Thomas d’Aquin, regardant la façon dont se comportait Jésus
après sa résurrection, les résume en quatre mots : impassibilité (il n’est
plus accessible à la souffrance, à la mort), subtilité (il passe à travers les
portes closes), agilité (il se déplace instantanément) et clarté (son visage
physique révèle parfaitement son esprit)[511].
[Chose certaine]
Lorsque
le dernier homme aura achevé de purifier son amour à travers un purgatoire de
solitude[512],
tout sera consommé. Il n’y aura plus que deux « demeures » dans
l’autre monde, c’est-à-dire deux types d’hommes. Ils sont symbolisés dans
l’Écriture par le bon grain et l’ivraie[513].
Il s’agit des habitants du paradis et de l’enfer. Il ne convient pas d’imaginer
cela comme deux mondes physiquement séparés. L’enfer étant un choix de liberté,
respecté par Dieu, son lieu est le même que celui du paradis. C’est l’univers
entier et ses merveilles. De fait, Dieu donnera aux damnés obstinés en cadeau
tout ce qu’ils désirent. Ils recevront la puissance à laquelle ils aspirent.
Ils auront la possession de l’univers. Ils pourront y faire ce qu’ils veulent
selon le choix de leur liberté. Une seule chose leur sera refusée : la
Vision sublime de Celui qui voulait les épouser. Faut-il donc affirmer que les
paroles de l’Écriture qui les décrivent condamnés à un étang de feu[514]
sont de vaines images ? Il s’agit au contraire d’une triste réalité, pire
encore que la lettre du texte le laisse imaginer. En effet, à cause de leur
méchanceté intérieure, toute cette liberté et cette puissance se retourneront
contre eux. Ils ne profiteront de rien. La vue d’une fleur ou de toutes les
merveilles créées par Dieu sera source d’allégresse pour les saints. Pour les
damnés, elle sera une pointe de plus dans leur cœur envieux. Mais la plus
grande souffrance sera pour eux la vue d’un élu. Ils ne supporteront pas la vue
de l’humilité, de l’amour généreux et de la gloire qu’elle mérite. Ce sera pour
eux un objet de rage qui leur rappellera douloureusement la perte qu’ils auront
faite. Ils fuiront donc le plus loin
possible, dans les recoins les plus sombres de l’univers. Ils se sépareront à
jamais de toute présence vivante et habiteront les lieux déserts. Ils
chercheront le centre des astres, l’obscurité brûlante de ces étangs de feu[515]
où nul saint ne s’aventure. Plutôt que de céder à l’amour et de se repentir,
ils rumineront la haine pour toujours.
[Chose certaine]
« Quant
au cosmos, la Révélation affirme la profonde communauté de destin du monde
matériel et de l’homme : Car la
création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu... avec l’espérance
d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption.... Nous le savons
en effet, toute la création jusqu’à ce jour gémit en travail d’enfantement. Et
non pas elle seule ; nous-mêmes qui possédons les prémices de l’Esprit,
nous gémissons nous aussi intérieurement dans l’attente de la rédemption de notre
corps. (Romains 8, 19-23) »[516]
Qu’est-ce que le paradis ?[517] « Voir Dieu face à face et ne posséder rien d’autre vaut infiniment plus que posséder l’univers entier et avoir perdu Dieu. »[518] Pourtant, Dieu se prépare à offrir à ses amis, en plus de lui-même, un univers entier. Il ne s’agit pas d’une exagération littéraire. Saint Paul l’a dit : « Selon qu’il est écrit, nous annonçons ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment. »[519] À partir d’ici, j’aborde les grâces supplémentaires que Dieu a préparées[520]. C’est un travail très difficile. D’incroyables surprises nous attendent. Nous ignorons encore presque tout des propriétés cachées de la lourde matière dont nous sommes faits mais qui se trouvera transfigurée. Parmi ces propriétés, quelques-unes sont certaines.
Après
la résurrection de la chair, l’homme retrouve la plénitude des facultés
physiques, le sens du toucher inclus. L’Église n’a jamais souscrit à cette foi
un peu fondamentaliste des
Témoins de Jéhovah, comme si le lieu du paradis devait être la terre. Ce lieu
est bien trop exigu pour une éternité selon le rêve de Dieu. En toute logique,
la présence de ce corps doit s’accompagner de la recréation d’un univers
physique qui lui corresponde. À l’heure dite, immédiatement après le retour du
Christ, conjointement à la résurrection des morts, il préparera la réalisation
de bienfaits inimaginables jusque dans notre sensibilité et notre corps, jusque
dans le monde physique qu’il transformera, pour que nous puissions admirer
éternellement sa richesse et sa beauté[521].
Nous ne
pouvons nous faire une idée de l’énergie qu’il déploiera pour nous combler.
Dieu ressemblera à un fiancé enfin réuni à sa bien-aimée. Il ne sait que faire
pour elle. Il se donne à elle et cela suffit. Pourtant, il ajoute toutes les
folies que l’amour peut imaginer, des parures somptueuses, des royaumes, des
amis, des fleurs, des animaux... Dieu se comportera de la même façon, comme un
prince des contes, à la mesure de sa toute-puissance. Il créera un univers
grandiose de telle façon que l’éternité ne nous suffira pas pour le visiter. À
une vie éternelle de bonheur, Dieu fait correspondre un univers infini de
beautés.
[Chose certaine]
Il
commencera son oeuvre en détruisant. Saint Pierre* décrit son action :
« Il viendra, le jour du Seigneur, comme un voleur. En ce jour, les cieux
se dissiperont avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, la terre avec
les oeuvres qu’elle renferme sera consumée. »[522]
Comme tous les textes apocalyptiques, ce texte parle en premier lieu de notre
mort individuelle. Mais il décrit aussi la fin de notre planète. Dieu ne voudra
pas la laisser subsister car elle est souillée tout entière des restes de nos
péchés. Rien ne devra demeurer des immenses cités où l’homme a si rarement vécu
pour son prochain. Personne ne regrettera les cathédrales gothiques[523]qui
furent construites comme toute œuvre humaine dans un mélange de sainteté et
d’orgueil, et dans lesquelles on priait si mal au temps où Dieu se cachait dans
son eucharistie. Personne ne voudra garder les immenses bibliothèques puisqu’on
lira les sciences à livre ouvert sur le visage de Dieu et dans la science des
anges. Il ne devra rien subsister du monde ancien, pas pierre sur pierre[524],
car le monde nouveau le remplacera. Même les oeuvres faites par Dieu pour cette
terre disparaîtront. Les textes des Évangiles seront brûlés par le feu dont
parle saint Pierre*[525].
Nous n’en aurons plus besoin. Nous aurons le Christ lui-même, présent devant
nos yeux. Les constructeurs des cathédrales seront à nos côtés, vivants et
prêts à construire plus beau.
[Chose certaine
mais inimaginable pour le concret]
Après la destruction de la terre, Dieu commencera à façonner un nouvel univers. Il s’agira d’un univers physique, tout autant que notre corps, mais adapté à sa nouvelle vie. Il sera donc comme lui éternel, délivré de toute corruption et génération, dispensé de cette loi de désagrégation (l’entropie) qui nous tient actuellement. C’est Dieu lui-même qui, en le soutenant comme il soutiendra notre corps et le dispensera de se nourrir, le rendra incorruptible. Nous comprendrons à cette heure l’utilité des milliards de mondes dont nous apercevons la lumière la nuit par temps clair. Il existe des milliards d’étoiles parce que ces mondes sont préparés pour nous après notre résurrection. Nous pourrons les visiter et qui sait ce que Dieu y aura préparé en beauté, nouveauté et féerie ? Ces mondes sont-ils habités par des créatures spirituelles ? Rien dans la révélation ne nous permet de l’affirmer ou de le nier. De grands théologiens ont répondu non à cette question, affirmant que nous étions le centre du monde. La preuve de ce fait leur paraissait sauter aux yeux puisque le Verbe de Dieu s’est fait homme « pour nous ». La réponse est solide au moins en apparence. Mais elle oublie un détail. Si le Verbe s’est incarné[526], c’est qu’il est capable de folies d’amour dont personne ne peut soupçonner la limite. Rien ne l’a empêché de créer des anges et de les conduire à la vision béatifique en un instant, dès le premier acte de leur amour pour lui. De même qui peut affirmer en son nom qu’il est certain qu’il n’a pas mis, en chacune des milliards de galaxies, des êtres dotés de vie spirituelle qu’il destine à être nos compagnons de bonheur pour toujours ? Nous ne pouvons savoir avec certitude qu’une chose : s’il les a créés, c’est qu’il veut se donner à eux comme à nous et aux anges, dans le bonheur de sa présence. Comme à nous et aux anges, il ne demandera qu’une condition, humilité et amour offert en retour.
[Chose certaine]
La résurrection de tous les morts,
« des justes et des pécheurs » précédera le Jugement dernier (…)
C’est face au Christ qui est la Vérité que sera définitivement mise à nu la
vérité sur la relation de chaque homme à Dieu. Le jugement dernier révélera
jusque dans ses ultimes conséquences ce que chacun aura fait de bien ou omis de
faire durant sa vie terrestre. « Tout le mal que font les méchants est
enregistré – et ils ne le savent pas. Le Jour où Dieu ne se taira pas. »[527]
Alors
tout sera accompli. La vie éternelle, dans la Vision qui rend bienheureux, sera
un repos perpétuel et une activité de chaque instant. Les trésors de Dieu
seront entièrement ouverts à ceux qui l’aimeront. En le voyant, ils verront
d’un seul regard toute son oeuvre. En même temps, ils visiteront le monde et
chacun de leurs frères, lisant dans les cœurs comme dans un livre ouvert. Nous
n’aurons pas honte d’être compris de l’intérieur, jusque dans nos secrets du
passé puisque nous n’aurons plus d’orgueil et que les autres n'auront plus que
de l’amour. Nous serons manifestés aussi aux damnés mais ils ne comprendront
pas car l’humilité est une aberration pour celui qui ne pense qu’à briller.
Moïse ne cachera rien de sa vie, de ses grâces et de ses faiblesses passées. Il
sera face à la petite sainte Thérèse et au nourrisson mort sans avoir connu la
terre. De même, chacun au Ciel pourra voir les damnés, anges et hommes. On se
réjouira de leur liberté et on respectera leur choix. Eux, pourtant, seront
séparés du reste du monde en raison de leurs propres désirs car ils ne
supporteront pas la présence des saints. Ils vivront entre eux ou seuls, se méprisant
les uns les autres, brûlés par la soif d’amour présente au fond de leur être,
mais fidèles à leur obstination. Eux aussi comprendront les raisons du monde et
les oeuvres de Dieu et ils ne cesseront de les rejeter. Ce sera un Jugement général et éternel de tous sur
tout. Il sera complet dès le premier instant de la vision béatifique, et
pourtant renouvelé à chaque instant.
Le
jugement général n’est pas comme le jugement particulier. Il ne consiste pas en
un choix du bien ou du mal, aboutissant à une bénédiction* ou une acceptation de la part de Dieu. Il est un jugement
de discernement sur toutes choses, à la lumière de Dieu. Le passé obscur de la
terre apparaîtra dans toute son unité. Pourquoi Dieu se cachait-il ?
Pourquoi laissait-il le mal se répandre sur terre ? Pourquoi la mort des
enfants, la souffrance des innocents et des coupables ? Les mystères de
l’histoire humaine, les interconnexions qui ont conduit aux guerres, le rôle
occulte du démon qui manipulait les foules, de Dieu qui permettait bonheurs et
malheurs, tout apparaîtra en une vision unifiée. Alors se réalisera la
prophétie de Jésus.
« Heureux les affamés et assoiffés de
la justice,
Car ils seront rassasiés. »[528]
Il suffit
d’aimer
Le Christ enseigne qu’il n’y aura plus de mariage dans
l’autre monde[529].
Cette parole pose parfois problème à ceux qui s’aiment. Ils peuvent se
rassurer. Elle ne veut pas dire que la femme n’aimera plus son mari au Ciel ou
la mère son enfant. Bien au contraire, ces amours et leur motif terrestre
demeureront comme ils demeurent aujourd’hui entre Marie*, Joseph et Jésus.
Mais, dans la Vision béatifique, le cœur de chacun s’ouvrira à l’infini au
point que l’amour qui unit chacun à chacun sera plus grand que le plus beau des
mariages terrestres. On sera en fait infiniment
marié avec tous, chacun étant aimé pour lui-même en Dieu. Loin de détruire
l’amour de la terre, cet amour divin le transfigurera dans des proportions
infinies. Cette communauté parfaite, l’Église du ciel, sera une véritable communion des saints.
« Et ils verront sa Face,
Et son Nom sera inscrit sur leur
front.
De nuit, il n’y en aura plus.
On se passera de la lampe pour
s’éclairer
Car le Seigneur Dieu répandra sa
lumière,
Et ils seront Rois pour les
siècles des siècles. »[530]
Une
telle précision sur le destin futur de l’humanité étonne. D’où l’auteur tient-il
cela ? Aurait-il des entretiens secrets avec l’autre monde ? Dans ce
chapitre, je voudrais expliquer, à ceux qui se posent la question
intellectuelle de mes sources, à quel point le théologien doit aussi être un
philosophe, un sociologue et un historien. De plus, il se doit d’être modeste
et prêt à modifier ses vues car ses déductions sur l’avenir intègrent beaucoup
d’éléments d’incertitude.
Trois
sources permettent d’approcher au mieux les évènements à venir. D’abord les
enseignements de la foi ; ensuite ceux des révélations privées* confirmées par
l’Église ; enfin, ceux de la philosophie et de l’observation de
l’humanité. La troisième source est indispensable. Elle est aussi la plus incertaine.
Les
textes év
– Passer beaucoup de temps, des années
s’il le faut, à fréquenter l’Esprit Saint par la prière et la réflexion pour se
familiariser à sa manière d’agir. La prière rend sa présence intime. Elle fait
sentir (sensus fidei) ce qui est vrai ou faux. La méditation,
c’est-à-dire l’observation à l’aide de l’intelligence, permet de comprendre le
futur par le passé. Il faut observer en premier lieu ce qu’Il a fait pour Jésus
car ce sera ce même Esprit Saint qui préparera et accomplira l’histoire de la
fin du monde[531].
L’Esprit Saint se résume à un esprit d’humilité en vue de l’amour (Agapè).
– Avoir le sens de la croix : Tout ce
que fait l’Esprit Saint pour sauver l’homme individuel ou les communautés humaines
est marqué du signe de la croix. La raison en est justement cette histoire
d’humilité et d’amour. Qui connaît mieux l’humilité que celui qui a un jour
souffert ? Qui est mieux disposer à aimer que celui qui est humble ?
La croix est une sagesse de souffrance et de mort. « En vérité, disait Jésus, si le grain de blé ne
meurt pas, il reste seul mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits »[532],
en humilité, en soif de Dieu, parfois même en charité et donc en Vie éternelle.
« Elle est scandale pour les Juifs et folie pour les païens. »[533]
Elle est scandale, mais réalité. Il suffit de se pencher sur l’histoire du
passé. Rien ne subsiste des réalités du passé, même celles que Dieu avait
voulues lui-même comme le Temple de Jérusalem. Les plus belles jeunes filles
sont déjà fanées. Jésus marque tout ce qu’il touche de cette sagesse de la
croix. Doit-on appliquer cette sagesse à l’humanité entière pour la fin du
monde ? On serait effectivement tenté, en observant le passé disparu,
d’interpréter la croix pour la fin du monde dans le sens le plus dur. Sous un
texte dont la lettre annonce bataille et terreur, il peut signifier tout autre
chose qu’une guerre extérieure.
En plus de cet aspect de connaissance affective, il existe
la Révélation d’un contenu intellectuel. La seule autorité qui de manière
absolue est certaine en cette matière, c’est la parole du Dieu unique et
éternel.
Lorsque
Jésus, le Verbe de Dieu fait homme, eut accompli son oeuvre, il communiqua à
ses disciples l’Esprit Saint de manière telle que rien d’essentiel ne leur fut
caché de l’avenir. Ils comprirent en plénitude l’Évangile et les projets de
Dieu. Saint Thomas d’Aquin dit que cette compréhension totale ne reviendra sur
terre que dans les temps de la fin. Les apôtres laissèrent des écrits. Leurs
textes ne doivent cependant pas être lus n’importe comment. Ils sont écrits en
mots humains. Traduire des vérités infinies par l’analogie de mots limités est
évidemment réducteur. C’est pourtant le pari que Dieu a fait en s’adressant aux
hommes à travers les paroles de divers prophètes, puis en se faisant lui-même
homme. Je me suis servi des textes explicites de la Bible à chaque fois que
cela a été possible. Mais, il faut le reconnaître, je ne l’ai jamais fait de
manière matérielle.
En effet,
certains textes sont purement symboliques (ceci n’exclut pas qu’ils se
réalisent parfois historiquement à telle ou telle époque).
Exemple : « Une bête apparut.
Elle avait sept têtes et dix cornes. »[534]
Le sens littéral de tels textes est
multiple. C’est le propre des symboles. Ils s’appliquent à chaque époque. Ainsi
fonctionne dans son ensemble l’Apocalypse de saint Jean. Elle parle non
seulement de la fin du monde, mais de la fin de chaque génération, de chaque
humain individuel, de la fin des cités, des entreprises humaines etc. Inutile
donc de vouloir appliquer les passages qui la composent à tel ou tel événement
historiquement daté à l’exclusion des autres. La bête, par exemple signifie aussi bien l’Empereur romain Néron,
qu’Hitler, nos propres péchés capitaux, etc.
D’autres
prophéties ont d’abord un sens historique[535]
(sans exclure cependant un sens symbolique).
Exemple : « De ce temple, il
ne restera pas pierre sur pierre. »[536]
Le Temple de Jérusalem fut physiquement détruit en 70 après Jésus-Christ comme
Jésus l’avait annoncé. C’est le premier sens. Pourtant, ce sens historique
n’exclut pas l’autre, Jésus lui-même en informe ses disciples. Le vrai temple était son corps qui devait
mourir et, trois jours plus tard, ressusciter. Toutes les prophéties de
Jésus concernant le peuple juif sont de cette catégorie. Leur sens littéral est
d’abord historique. Elles sont du même ordre que la parole d’Isaïe :
« Voici, une vierge est enceinte ! »[537]
On le voit, la théologie de l’Église ne donne pas seulement une vision générale
du projet éternel de Dieu. Elle parle aussi du concret. Elle annonce certains
éléments du futur avec certitude.
Les
textes de cette catégorie sont dispersés partout dans l’Écriture, depuis les
évangiles jusqu'aux épîtres. Certains font même référence à des prophéties de
Daniel dans l’Ancien Testament. Il est possible de distinguer ces deux sortes
de prophéties par leur style, leur contexte. Mais un tel travail exige une
bonne connaissance des mentalités orientales. L’erreur est possible. Au cours
de cet ouvrage, je me suis efforcé de ne pas en oublier un seul.
î [?] Un principe
doit être retenu : Plus on
s’approche du concret, plus l’erreur est possible. Plus on reste dans des généralités,
abordant par exemple les questions du projet de Dieu, de la croix qu’il
maintient dans l’histoire pour sauver l’humanité, plus on est dans les choses
certaines …
Tout au long de cet ouvrage, je me suis efforcé de distinguer, soit en note soit dans le texte, ce qui était sûr de ce qui était probable. Mais, en ne perdant pas de vue le principe ci-dessus, il est possible à chacun d’entrer dans cette liberté de la recherche, incarnée dans une observation quotidienne des évènements de l’actualité.
Exemple : Il est certain, de manière infaillible, qu’il est inutile d’annoncer le retour final du Christ, celui qui se produira historiquement à la fin des générations, avant que ne soient réalisés un certain nombre de faits historiques : « L’Église de la dernière génération subira d’abord un sacrifice comparable à la passion du Christ. Son offrande d’amour et d’humilité provoquera le retour du Christ. À cette époque, un dernier Antéchrist* régnera. Il se distinguera des autres par le fait que son gouvernement politique sera mondial. Ce sera, humainement, une époque de paix et de gloire. Au Ciel, ce sera la plus grande détresse car, en cette époque, beaucoup risqueront de se perdre pour l’éternité. » Ceci constitue une vérité sûre car elle est non seulement explicitement rapportée par l’Écriture[538], mais elle fut confirmée à la fin du xxe siècle par le Magistère ordinaire de l’Église[539].
Mais, si l’on veut entrer dans les détails de cette
prophétie, dans le concret de sa réalisation, le scénario devient simplement probable[540].
Il n’est obtenu que par voie de déduction, compte tenu de la connaissance des
méthodes habituelles de Dieu et de la psychologie des hommes.
Exemple de cette probabilité : J’affirme à un moment que « le dernier
Antéchrist, celui qui triomphera à la fin du monde, révélera explicitement au
monde Lucifer* et son projet, ce projet même qu’il présenta en toute lucidité à
Adam et Eve à l’origine du monde. »
Avec d’autres théologiens, je l’ai sorti de la lettre des textes de l’Écriture.
C’est très probable. Mais tant que l’Église ne l’aura pas solennellement
confirmé, ce n’est que probable.
Pierre, évêque de Rome
L’Écriture
Sainte comme les apparitions laissent beaucoup d’incertitudes. Les textes sont
parfois symboliques, parfois ils sont à prendre au sens littéral. Comment ne
pas se tromper ?
Un dernier moyen utile et pratique a été prévu par Jésus avant sa passion. Il s’agit de
la personne de Pierre. Il existe un charisme particulier, donné à un homme
marqué du sceau de l’autorité, pour confirmer ses frères dans leurs
interprétations laborieuses. Jésus l’affirme à Pierre, le premier pape :
« J’ai prié pour que ta foi ne défaille pas. Quand tu seras revenu (de ton
reniement), affermis tes frères. »[541]
Qu’on y croie ou non, on est obligé d’admettre que même les papes les plus
corrompus sont restés infailliblement fidèles à la même foi. Ils ont établi
fidèlement les dogmes de l’Église, par centaines.
Étant
catholique, j’ai fait le pari d’écouter l’Église dans la voix de Pierre. Ce
n’est pas à la mode de nos jours. Pourtant, à l’intersection de trois chemins
(Écriture, Enseignement des saints, Confirmation de Pierre*), j’ai trouvé quelque
chose d’unique. Là, la Lumière et l’Amour, qui sont les marques de Dieu,
s’unissaient.
Certains dogmes sont, il faut le reconnaître, difficiles à
comprendre et à accepter. Ainsi, celui du martyre final de l’Église. On n’admet
pas sans tremblement que le Temple créé par Dieu finisse un jour lamentablement,
à l’image du Christ crucifié. L’Écriture semble nier cette affirmation :
« Les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur mon Église. »[542]
Cependant, et c’est le propre de la foi, il faut avoir l’audace en toute
confiance d’adhérer à la vérité de cet enseignement. Si Pierre a parlé, c’est
que l’Esprit Saint a confirmé par sa bouche. Des contradictions apparentes sort
toujours la lumière, comme de deux silex qu’on frotte.
Le Magistère de Pierre et de ses successeurs s’est peu
exprimé sur les mystères de la fin du monde. Au cours des deux mille ans
d’histoire, il s’est contenté de condamner deux erreurs : le millénarisme (comme si le Christ
devait régner physiquement mille ans sur
terre ! L’Église a sans cesse rappelé que ces mille ans[543]
étaient le symbole de sa présence
cachée jusqu’au cœur des plus grands malheurs). Le messianisme temporel (comme si le paradis céleste était possible
ici-bas, à travers un gouvernement humain !) a été condamné comme une utopie
dangereuse car source des pires idéologies politiques (marxisme par exemple) ou
religieuses (sectes apocalyptiques).
Cependant, en 1992, et sans doute pour la première fois,
Pierre nous a donné un nouvel enseignement doté de son autorité ordinaire pour
confirmer la foi[544].
Ce texte est essentiel car il donne en une page tout l’esprit de la fin du
monde et de la fin de toute chose. Il peut se résumer ainsi : « Tout
passera par la mort, même l’Église. Si le grain de blé ne meurt pas, il
reste seul. Mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits[545].
Car toute créature spirituelle, toute communauté humaine se doit d’apprendre,
comme Jésus, l’humilité. Alors tout sera exalté dans la vie éternelle, même
l’Église et, avec elle, l’humanité. » Ce texte, déjà cité au cours du
livre, mérite d’être répété ici. Il est la clef de tout :
« Avant l’avènement du Christ, l’Église doit passer
par une épreuve finale qui ébranlera la foi de nombreux croyants (…) L’Église
n’entrera dans la gloire du Royaume qu’à travers cette ultime Pâque où elle
suivra son Seigneur dans sa mort et sa
Résurrection. »[546]
Il existe une seconde source, qui nous est commune avec les
orthodoxes. Il s’agit des saints canonisés et, en particulier, des docteurs de l’Église.
Il s’agit aussi des apparitions officiellement reconnues par l’autorité de l’Église.
On a
souvent dit que la canonisation des saints et la reconnaissance des apparitions
n’engageaient pas la foi. Précisons les choses. Il est vrai qu’une canonisation
ne constitue pas un nouveau dogme, un
nouvel article de la foi ou de la morale. Tout avait été révélé à la mort du
dernier des apôtres, saint Jean. Il n’est donc pas question de croire en la
sainteté de Vincent de Paul comme on croit à l’existence d’un purgatoire après
la mort. Appuyé sur cela, beaucoup de théologiens s’efforcent de ramener à du
secondaire les saints ou les apparitions reconnues de manière canonique. Ils
ont tort et ce pour deux raisons :
–
D’abord parce
que, lorsque l’Église canonise un saint ou reconnaît une apparition, elle
engage son autorité. « Il s’agit d’une autorité ordinaire qui requiert, de
la part des croyants, la soumission religieuse de la volonté et de
l’intelligence. »[547]
Le Cardinal Ratzinger le rappelait récemment, lorsqu’il expliquait les
différents niveaux de l’infaillibilité du Magistère[548] :
« La canonisation des saints engage l’Église eut égard aux vérités liées à
la
Révélation par nécessité historique. On doit les tenir pour définitives. »[549]
Pire encore, la procédure de canonisation nécessitant un miracle reconnu comme
d’origine divine, c’est Dieu lui-même qui engage son autorité. Le mépris où est
tenu une telle reconnaissance est plus qu’une erreur théologique, c’est une
folie. Il est donc abusif d’affirmer que nul n’est tenu de considérer avec
confiance la vérité de la sainteté de tel homme ou la réalité d’une apparition
reconnue de la Vierge Marie* (Lourdes par exemple). Nul n’est tenu d’y croire
comme à un dogme de la foi. Il s’agit d’y croire comme à la manière dont,
historiquement, Dieu a incarné cette vérité dans l’histoire d’un homme ou d’une
époque.
– Ensuite parce que ces deux sources, si
elles n’apportent rien de nouveau concernant le contenu de la foi, apportent vraiment du nouveau en ce qui concerne le contenu de
l’espérance. Elles sont essentielles quand il s’agit de disserter
sur le concret, sur l’action de Dieu dans telle ou telle époque. Elles
permettent de comprendre comment Dieu va appliquer ici et maintenant son plan
général qui ne vise qu’au salut du plus grand nombre.
Aucune
apparition n’est reconnue, nul homme ne peut être canonisé si les trois
critères suivants ne sont pas réalisés :
1- La conformité de ce qui est enseigné avec la foi catholique.
2- La sainteté intérieure de l’apparition ou du saint, c’est-à-dire dans l’ordre d’importance, le fait que transparaissent l’amour de charité, l’humilité et la droiture des vertus morales.
3- La
réalisation, concrète et vérifiable, après la mort du saint ou à la fin des
apparitions, de quelque miracle remarquable. La définition du miracle est
précise en théologie. Elle ne se confond pas avec le prodige parapsychologique.
Il s’agit d’un phénomène qui dépasse les lois de la nature et qui vient nécessairement
de Dieu[550].
Si Dieu manifeste qu’il bénit* de cette manière certains théologiens morts ou
telle apparition, c’est que l’enseignement qui en ressort doit être plutôt bon
et vrai.
Appuyée sur ces saints qui sont ce qu’il y a de meilleur
dans la Tradition de l’Église, la théologie n’a cessé de s’approfondir. À
chaque fois que cela m’a été possible, je me suis appuyé sur les saints :
saint Thomas d’Aquin pour l’ensemble de la théologie, saint
« Foi
et raison doivent, comme deux affectionnées, marcher ensemble. » Ainsi
s’exprimait saint François de Sales pour qualifier la théologie catholique. Un
théologien est donc fondamentalement philosophe. Il sait que Dieu n’a pas créé
son intelligence et son sens de l’expérience pour qu’il les bannisse de ses
recherches.
Or
l’histoire des hommes est dépendante de nombreuses influences.
1- Certaines échappent totalement au raisonnement. Elles sont
contingentes et, à moins de recevoir
une révélation de Dieu, inconnaissables. Ainsi en est-il de ce qui dépend,
d’une part, totalement de la liberté (celle de Dieu ou celle d’un homme), et,
d’autre part, du hasard.
Deux exemples : Dieu avait annoncé
explicitement dans l’Écriture la venue de pestes et de guerres, ainsi que de
plusieurs Antéchrists[552].
Mais qui pouvait, en 1346, prévoir l’arrivée de la peste noire, soit un an
avant son arrivée ? Cette date était imprévisible pour deux raisons. Dans
l’apparition de la peste noire en 1347 sont intervenus deux critères échappant
au raisonnement : le hasard d’un navire contaminé ; une permission de
la liberté de Dieu.
Autre exemple : Qui pouvait deviner
que l’un des plus grands Antéchrists serait allemand ? Personne sauf par
une révélation expresse de Dieu. Sainte Odile en reçut révélation dès le viiie siècle[553].
Mais qui pouvait prévoir qu’il s’appellerait Adolf Hitler ? Personne car Dieu s’est réservé cette
connaissance.
Il en est de même pour les
passages de ce livre qui traitent du futur. J’ai pu en décrire certains aspects
généraux avec une bonne probabilité théologique. J’y ai été aidé par les écrits
de ces saints ou à travers le message d’une apparition reconnue. N’étant pas
moi-même éclairé par le Ciel, je suis obligé d’admettre que je ne connais rien
des aspects particuliers comme l’époque et le nom du dernier Antéchrist. Ce
sont des futurs contingents que Dieu se garde.
2- Certaines influences qui font l’histoire sont par contre
liées à des lois sociologiques connues. Exemple
: que la génération des enfants des Nazis ait été influencée, par opposition à leurs pères, par le gauchisme
pacifiste, antipatriotique, cela pouvait être déduit dès 1945 de la
connaissance de « l’effet balancier » (Tout excès provoque l’excès
inverse).
Chaque
fois que c’est possible, en m’appuyant sur des lois sociologiques semblables à
celle-ci, j’ai pu annoncer avec une certaine sûreté des évènements du futur.
Déduction logique : « Il est probable que les religions seront
un jour rejetées dans leur ensemble avec horreur par les hommes, à cause des
erreurs et des violences de l’une d’elles, l’islam*. » J’ai écrit
cela en considérant avec inquiétude, depuis 1979, la montée de la haine à un
tel niveau qu’elle ne peut que provoquer son effet de violence. Il est probable
que les meilleurs connaisseurs de l’Allemagne le pressentaient aussi dès 1933.
Quant au rejet des religions, par comparaison avec 1945-1968, j’ai écrit qu’il
se produirait environ vingt-cinq ans après la fin des malheurs ou de la grande
guerre de l’islam, le temps qu’une nouvelle génération grandisse[554]. Ce travail n’a rien de prophétique. Il est essentiellement
philosophique. C’est pourtant loin d’être une science exacte car, je l’ai dit,
l’histoire est aussi faite de hasards, de liberté. La survenue de telles
réactions sociologiques est probable car la plupart des hommes, les foules
humaines, suivent le courant dominant de leur époque. Mais je l’ai qualifiée
d’indécise car il se peut qu’un évènement inimaginable retourne l’histoire.
Aliah : Retour à Jérusalem. Il s’agit d’une des
promesses explicites de Dieu envers Israël avant la fin du monde. Elle s’est
réalisée en partie à partir de 1948. Mais elle s’applique aussi à l’Église à
travers la papauté. Elle constitue l’un des grands signes de la fin de
l’Église, car il ne convient pas qu’un prophète meure hors de Jérusalem.
Le dernier pape offrira son sacrifice à Jérusalem que saint Pierre avait quitté
en 50 ap. J.-C. (pour Israël, voir chapitre 5. Pour la papauté, voir chapitre 7, l’Église du silence).
Allégorie : L’Écriture contient nombre d’histoires,
anodines en apparences. En fait, sous leur lettre, se cache une prophétie
souvent très précise et spirituelle de plusieurs événements futurs. Ces
histoires sont des allégories. Exemple : « Dieu fit tomber Adam dans un sommeil mystérieux puis, de son
côté, il tira la femme. » (Genèse 2, 21) « Dieu fit tomber le
Christ dans le sommeil de la mort. De son côté percé par la lance jaillit la
femme nouvelle : Marie, l’Église, mères de tous les vivants. »
(Jean 19, 34) Utilisés avec prudence, les textes permettent donc souvent de
connaître l’avenir et ce avec grande précision.
Antéchrist : Ante signifie
"avant" en latin. Mais antéchrist se dit en latin antichristus,
et en grec antichristos, c'est-à-dire tout simplement
"anti-Christ". Il n'y a aucun sens temporel. D'après le
Blaise-Chirat, antichristus, ou antechristus, est employé par les pères de
l'Eglise au sens général d'ennemi du Christ, en parlant des hérétiques ou des
persécuteurs] Il se distingue de son idéologie, appelée dans les Écritures l’esprit de l’Antéchrist. L’Antéchrist
est tout homme qui incarne à telle ou telle époque l’idéologie anti-chrétienne
(orgueil et égoïsme au lieu d’humilité et amour). À la fin du monde, le
dernier Antéchrist poussera jusqu’au sublime le culte de l’orgueil et de
l’égoïsme humain. L’Antichrist (celui qui
lutte contre le Christ) est le même mot en grec. (Voir chapitre 6).
Anne-Catherine
Emmerich (1774-1824) : Stigmatisée allemande, diocèse de
Westphalie. Ses visions de la vie de Jésus et ses prophéties sur le destin et
les épreuves de l’Église sont célèbres. Elle a été béatifiée par le pape
Jean-Paul II, le 3 octobre 2004, ce qui confère à ses visions une réelle
autorité. Voir Les visions
d’Anne-Catherine Emmerich, Téqui, 1965 (3 volumes).
Apocalypse de saint Jean : Dernier livre canonique de l’Écriture
Sainte. Son style est celui du récit d’un rêve fait par Jean. Il est rempli de
significations symboliques. Ses métaphores n’annoncent donc pas un seul événement
de l’histoire mais s’appliquent tout au long de l’histoire des individus ou des
communautés humaines. C’est de cette manière qu’il est utilisé au long de cet
ouvrage. Ce n’est qu’en un dernier sens et avec grande prudence qu’un passage
peut être appliqué spécifiquement à tel ou tel événement précis de l’histoire.
Apostasie : C’est le fait de renier sa foi après en
avoir vécu. Les chrétiens comme les musulmans ont reçu l’annonce explicite
d’une apostasie de masse vers la fin du monde. Jésus affirme que cela se fera
dans son Église à cause de la perte de l’amour de Dieu et du prochain. Mahomet
l’annonce pour l’islam du fait d’un échec militaire gravissime vers la fin du
monde, accompagné de la perversité de certains de ses descendants arabes et de
la perte de toutes les constructions politiques de l’islam (Voir chapitres 4 et
5).
Apparitions et révélations
privées : Elles n’apportent jamais rien en ce qui concerne le
contenu de la foi. La Révélation a été close à la mort de saint Jean,
vers 90 après Jésus-Christ. Lorsqu’elles sont canoniquement reconnues, elles
sont importantes pour connaître l’application du gouvernement de Dieu à telle
ou telle génération (l’espérance). Elles apportent alors des vérités du
Ciel concrètes concernant le futur et sa signification (Voir deuxième partie, les saints canonisés et les apparitions
reconnues).
Bénir, bénédiction :
L’expression « bénédiction de Dieu » peut prendre deux sens selon
qu’il est divin ou humain. Pour Dieu, une religion ou un homme est béni s’il
est humble, petit, prêt à se livrer à l’amour. C’est du moins l’interprétation
catholique du mot. L’homme béni par excellence est Jésus sur la croix. Dans le
sens humain, habituel, mondain du terme, être
béni par Dieu signifie souvent l’inverse : gloire humaine, réussite,
pouvoir. Les Protestants américains comme les islamistes communient dans cette
conception du mot bénédiction. Dieu se sert de cette ambiguïté des sens. Il en
fait un instrument pour sanctifier les hommes. Il laisse à chacun un temps de
pouvoir terrestre pour mieux, tôt ou tard, mettre un terme à cette gloire et
plonger à travers une chute douloureuse dans l’apprentissage de l’humilité.
C’est l’explication du caractère mortel de toute réalité d’ici-bas.
Dajjal (Antéchrist
musulman) : Puissance militaire de la fin du monde. Elle sera dirigée
par un homme, le Dajjal. Son idéologie sera anti-islamique. Il
s’opposera à l’islam au cours d’une grande guerre. Il réussira et détruira les
possessions islamiques dans le monde. Le Dajjal sera lui-même vaincu par
l’apparition du Messie Jésus, fils de Marie (Voir Les signes dans l’islam, chapitre 5).
Djihad (guerre sainte
musulmane) : Commandée par Allah vers la fin de l’exil à Médine pour
reconquérir la ville païenne de La Mecque et rendre la Kaaba au culte unique
d’Allah. L’islam sunnite distingue quatre guerres saintes. 1- Contre les mécréants pour répandre
la vraie foi, 2- Contre les pervers
musulmans, 3- Contre Satan, 4- Contre ses propres vices. Pour
l’islam Wahhabite, la plus grande des guerres est non seulement militaire, mais
elle n’a aucune autre règle que
l’efficacité. Pour le Coran et les Hadith, le djihad est bien une guerre
militaire mais elle doit être soumise à des règles légales précises :
commandée par le seul Calife, respectant la vie des civils. Usant de la ruse,
elle permet selon les circonstances l’exécution des prisonniers de guerre, sans
pourtant nier l’honneur et l’humanité. Elle ne vise pas à imposer mais à proposer
l’islam. Par contre, elle vise à imposer les lois humaines justes de Moïse: interdire
le meurtre, l’avortement, la trahison, etc. (Voir L’origine de l’islam, chapitre 3).
Élie : Avec Énoch, ils sont les deux hommes dont la Bible affirme
qu’ils ne moururent pas. Énoch représente l’amour de Dieu ; Élie, le zèle
apostolique (parfois intransigeant) pour la gloire de Dieu. À la fin du monde,
ils doivent revenir et annoncer le retour du Messie. De fait, ils ne
reviendront pas personnellement. Ils sont la figure de deux témoins (plusieurs
sens sont donnés à ce mot) donnés à l’humanité pour qu’elle comprenne l’amour
de Dieu et sa propre vanité (Voir Chapitre 5).
Énoch : (voir Élie)
Eschatologie : C’est la partie de la théologie qui
étudie le mystère de la fin de toutes choses. Elle se divise en deux
parties : 1- La mort
individuelle et le destin de chacun dans l’autre monde ; 2- La mort des communautés humaines et
la fin du monde. Pour un chrétien, l’eschatologie de l’islam n’est qu’un chapitre
d’une eschatologie plus grande, celle du monde entier. Voir à cet égard un
autre ouvrage du même auteur : L’heure
de la mort.
Fatima (Apparitions de la
Vierge à) : Cette
apparition, reconnue officiellement par l’Église, a eu lieu au Portugal en
1917. Pour ce qui concerne l’eschatologie, les trois secrets révélés aux
enfants sont importants. Ils se réfèrent aux guerres mondiales (Voir les deux
premiers secrets, chapitre 4, les sept
athéismes) et au martyre final de l’Église (le troisième secret est au
chapitre 7, la fin de la papauté).
Franc-maçonnerie : Groupes philosophiques nés de l’esprit
des Lumières. Organisés sous forme de loges secrètes, ils cherchèrent dès le xviiie siècle
à réaliser le meilleur monde possible, en se libérant des dogmes chrétiens trop
pesants. D’option humaniste, ils rejetèrent finalement toute référence à Dieu.
Leur influence athée provoqua en France (GODF), puis dans le monde entier, une
accélération de l’apostasie*
religieuse et l’adoption d’une nouvelle morale du type Carpe Diem (Voir
Chapitre 4, deuxième étape).
Gog et Magog :
Bataille militaire finale de l’islam et de l’Antéchrist* (Voir Apocalypse 20, 7-9). « L’Antéchrist viendra et ira dans le voisinage de Médine. La ville
éprouvera trois secousses et, après cela, les infidèles et les hypocrites iront
trouver l’Antéchrist. » (Hadith 92, 26). Il viendra de la région du
Khorassan, en Asie, et 70 000 Juifs armés le suivront. Les diables que le
Prophète Soulaïman a enchaînés dans les mers le suivront. Les musulmans seront
vaincus. Mais ce sera provisoire. La venue de Jésus dévorera l’Antéchrist (Voir
Deuxième partie, chapitres 2 et 3).
Harmagedôn (la bataille
d’) : Voir Apocalypse 16. Je
n’en traite pas explicitement car cet ouvrage ne fait que parler du sens
profond de ce combat. Ce texte, d’abord symbolique comme tous ceux de
l’Apocalypse, ne signifie rien d’autre que ce choix final qu’est amené à faire
tout homme et toute communauté, tôt ou tard, entre l’amour de soi et la
conversion au Sauveur.
Harmagedôn est situé près de Jérusalem car cette bataille réelle quoique
d’abord spirituelle porte justement sur le choix ou le rejet de Dieu. Elle se
situe habituellement à l’heure de la mort de chacun ou, pour la fin du monde,
face à l’Antéchrist et dans le retour glorieux du Christ. en fait, cette bataille
a eu lieu historiquement à Megiddo en Israël.
Humanisme sans Dieu : Philosophie issue de la
Franc-maçonnerie*. Après les
excès des idéologies athées puis de l’islam guerrier, cette philosophie
triomphera sans doute à travers sa forme matérialiste. Elle sera l’une des
étapes de l’antichristianisme en marche vers la révélation ultime de Lucifer et
sa révolte (Voir Chapitre 4, deuxième et troisième étape).
Iniquité (le mystère de
l') : Il s’agit de la révolte première, celle de
Lucifer au commencement de la création. Le motif de cette révolte est
celui-ci : Dieu se propose de donner la première place dans la Vision
béatifique à la créature qui se montrera la plus humble et aimante. Lucifer se
révolte car il sait que, sur ce point, certaines femmes (psychologiquement
mieux disposées à cela) le dépasseront. Lucifer prétend imposer à Dieu un autre
ordre : celui de la dignité, de l’intelligence. Vers la fin du monde, un
gouvernement mondial dirigé par l’Antéchrist remettra dans l’actualité cette
religion du mystère de l’iniquité. Il s’agira du culte d’un nouveau
Messie : le dieu de la noblesse (par opposition au Dieu crucifié) (Voir
Chapitres 4, troisième étape ; et 6).
Intégrisme : Après le Concile Vatican II, ce courant
se révéla puissamment dans l’Église. Il refuse l’attitude plus humble du
catholicisme dans sa parole et sa liturgie. Il rêve du temps où elle pouvait
diriger le monde. Pour ce qui concerne l’eschatologie, la figure de ce courant
est Pierre lorsqu’il refusa de se faire laver les pieds par Jésus. Vers la fin
du monde, ces chrétiens pourtant fervents ne tiendront pas et ne comprendront
pas le martyre de l’Église, à l’image de Pierre à la croix de Jésus (Voir
chapitre 5).
Islam : Religion non créée par Dieu mais bénie* par Dieu par la suite à cause de sa
foi semblable à celle d’Abraham. Fondée comme une religion de l’épée, elle
s’est répandue par la guerre. Pour ce qui concerne l’eschatologie*, elle est sans doute l’une des
réalités symbolisées par Élie*,
l’un des deux témoins qui doivent revenir. Cette religion prendra l’épée et
périra par l’épée. À cause de ses excès, elle entraînera par réaction le monde
dans une nouvelle étape d’apostasie*
(Voir chapitres 3, 5 et 7).
Israël : Pour ce qui concerne l’eschatologie*, le peuple élu est l’une des figures les plus importantes. Son
destin politique est signe, à chaque époque, de l’état du monde. Les
ennemis de Dieu se font ennemis d’Israël et versent son sang avant d’être
vaincus. Ce fait, quatre fois millénaire, vient de ce que ce peuple, toujours
différent des autres, ne peut être supporté par l’orgueil des civilisations
quand, tout en se croyant la meilleure, elles constatent la grandeur de ce
petit peuple. Sept prophéties politiques et datables doivent se réaliser avant
le retour du Christ (Voir chapitres 5 et 7).
Jean : Pour ce qui
concerne l’eschatologie*, Jean
est la figure de l’Église intérieure, celle des fidèles qui prient. Vers la fin
du monde, cette Église sera préparée par la Vierge Marie à vivre les évènements
de la fin. Elle subsistera toujours sur terre, jusqu’au retour du Christ.
Jérusalem : Pour ce qui concerne l’eschatologie*, Jérusalem est l’image du séjour de
Dieu en proie aux attaques incessantes du mal, du démon, pour la damnation de
l’âme. Pour les chrétiens qui sont appelés à prier d’abord en esprit et vérité,
cette ville n’a pas de valeur politique mais elle est un puissant symbole
religieux et eschatologique. Vers la fin du monde, la papauté s’y éteindra car « il ne convient pas qu’un prophète
meure hors de Jérusalem ». Pour les musulmans, Jérusalem est
le troisième lieu saint de l’islam. Après sa conquête par les armées arabes, au
ixe siècle,
une mosquée au dôme doré fut construite à l’emplacement du Temple ruiné des
Juifs. Pour eux, ce Temple juif ne doit jamais être reconstruit. Les Juifs
furent maudits de Dieu après avoir voulu tuer le Messie Jésus. Vers la fin du
monde, Jérusalem sera perdue par l’islam à cause de la guerre de l’Antéchrist
qui sera lui-même juif (Voir les signes
dans l’islam, chapitre 5). Pour les chrétiens au contraire, le retour des
Juifs dans la totalité de Jérusalem est un signe explicitement rapporté par
Jésus pour annoncer, vers la fin du monde, l’étape de la fin des structures
politiques nationales. Ce signe précédera leur réconciliation avec le Christ
Jésus (Voir chapitres 6 et 7).
Jonas (le signe de) : Jonas resta trois jours dans le ventre
d’une baleine. Le Christ resta trois jours au sépulcre. De même, vers la fin du
monde, ce signe sera donné au monde. L’Église et les religions subiront un
martyre et trois jours symboliques de disparition totale (Voir chapitre
7).
Joseph (fils de Jacob) : Pour ce qui concerne l’eschatologie*, l’histoire de Joseph est une
allégorie révélant la manière dont l’Église et Israël se retrouveront à la fin
du monde. Israël reconnaîtra le Christ comme son Messie (Voir chapitre 7, la conversion d’Israël).
Judas : Pour ce qui concerne l’eschatologie*, il est la figure de cette partie de l’Église qui, vers la fin
du monde, trahira l’Évangile et livrera la papauté restée fidèle pour qu’elle
disparaisse (Voir progressisme,
chapitre 5).
Kaaba : Le sanctuaire
de La Mecque, la Kaaba, possède en son centre une pierre noire apportée par les
anges. Il serait le premier temple élevé en l’honneur de Dieu par Abraham et
son fils aîné Ismaël. À l’époque de
Mahomet, l’enceinte de la Kaaba était peuplée de plus de trois cents idoles.
Il la purifia et la rendit à Allah. Vers la fin du monde, la ville sera
détruite par les armées de l’Antéchrist. Ce choc déstabilisera l’islam au point
de créer un vaste mouvement d’apostasie*
(Voir Deuxième partie, chapitre 5).
La Mecque : La ville de La Mecque fut fondée, deux
mille ans avant
Jésus-Christ, par Abraham et son fils Ismaël, père de tous les Arabes. Située
en Arabie Saoudite, elle est le premier lieu saint de l’islam. Elle est la
ville natale du Prophète Mahomet, le siège de la Kaaba autour duquel tourne
toute la prière des musulmans du monde entier. Mahomet la conquit militairement
vers la fin de sa vie et établit le départ de toutes les conquêtes militaires
arabes. C’est vers elle que se tournent tous les musulmans dans leurs cinq
prières journalières. Ils s’y rendent en pèlerinage une fois dans leur vie.
Vers la fin du monde, la ville sera détruite par les armées de l’Antéchrist* (Voir chapitre 5).
La Salette (Apparitions de la
Vierge à) : Cette
apparition donne un secret apocalyptique important pour illustrer la complicité
d’une partie du clergé dans les grandes idéologies des xixe et xxe siècle.
Cette complicité objective, venue de l’intérieur de l’Église, a augmenté la
confusion et la ruine de l’Église (Voir chapitre 4, deuxième étape. Le secret
de La Salette est rapporté in extenso en note).
Liturgie : Pour ce qui concerne l’eschatologie*, les évolutions de la liturgie au
cours de l’histoire sont et seront signe de l’heure de l’Église jusqu’à sa
dernière liturgie, comparable analogiquement à celle du Christ au sépulcre
(Voir chapitre 5).
Lucifer : (du latin lucem fero, « je porte la lumière »). Il est
l’un des
Chérubins supérieurs. Il se révolta contre Dieu parce que la Vision béatifique
était d’abord promise aux humbles. Il proclama que sa révolte était motivée par
le sens de l’honneur du Tout-Puissant. Mikaël (de l’hébreu « qui est comme Dieu ? »),
un simple archange fidèle, manifesta avec force son mensonge et son orgueil
(Voir son histoire en note, chapitre 4, les
prophéties).
Lucifériens : Religion
de la dignité de l’homme. Ils rendent un culte et ils suivent la révolte de
Lucifer, de manière très spirituelle. Voir aussi « Satanisme » (Voir
chapitre 5, quatrième étape).
Mahdi : Le grand imam
(chef et enseignant musulman) qui doit venir vers la fin du monde, avant la
venue de l’Antéchrist*. Il
rétablira la pureté originelle de l’islam et rendra la Communauté (l’Oumma)
prête pour affronter l’épreuve finale de la guerre (Gog et Magog*). Pour les musulmans plus
spirituels, la prédication du Mahdi sera un piège. Son islam sera trop
violent pour venir de Dieu. Il sera en fait une épreuve pour dévoiler la
différence entre les vrais musulmans (qui servent Dieu) des faux (qui servent
avant tout leur gloire politique). (Voir chapitre 5).
Médine :
Deuxième lieu saint de l’islam. La jeune communauté musulmane s’y réfugia et
s’y fortifia après avoir été chassée de La Mecque. L’islam de Médine, humble,
priant et non militaire, reviendra vers la fin du monde. Vers la fin du monde,
la ville et sa mosquée sainte seront détruites par les armées de l’Antéchrist* (Voir chapitre 5).
Marie : (voir Vierge Marie)
Medjugorje (Apparitions de
la Vierge à) : Cette apparition n’étant pas terminée, elle ne peut
recevoir une reconnaissance canonique de l’autorité ecclésiastique. Cependant,
elle constitue, avec les apparitions du Rwanda et toutes les autres déjà
reconnues, un des exemples puissants de la pédagogie de la Vierge Marie. Elle
est envoyée par Dieu pour préparer, en vue des évènements de l’heure de la fin,
une Église semblable à elle et capable de croire contre tout réalisme.
Mystère de l’iniquité : Voir Iniquité.
Nations (fin du temps des) : Les nations sont un des mystères de
l’eschatologie. Elles sont purifiées comme le sont les individus (naissance,
croissance, échecs et succès puis apprentissage de l’humilité jusqu’à la mort).
Vers la fin du monde, les nations organisées politiquement seront remplacées
par un gouvernement mondial. Cet événement est lié par le Christ à la récupération
par les fils d’Israël de Jérusalem. Un scénario paraît aujourd’hui se mettre à
jour. Après sa révolte liée à la perte de Jérusalem, l’islam voudra une guerre,
la perdra et, à cause du traumatisme mondial, provoquera à la fois les
changements dans l’organisation du monde et en Terre sainte (Voir chapitres 6
et 7).
Odile (sainte) : (660-720) Elle est la patronne de
l’Alsace. On lui attribue plusieurs prophéties dont une, particulièrement
nette, qui est une vision étonnante de la Seconde Guerre mondiale et de ses
conséquences (voir le texte, in extenso, chapitre 6 concernant
l’Antéchrist).
Papauté : Pour ce
qui concerne l’eschatologie*, la
papauté et son histoire ont un rôle de signe important (voir Pierre). Vers la
fin du monde, la papauté annoncera le martyre de l’Église mais essayera de s’y
soustraire (voir chapitre 5, dernier paragraphe).
Parousie : Retour du Christ. Il reviendra, non
plus avec son corps de douleur, mais avec son corps de gloire, accompagné des
nuées du Ciel, c’est-à-dire des anges et des saints (voir chapitre 8). En le
voyant, chacun comprendra tout ce qui est nécessaire au salut.
Pentecôte d’amour : Annoncée par Jean-Paul II et par
beaucoup de mystiques, elle consiste en un dernier temps éphémère de gloire
terrestre donnée à l’Église chrétienne avant l’apparition de
l’Antichristianisme final. Elle est annoncée dans l’Écriture sous l’image de
l’entrée glorieuse de l’Église à Jérusalem, avant sa passion. L’Église, dont la
vie politique et l’histoire sont semblables à celles du Christ, vivra ce temps
d’abondante récolte. La même foule exigera son interdiction quelques décennies
plus tard (voir chapitre 5, dernier paragraphe).
Pierre : Pour ce
qui concerne l’eschatologie*, il
est l’image de cette partie de l’Église qui la rend politiquement visible dans
le monde. Elle doit imiter la vie du Christ et donner au monde, de manière
glorieuse, le signe de Jonas*
(Voir chapitre 6, fin).
Progressisme : Ce courant chrétien, né après la
Seconde Guerre mondiale, identifie l’Évangile du Christ avec la philanthropie.
Il est aussi appelé christianisme libéral. Pour lui, seules comptent la réalisation
du monde d’ici-bas et les actions sociales, souvent matérielles. La vie
monastique lui paraît une perte de temps. Pour ce qui concerne l’eschatologie*, ce courant a pour figure év
Prophétie des papes : Au cours de cet ouvrage, je ne me suis
pas servi de cette prophétie, malgré ses étonnantes concordances pratiques avec
les faits de l’histoire et les prophéties de la foi. En effet, elle n’a pas
reçu de reconnaissance officielle de la part de l’Église. Le patronage de saint
Malachie est douteux.
Attribuée
à saint Malachie (1143), un disciple de saint Bernard, elle est une liste
prophétique des papes à venir, qualifiés par une devise latine (Voir Raoul
Auclair, La prophétie des papes,
N.E.L., Paris, 1969). Elle ne donne plus après Jean-Paul II que deux
devises :
1- De gloria Olivae, la gloire de l’olivier. Elle semble
indiquer pour le règne de ce pape un âge d’or de vie spirituelle. L’olivier est
le symbole de la paix, de l’onction du Saint-Esprit. D’après le message de La
Salette, il pourrait s’agir des vingt-cinq ans d’abondante récolte. Cette
devise peut aussi concerner Israël*
qui est l’olivier franc et son destin, signe des temps : Jérusalem*, le Mont du Temple, l’Arche
d’Alliance sont-ils en jeu ? Ces interprétations sont hypothétiques car la
paix spirituelle n’est pas toujours synonyme de paix civile.
2- Enfin vient le dernier pape de la prophétie, Petrus Romanus,
accompagné de la phrase : « Dans
la dernière tribulation de l’Église Romaine siégera Pierre* de Rome. Il paîtra ses brebis dans de nombreuses tribulations. Ces tribulations
passées, la ville aux sept collines sera détruite, et le peuple sera jugé par
le juge terrible. » Cette devise se réfère au martyre final de
l’Église. Mais le retour définitif du Christ ne vient qu’après un temps de
sépulcre dont la durée est inconnue (Voir Chapitre 8, la durée du monde de l’Antéchrist).
Protestantisme : À cause
de ses fautes, l’Église catholique fut divisée au xvie siècle,
comme elle le fut au cours de son histoire à chaque fois qu’elle se crut
toute-puissante. Pour ce qui concerne l’eschatologie*, cette division est préférée par Dieu à une unité orgueilleuse
(Voir chapitre 3, fin).
Révélations privées (voir aussi apparitions) : Il
s’agit de tous les messages venant du Ciel après la Révélation publique
contenue dans les Écritures Saintes. Elles peuvent obtenir une reconnaissance
canonique de l’autorité de l’Église. Dans ce cas, l’Église y engage son
autorité (Voir deuxième partie, les
saints canonisés).
Révélation publique :
Il s’agit de l’Écriture Sainte (Ancien et
Nouveau Testaments). Elle a été clôturée à la mort du dernier apôtre, saint
Jean vers 90 ap. J.-C. Les textes eschatologiques utilisés sont principalement
le prophète Daniel, les discours eschatologiques de Jésus, les prophéties de
saint Paul et saint Jean sur l’Antéchrist (l’Apocalypse de saint Jean, texte
dont le sens premier est symbolique, est à mettre à part, voir ci-dessus). Certains
textes annoncent au sens premier littéral des évènements futurs. Bien que
l’autorité de ces textes soit la plus haute qui soit, ils doivent être utilisés
avec prudence car leur sens est souvent, de par la volonté de Dieu, multiple.
L’exemple de la fameuse parole de Jésus : « Détruisez ce Temple, en trois jours je le rebâtirai »
le prouve. Il parlait certes du Temple de Jérusalem, détruit de fond en comble
40 ans après sa mort et peut-être un jour rebâti… Il parlait aussi de son
corps, et peut-être aussi du nôtre face à la mort, et des cathédrales
gothiques, des générations humaines, etc.
Satanisme : Mouvement philosophique athée
centré sur le culte de l’homme (666). Sera-t-il, avec les courants lucifériens,
le dernier antichristianisme avant la fin du monde ? (Voir chapitre 4,
quatrième étape).
666 : Chiffre de la bête (d’après le chapitre 13, 17-18 du livre
de l’Apocalypse). Ce chiffre symbolise le rêve éternel de l’homme de se créer
un monde parfait, en paix comme s’il était dieu. C’est le chiffre de l’homme
sans Dieu (Voir chapitre 4, la troisième étape).
Témoins (les deux) : Le livre de l’Apocalypse annonce vers
la fin du monde la venue de deux témoins. Ils prêcheront Dieu et la vie
éternelle avant d’être provisoirement vaincus par l’Antéchrist. Cette prophétie
a un sens symbolique donné à toutes les époques du monde (voir Énoch et Élie).
Concrètement, elle se réalise dans chaque génération. À la fin du monde, elle
se réalisera une dernière fois de manière grandiose (islam et christianisme,
peut-être aussi deux hommes) (Voir chapitre 5, Énoch et Élie).
Thérèse de
l’Enfant-Jésus (sainte) : (1873-1897) Sa vie et son martyre silencieux,
sa spiritualité faite de confiance est un signe puissant de la spiritualité
voulue pour l’Église vers la fin du monde (Voir chapitre 6, les signes des temps donnés par sainte
Thérèse).
Vierge Marie : Elle
fut fidèle, croyante, humble, aimante, jusqu’au pied de la croix de son fils.
Elle crut qu’il sauvait le monde, alors que tout semblait perdu. Elle est la
seule. Il s’agit d’une incroyable humilité, foi et amour tant l’épreuve était
intense. Vers la fin du monde, son rôle sera essentiel. Elle préparera l’Église
de la prière à devenir comme elle en vue du martyre de l’Église visible. Seuls
ceux qui auront une foi semblable à elle tiendront dans ces moments ultimes.
Elle a donc reçu mission, par ses apparitions, de préparer cette Église de la
fin du monde (Voir chapitres 5 et 7).
Wahhabite : Islamisme
puritain né en Arabie au xviiie siècle. Il annonce une
domination musulmane politique sur le monde entier. Pour ses membres, le
fondateur Ibn Abdul Wahhab (1703-1792) est considéré comme le Mahdi, l’imam saint annoncé pour la fin
du monde. Cette secte violente a son siège sur le trône de l’Arabie Saoudite.
Par l’argent du pétrole, elle finance l’enseignement de la jeunesse musulmane
dans le monde entier, la construction des mosquées et le terrorisme islamiste
mondial (Voir Les signes dans l’islam,
chapitre 5).
[1]. Sans compter l’islamisme wahhabite qui est
une secte apocalyptique et un cancer de l’islam.
[2]. Marc 13, 14.
[3]. Luc 21, 28.
[4]. Une remarque faite à propos de ce
livre : « Au moment de mourir, le Christ dit sept paroles puis il se
tait. Il invite au silence sur les mystères qui lui appartiennent seuls. »
Pourquoi, dans ce cas, a-t-il prononcé juste avant de mourir les discours
eschatologiques (Matthieu 24, Marc 13, Luc 21), allant jusqu’à insister :
« Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. »
(Luc 21, 33) ? Pourquoi saint
Pierre, saint Paul et saint Jean ont-ils laissé de nombreux enseignements sur
la fin du monde ? Tout cela n’est-il que spéculation ?
[5]. Ce livre n’est pas une thèse de
Théologie. Il aurait été trop lourd de rappeler, à chaque étape, le niveau
d’autorité dogmatique de chaque source utilisée. Elles sont multiples, selon la
méthode d’ouverture de Thomas d’Aquin. Mais ce travail a été fait. Voir, du
même auteur, Le Traité des Fins dernières, Paris, 1992, sur le
site Internet http://docteurangelique.free.fr.
Tout au long de cet ouvrage, des notes rappelleront la nécessité de cette
prudence critique.
[6]. Arnaud Dumouch, L’heure de la mort,
éditions Docteur angélique, 2006.
[7]. Comprendre sous le mot
« personnes » trois jaillissements de lumière et d’amour.
[8]. Leur vrai nom théologique est « le
Non-né, le Verbe et l’Amour ».
[9]. « L’humilité et l’amour de Dieu,
telles sont les deux révélations explicitement et exclusivement chrétiennes.
Nulle autre religion n’en parle de cette manière. Le fait que le Christ soit né
dans une crèche, son geste du lavement des pieds qui scandalisa tant Pierre, sa
mort d’esclave révèlent que le Dieu tout puissant, le maître et Seigneur, est
le plus humble. Il ne s’agit pas, bien sûr, de l’humilité propre à nous,
créatures et pécheurs. Il s’agit de l’humilité de celui qui, Tout-puissant et
sans péché, veut s’unir à nous comme à un égal, dans une amitié cœur à cœur.
Curieusement, ce ne sont pas les théologiens catholiques qui ont le plus
manifesté cette humilité de Dieu. Ce sont les musulmans, en en critiquant la
présence dans « les évangiles falsifiés et hérétiques de Jésus ».
Le
fait que le Verbe fait chair meure pour sauver des gens qui ricanent au pied de
la croix révèle jusqu’où va son amour.
[10]. Certaines traditions ajoutent que Dieu
créa des êtres intermédiaires dotés d’esprit et d’un psychisme mais dépourvus
de chair. Ce sont les « djinns»
de l’islam.
[11]. Ce que l’Écriture appelle « le
baptême d’eau et d’esprit ». Dans Jean 3, 5, Jésus répondit : « En
vérité, en vérité, je te le dis, à moins de naître d'eau et d'Esprit, nul ne
peut entrer dans le Royaume de Dieu. » De même, l’eau et le sang qui
sortit du côté du Christ symbolisaient ces deux qualités. Il s’agit donc d’un
mystère central de la Révélation.
[12]. 1 Rois 19, 13.
[13]. D’après saint Paul 2 Thessaloniciens, 2,
4 « tout ce qui porte le nom de Dieu », par exemple le judaïsme
(atteint dans son être même par la destruction du Temple), mais aussi, nous le
verrons, le christianisme.
[14]. Mais au commencement, il n’y avait ni
souffrance ni mort. Tout était utile pour préparer chacun à devenir humble,
sauf la croix. J’ai rapporté au début de
L’heure de la mort (op. cit.) l’histoire du monde tel que Dieu l’avait
pensé au commencement et celle du péché originel.
[15]. Luc 1, 51-52.
[16]. Cette partie intègre une lecture et une
interprétation des événements de l'histoire. Elles se situent dans la logique
de l'ensemble de la compréhension de l'Évangile. Nous espérons que notre
manière de regarder l'histoire guérira le lecteur de toute interprétation liée
à une apocalypse de peur.
[17]. Catéchisme de l’Église Catholique,
n° 673. Ce texte, publié en 1992 par le Pape Jean-Paul II, est le reflet
authentique de la foi catholique. Il a donc une très grande autorité pour la
foi.
[18]. C’est même là un des articles essentiels
de la foi, ce qui distingue les catholiques et les orthodoxes de bien des
prédicateurs réformés.
[19]. Matthieu 24, 36.
[20]. Cit. ap. Ferraris, Prompta bibl., verbo Prædicare. Mansi, Sacrorum Conciliorum collectio, t. XXXII, p.
945-947.
[21]. Jean 6, 15.
[22]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n° 675-677.
[23]. Voir décret d’introduction au Catéchisme de l’Église Catholique.
[24]. Voir 1 Thessaloniciens 5, 3.
[25]. Luc 3, 8.
[26]. Cependant, une question grave peut lui
être objectée : Si les hommes dans leur majorité se trouvent éloignés du
Christ lors de sa venue, ne seront-ils pas damnés en masse? Le fait que seuls
quelques contemplatifs comprennent de l'intérieur ces événements n’a aucune
importance si le reste du peuple se perd. Cette objection sera largement
résolue à la fin de cet ouvrage car, nous le verrons, ces épreuves seront en
fait salutaires pour la plupart !
[27]. Ce terme de théologie désigne un
renoncement volontaire à soi-même jusqu’à la mort.
[28]. Voir chapitre 5, les signes de la fin du
monde dans l’Église.
[29]. Nous ne racontons pas ici la manière
individuelle dont ces prophéties sont accomplies. Nous l’avons décrite dans le
premier ouvrage sur L’heure de la mort, même éditeur.
[30]. Extrait de plusieurs passages du Catéchisme de l’Église Catholique, 1992,
n° 671. Ce texte ne fait qu’indiquer que tout, y compris l’Église de
Dieu, sans excepter les religions, les nations, les individus, doit apprendre
ce qui plait à Dieu, à savoir lui être soumis (être soumis à la tendresse et à
l’humilité de Dieu ne signifie pas l’esclavage, nous le montrerons plus loin)
avant que vienne la fin.
[31]. Ces jours sont symboliques. Ils sont
plutôt des étapes de l’humanité dans
l’histoire de son salut. C’est pourquoi ils peuvent se chevaucher. Parfois
Dieu plonge un homme dans le premier jour, alors qu’un autre, dans la même maison,
vit du quatrième jour.
[32]. Hormis, probablement, un petit groupe de
fidèles qui s'est transmis une tradition depuis Adam.
[33]. Extrait de Starmania, Michel Berger. Cette sagesse de Dieu n’a pas disparu
aujourd’hui puisqu’il existe des justes qui n’ont pas la foi. Ils cherchent,
sans le savoir, Dieu.
[34]. La Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich,
une célèbre stigmatisée allemande du xixe
siècle, assista à la descente du Christ aux enfers après sa mort. Elle décrit
de manière saisissante les limbes où attendaient les âmes justes :
« Les limbes étaient divisés en deux cercles. Le Sauveur pénétra d’abord
entre ces deux cercles dans un lieu enveloppé de brouillards, où se trouvaient
Adam et Ève. Il leur adressa la parole et ils l’adorèrent avec un ravissement
inexprimable. Alors Jésus, au cortège duquel s’étaient joints nos premiers
parents, pénétra dans le cercle de gauche. Il renfermait les âmes des
patriarches antérieurs à Abraham. Elles avaient une notion vague de Jésus.
Certaines étaient encore tourmentées par de mauvais esprits. Celui de droite
contenait les âmes des justes qui avaient vécu depuis Abraham jusqu’à
Jean-Baptiste (le sein d’Abraham à proprement dit). On n’y éprouvait aucune
peine, si ce n’est le désir de voir l’accomplissement de la promesse. » (Visions
d’Anne-Catherine Emmerich, Téqui, 1950, Tome III, p. 370-371)
[35]. Catéchisme de l’Église Catholique,
n° 670.
[36]. Matthieu 24 et 25 et les parallèles en
Marc et Luc. Ce genre de textes semble annoncer au sens premier littéral des
événements futurs. Bien que leur autorité soit la plus haute qui soit, ils
doivent être utilisés avec prudence car leur sens est souvent, de par la
volonté de Dieu, multiple. L’exemple de la fameuse parole de Jésus :
« Détruisez ce Temple, en trois jours je le rebâtirai » le prouve. Il
parlait certes du Temple de Jérusalem (sens historique premier, littéral),
détruit de fond en comble quarante ans après sa mort et peut-être un jour rebâti.
Il parlait aussi de son corps (sens profond, historique et mystique), et
peut-être aussi du nôtre face à la mort, des cathédrales gothiques, des générations
humaines, etc.
[37]. Matthieu 24, 34.
[38]. Actes 2, 14-41.
[39]. Paul dut même le reprendre plusieurs
fois. De même, au cours de l’histoire de l’Église, les papes se laissèrent
plusieurs fois aller à la décadence.
[40]. Galates 2, 11.
[41]. Ceci devrait être présent au cœur des
apôtres d’aujourd’hui qui s’épuisent à prêcher et obtiennent (difficilement)
une ou deux conversions ici et là. Ce n’est pas toujours à cause de leur manque
de sainteté personnelle mais à cause de l’Esprit Saint qui vient quand il veut.
En effet, dans n’importe quelle foule humaine, il peut instantanément susciter
des milliers de chrétiens. Très peu de gens sont réellement obstinés dans le
mal et la moindre prédication un peu aidée par les charismes divins, touche les
cœurs. Si l’Esprit ne vient pas, c’est qu’il a ses raisons et ses raisons sont toujours
bonnes. Il saura en faire sortir du bien pour l’apôtre rendu plus pauvre et
pour les auditeurs indifférents qu’il saura rattraper au bon moment. Il a le
temps. Il peut même évangéliser à L’heure de la mort. D’autre part, une
vie terrestre passée sans le connaître n’est pas un mal absolu car elle accroît
la soif d’un salut.
[42]. Jean 21, 18.
[43]. Matthieu 24, 4-11.
[44]. 2 Thessaloniciens 2, 4.
[45]. 2 Thessaloniciens 2, 1-3.
[46]. Matthieu 24, 34.
[47]. 2 Pierre 3, 4.
[48]. Apocalypse 10, 6.
[49]. Voir du même auteur : L’heure de la mort, op. cit..
[50]. Il s’agit d’un
regard de sagesse, c’est-à-dire d’un regard sur l’action patiente et
mystérieuse de Dieu. Cette contemplation, très peu développée dans l’Église en
ce qui concerne sa propre histoire, peut être qualifiée d’histoire sainte de
l’humanité.
[51]. Luc 1, 52. Le Catéchisme de l’Église Catholique, n° 671, exprime cette même
réalité sous l’expression : ... en
attendant que tout lui soit soumis.
[52]. Cette action est décrite dans l’Ancien
Testament, Livre de l’Exode. Beaucoup d' Hébreux moururent dans le désert. Elle
n’a pas changé après la venue du Christ. Elle a simplement été expliquée. Nous
en connaissons maintenant les raisons, l’humilité qui ouvre à la vie éternelle.
[53]. Matthieu 24, 3-11, 14.
[54]. L' Allemagne au-dessus de tout.
[55]. Le film Titanic, sorti en 1999, mérite d’être revu sous cette lumière. Le
Titanic est la société en miniature. Elle est composée de trois classes, bien
séparées. Elle se fie totalement à sa technologie. Le film se termine dans la
Lumière de la Vie éternelle où les naufragés, au-delà de leurs souffrances, se
retrouvent humbles, aimants et sauvés. Il y a là une prophétie dont on ne soupçonne
pas la justesse.
[56]. Apocalypse 16, 9 : « Et les hommes furent brûlés par une
chaleur torride. Mais, loin de se repentir en rendant gloire à Dieu, ils
blasphémèrent le nom du Dieu qui détenait en son pouvoir de tels fléaux. »
« Le
préservatif est la seule prévention du SIDA », martelait-on. Ce fut un
étonnant et pitoyable combat de la part des anciens de mai 68. On criminalisait
même le pape Jean-Paul II quand, sans parler directement de cette terrible
maladie, il parlait de la fidélité dans l’amour.
[57]. Pour la France, 225 000 I.V.G. par an
depuis plus de 25 ans pour 750 000 naissances.
[58]. Matthieu 24, 9.
[59]. Luc 7, 47.
[60]. Matthieu 24, 6. Le texte est ici
interprété selon un de ses multiples sens, la guerre intérieure contre
soi-même.
[61]. L’acédie est pour saint Augustin cette
forme d’overdose des choses spirituelles qui frappe les adeptes de la vie
contemplative.
[62]. Matthieu 24, 11.
[63]. Il ne le permettra d'ailleurs jamais afin
que l’Évangile soit toujours gardé par quelques-uns sur la terre. Certains
esprits, pour nier la sainteté de l’Église, se plaisent à montrer du doigt les
compromissions, les pressions politiques des Conciles œcuméniques de cette
époque. C’est justement l’inverse. Le fait est que, depuis deux mille ans,
infailliblement, l’enseignement de l’Église romaine est resté fidèle à la
vérité prêchée par le Christ.
[64]. Genèse 11, l-9.
[65]. Dieu… ou plutôt la vanité humaine,
diraient les sociologues. Mais la sociologie ne décrit que des lois prévues par
Dieu pour le salut des peuples pécheurs. Dieu et les lois humaines ne sont,
pour le théologien, que les deux faces d’une même pièce.
[66]. Cet ensemble de détails paraîtra peut-être surprenant au lecteur. Doit-on
les mépriser comme inventions imaginaires ? Non, car dans le domaine de
l’histoire sainte de l’humanité, de sa marche vers Jésus-Christ, c’est le
mystère même de Dieu qui s’exprime. Il faut ajouter que ni les uns ni les
autres de ces détails ne se trouvent confirmés par des textes précis du
Magistère, pas plus qu'ils ne reposent sur une indéniable tradition. De plus,
point de textes scripturaires au sens littéral, mais seulement un incroyable
concours de métaphores, qui me semblent trop nombreuses pour être simple
hasard. Au lecteur de juger.
[67]. Apocalypse 3, 14.
[68]. Actes 5, 34.
[69]. Actes 9, 1.
[70]. Jérémie 7, 13-14.
[71]. Lumen Gentium,
16.
[72]. Abram ne reçut que plus tard le nouveau
nom d’Abraham.
[73]. Genèse 15, 1-6.
[74]. Genèse 16, 2.
[75]. Genèse 16, 5-12.
[76]. Genèse 21, 10-21.
[77]. Genèse 25, 12-18.
[78]. Genèse 21, 11.
[79]. Genèse 18.
[80]. Au chapitre 21, 20.
[81]. Nous en sommes frappés à l’évocation des
nombreux exemples qui jalonnent l’Écriture ou la vie des saints : Jeanne
d’Arc, demandant à ses voix si elle serait sauvée s’entendit répondre :
«Oui, par grande victoire ! » Le lendemain, elle était brûlée vive. Ses
voix lui avaient-elles menti ? Jeanne, dans un grand sanglot, le crut
d’abord. Juste après sa mort, elle comprit à quel point ses voix avaient dit
vrai, plus vrai qu’elle ne l’imaginait. Dieu n’avait pas menti mais elle avait
mal compris le sens divin du mot « victoire ». Elle ne nous l’a
certes pas dit mais les miracles qui ont précédé sa canonisation en sont le signe
le plus grandiose.
[82]. Jean 19, 10.
[83]. Voir deuxième partie, chapitre 1. Ce
mystère y est expliqué dans ses causes et ses effets, dont le plus mystérieux
est le mal permis sur la terre.
[84]. CEC, n° 675-677.
[85]. Finalement, toutes les erreurs possibles,
les pires des idéologies sont pour un temps donné « bénies ». elle
reçoivent un temps de réussite terrestre. Dieu sait se servir de leur victoire
puis de leur écroulement pour en tirer un bien plus grand. Il sauve les
victimes. Il les récupère de l’autre côté de la vie et beaucoup d’entre eux ont
compris jusqu’à la misère la stupidité de l’orgueil humain.
[86]. Genèse 11, 3-8.
[87]. 1 Rois 11, 12, 20.
[88]. Matthieu 24, 6.
[89]. Grégoire le Grand (Homélie sur
l’Évangile, Patrologie latine 76, p. 1078) a pu parler d’un monde vieillissant,
« car, que s’élève peuple contre
peuple, et que leur calamité s’étende sur le pays, cela nous le constatons
dans notre époque plus que nous ne le lisons dans les livres. Vous savez aussi
combien de fois nous avons ouï dire que, dans d’autres parties du monde, des
tremblements de terre ont dévasté d’innombrables cités. Sans cesse nous souffrons
de pestes. Et si nous ne constatons pas encore visiblement des signes dans le
soleil, la lune et les étoiles, nous pouvons du moins conjecturer qu’ils ne
sont pas éloignés, puisque déjà le climat subit des modifications sensibles.
C’est pourquoi on peut dire inversement : Quand les hommes se disent ‘Paix
et sécurité’, c’est alors que tout d’un coup fondra sur eux la perdition comme
les douleurs sur la femme enceinte, et ils ne pourront y échapper. » (1
Thessaloniciens 5, 3)
[90]. 1 Thessaloniciens 5, 3.
[91]. Voir deuxième partie, premier
chapitre : Que veut Dieu aux
hommes pour les avoir mis sur la terre ?
[92]. Luc 1, 51-53.
[93]. Livre des juges 19-20.
[94]. La réalité de ce fait est vertigineuse.
Après la mort, face à l’apparition du Christ dont l’amour et la vérité
bouleversent l’homme, tout genou devient chancelant et l'homme découvre le
profond égoïsme qui l’anime.
[95]. Le sommet du judaïsme est dans cette
conception et l’Église catholique l’a entièrement gardée tout en pensant
pouvoir, grâce à Jésus-Christ, en expliquer le pourquoi (voir deuxième partie,
chapitre un). La liturgie juive continue de chanter à propos d’Auschwitz et du
génocide des enfants : « Yahvé, tu nous as frappés car nous avions
péché. »
[96]. Deutéronome 28, 47-52.
[97]. Coran* 16, 93.
[98]. Apocalypse 13, 17.
[99]. Galates, 5.
[100]. 2 Chroniques 18, 22.
[101]. Genèse 16, 12.
[102]. Genèse 25, 18.
[103]. Genèse 16, 12.
[104]. Il est remarquable de constater que les musulmans
écrivent exactement la même chose des chrétiens. Pour eux, Jésus viendra nous
prêcher l’islam sur notre lit de mort. Il nous expliquera qu’il n’était qu’un
homme et qu’il n’est pas mort crucifié. Il balayera la croix. Alors la majorité
des chrétiens, disposés par leur religion à l’humilité, se convertiront à
l’islam. Dans les deux religions, seul un péché contre l’Esprit Saint conduit
en enfer. Le refus de croire à une vérité suffisamment révélée en est un.
[105]. Actes 16, 6.
[106]. S'il l'avait voulu, ce serait fait depuis
longtemps en raison de la puissance de l'Esprit et seuls résisteraient
aujourd’hui ceux qui en auraient fait lucidement le choix.
[107]. Car ce n’est qu’un contretemps et les
Chinois jusqu’à aujourd'hui découvrent l'Évangile dans sa perfection à l'heure
de leur mort. On peut trouver de multiples raisons à cela qui toutes se
ramènent, comme toujours, à une seule : l’humilité produite par une
division des nations en diverses cultures. C’est mieux ainsi à la fois pour le
salut de tous, chrétiens et chinois.
[108]. Voir chapitre 1, Les sept jours de l’histoire du monde.
[109]. Voir du même auteur L’heure de la mort, op. cit..
[110]. « Trompeuse » ou plutôt ambiguë
car lorsque Dieu parle de « gloire, de victoire, de salut », il
entend souvent « vie éternelle, donc humilité et son chemin, crucifixion
et humiliation ». Mais l’homme y voit ce qui lui plaît, à savoir
« succès mondain, gloire terrestre ».
[111]. Il finit par accepter le baptême afin de
mourir garrotté plutôt que brûlé vif.
[112]. Matthieu 8, 12.
[113]. Apocalypse 6, 7. Lorsque des textes de
l’Apocalypse sont cités, c’est toujours à titre d’illustration. Ils ne
s’appliquent pas, quoi qu’en pensent les
Témoins de Jéhovah, à une seule période de l’histoire mais à chaque génération.
[114]. Matthieu 21, 6.
[115]. Apocalypse 8, 1.
[116]. Isaïe 65, 17.
[117]. Apocalypse 13, 3 : « L'une de ses têtes paraissait blessée
à mort, mais sa plaie mortelle fut guérie ; alors, émerveillée, la terre
entière suivit la Bête. »
[118]. Daniel 5, 25.
[119]. Saint Thomas disait que l’amour, et les
oeuvres qui sortent de lui, méritent le Ciel de la part de Dieu qui aime le
premier.
[120]. « Donnez-moi deux attelages pour une
course de chars. Que le premier concurrent ait pour chevaux l’orthodoxie (la
vraie foi) accompagnée de l’orgueil. Que le deuxième coure avec l’hérésie
accompagnée de l’humilité. Vous verrez alors l’hérésie remporter la course, non
à cause d’elle-même mais à cause de la force de l’humilité. »
[121]. Cf. Genèse 50, 20.
[122]. Marc 9, 38 : « Jean dit à
Jésus : ‘Maître, nous avons vu quelqu'un expulser des démons en ton nom,
quelqu'un qui ne nous suit pas, et nous voulions l'empêcher, parce qu'il ne
nous suivait pas.’ Mais Jésus dit : ‘Ne l'en empêchez pas, car il n'est
personne qui puisse faire un miracle en invoquant mon nom et sitôt après parler
mal de moi.’ »
Marc
9, 40 : « Qui n'est pas contre nous est pour nous. »
[123]. 1 Rois 12, 16.
[124]. Matthieu 26, 52.
[125]. Actes 9, 3-4.
[126]. Matthieu 24, 12-14. Rappelons que ce
genre de textes semble annoncer au sens premier littéral des événements futurs.
Bien que leur autorité soit la plus haute, ils doivent être utilisés avec
prudence car leur sens est souvent, de par la volonté de Dieu, multiple.
L’exemple de la fameuse parole de Jésus : « Cette génération ne passera pas que tout soit réalisé »
le prouve. Il parlait certes de sa venue dans la gloire mais pas de la même
façon que ses auditeurs qui pensaient à la fin du monde. Lui parlait de la mort
à venir de cette génération, à travers la mort individuelle de chacun de ses
membres, etc.
[127]. 1 Timothée 4, 1.
[128]. 2 Timothée 3, 1-5.
[129]. 1 Périarchion, chapitre 3.
[130] 1 Jean 4, 3.
[131]. Une fiction parfois dangereuse et, au
plan catholique, hérétique. Qu’on se souvienne du Protocole des sages de
Sion, cet écrit attribué à des Juifs et qui prétendait décrire un plan sur
plusieurs générations visant à rendre décadents les peuples pour établir le
règne mondial d’un roi juif. Il s’agit d’un faux, produit dans un milieu
antisémite en Russie au xixe
siècle. Hitler s’en servit pour justifier sa thèse du complot judéo-maçonnique.
Qu’y pouvaient les enfants qu’il fit massacrer en masse, à cause de ce mythe.
Le vrai ennemi de l’homme est cet orgueil premier qui se cache sous tout mal.
Les francs-maçons en ont été souvent soupçonnés. En vérité, eux-mêmes ont erré
dans leur recherche du meilleur monde possible. Ils n’ont fait que naviguer à
vue, sans deviner les conséquences de certaines de leurs décisions.
[132]. Ephésiens 6, 12.
[133]. L’histoire des anges et l’origine des
démons, ces anges devenus mauvais, sont rapportées en détail plus loin dans ce
chapitre (quatrième étape, le mystère de l’iniquité). Il s’agit de la
révolte première, celle qui motiva la haine mortelle de Lucifer et de ses anges
contre l’humanité.
[134]. Matthieu 24, 12.
[135]. Tout antijudaïsme est un mauvais signe.
Les ennemis de Dieu semblent perpétuellement conduits à se faire ennemis du
peuple élu. Ceci est systématiquement vrai depuis quatre millénaires. Il n’est
en fait que le symptôme de la maladie mortelle du cœur de l’homme pour le
salut, l’orgueil. Quand une communauté nationale réussit et réalise une
structure puissante et parfaite, elle n’a plus qu’un ennemi : celui qui
est différent et vit au milieu d’elle. Elle s’en prend toujours au juif qui vit
chez elle, sous n’importe quel prétexte (ils empoisonnent l’eau ; ils sont
avares ; ils ont tué le Christ). De nos jours, l’islam est à son tour
atteint de ce syndrome. Cela ne lui apportera rien de bon. La main de Dieu
n’aime pas la nation qui s’exalte en son cœur. Il abaisse toujours l’orgueil
des puissants.
[136]. Une faute que l’histoire a tendance à
relativiser à un conflit d’hommes et non à une preuve du sectarisme
intellectuelle de l’Église de la Renaissance. En effet, tout semble indiquer
que la plupart des membres du clergé sont à cette époque plutôt ouverts à la
nouveauté, curieux de tout, parfois davantage que certains barons
universitaires actuels de la pensée unique. Mais l’histoire que je raconte ne
parle pas de vérité historique. Elle parle d’une lutte à mort d’une force
invisible contre ce qui porte le nom de Dieu, par tous les moyens y compris
ceux de l’exagération et de l’amalgame.
[137]. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, chants
et poésies.
[138]. de H.
L. Heijkoop, paru, en 1949 et 1950, dans le périodique hollandais Uit het
Woord der Waarheid, Studie- en
Contactblad voor Jongeren. Voir le site protestant http://bibliquest.com
[139]. 2
Thessaloniciens 2, 6-8.
[140]. Bern.
a Piconio, Epist. B. Pauli triplex
expost.: II Epist. ad Thess., II, 3.
[141]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich,
une stigmatisée du xixe
siècle, eut la vision de notre époque qui lui semble être l’une des pires
depuis le commencement de l’humanité. «
J’appris que Lucifer doit être déchaîné pour un temps, cinquante ou soixante
ans avant l’an 2000, si je ne me trompe. Quelques démons doivent être déchaînés
de temps en temps pour punir et tenter le monde. Je crois que quelques-uns
l’ont été de nos jours (elle parle vers 1820), d’autres le seront bientôt
après. » (Visions
d’Anne-Catherine Emmerich sur la vie
de Jésus, op. cit., tome 3, page 372).
[142]. D’après saint Paul 2 Thessaloniciens, 2,
4.
[143]. Voir Saint. Thomas d’Aquin, Opusc.,
LXVIII, De Antichr., édit. Parmæ, 1864. t.XVII
p. 439.
[144]. Lumen Gentium, 16.
[145]. Apocalypse 17,
9-10.
[146]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich*
vit ce dernier antichristianisme sous la forme de la fameuse prostituée de
l’Apocalypse : « Je me trouvais dans la maison des noces et je vis un
bruyant cortège matrimonial arriver dans plusieurs carrosses. La fiancée qui
avait près d’elle plusieurs hommes et femmes était une personne de grande
taille, à l’air effronté et avec une parure de courtisane. Elle avait sur la
tête une couronne, sur la poitrine beaucoup de bijoux, trois chaînes et trois
agrafes de clinquant auxquelles étaient suspendues une quantité d’instruments,
de figures représentant des écrevisses, des crapauds, des sauterelles, et aussi
de petites cornes, des anneaux, des sifflets, etc. » (Vie d’Anne-Catherine Emmerich, op. cit., tome 2, p. 398)
[147]. Apparition reconnue officiellement par
l’autorité de l’Église. Son message a
donc une certaine autorité sur l’espérance des catholiques, à un degré précisé
en fin d’ouvrage.
[148]. Luc 6, 22.
[149]. De telles apparitions, reconnues
canoniquement par l’Église, ont une valeur essentielle, non pour ajouter un
dogme à la foi, mais pour révéler du nouveau quant à l’espérance, c’est-à-dire
à l’action de Dieu sur telle génération. Leur rôle en théologie est expliqué
dans la troisième partie.
[150]. La Première Guerre mondiale.
[151]. Ce signe a été donné en automne 1938.
[152]. 2 Thessaloniciens 2, 6-8.
[153]. Il manque la paresse. À l’heure où
j’écris ce livre, on peut penser qu’elle sera une étape incontournable. Les
jeunes du début du xxie
siècle rêvent de gagner plus d’argent tout en travaillant moins. Le climat
général de cette génération n’est plus la révolution comme chez leurs aînés de
mai 68 mais la fragilité et le manque d’énergie. Tout cela pourrait conduire à
la pauvreté matérielle.
[154]. Malachie 2, 15.
[155]. Matthieu 23, 29.
[156] Apparition reconnue par l’Église.
Elle eut lieu dans les Alpes, auprès de deux enfants bergers, Mélanie et
Maximin. Rappelons que ce texte reçoit, du fait de sa reconnaissance canonique,
une certaine autorité qui ne concerne pas la foi mais la manière dont le plan
du salut est appliqué à chaque époque (l’espérance).
[157] Marc 8, 38.
[158]. Matthieu 5, 11.
[159]. Un massacre des innocents comme jamais au
cours de l’histoire, et l’absence totale d’une simple explication de la douleur
de Pierre sur ce sujet. On ne parle pas de l’âme de ces enfants, de leur destin
après leur mort. Il semble que le clergé a admis qu’il n’y a pas pour eux de
vie après la mort, qu’ils ne sont que des pré-humains.
[160]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich
parle sans cesse dans ses visions de la fidélité du Saint-Père et de la
complicité d’une grande partie du clergé. Ses descriptions surprendront par
leur actualité ceux qui connaissent la crise théologique dans l’Église
catholique depuis le Concile Vatican II. Elle écrit vers 1820 : « On
gardait le silence sur la croix, sur le sacrifice et la satisfaction, sur le
mérite et le péché, où les faits et les miracles et les mystères de l’histoire
de notre rédemption devaient céder la place à de creuses théories de la
révélation où l’homme-Dieu, pour être supporté, ne devait plus être présenté
que comme l’ami des hommes, des enfants et des pécheurs, où sa vie n’avait de
valeur que comme enseignement, sa passion comme exemple de vertu, sa mort comme
charité sans objet. Le manque total de doctrine devait être voilé sous un
langage naïf à la portée de toutes les intelligences. » (Vie d’Anne-Catherine Emmerich, op.cit.,
tome I, p. 415)
[161]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich
eut la vision de ce comportement perpétuel du clergé à la remorque de l’idée
dominante du temps : « Je vois chez tous, même chez les meilleurs
d’entre eux, un orgueil effrayant, mais chez aucun l’humilité, la simplicité et
l’obéissance. Ils sont terriblement fiers de la séparation dans laquelle ils
vivent. Ils parlent de foi, de lumière, de christianisme vivant. Mais ils méprisent
et outragent la sainte Église dans laquelle il faut chercher la vie. Dans leur
présomption, ils prétendent mieux comprendre toute chose que les chefs de
l’Église et même que les saints docteurs. » (Vie d’Anne-Catherine
Emmerich, op.cit., tome I, p. 536)
[162]. Daniel
12, 7.
[163]. Apocalypse 13, 17-18. Ce genre de texte a
d’abord un sens symbolique valable pour chaque époque de l’histoire du monde.
Mais il devient de plus en plus évident au fur et à mesure que l’histoire
avance.
[164]. Anecdote significative du changement de génération :
Un débat récent de la RTBF (Belgique) mettait en scène de jeunes concubins
d’une vingtaine d’années et des psychologues quinquagénaires. Ceux-ci se
scandalisaient de leur non-usage du préservatif, selon eux « indispensable même dans la vie de couple ».
Les jeunes répondaient : « Nous
avons promis d’être fidèles. Si on ne fait pas confiance, l’amour n’existe
pas. » Cette évidence était insoutenable dix ans plus tôt.
[165]. Chiffre symbolique valable à chaque
époque mais de plus en plus visible à mesure qu’approche la fin.
[166]. Genèse 1, 31.
[167]. Exode 7, 25.
[168]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich
eut la vision de l’humanisme universel sous la forme d’une Église :
« Et il apparut une nouvelle Église dans laquelle des gens, parmi lesquels
il y avait des savants, se trouvèrent rassemblés. Cette Église était ronde
(symbole d’universalité ?) avec une coupole grise et tant de gens y
affluaient que je ne comprenais pas comment l’édifice pouvait les contenir
tous. C’était comme un peuple entier. Cependant, la nouvelle Église devenait de
plus en plus sombre et noire et tout ce qui s’y faisait était comme une noire
vapeur. Ces ténèbres se répandirent au-dehors et toute verdure se flétrit.
Plusieurs paroisses des environs furent envahies par l’obscurité et la sécheresse. »
(Vie d’Anne-Catherine Emmerich, op.
cit., tome 3,
p. 157). Ces images montrent avec force l’enthousiasme des débuts puis
l’arrivée des fruits de séduction dans l’Église du Christ puis d’amertume de
tous les antichristianismes. C’est encore plus saisissant si l’on considère
l’humanisme actuel ou le culte futur de Lucifer dans sa révolte et sa liberté.
[169]. 1 Corinthiens 15, 32.
[170]. L’expérience
des sept péchés capitaux depuis 1830, les millions de morts, chapitre 4,
deuxième étape.
[171]. Consulter, pour illustrer cette
réflexion, l’évolution des débats du Grand Orient de France.
[172]. Cette charte n’est pas officielle. Ces
textes ont été extraits par l’auteur à partir de textes de l’O.N.U. et de
l’UNESCO.
[173]. Religions à vocation universaliste. Elles
ont tendance à imposer leur message. On pense à l’islam et au christianisme
dans leurs dimensions politiques.
[174]. Apocalypse 16, 8-10.
[175]. Deutéronome 8, 3.
[176]. Avertissement : Cette section pose
la question suivante : jusqu’où ira l’humanité, avant la fin du monde,
dans sa recherche d’une liberté de l’orgueil ? Comment répondre avec
certitude et précision à partir des prophéties bibliques ?
[177]. Voir le chapitre 4.
[178]. Le
dernier des prophètes canoniques, Malachie 2, 14, écrit : « Et vous dites : Pourquoi
ces malheurs ? – C’est que Yahvé est témoin entre toi et la femme de ta
jeunesse que tu as trahie, bien qu’elle fût ta compagne et la femme de ton
alliance. N’a-t-il pas fait un seul être, qui a chair et souffle de vie ?
Et cet être unique, que cherche-t-il ? Une postérité donnée par
Dieu ! Respect donc à votre vie, et la femme de ta jeunesse, ne la trahis
point ! Car je hais la répudiation, dit Yahvé le Dieu d’Israël, et qu’on
recouvre l’injustice de son vêtement, dit Yahvé Sabaot. Respect donc à votre
vie, et ne commettez pas cette trahison ! »
[179]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich
écrit : « Je vis que certains idolâtres du passé aimaient davantage
leur idole qu’eux-mêmes, avec un réel sens du sacrifice. Au contraire, certains
hommes de notre époque mettent leur propre personne au-dessus de tout ce qui
existe dans le monde. » (Vie d’Anne-Catherine Emmerich, op. cit.,
tome 3, p. 169)
[180]. C’est de cette manière que saint Augustin
définit l’intensité de l’amour qui règne dans la Cité de Dieu et qui peut tout
supporter pour l’autre, jusqu’à la croix.
[181]. 1 Jean 5, 19.
[182]. Sagesse 17, 1 et suiv.
[183]. Matthieu 24, 19 et suiv.
[184]. 2 Thessaloniciens, 2.
[185]. Cette troisième étape n’est autre que le
sixième jour. Mais il sera traité de manière plus concrète au chapitre
suivant.
[186]. 2 Thessaloniciens 2, 8. Ce texte de saint
Paul, dans son sens littéral, n’est pas symbolique ni valable pour chaque
époque. St Paul le présente comme la prophétie des événements qui précéderont
le retour du Christ à la fin des fins.
[187]. Apparition reconnue canoniquement par
l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé
en fin d’ouvrage.
[188]. 2 Thessaloniciens, 2.
[189]. Matthieu 24, 35.
[190]. Aussi, tout au long de cet ouvrage, j’ai
pris le parti de parler d’eux en termes anthropomorphiques. Il s’agit bien sûr
d’un langage analogique.
[191]. Certains théologiens sont allés plus loin
encore. Ils ont cru lire dans la Bible que Dieu était allé jusqu’à révéler aux
anges que naîtrait un jour une femme dont le cœur serait pur, l’humilité absolue,
le don d'elle-même total au point que Dieu l’élèverait au-dessus de tout et en
ferait leur reine. Dieu a-t-il révélé dès cet instant la naissance future de la
Vierge Marie ? Une chose par contre est certaine : ils ont compris
dès cet instant le projet de Dieu, faire d'eux les serviteurs et les guides
spirituels de leurs futurs frères cadets. Anges gardiens, mandatés selon un
ordre hiérarchique parfait au service des hommes, voilà quelle serait leur
mission jusqu'à ce que le dernier homme ait terminé sa vie terrestre.
[192]. Genèse 1.
[193]. Jérémie 2, 20.
[194]. Apocalypse 12, 4.
[195]. Apocalypse 12, 7.
[196]. « Qui est comme Dieu ? », c’est-à-dire, en hébreu, Mikaël. Le
fait que Michel soit un simple archange fut la première humiliation du Chérubin
Lucifer. Révolté contre Dieu, il n’est même plus intelligent.
[197]. Isaïe 14, 12.
[198]. Jean 8, 44.
[199]. Apocalypse 12.
[200]. Le démon ne désire pas premièrement
que l’homme s’autodétruise dans un holocauste nucléaire. Le meurtre du corps ne
l’intéresse qu’à cause de sa racine, le péché de l’âme. Son but premier est
spirituel. Il veut que le maximum d’humains, devenus égoïstes et orgueilleux,
choisissent avec lui l’enfer, librement.
[201]. Traduction libre de Genèse 3, 5.
[202]. Genèse 3, 14. Eux, des êtres spirituels
indifférents par nature au sexe, à l’argent, et à la vanité du regard des
autres, vautrent leur action sur l’homme dans de telles propositions.
[203]. 2 Thessaloniciens 2, 1-12.
[204]. Informations données par Denis Vlieghe et
Vincent Rossome, mai 2001.
[205]. Le seul péché qui conduit en enfer, parce
qu’il est libre, lucide et maîtrisé. Voir du même auteur, L’heure de la mort, op. cit.
[206]. Jean 23, 34.
[207]. Une apparition reconnue canoniquement.
Deux des voyants sont déjà béatifiés. Sa réalité est donc attestée par l’Église
avec une certaine autorité dont le degré est rappelé en fin d’ouvrage.
[208]. Il est évident que toutes ces révélations
privées*, même celles qui sont reconnues par l’Église, ne peuvent être mises au
même niveau que l’Écriture Sainte. Pourtant, il serait présomptueux de les négliger.
Elles révèlent à l’homme la manière concrète dont se réalise ce qui est annoncé
par l’Écriture dans l’histoire.
[209]. Il s’agit des trois secrets de Fatima,
concernant la Seconde Guerre mondiale, la guerre froide puis le martyre du
Pape.
[210]. Luc 16, 31.
[211]. Paul VI, 1968, Documentation
Catholique n° 603.
[212]. Recueil de textes, Piveteau, L'évolution, encyclopédie universitaire,
p. 10.
[213]. Le scientifique Salet estimait à 10300
le nombre d’atomes qui composent l’univers dans son ensemble et à une
chance sur 10 [puissance 5 milliards] la probabilité pour qu’un
vivant apparaisse par hasard. Son calcul reposait sur le nombre incroyable et
la précision des bases qui composent l’A.D.N. de tout vivant autonome, même le
plus simple. Il disait que ce chiffre rendait impossible l’apparition par
hasard de la vie.
Il y a autant de chance pour que le premier vivant
soit apparu par hasard que de voir un singe dactylographe écrire en tapant au
hasard, un ouvrage de 100 000 pages.
[214]. Luc 12, 54-56.
[215]. 2 Thessaloniciens 2, 5.
[216]. Voir du même auteur La grande guerre de l’islam.
[217]. Genèse 16, 10.
[218]. Genèse 21, 20.
[219]. Voir la
foi des musulmans concernant la guerre sainte, mode principal de leur
extension. Voir La Voie du musulman,
Aboubaker Djaber Eldjazaïri (Aslim éditions 1986, France), « catéchisme
sunnite officiel ».
A- Institution : L’objectif
principal du djihad est d’affronter les mécréants et les belligérants ; B-
Différentes sortes de djihad ; C- Le but du djihad : Toute sorte de
djihad tend à proscrire toute autre adoration que celle de Dieu, l’Unique, à se
dresser contre la violence et le mal, à sauvegarder la vie, les biens et
l’équité, à généraliser le bien et à répandre la vertu. Dieu dit : —
Combattez-les afin que plus aucun croyant ne soit tenté d’abjurer et que le culte
tout entier soit rendu à Dieu. (8 - Le Butin - 39) ; D- Mérite du
djihad : Le mérite du djihad et de la mort en martyr pour la Cause de Dieu
est exprimé en termes nets dans les annonces véridiques divines et dans les
hadith authentiques du Prophète.
[220]. Je rapportais précédemment la prophétie
des Incas qui les livra pieds et mains liés aux conquistadors violents et…
évangélisateurs. Des centaines d’autres exemples pourraient être rapportés, non
seulement dans la Bible mais dans l’histoire récente. En 1940, lorsque Hitler
décida de son nid d’aigle la date définitive de l’invasion de la Russie, il se
fit dans l’atmosphère une agitation étonnante. Le ciel était rouge feu et le
vent soufflait en tempête tandis que des nuages aux formes déchirées passaient dans
le ciel. Une femme présente s’écria : « Mauvais présage. Beaucoup de sang et de malheur ».
Hitler fut fortement impressionné. (Document U.S., La chaîne histoire, Hitler, homme et Mythe)
La
tradition du bouddhisme khmer gardait la prophétie suivante : « Quand le ciel rougira comme le
feuillage du banian, de l’orient à l’occident, que chacun fuie le pays car la
guerre et le malheur arrivent. » Or un coucher de soleil de ce type
se produisit peu avant la prise de pouvoir du criminel marxiste Pol Pot qui, en
quelques années, causa la mort d’un million de Cambodgiens. Une étude
approfondie de ce genre de présages ou de prophéties mériterait d’être faite,
avec les vérifications critiques d’usage. Les prophéties d’une puissante
religion comme l’islam méritent d’autant plus d’être étudiées en détail.
[221]. Voir La
mort et le jugement dernier selon les enseignements de l’islam, Fdal Haja,
Rayhane éditions, Paris 1991, p. 53 et suiv.
[222]. Il existe d’autres signes, mineurs.
[223]. Voir chapitre 7, le temps du sépulcre, le
signe de Jonas.
[224]. Tirmizzi dans « ce qu’on rapporte du
Mahdi » note qu’il tient de Ibn Mass’oud ce Hadith*: « Un homme de ma famille viendra,
son nom correspondra à mon nom ».
[225]. Les Musulmans anti-Wahhabites appellent
le Wahhabisme fitna an Najdiyyah, le
malheur venant de Nejd.
[226]. Il s’agit des habitants musulmans de
l’Arabie vers la fin du monde.
[227]. Selon Hisham al-Kabbani, né au Liban et
vivant actuellement aux U.S.A.
[228]. Ces textes paraissent-ils clairs ?
Ils sont en fait ambigus et ne provoquent pas la paix des débats en islam.
Chacun voit « l’Arabe pervers » annoncé selon ce qui l’arrange.
Pour le terroriste Oussama Bin Laden, c’est la royauté de l’Arabie Saoudite qui
a accompli l’horreur en introduisant les armées étrangères sur la terre sainte.
Pour la famille royale arabe, les pervers sont les terroristes arabes
puisqu’ils répandent le sang des femmes et des enfants par toute la terre… Pour
la majorité des musulmans Sunnites, ce sont tous les Arabes à cause de leur
sectarisme Wahhabite* (voir plus loin).
[229]. Ezéchiel 39, 9-11. Il s’agit de l’annonce
d’une grande guerre qui verra la défaite des impies.
[230]. Elle ne parle pas seulement du danger du
retour du nazisme. Cette phrase est universelle.
[231]. Deutéronome 28, 47-66. Cette prophétie a
été réalisée une troisième fois par Hitler dont, est-ce une simple coïncidence,
l’étendard était aussi l’aigle.
[232]. Isaïe 60, 10-13.
[233]. Isaïe 11, 1-5.
[234]. L’ambiguïté de Dieu vient d’abord de la
psychologie trop humaine… de l’homme. Lorsque Dieu parle de « gloire, de
victoire, de salut », il entend
souvent « vie éternelle, donc humilité et son chemin, crucifixion et
humiliation ». Seul un croyant lui-même passé au feu purificateur de Dieu finit
par s’habituer à son style et à ne plus lire « succès mondain, gloire
terrestre ».
[235]. Josèphe raconte (La Guerre des Juifs contre les Romains, livre 6, 31) : « Quelques années avant la guerre, il
se leva un pauvre homme, qui était prêtre. Il se mit à prophétiser par toute la
Judée en disant simplement : ‘Voix du côté de l’orient ! Voix du côté de
l’occident ! Voix du côté des quatre vents ! Voix contre Jérusalem et contre le
Temple ! Voix contre les nouveaux mariés et les nouvelles mariées, voix contre
tout le peuple !’ Il parlait ainsi, toujours, sans injurier ceux qui le
battaient, ni remercier ceux qui lui donnaient à manger. Toutes ses paroles se
réduisaient à un triste présage, et il les proférait d’une voix plus forte dans
les jours de fête. Il continua d’en user ainsi durant sept ans et cinq mois
sans aucune intermission et sans que sa voix fût ni affaiblie ni enrouée. Quand
Jérusalem fut assiégée, on vit l’effet de ses prédictions et, faisant alors le
tour des murailles de la ville, il se mit encore à crier : ‘Malheur,
malheur sur la ville, malheur sur le peuple, malheur sur le Temple’, à quoi
ayant ajouté ‘Malheur sur moi’, une pierre lancée par une machine le renversa
par terre, et il rendit l’esprit en proférant ces mêmes mots. »
[236]. Un troublant rapprochement des dates
s’impose. Le Wahhabisme est la plus terrible attaque satanique contre l’islam
depuis l’Hégire*. Il prend la religion par sa qualité d’honneur militaire et la
transforme en un fanatisme exterminateur. Au même moment, le christianisme
subissait une attaque au défaut de sa cuirasse (il libère l’homme) avec la
Révolution française et le culte de l’homme divinisé…
[237]. D’après la longue prophétie d’Ezéchiel,
39, 1 et suiv.
[238].
Ezéchiel 39, 12 : « On les
enterrera afin de purifier le pays pendant sept mois. »
[239]. Avis religieux adressé aux musulmans,
quoique n’engageant que celui qui la prononce. Comme chez les Protestants,
chaque musulman est imam. N’ayant pas de magistère papal, les fatwa
islamiques n’ont de valeur que pour ceux qui reconnaissent l’autorité de l’imam
émetteur. Depuis la révolution islamique d’Iran, le terme fatwa a pris
le sens malheureux d’appel à l’exécution sommaire.
[240]. Création en 1979 en Iran d’une république
islamique sectaire.
[241]. Nous ajoutons cette note le 11 septembre
2001. Ce livre était déjà écrit en 1996 (Voir Nihil Obstat). Mais devant moi défile à la télévision, en boucle,
l’attaque suicide du World Trade Center aux U.S.A. Les deux tours viennent de
s’écrouler après avoir été percutées par deux avions gros porteurs chargés de
passagers détournés par des combattants de l’islam. Les commentateurs parlent
de « nouveau Pearl Harbor ». Ils n’ont pas tort. Le monde entre sans
doute, après la guerre froide, dans une quatrième guerre mondiale. L’ennemi ne
viendra pas d’abord des nations musulmanes mais de cette mouvance particulière
des combattants de l’islam qui agit en s’appuyant sur les textes de sa foi. La
présence de ces textes est dramatique. Elle plongera beaucoup de musulmans dans
la guerre Sainte. La victoire du monde coalisé ne fait pas de doute, mais à
quel prix? Le Pakistan possède l’arme nucléaire. Lorsque la guerre sera gagnée,
il est probable que naîtra une nouvelle génération qui, devenue adulte vingt
ans plus tard, rejettera, dans un nouveau mai 68, la religion et celui qui en
porte le nom : Dieu. C’est une étape nouvelle mais essentielle dans la
réalisation des prophéties.
[242]. Matthieu 26, 52.
[243]. Nous disions que cette époque n'est pas
pour aujourd'hui. C'est donc que le temps de l’Antéchrist n'est pas encore pour
cette année. Mais il peut venir vite, en quelques générations, d'autant plus
que les moyens modernes de communication précipitent l’évolution des mœurs. Les
enfants bouddhistes d'Orient se forment en ce moment avec la télévision
occidentale tout entière imbibée du message de l’homme sans Dieu.
[244]. 2 Thessaloniciens 2, 4.
[245]. « Qu’on
le veuille ou non, l’heure est venue de devenir citoyen du monde ou de voir
périr toute civilisation. » Citation d’un discours aux
enseignants, du ministre français de l’Instruction publique, 1918.
[246]. En Luc 21, 24 : « Jérusalem
sera foulée par les païens jusqu’à ce que soit accompli le temps des nations. »
[247]. Dans les années 70, des jeunes aux
cheveux longs se tenaient non loin d’un monument aux morts. On fêtait
l’Armistice du 11 novembre et des anciens combattants des deux guerres
mondiales saluaient le drapeau français. Des cris fusèrent : « Fascistes ! – Mais nous avons
combattu le fascisme, leur fut-il répondu. – Peu importe, vous êtes à mettre
dans le même sac patriotique. » Cette anecdote illustre ce
que peut être la réaction d’une génération, non par son intelligence, mais par
sa sensibilité.
[248]. Extraits significatifs tirés du Testament
de Moïse, Deutéronome 28-30.
[249]. Ils voient de leurs yeux, dirait Job.
Voir, à propos de la survie des facultés sensibles après la mort, du même
auteur, L’heure de la mort, op. cit.
[250]. Romains 11, 15.
[251]. Matthieu 24, 15.
[252]. Luc 21, 24.
[253]. Luc 23, 28.
[254]. Luc 21, 24.
[255]. Romains 11, 25.
[256]. 2 Maccabées 2, 4-7.
[257]. 2 Maccabées 2, 8.
[258]. Bien sûr, chacune des prophéties
concernant les Juifs a, outre une réalisation matérielle, une signification
spirituelle. La destruction du temple de
Jérusalem* marque l’entrée dans un nouveau temps qui est celui de la
Nouvelle Alliance où Dieu n’est plus adoré sur une montagne ou dans un temple
mais au fond des cœurs. Dans un sens symbolique, cette destruction préfigure et
annonce celle de notre corps par la mort et celle du nouveau temple qu’est
l’Église dans un sacrifice final qui précédera la glorification du monde. La
déportation d’Israël ne doit pas être considérée comme une punition pour l’acte
commis par ceux qui ont tué Jésus car ce péché leur a été imputé personnellement
lors de leur jugement particulier. Cette dispersion est donnée aux nations
comme un signe qui manifeste les conséquences auxquelles aboutit tout péché. Ce
peuple de prophètes montre sans le vouloir qu’en péchant, nous sommes dispersés
à tous vents loin de Dieu et de nos frères. Il en est de même pour les
persécutions. Elles sont un témoignage des conséquences terribles du péché qui
tue la vie de l’âme d’une manière analogue à la barbarie des persécuteurs
lorsqu’ils massacrent des enfants innocents. Le peuple juif persécuté est le
signe de la fin du monde où se manifestera la haine implacable du démon pour
toute vie de l’âme.
[259]. Luc 13, 35.
[260]. Romains 11, 15.
[261]. Voir par exemple Apocalypse 9, 15. Ce
chiffre d’un tiers, appliqué au malheur, est cité 14 fois dans ce livre.
[262]. Actes 5, 34.
[263]. A l’image du pharaon devant Moïse :
« Car Dieu renverse les puissants de leur trône et relève les
humbles », dit la Vierge Marie
dans son Magnificat.
[264]. Chapitres 6 et 7.
[265]. Cité par saint Louis-Marie Grignon de
Montfort, Traité de la vraie dévotion à
la Sainte Vierge, édition du Seuil, Paris, 1966, 46.
[266]. …qui est un saint canonisé. Ses visions
et ses prophéties ont de ce fait une certaine autorité dont le degré, sans
rapport évidement avec celui de la
Révélation publique, est précisé en fin d’ouvrage. Elles n’en demeurent pas
moins très importantes pour la théologie de l’espérance.
[267]. Lire son Traité de la vraie dévotion à Marie, op. cit., p. 47 et suiv.
[268]. En réalité, l'apparition à Catherine
Labouré est loin d'être la première. L'apparition à Jean Courdil (Celles, 1686)
ou à Benoîte Rencurel (Notre-Dame du Laus) est largement antérieure. Mais celle
de Catherine inaugure un caractère eschatologique nouveau. Pour la première
fois, la Vierge ne vient pas seulement comme mère. Elle vient comme sage-femme
en ce sens qu’elle va accompagner une douloureuse naissance vers la Vie.
[269]. Il s’agit d’une apparition reconnue
officiellement par l’autorité de l’Église. Son message a donc une certaine
autorité sur l’espérance des catholiques et leur compréhension de l’action
incarnée de Dieu dans chaque génération, à un degré précisé en fin d’ouvrage.
[270]. À savoir que le salut consiste en une
réconciliation amoureuse de Dieu avec l’humanité. Pour ce faire, une nouvelle
Ève a eu à dire oui. Le rôle de Marie, loin d’être passif, fait partie de la
rédemption de la même manière que, pour qu’il y ait mariage, il faut deux oui.
[271]. La valeur théologique de ces deux cœurs
est très profonde. Elle est le cœur même de la révélation dans son
interprétation catholique. Marie et Jésus sont ensemble, l’image de Dieu.
Jésus-Dieu et Marie-femme sont ensemble rédempteurs et co-rédempteurs.
[272]. Apparition reconnue canoniquement par
l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé
en fin d’ouvrage.
[273]. Les apparitions continuent en ce début de
troisième millénaire.
Medjugorje* ne peut encore être reconnu puisque cette apparition n’est pas
terminée.
[274]. Apocalypse 11, 3-13. Texte symbolique,
d’abord valable pour chaque époque de l’humanité, mais de plus en plus
nettement réalisé vers la fin.
[275]. Genèse 6, 22.
[276]. 2 Rois 2, 11.
[277]. Matthieu 11, 14.
[278]. 1 Rois 17, 1.
[279]. Marc 6, 18.
[280]. Romains 11, 16.
[281]. Il invita des représentants des grandes
religions du monde à prier ensemble Dieu pour la paix.
[282]. Il est probable que les trois sens soient
vrais. Dieu se plaît à réaliser les textes selon tous leurs sens.
[283]. L’Antéchrist, 1905.
[284]. Daniel 12, 10.
[285]. Daniel 11, 33.
[286]. Matthieu 24, 14.
[287]. …qui est un saint canonisé. Ses visions
et ses prophéties ont de ce fait une certaine autorité dont le degré, sans
rapport évidement avec celui de la Révélation publique, est précisé en fin
d’ouvrage.
[288]. Traité
de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, op. cit., p 49 et suiv.
[289]. Psaume 126, 4.
[290]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich*
eut la vision de ces derniers apôtres sous la forme de douze
prédicateurs : « Je vis au milieu des désastres les douze hommes dont
j’ai déjà parlé, dispersés en diverses contrées sans rien savoir les uns des
autres, recevoir les rayons de l’eau vive. Je vis que tous faisaient le même
travail de divers côtés. Ils étaient tous catholiques. Je vis aussi, chez les
ténébreux destructeurs, de faux prophètes et les gens qui travaillaient contre
les écrits des douze nouveaux apôtres. Les douze hommes apostoliques gagnaient
toujours un grand nombre d’adhérents et la lumière se mit à briller depuis
Rome. » (Vie d’Anne-Catherine
Emmerich, op. cit., tome 3, p. 159).
[291]. Zacharie 9, 9.
[292]. Marc 7, 27.
[293]. Jean 12, 20-36.
[294]. 2 Thessaloniciens 2, 3.
[295]. Il s’agit d’une proximité en terme de
générations, 20, 40 ou 100 ans. Nous
l’avons déjà suggéré à propos de l’islam. Dieu a le temps. Rappelons que la
Vierge a commencé à parler de la fin des
fins à la Salette, il y a 150 ans ! Les événements peuvent certes se
précipiter au plan de la politique.
[296]. Jean 6, 66.
[297]. Jean 7, 19.
[298]. Jean 11, 45-53.
[299]. Hébreux 5, 8.
[300]. Jean 21, 18 - l9.
[301]. Jean 12, 4,
[302]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich*
écrit à propos du clergé progressiste qu’elle voit dans ses célèbres
prophéties : « Ces éclairés,
je les vois toujours dans un certain rapport avec la venue de l’Antéchrist, car
eux aussi, par leurs menées, coopèrent à l’accomplissement du mystère de
l’iniquité. » (Vie d’Anne-Catherine
Emmerich, op. cit., tome I, p. 536) Ailleurs, elle décrit leur oeuvre de la
manière suivante : « Ils bâtissaient une grande Église, étrange et
extravagante. Tout le monde pouvait y entrer pour communier et y posséder les
mêmes droits. Ce devait être une vraie communion des profanes où il n’y aurait
qu’un seul pasteur, un seul troupeau. Il devait y avoir un pape
(vraisemblablement élu) mais qui ne possèderait rien et serait salarié. Tout
était préparé d’avance et bien des choses étaient déjà faites. Mais, à
l’endroit de l’autel, il n’y avait que désolation et abomination. Ils
veulent enlever au pasteur le pâturage qui est à lui. Ils veulent en imposer un
qui livre tout aux ennemis. » (op.
cit., tome 3, p. 184)
[303]. Des courants puissants réclament un
Concile Vatican III : suppression de la papauté*, démocratisation dans la
définition de la foi, de la morale. Si la foi chrétienne est un jour votée par
les hommes, à quoi sera-t-elle réduite ? La parole viendra-t-elle encore
d’en haut ?
[304]. Avec le mystère de la charité de Dieu,
qui veut se faire époux à égalité de droit avec l’homme. Il s’agit de l’autre
révélation spécifique du christianisme, sur le cœur de Dieu.
[305]. Jean 13, 6.
[306]. Matthieu 24, 15.
[307]. Luc 22, 32.
[308]. Matthieu 16, 18.
[309]. Luc 21, 28.
[310]. Jean 19.
[311]. Jean 21, 16.
[312]. Catéchisme
de l’Église Catholique, Mame 1992, pages 149-150. Ce texte, publié en 1992
par le Pape Jean-Paul II, est le reflet authentique de la foi catholique. Il a
donc une très grande autorité pour la foi.
[313]. Seule exception peut-être à cette règle :
Honorius I qui enseigna un temps de manière privée le monothélisme (Jésus
n’aurait qu’une seule faculté volontaire, la volonté divine). Ce pape se
rétracta. Mais son enseignement avait un caractère privé.
[314] Voir sous ce titre l’ouvrage de
Jean Raspail qui raconte cette histoire, Albin Michel, 1995.
[315]. L’anneau
du pêcheur, Albin Michel, 1995, p. 226.
[316]. Rappelons, pour le puriste de la
théologie, que je ne cite ce texte de roman qu’au titre d’une belle histoire
qui illustre mieux qu’une théorie mon propos.
[318]. Jean 11, 49.
[319]. Le 26 juin 2000, le pape Jean-Paul II
dévoila au monde le troisième secret de Fatima. Il parle d’un homme vêtu de
blanc, entouré de prêtres, d’évêques et de laïcs et que des soldats viennent
tuer sur une montagne. Dans son commentaire, le Cardinal Ratzinger, préfet pour
la Congrégation de la foi, dit : « Ce secret concerne visiblement le passé
». Il fait référence à l’attentat de 1981. Ce commentaire, venant de la source
la plus proche du Saint Père, manifeste la difficulté du clergé à croire que
cette prophétie puisse avoir un sens plus profond, plus radical. Pourtant, ce
secret ne concerne pas le passé. Sa portée est beaucoup plus grande que l’attentat
de 1981 contre Jean-Paul II. Voir texte complet du secret dans L’Église du silence, chapitre 7.
[320]. Vers 1870.
[321]. Ceci étant dit, nous verrons plus tard en
quel sens il faut interpréter la prophétie de Jésus sur la présence de l’Abomination au cœur même du Temple saint, en
Marc 13, 14.
[322]. Matthieu 21, 7.
[323]. Matthieu 27, 17.
[324]. Zacharie 9, 9.
[325]. Voir Le
temps de la fin des temps, Patrick de Laubier, Editions F.X. de Guibert.
[326]. Apparition reconnue canoniquement par
l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé
en fin d’ouvrage.
[327]. Ce texte de style apocalyptique ne doit
pas nécessairement être pris au sens littéral. Il peut signifier aussi une
destruction spirituelle par le péché
(Paris n’est-il pas une nouvelle Babylone, mère de tous les péchés médiatiques
d’une génération perdue). Cela peut signifier aussi un combat physique, une
lutte civile. À notre époque, on serait tenté de voir sous ces images une
future crise de l’islamisme des banlieues.
[328]. La terre, c’est-à-dire les habitants du
péché, du mondain. Ce texte semble indiquer une conversion subite du peuple,
suite à un fléau. Terrorisme ? Maladie ?
[329]. Par exemple, la bienheureuse
Anne-Catherine Emmerich* vit au xixe
siècle plusieurs renouveaux cycliques de l’Église suivis de décadence. Elle vit
un dernier renouveau, plus puissant : « J’ai vu la Pentecôte, à
travers le monde entier. Elle m’a été montrée en divers tableaux. J’ai vu aussi
les douze nouveaux apôtres et leur rapport avec l’Église. J’ai vu encore une
Église spirituelle se former de beaucoup de paroisses réunies et celles-ci
recevoir le Saint-Esprit. C’était un nouveau réveil de l’Église
catholique. » (Vie d’Anne-Catherine
Emmerich, op.cit., tome 3, p. 144) « Je vis l’Église complètement restaurée.
Au-dessus d’elle, sur une montagne, l’Agneau de Dieu entouré de vierges tenant
des palmes à la main. Je vis beaucoup de personnes qui devaient souffrir le
martyre pour Jésus. Il y avait encore beaucoup de méchants et une autre séparation
devait plus tard avoir lieu. » (Id., p. 113-115)
[330]. Voir aussi La prophétie des papes* de saint Malachie, citée dans le glossaire
en fin d’ouvrage. Je ne peux l’utiliser dans le corps de cet ouvrage où seules
les révélations reconnues canoniquement ont leur place. Mais le nom du pape qui
suit Jean-Paul II (le travail du soleil) est intéressant : « la
gloire de l’olivier ». L’olivier est symbole à la fois de l’Église, d’Israël,
de la paix de Dieu. À Medjugorje* (apparition de la Vierge en Yougoslavie non
encore canoniquement reconnue), la Vierge annonce un grand signe, comme un jugement
dernier de l’âme, qui incitera le peuple à réfléchir gravement sur lui-même.
[331]. Beaucoup de crises possibles peuvent
sortir à chaque époque : épidémies brutales, fous d’Allah nucléarisés,
etc. Le monde occidental sommeille, sûr que tout est sous contrôle. C’est un
colosse aux pieds d’argile qui peut être remis par Dieu face à sa faiblesse par
de multiples moyens.
[332]. La Vierge Marie confirme à La Salette
cette prophétie, en appelant pour cette époque les apôtres des derniers
temps : « J’adresse un vibrant appel à la terre. J’appelle les vrais
disciples du Dieu Vivant et régnant dans les cieux. J’appelle les vrais
imitateurs du Christ fait homme, le seul et vrai sauveur des hommes. J’appelle
mes enfants, mes vrais dévots, ceux qui se sont donnés à moi pour que je les
conduise à mon divin Fils, ceux que je porte pour ainsi dire dans mes bras,
ceux qui ont vécu de mon esprit. Enfin, j’appelle les apôtres des derniers
temps, les fidèles disciples de Jésus-Christ qui ont vécu dans un mépris du
monde et d’eux-mêmes, dans la pauvreté et l’humilité, dans le mépris et le
silence, dans l’oraison et la mortification, dans la chasteté et dans l’union
avec Dieu, dans la souffrance et inconnus du monde. Il est temps qu’ils sortent
et viennent éclairer la terre. Allez, montrez-vous, mes enfants chéris. Je suis
avec vous et en vous, pourvu que votre foi soit la lumière qui vous éclaire
dans ces jours de malheurs. Que votre zèle vous rende comme les affamés pour la
gloire et l’honneur de Jésus-Christ. Combattez, enfants de lumière, vous, petit
nombre qui y voyez. Car voici le temps des temps, la fin des fins. »
[333]. Liberté égoïste, humanisme orgueilleux,
666.
[334]. Le secret de La Salette continue : «
Avant que n’arrivent les dix rois de l’Antéchrist qui gouverneront le monde, il
y aura une espèce de fausse paix sur le monde. On ne pensera qu’à se divertir.
Les méchants se livreront à toutes sortes de péchés. Mais les enfants de la
sainte Église, les enfants de la foi, mes vrais imitateurs, grandiront dans
l’amour de Dieu et dans les vertus qui me sont les plus chères. »
[335]. Jean 12, 20. « Il y avait là quelques
Grecs, de ceux qui montaient pour adorer pendant la fête. »
[336]. Jean 12, 23.
Jésus leur répond : « Voici venue l'heure où doit être glorifié le
Fils de l'homme. En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé
en terre ne meurt pas, il demeure seul. Mais s'il meurt, il porte beaucoup de
fruit. »
[337]. Le chapitre qui suit peut paraître
désespérant. En fait, il ne supprime pas l’espérance. Il montre qu’il n’y a pas
d’espoir. Ces deux notions ne doivent pas être confondues. L’espoir vise une
réussite terrestre. On espère, de cette manière, quand on est chrétien, que
tous les hommes adhèrent à la foi dès cette terre. L’espérance, au contraire,
vise une victoire éternelle. Elle n’attend que la victoire de Dieu, sachant
qu’elle n’est promise dans sa plénitude que pour l’autre monde. Distinguer
espoir et espérance est essentiel, sous peine de confondre le christianisme et
son Royaume qui n’est pas de ce monde avec un millénarisme.
[338]. Matthieu 24, 15.
[339]. 2 Thessaloniciens 2, 1-12. Rappelons
encore une fois, afin d’éviter le scandale de certains théologiens exigeants au
plan de la précision, que ce genre de textes semble annoncer au sens premier
littéral des événements futurs. Bien que l’autorité de ces textes soit la plus
haute qui soit, ils doivent être utilisés avec prudence car leur sens est
souvent, de par la volonté de Dieu, multiple. L’exemple de la fameuse parole de
l’archange Gabriel à la Vierge Marie, « Ton
fils régnera sur la maison de
Jacob pour les siècles et son règne n'aura pas de fin » (Luc 1,
33), le prouve. Marie aurait pu comprendre l’annonce d’une royauté terrestre,
puis éternelle. L’ange ne parlait que d’abord d’une royauté spirituelle, par la
croix, puis d’une royauté totale dans la gloire éternelle. Il était aisé de se
tromper.
[340]. D’après l’abbé Augustin Lemann, L’Antéchrist, 1905.
[341]. 1 Jean 4, 3.
[342]. 1 Jean 2, 18.
[343]. Voir les génocides de Palestiniens commandés
par Josué et Yahvé lors de la conquête de la terre sainte. Voir par exemple
Josué 6, 17.
[344]. De par sa canonisation, ses écrits et ses
visions reçoivent une certaine autorité de l’Église dont le degré est précisé
dans la dernière partie de cet ouvrage.
[345]. Manuscrit des prophéties de sainte Odile
qui, étant une sainte canonisée, a donc un certain niveau d’autorité dans ses
écrits, niveau dont le degré n’apporte rien au contenu de la foi mais peut,
dans le cas qui nous occupe, éclairer le mode de l’action de Dieu sur les
générations humaines. L’original du texte est conservé à la Bibliothèque
Nationale de France.
[346]. Matthieu 10, 28.
[347]. Luc 12, 4.
[348]. Daniel 8, 22-26. Rappelons que ce genre
de texte semble annoncer au sens premier littéral des événements futurs. Bien
que l’autorité de ces textes soit la plus haute qui soit, ils doivent être
utilisés avec prudence car leur sens est souvent, de par la volonté de Dieu,
multiple et ambigu. La parole suivante de Jésus « Il annonçait par quel genre de mort Pierre devait glorifier
Dieu » (Jean 21, 19) l’indique. Il parlait certes de la mort de
Pierre (sens littéral historique)… Il parle sans doute aussi de l’Église, dans
sa partie visible et sacerdotale.
[349]. « Ce sera pendant ce temps que
naîtra l’Antéchrist, d’une religieuse hébraïque, d’une fausse vierge qui aura
communication avec le vieux serpent, le maître de l’impureté. Son père sera
évêque. En naissant, il vomira des blasphèmes. Il aura des dents. En un mot, il
sera le diable incarné. Il poussera des cris effrayants, il fera des prodiges,
il ne se nourrira que d’impuretés. Il aura des frères qui, quoiqu’ils ne soient
pas comme lui des démons incarnés, seront des enfants du mal. À douze ans, ils
se feront remarquer par leurs vaillantes victoires chacun à la tête des armées,
assistés par les légions de l’enfer. »
[350]. 2
Thessaloniciens 2, 9 : « Sa venue à lui, l’Impie, aura été marquée,
par l’influence de Satan, de toute espèce d’œuvres de puissance, de signes et
de prodiges mensongers. »
[351]. Voir par exemple Apocalypse 19, 20.
[352]. Il s’agit d’abord d’observations
théologiques. Dieu aime donner des prophéties dont le sens est d’abord
symbolique. Mais il se plaît à les réaliser matériellement. Il y a de plus une
série d’observations sociologiques : l’humanité peut se laisser entraîner
à tout, jusqu’à la folie.
[353]. Voir chapitre 4, le dernier des
antichristianismes.
[354]. Matthieu 24, 15.
[355]. Daniel 9, 26-27.
[356]. Daniel 12, 5-13.
[357]. 1 Mac. 1, 41-64. 2
Mac. 6, 1-9.
[358]. Matthieu 24, 15 :
« l’Abomination de la désolation dans le lieu saint ! »
[359]. Daniel 8, 22.
[360]. Voir chapitre 4. Voir aussi notre
description du « Temps de l’apostasie en marche ».
[361]. Daniel 8, 23.
[362]. Apocalypse 13, 1-8 ; Daniel 7, 20-26.
[363]. Genèse 3, 3. Tout au long de l’Écriture
Sainte, Dieu frappe l’homme de divers fléaux. Son but n’est pas de le rendre
esclave mais de façonner son cœur dans l’humilité, l’amour, afin de le sauver.
[364]. Apocalypse 16, 9. Face à des cœurs
orgueilleux, l’expérience de la souffrance peut avoir l’effet inverse :
elle durcit la peau et fortifie la dureté du cœur.
[365]. La parole de Jésus en Luc 4, 4 est citée
à cause de sa vérité devenue évidente après l’échec des matérialismes. Mais
elle est dévoyée au service d’une autre religion, celle de l’ange des ténèbres.
Le démon n’a pas intérêt à nier la vérité. Il ne fait que la détourner de son
but. Le paradis qu’il propose à l’homme est réel en ce sens qu’il est une vie
éternelle indépendante et libre. Mais c’est en vérité un enfer (l’enfer tel que
le définit l’Église catholique) où le cœur brûle car l’amour y est rejeté.
[366]. Nous l’avons montré, l’idéologie de
l’Antéchrist n’est pas dénuée de vérité. La révolte première de Lucifer n’était
pas dénuée de noblesse. Mais la valeur qui la motive est bien l’inverse de
celle de Dieu.
[367]. Citation de l’abbé Augustin Lemann, L’Antéchrist, 1905.
[368]. Auguste
Comte avait annoncé cette nécessité historique de la fin des religions. Selon
lui viendra bientôt un âge définitif de l’humanité. Ce sera la fin de
l’histoire. Les humains renonceront définitivement à se questionner sur le pourquoi de l’existence. Ils
comprendront à quel point cela n’a pas de sens. Enfin mûris, ils ne chercheront
qu’à s’attaquer au comment :
Comment faire disparaître la guerre, la famine, les maladies ? Le dernier
des ennemis sera celui-ci : Comment détruire biologiquement la mort ?
Grâce à la science, l’humanité réussira. Ce sera l’ère de la paix définitive,
l’âge post-moderne, la fin de l’histoire. Il a profondément tort. Il oublie que
l’homme est fondamentalement religieux. Il se pose forcément le
« pourquoi ». Mais les réponses peuvent être multiples. La dernière
semble être la religion de Lucifer : vie éternelle dans la liberté totale…
[369]. Le mystère de l’iniquité, tel que je l’ai
montré dans l’histoire de Lucifer, n’est pas un athéisme. C’est une religion
qui parle de vie éternelle. Mais la vie proposée par Satan n’a rien à voir avec
celle de Dieu. Sa dignité n’est pas celle de l’amour poussé jusqu’au mépris de
soi… Elle est liée au culte de sa grandeur individuelle. En conséquence, il est
possible que l’un de ses dogmes fondamentaux annonce une forme de réincarnation
personnelle sur terre. Il ne s’agit pas de la réincarnation telle que la
conçoivent les hindouistes ou les bouddhistes. Pour ces sagesses, la
réincarnation est la punition d’un manque d’anéantissement de soi, donc
d’humilité. Pour l’Antéchrist, la réincarnation sera plutôt annoncée comme une
espérance de l’individualisme, dans le style de l’espérance New Age.
[370]. En latin, Lucis fero, Lucifer. Satan redevient ce qu’il était à l’origine : un être
intelligent et spirituel. Il rampa
sur son ventre pendant des siècles, c’est-à-dire qu’il tenta l’homme
charnellement, uniquement parce que c’était le meilleur moyen de faire tomber
des peuples vulgaires. À la fin du monde, il s’adressera à des peuples
cultivés. Il parlera donc en vérité de son projet de paradis fondé sur la
noblesse des intelligences.
[371]. Sous-entendu Jésus-Christ et son message
d’humilité et d’amour.
[372]. Il est intéressant de remarquer que, pour
plusieurs messianismes temporels, annonçant pour bientôt un paradis religieux
sur terre avec le Christ (par exemple les témoins de Jéhovah), il sera aisé de
confondre ce faux Messie et le vrai.
[373]. Voir Genèse 11, 9 : Dieu divisa
l’humanité à Babel pour l’empêcher de s’unir et de se croire toute-puissante.
Son but n’était bien sûr pas la préservation égoïste de sa primauté mais le
salut éternel de l’homme.
[374]. Saint Paul
explique que l’adhésion à l’Évangile de l’homme impie ne peut venir qu’après la
disparition de la vraie religion de Dieu. Thessaloniciens, 2, 6-8 : «Vous
savez ce qui retient aujourd’hui l’apostasie et l’Homme impie, de façon qu’il
ne se révèle qu’à son moment.. »
[375]. Un texte de l’Apocalypse de saint Jean
13, 15 : « On lui donna
même d'animer l'image de la Bête pour la faire parler, et de faire en sorte que
fussent mis à mort tous ceux qui n'adoreraient pas l'image de la Bête. » La bête est Lucifer (c’est le dragon
rouge-feu de la Bible). L’image de la bête est l’idéologie qui motiva sa
révolte originelle contre Dieu. Mais c’est aussi, très matériellement, le monde
des dinosaures, ces dragons disparus depuis 65 millions d’années. Il y aura
certainement à cette époque des correspondances très curieuses, comme la
renaissance par l’image ou même par génie génétique de certaines de ces espèces
du passé, afin que tous les hommes, même les moins réfléchis, ne soient pas
totalement étrangers aux signes des temps.
[376]. Daniel 8, 24.
[377]. On peut les distinguer avec facilité en
considérant l’ordre d’importance donné aux vertus : Dans cet évangile
luciférien, la première est la liberté, la deuxième est la puissance.
L’Évangile du Christ est celui de la petitesse et de l’amour poussé, s’il le
faut, jusqu’au mépris de sa propre liberté.
[378]. L’Antéchrist, 1905.
[379]. 2 Thessaloniciens 2, 9.
[380]. Apocalypse 11.
[381]. 2 Thessaloniciens 2, 4.
[382]. Décret sur les religions non chrétiennes.
[383]. Galates 1, 8.
[384]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich*
vit au xixe siècle ce
dernier antichristianisme sous la forme de la fameuse prostituée de l’Apocalypse :
« Mais cette ignoble fiancée voulait se marier et, qui plus est, à un
jeune prêtre pieux et éclairé. Je crois que c’était un des douze que je vois
souvent opérer des œuvres importantes sous l’influence de l’Esprit Saint. Il
s’était enfui de la maison à la vue de cette femme. Elle le fit revenir en lui
adressant les paroles les plus flatteuses. Quand il arriva, elle lui montra
tout et voulait tout remettre entre ses mains. Il s’arrêta quelque temps. Puis
il prit un air grave et très imposant. Il la maudit ainsi que tous ses manèges,
comme étant ceux d’une infâme courtisane, et se retira. » (Vie
d’Anne-Catherine Emmerich, op. cit., tome 2, p. 398)
[385]. Marc 13, 10.
[386]. Chapitre 5.
[387]. Daniel 8, 25.
[388]. 2 Thessaloniciens 2, 4.
[389]. …ou de ce qui précédera sa venue, le
dernier des antichristianismes.
[390]. Daniel 9, 26.
[391]. 2 Thessaloniciens 2, 6-8.
[392]. Luc 21, 24.
[393]. Nous avons montré que toutes les
prophéties de Jésus concernant Israël ont en premier lieu un sens politique.
Elles sont datables dans leur réalisation. L’histoire qui est en marche permet
de deviner les grandes lignes des événements à venir : Jérusalem* est
aujourd’hui divisée en deux. Une partie est tenue par les Juifs, l’autre partie
par les Palestiniens chrétiens et surtout musulmans, eux que l’Ancien Testament
appelle les « gentils » (les peuples). Or les guerriers musulmans
sont en train de se rendre odieux aux yeux des nations coalisées. Y aura-t-il
guerre, crime puis défaite de l’islamisme et, avec lui, parce que
l’histoire aime peu les nuances, de l’islam ? Si c’est le cas, il est peu
probable qu’une mosquée continue à trôner sur le mont du Temple. Si, au cours
du xxie siècle, une
nation ou un groupe musulman prend l’initiative du terrorisme nucléaire, il
provoquera non seulement une réaction nucléaire mais, à court terme, la fin du
système politique des nations et à moyen terme, le rejet des religions dans
leur ensemble.
[394]. l Thessaloniciens 5, 3.
[395]. Daniel 8, 25.
[396]. « Tout ce qui porte le nom de
Dieu », donc tout ce qui peut conduire au minimum à l’humilité, au
maximum à l’amour de Dieu.
[397]. Daniel 12, 7.
[398]. 2 Thessaloniciens 2, 4.
[399]. Matthieu 24, 15.
[400]. Le secret de La Salette décrit cette
époque : « Le Vicaire de mon Fils aura beaucoup à souffrir, parce que
pour un temps l’Église sera livrée à de grandes persécutions. Ce sera le temps
des ténèbres. L’Église aura une crise affreuse. La sainte foi de Dieu étant
oubliée, chaque individu voudra se guider par lui-même et être supérieur à ses
semblables. On abolira les pouvoirs civils et ecclésiastiques, tout ordre et
toute justice seront foulés aux pieds. On ne verra qu’homicide, haine,
jalousie, mensonge et discorde, sans amour pour la patrie et la famille. Le
Saint-Père souffrira beaucoup. Je serai avec lui jusqu’à la fin pour recevoir
son sacrifice. Les méchants attenteront plusieurs fois à sa vie sans pouvoir
nuire à ses jours. Mais ni lui, ni son successeur ne verront le triomphe de
l’Église de Dieu. »
[401]. Jean 21, 18-23.
[402]. Genèse 5, 24.
[403]. Voir Daniel 8, 9.
[404]. Apocalypse 11, 9.
[405]. Voir L’anneau
du pêcheur de Jean Raspail, qui raconte la manière dont disparut du monde
visible la papauté* d’Avignon.
[406]. Apparition reconnue canoniquement par
l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé
en fin d’ouvrage. La béatification de deux des trois voyants montre
l’importance que donne l’Autorité apostolique romaine à cet événement.
[407]. Dévoilé
au monde le 26 juin 2000 par le pape Jean-Paul II. Mon opinion est que ce
secret ne concerne pas le passé. Elle diffère en cela de celle du cardinal
Ratzinger (commentaire du secret, 26 juin 2000). Sa portée me semble être
beaucoup plus grande que l’attentat de 1981 contre Jean-Paul II. Le fait que
les autorités de Rome le rangent dans les faits passés n’est-il pas lié à cette
parole de Jésus en Jean 21, 18 : « Quand tu auras vieilli, tu
étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais
pas. »
[408]. Ceci
semble signifier une intervention maternelle de la Vierge. Elle empêche la
paternité de Dieu d’amender l’humanité en la frappant. Elle obtient de laisser
agir patiemment la loi des conséquences du péché.
[409]. Matthieu 16, 18.
[410]. Matthieu 12, 38.
[411]. Matthieu 27, 57.
[412]. Voir Job 1 : Satan a librement accès
devant Dieu car sa révolte libre est respectée par Dieu.
[413]. Certes, il ne peut exister pire péché.
Mais nous l’avions déjà expliqué, une telle perfection
dans le mal ne pourra être qu’une « apparence », une image de la
lucidité parfaite qui règne en enfer. Mettre l’enfer ici-bas consistera à entraîner
dans un engrenage du politiquement
correct une foule incapable de vraiment comprendre l’énormité de ce qu’elle
fait dans une unanimité apparente du culte de l’Homme et du démon. La grande
majorité des hommes est incapable d’un choix aussi radical car la nature
humaine, blessée depuis le péché originel, se débat dans sa faiblesse. Mais les
foules humaines peuvent être manipulées au point de paraître adhérer à ce
système. Le démon et son serviteur l’Antéchrist ont assez de lucidité pour le
savoir. Aussi accompagneront-ils leur œuvre de la réalisation d’un monde qui
donnera aux hommes le maximum de bonheur terrestre individuel.
[414]. 2 Thessaloniciens 2, 15.
[415]. Luc 13, 33. Le destin de l’Église semble
devoir se réaliser dans le même cadre que son commencement. Le peuple juif,
nous le verrons, y tiendra un rôle important. Voir plus loin : La conversion d’Israël.
[416]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich*
en eut la révélation dans une de ses visions prophétiques : « Le
temps de l’Antéchrist n’est pas si proche que quelques-uns le croient. Il aura
encore des précurseurs. J’ai vu deux villes des docteurs, de l’école desquels
pourraient sortir ces précurseurs. J’ai vu la cessation du sacrifice à l’époque
de l’Antéchrist. » (Vie
d’Anne-Catherine
Emmerich, op. cit., tome 2, p. 441 et 492)
[417]. Au xviie
siècle, le cardinal de Bérulle fonda l’Oratoire. Son disciple, Jean-Jacques
Olier, fonda les séminaires sulpiciens. Ce fut un immense renouveau de
l’Église. Ils formaient des prêtres qui formèrent ensuite, de manière souvent
trop exclusive à la piété eucharistique, les fidèles.
[418]. … qui n’est pas encore une sainte
canonisée. Ses écrits sont cités à titre de témoignage. Ce texte a été composé
par elle le 4 avril 1931.
[419]. À cause de cette réduction de la vie
chrétienne à la spiritualité eucharistique, les divorcés remariés, qui n’ont
plus accès à la communion eucharistique, ne pouvaient plus comprendre ce que
leur demandait l'Église. Il sont appelés à la spiritualité du publicain décrite
en Luc 10, 18 : « Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était Pharisien
et l’autre publicain. Le Pharisien, debout, priait ainsi en lui-même :
‘Mon Dieu, je te rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des
hommes. Je suis un homme vertueux.’ Le publicain, se tenant à distance, n’osait
même pas lever les yeux au ciel, mais il se frappait la poitrine, en
disant : ‘Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis !’ Je vous le
dis, ce dernier descendit chez lui justifié, l’autre non. Car tout homme qui
s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé. » Tout est dit ici de la communion de celui qui ne
peut plus communier.
[420]. La bienheureuse Anne-Catherine Emmerich
vit Marie : « Je vis au-dessus de l’église saint-Pierre de Rome fort
amoindrie, une femme majestueuse revêtue d’un manteau bleu de ciel qui s’étalait
au loin, et portant une couronne d’étoiles sur la tête. Son manteau allait
toujours en s’élargissant et finit par embrasser tout un monde avec ses
habitants. » (Vie d’Anne-Catherine
Emmerich, op.cit., tome 3, p. 160)
[421]. C’est pourquoi, à la fin de ce troisième
temps, alors que l’Antéchrist sera au sommet de son règne, alors qu’il aura
établi sur le monde une paix extérieure très réelle, le Messie reviendra, obéissant à la prière des saints. Ainsi,
la fin des temps, c’est-à-dire la fin du temps de l’Antéchrist, coïncidera avec
la fin du monde.
[422]. Romains 5, 20.
[423]. …Qui est un saint canonisé. Ses visions
et ses prophéties ont de ce fait une certaine autorité dont le degré, sans
rapport évidemment avec celui de la Révélation publique, est précisé en fin
d’ouvrage. (Traité de la vraie dévotion à
la Sainte Vierge, édition du Seuil, Paris, 1966).
[424]. Luc 18, 8.
[425]. Matthieu 24, 22. La bienheureuse
Anne-Catherine Emmerich témoigne : « Il n’y a qu’une Église, l’Église
catholique romaine. Et quand il ne resterait sur la terre qu’un seul
catholique, celui-ci constituerait l’Église une, universelle, c’est-à-dire
l’Église catholique, l’Église de Jésus-Christ, contre laquelle les portes de
l’enfer ne prévaudront pas. » (Vie
d’Anne-Catherine Emmerich, op.cit., tome I, p. 528)
[426]. Job 19, 25.
[427]. Nous l’avons dit précédemment, comme le
christianisme, Ismaël sera purifié de l’apostasie* de ses fidèles par l’épreuve des guerres perdues dans
le sang. Ils entreront dans la prise de conscience de leur faute, le repentir,
et le désir de la venue du Messie.
[428]. Concile Vatican II, décret sur les
religions non chrétiennes.
[429]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n° 674.
[430]. Chapitre 5.
[431]. Luc 13, 35.
[432]. Il ne convient pas de parler du peuple
juif comme de « l'ennemi de Dieu ». Ce serait négliger l'Alliance.
Mais, au plan du symbole néo-testamentaire, l'Israël séparé du Christ est gardé
tel par Dieu en vue d’une grande conversion individuelle et politique, vers la
fin du monde.
[433]. Luc, 11-32. Nous verrons au chapitre
suivant comment il peut éclairer le mystère du retour du Christ, de sa tenue au
temps de l’Antéchrist.
[434]. Genèse 37, 45 et suiv. Cette histoire est
l’une des plus romanesques racontées par la Bible.
[435]. Genèse 37, 26.
[436]. Ceci ne s’oppose pas à une autre opinion
souvent proférée par les anciens Pères de l’Eglise, comme quoi une partie des
Juifs adhérerait dans le futur au message de l’Antéchrist. « Je suis venu au
nom de mon Père, et vous ne m'avez pas reçu ; un autre viendra en son nom
et vous le recevrez. » (St. Jean, 5, 43) C'est sur cette parole adressée par
Jésus-Christ aux Juifs, ses contemporains et ses adversaires, que cette
croyance s'est établie ; et l'on peut dire qu'elle est le sentiment commun
des Pères de l'Église. Nommons saint Irénée, saint
Hippolyte, saint Hilaire, saint Cyrille de Jérusalem, saint Grégoire de
Nazianze, saint Ephrem, saint Ambroise, Rufin, saint Jérôme, saint
Chrysostome, saint Prosper, saint Cyrille d'Alexandrie, Théodoret, Victorinus,
saint Grégoire le Grand, André de Césarée, le Vénérable Bède, saint Jean
Damascène, Théophylacte, saint Anselme, etc. Le peuple juif n’est jamais
unanime dans ses opinions. Il est l’image de l’humanité…
[438]. Aggée 2, 9. Cette interprétation ne
s’oppose pas à une autre : la reconstruction hypothétique du Temple de
Jérusalem, où jadis les Juifs adoraient Yahvé de manière semblable à celle des
catholiques dans les tabernacles des églises… Dieu se plaît souvent à réaliser
matériellement ce qu’il a réalisé en esprit et vérité.
[439]. Disposer au salut ne veut pas dire donner le
salut. Humilier les cœurs ne signifie pas les unir à Dieu. Mais c’est une
première étape.
[440]. Matthieu 4, 4.
[441]. Matthieu 24, 22.
[442]. Ibid.
[443]. L’histoire nous montre qu’elles furent
dramatiquement vraies pour bien des générations de nos ancêtres, sans compter
les signes donnés par Dieu sous formes d’images dans le ciel. On pense au
soleil dont l’image tourna et parut se précipiter sur la terre à Fatima. On
pense aussi à ce que rapporte la Bible dans le deuxième livre des Maccabées 10,
29 : « Au fort du combat,
apparurent du ciel aux ennemis, sur des chevaux aux freins d'or, cinq hommes
magnifiques qui se mirent à la tête des Juifs. »
[444]. Voilà en résumé le sens de ce livre.
[445]. Littéralement, en Matthieu 24, 28 :
« Où que soit le cadavre, là se rassembleront les vautours. » Seuls les
mystiques, fils de Marie, pourront contempler les restes de l’Église disparue
(les bâtiments désaffectés, les anciens traités théologiques), et comprendre ce
qui se joue.
[446]. Jean 6, 63.
[447]. Apparition reconnue canoniquement par
l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé
en fin d’ouvrage.
[448]. Le philosophe athée Feuerbach a analysé
avec justesse le feu profond de l’âme humaine. Pour lui, le Dieu des chrétiens
(et son amour jusqu’à la mort) fut le seul « conte » imaginé au cours
de l’histoire et capable de répondre à la nature même de l’inconscient
spirituel le plus profond. (Voir L’essence
du Christianisme)
[449]. La Genèse fait de la mort le mystère
ultime, celui que l’homme veut à tout prix vaincre. Ce livre, qu’on prend
habituellement comme une œuvre mythique, rejoint l’histoire de manière
surprenante.
[450]. Genèse 3, 22 et suiv.
[451]. Genèse 6, 1.
[452]. Genèse 3, 24.
[453]. Donc dans un autre monde, pas ici-bas,
quoi qu’en pensent les Témoins de Jéhovah.
[454]. La science génétique est de grande
importance dans cette histoire car celui qui la maîtrise possède le pouvoir sur
la vie. Bonne en elle-même, la science des O.G.M. est, pour l’orgueil humain,
l’une des conquêtes les plus importantes. Mais l’A.D.N. est aussi un texte
écrit. Loin d’être produit par le seul hasard, son évolution est provoquée
par la plus intelligente des actions. Les logiciels de la vie furent produits
comme par des ingénieurs informaticiens, par un ordre d’anges que saint Thomas
d’Aquin appelait Vertus. En conséquence, la connaissance des mécanismes
génétiques produira deux effets : 1- L’existence d’une Intelligence organisatrice
du monde ne pourra plus être niée (voir le texte de Paul VI cité au chapitre 4,
troisième étape de l’apostasie). 2- Il sera plus que jamais possible de se
révolter contre Dieu grâce au pouvoir sur la vie humaine (clonage, chimères,
tout sera imaginable, jusqu’à la limite fixée par rapport à l’immortalité).
[455]. Quant à la tentative de rendre l’homme immortel
sur terre, ce prodige ne pourra jamais être réalisé, nous l’avons montré. C’est
la limite ultime des permissions de Dieu concernant les réalisations
orgueilleuses de la science humaine.
[456]. Luc 21, 25. Rappelons pour la dernière
fois que ce genre de textes semble annoncer au sens premier littéral des
évènements futurs. Bien que leur autorité soit la plus haute qui soit, ils
doivent être utilisés avec prudence car leur sens est souvent, de par la
volonté de Dieu, multiple.
[457]. Matthieu 24, 29.
[458]. Matthieu 5, 18.
[459]. Hébreux 5, 8.
[460]. Matthieu 27, 45.
[461]. Matthieu 24, 29-31.
[462]. Daniel 8, 25.
[463]. 2 Thessaloniciens 2, 8.
[464]. Luc 21, 28.
[465]. Matthieu 24, 22.
[466]. Daniel 9, 27.
[467]. Daniel 12, 11.
[468]. Il réaliseront ce que Jésus dit de
Jean : « S’il me plaît qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne »,
malgré la disparition de l’Église hiérarchique (symbolisée dans le même texte
par saint Pierre).
[469]. 2 Thessaloniciens 2, 8.
[470]. Matthieu 24, 34.
[471]. Genèse 11, 4.
[472]. Genèse 11, 1.
[473]. Genèse 11, 7.
[474]. Genèse 6, 3.
[475]. Selon l’expression de la Vierge Marie
dans son apparition à La Salette.
[476]. 2 Chroniques 36, 21.
[477]. Exode 16, 35.
[478]. Apocalypse 22, 6.
[479]. Genèse 11, 6.
[480]. Isaïe 2, 11.
[481]. Du même auteur, L’heure la mort, op. cit..
[482]. Sur ce pouvoir des anges, voir Tobie 12,
19.
[483]. Matthieu 24, 27. On voit qu’il n’y a
aucune confusion possible avec les prodiges de l’Antéchrist et ses techniques
d’élévation aérienne.
[484]. Luc 1, 29. L’ange l’avait appelée « pleine de grâce ».
Les chrétiens de l’Église du sépulcre seront pleins de grâces.
[485]. Luc 15, 11 et suiv.
[486]. S’il en reste à cette époque car il est
probable qu’ils auront déjà reconnu en masse Jésus comme le Messie. Voir
chapitre 7, la conversion d’Israël.
[487]. Luc 13, 35.
[488]. Apocalypse 19, 20.
[489]. Apocalypse 20, 10.
[490]. Voir du même
auteur L’heure de la mort, op. cit.,
et le chapitre sur les six péchés contre
l’Esprit Saint. On peut, grâce à la théologie, reconstituer une partie du
destin d’Hitler, juste après son suicide. Il fut lui aussi un Antéchrist. Sa
vie illustre celle du dernier Antéchrist. Lorsque Adolf Hitler s’est suicidé,
il a quitté ce monde en emportant la responsabilité directe de dizaines de
millions de vies humaines détruites dont, en particulier, quelques millions de
femmes, d’enfants coupables d’être nés accompagnés de son mépris. Formellement,
et sans entrer trop rapidement dans sa conscience, Hitler ne semble pas s’être
rendu coupable ici-bas d’un véritable blasphème contre l’Esprit Saint. Rappelons-le,
les conditions requises pour commettre ce péché sont vertigineuses. Dieu est
juste et la moindre ignorance déterminante par rapport au sens de la vie
terrestre est reçue comme une circonstance atténuante. À la différence de
Monseigneur Cauchon, le théologien bourreau de sainte Jeanne d’Arc, Hitler
ignore bien évidemment la théologie et le cœur de Dieu. Il ne soupçonnait pas
un seul instant à quel point il était aimé par les milliards d’êtres humains et
De toute façon, il est certain qu’il fut
accueilli à l’heure de sa mort par le déploiement d’un innombrable cortège de
saints. Le Ciel entier se mobilisa pour sauver ce grand pécheur. Parmi les âmes
présentes brillaient celles de millions de Juifs qu’il avait fait exterminer.
Il les vit un à un pendant un de ces regards profonds que peut offrir la
puissance de Dieu au moment décisif. Toutes ces âmes réunies proposaient leur
pardon à Hitler, sans arrière-pensée. C’est ainsi que l’on est au Ciel. Nul ne
peut entrer au Ciel sans être ainsi. C’est pourquoi il est certain que les
Juifs accueillirent Hitler de cette façon. Il vit le visage de Jésus rayonnant
la vérité, mais aussi la douceur et l’humilité. Il vécut de l’intérieur cette
parole terrible pour lui de l’Évangile : «Tout ce que vous avez fait au
plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». Le silence
accueillant de Dieu à l’instant de la mort est décrit par l’Écriture comme le
Jour de la colère (Dies irae). Car il
vaudrait mieux affronter la colère de Dieu que son pardon. Mais le démon aussi
avait droit à la parole, comme il convient en cette occasion. Il n’est pas
difficile, connaissant les obsessions d’Hitler durant sa vie terrestre, d’en
reconstituer la teneur. Satan sait comment parler pour toucher une âme dans
l’axe même de sa perversité : « Vois ces Juifs, ces Tziganes que tu
as méprisés avec raison toute ta vie. Regarde leur humiliante attitude de
dépendance les uns vis-à-vis des autres. Regarde la royauté qu’ils ont reçue de
Dieu. Si tu te convertis maintenant, n’oublie pas que toi, le Guide de millions
d’hommes, tu seras plus petit qu’eux pour l’éternité. De Maître que tu étais,
tu deviendras inférieur car chacun se fait serviteur de tous dans leur monde.
Ne te convertis pas. Reste fidèle à ton combat, sois Roi avec moi, loin de ces
gens. » Là se trouve la puissante tentation de l’envie des grâces fraternelles.
Elle concerne tout homme qui a été dominant vis-à-vis de son prochain durant sa
vie. Il est difficile de renoncer au pouvoir. L’écho de ces paroles fut, on
s’en doute, immense dans un cœur tel que le sien. Elles correspondaient à toute
sa vie. Nous ne saurons qu’au Ciel quel fut le choix définitif d’Hitler en ce
30 avril 1945. Implora-t-il le pardon de Dieu et de ses frères ?
Provoqua-t-il au Ciel la plus grande joie ? Céda-t-il au contraire à
l’envie, selon l’inclination acquise par toute une vie nourrie de haine ?
L’envie des grâces fraternelles, deuxième péché contre l’Esprit Saint, est sans
rémission possible car, commis ainsi dans la lucidité de l’heure à la mort, il
est le fait d’une personne qui jamais plus ne reviendra en arrière.
[491]. Du même auteur, L’heure de la mort.
[492]. Apocalypse 19, 21.
[493]. Je parle ici par manière d’allégorie car
tout cela se fera plus profondément, par mode de communion d’âme, par une sorte
d’intense télépathie des cœurs.
[494]. Cantique des cantiques 5, 6 et suiv.
[495]. L’heure
de la mort, op. cit. .
[496]. 1 Corinthiens 15, 55.
[497]. Voir, d’une autre manière Romains 11,
32 : « Dieu a enfermé tous
les hommes dans la désobéissance pour faire à tous miséricorde. »
[498]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n° 1042 et 1043. Ce texte, publié en 1992 par le
Pape Jean-Paul II est le reflet authentique de la foi catholique. Il a donc une
très grande autorité pour la foi.
[499]. 1 Corinthiens 15, 5 et suiv.
[500]. En dépit de 1 Thessaloniciens 4, 17,
l'enseignement commun de l’Église était autrefois que tous les hommes
mourraient (cf. Romains 5, 12.
1 Corinthiens 15, 22) parce que tous sont pécheurs. Cependant, ce courant
traditionnel était essentiellement fondé sur une erreur de traduction dans la
Vulgate. Saint Jérôme écrivait, à propos du texte de saint Paul :
« Je vais vous dire un mystère : nous mourrons tous. » Cette traduction a pu être rectifiée
par la suite. Ce texte affirme donc au sens littéral que ceux qui verront le
retour du Christ à la fin du monde ne mourront pas. En confrontant cela aux
autres textes qui semblent le contredire, nous pensons qu'il convient de dire
ceci : ceux qui seront sauvés mourront tous à eux-mêmes, à leur orgueil et
à leur égoïsme, mais la dernière génération sera dispensée de la mort physique.
[501]. La vie après la vie, Dr Moody, Robert
Laffont, 1977, p. 35. Sur la survie, outre les facultés spirituelles, des
facultés sensibles après la mort, voir du même auteur, L’heure de la mort, la recherche philosophique sur la
N.D.E.
[502]. 1 Corinthiens 15, 52.
[503]. 1 Rois 19, 12.
[504]. Ce serait ridicule et nous savons que la
matière ne cesse de varier au cours de notre existence. On dit même qu’elle se
renouvelle tous les sept ans. Ce qui fait qu’un corps humain est le sien, c’est
d'abord et fondamentalement son chiffre génétique, porté sur les chromosomes et
définitivement fixé dès notre conception. À l'intérieur de ce chiffre, certains
défauts ne constituent pas essentiellement notre être physique et peuvent être
guéris en nous laissant semblables à nous-mêmes. La pratique traditionnelle du
culte des reliques des saints n’a donc plus aujourd’hui le sens matériel
d’autrefois. L’intelligence de la foi a progressé sur ce point. C’est pourquoi
l’Église autorise l’incinération des cadavres depuis le Concile Vatican II.
[505]. 1 Corinthiens 15, 44-49.
[506]. Voir le livre de Tobie.
[507]. Jean 20, 27.
[508]. Daniel 12, 2.
[509]. Nous verrons ultérieurement à quoi
ressemblera leur enfer de ressuscités.
[510]. Certaines propriétés sont miraculeuses en
ce sens qu’elles dépassent les lois de la matière. Le mouvement instantané
semble être impossible, ainsi que le fait d’être en deux lieux à la fois
(bilocation). La puissance de Dieu rendra cela possible, à volonté. Très
concrètement, cela signifie qu’il sera possible aux amis de Dieu de se déplacer
physiquement de manière instantanée d’un bout à l’autre de l’univers, malgré
les distances immenses (milliard d’années-lumière). Les damnés ne le pourront
pas, s’appuyant non sur la Puissance infinie de Dieu mais sur la vigueur
limitée de leur âme.
[511]. Pour connaître ces quatre propriétés,
voir du même auteur, L’heure de la mort.
[512]. Voir dans l’ouvrage, L’heure de la mort. Il existe six étapes du purgatoire. Elles ne
sont pas obligatoires. Leur but est de rendre totalement humble celui qui aime
Dieu. Ce passage sera aussi bref en temps réel qu’il paraîtra long en temps
intérieur aux hommes assoiffés de la présence du Christ.
[513]. Matthieu 13, 29.
[514]. Apocalypse 19, 20.
[515]. Apocalypse 19, 20 et des dizaines
d’autres références év
[516]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n°1046.
[517]. Voir du même auteur, L’heure de la mort.
[518]. D’après saint Augustin, Les confessions.
[519]. 1 Corinthiens 2, 9.
[520]. En plus de la Vision de sa vie Trinité et
de la présence de nos frères anges et hommes qui est la grâce essentielle et
suffisante.
[521]. Comme tout cela est inimaginable, bien
des points seront traités au conditionnel. Nous nous trouvons dans l'attitude
exacte des enfants le jour de Noël. Ils n’ont pas encore le droit de descendre
voir le sapin mais ils soupçonnent, connaissant l'amour et la richesse en
inventions de leurs parents, les présents cachés.
[522]. 2, Pierre 3, 10. Ce texte, valable pour
la fin du monde, est vrai aussi pour chaque civilisation, pour chaque
génération. Les plus belles constructions humaines finissent tôt ou tard à
l’état de ruine. Des sept merveilles du monde antique, seules les pyramides
d’Egypte subsistent, rongées par les caries du temps. Ce fait paraît
dramatique. En fait, les constructions de l’homme ont plusieurs
inconvénients : elles sont souvent le fruit de l’orgueil, pas seulement de
l’amour désintéressé. Elles sont faites de matière soumise à la corruption. De
plus, en comparaison de ce qu’il nous sera possible de faire dans l’autre
monde, avec la liberté d’une imagination sans limite et d’une matière sans
résistance, tout ce qui est ici-bas est très gris et très laid !
[523]. Cette phrase choque. Jésus la tint
explicitement à ses disciples qui s’extasiaient de la beauté du Temple de
Jérusalem.
[524].
Matthieu 24, 2 : À l’image du Temple, pourtant magnifique, de
Jérusalem*. Le Catéchisme de l’Église
Catholique précise au n° 1050 : « Car tous les fruits excellents de notre
nature et de notre industrie, que nous aurons propagés sur terre selon le
commandement du Seigneur et dans son Esprit, nous les retrouverons plus tard,
mais purifiés de toute souillure, illuminés, transfigurés, lorsque le Christ
remettra à son Père le royaume éternel et universel. » Dieu sera alors
« tout en tous » (1 Co 15, 28) dans la vie éternelle : la vie
subsistante et vraie, c'est le Père qui, par le Fils et en l'Esprit Saint,
déverse sur tous sans exception les dons célestes. Grâce à sa miséricorde, nous
aussi, hommes, nous avons reçu la promesse indéfectible de la vie éternelle
(S. Cyrille de Jérusalem, catech. ill. 18, 29 ).
[525]. 2 Pierre 2, 7.
[526]. Le plus grand parmi les théologiens,
saint Thomas d’Aquin, dans son traité de l’Incarnation (Somme théologique,
Troisième partie, Q. 3, a. 7, accepte la possibilité d’autres modes de salut.
Selon lui, le Verbe peut même s’incarner « plusieurs fois », dans
plusieurs individuations !
[527]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n° 1038 et 1039.
[528]. Matthieu 5, 6.
[529]. Matthieu 22, 25.
[530]. Apocalypse 22, 3-5.
[531]. D’où l’importance de se familiariser avec
le mystère de l’Évangile tel que je l’ai rapporté dans l’introduction.
[532]. Jean 12, 24.
[533]. 1 Corinthiens 1, 23.
[534]. Apocalypse 13, 1.
[535]. De type « Témoin de Jéhovah »,
car leur sens fondamental est effectivement littéral.
[536]. Matthieu 24, 2.
[537]. Isaïe 7, 14.
[538]. Voir par exemple 2 Thessaloniciens, 2.
[539]. Catéchisme
de l’Église catholique, n° 675 et
676.
[540]. Parfois, il est plus que probable. C’est
le cas pour les cinq prophéties concernant Israël. Le peuple élu a le privilège
d’être à lui seul une icône historique et politique de la vérité de Dieu (voir
chapitres 5 et 7). Pour le reste, tout dépend de la qualité du théologien [euh…
c'est un autoportrait, là?] qui le reconstruit, de sa vie de prière, de sa
fréquentation des Écritures et de son amour pour la Vierge Marie. Curieusement
ce dernier point est le plus important. Seule la Vierge Marie est capable
d’expliquer ce qu’elle a été seule à vivre au pied de la croix : la fin du
monde ressemble à la croix de Jésus.
[541]. Luc, 22, 23.
[542]. Matthieu 16, 18.
[543]. Apocalypse 20, 2.
[544]. Le
catéchisme de l’Église catholique est présenté par le pape Jean-Paul II
comme « l’enseignement sûr et authentique de la doctrine catholique », constitution
Fidei depositum.
[545]. Jean 12, 24.
[546]. Catéchisme
de l’Église Catholique, n° 675 et
676.
[547]. Lumen
Gentium 25. Congrégation pour la Doctrine de la foi, Instruction Donum Veritatis, 23 et 24, AAS 82 (1990)
pp. 1559-1561.
[548]. Constitution Ad tuendam Fidem, commentaires de la Congrégation pour la Doctrine
de la foi, n° 11, 18 mai 1998.
[549]. Il ajoute : « quoique non
divinement révélées », c’est-à-dire que, même si elles viennent vraiment
de Dieu, elles n’ont pas ce statut particulier qui est réservé à la seule
révélation officielle.
[550]. Par exemple, le premier miracle de
Lourdes rendit la vue à un enfant… sans réparer ses yeux handicapés. « Tu
ne peux pas voir », disait le médecin rationaliste qui constata le
phénomène. « Je vois », répondait l’enfant. C’est un miracle.
[551]. Il s’agit pour l’essentiel, en ce qui
concerne les messages apocalyptiques, des apparitions de La Salette, de
Lourdes, Pontmain, Fatima et de la rue du Bac (apparitions reconnues
officiellement par l’autorité de l’Église). D’autres sont en cours
d’étude : Rwanda, Medjugorje*…
[552]. Voir par exemple Apocalypse 6, 4 et 6, 8.
1 Jean 2, 18.
[553]. Sa prophétie est citée in extenso au chapitre 6 consacré à
l’Antéchrist.
[554] Voir chapitre 5 et 7, l’islam.